
s’écouler profnptement au-travcrs de ces mêmes paf-
iages étroits. V~oyt^ les mim. de Vacadémie royale de
Sucde, année i j i o , tome X I I .
Les marins donnent en général le nom de Mahlf-
trorn à tous les tournans d’eau qui fe trouvent dans
la mer. Les voyageurs rapportent qu’il y en a un
très-confidérable dans l’Océan, entre l ’Afrique 6c
l ’Amérique ; les navigateurs l’évitent avec grand
foin. Les goufres de Sylla & de Charybde font auffi
des efpeces de mahlßroms. (—)
MAHOL, (Hiß. nat.) fruit qui croît dans les îles
Philippines. Il eft un peu plus gros qu’une pêche,
mais cotoneux ; il a la couleur d’une orange ; i’arbre
qui le produit eft de la hauteur d’un poirier ; fes
feuilles reflemblent à celles du laurier ; fon bois eft
prefque auffi beau que l’ébene.
MAHOMÉTISME, f. m. ( Hiß. des religions du
monde.) religion de Mahomet. L’hiftorien philofophe
de nos jours en a peint le tableau fi parfaitement,
que ce feroit s’y mal connoître que d’en préfen-
ter un autre aux le&eurs.
Pour fe faire, dit-il, une idée du Mahométifme ,
qui a donné une nouvelle forme à tant d empires,
il faut d’àbord fe rappeller que ce fut fur la fin du
fixieme fiecle, en 570, que naquit Mahomet à la Mecque
dans l’Arabie Pétrée. Son pays défendoit alors
fa liberté contre les Perfes, 6c contre ces princes
de Conftantinople qui retenoient toujours le nom
d’empereurs romains.
Les enfans du grand Noushirvan, indignes d’un
tel pere , défoloient la Perle par des guerres civiles
6c par des parricides. Les fuccefleurs de Juftinien
avilifloient le nom de l ’empire ; Maurice venoit
d’être détrôné par les armes de Phocas 6c par les
intrigues du patriarche lyriaque 6c de quelques évêques
, que Phocas punit enfuite de l’avoir l'ervi. Le
lang de Maurice 6c de fes cinq fils avoit coulé fous
la main du b o u r r e a u 6c le pape Grégoire le grand,
ennemi des patriarches de Conftantinople, tachoit
d’attirer le tyran Phocas dans fon parti, en lui prodiguant
des louanges & en condamnant la mémoire
de Maurice qu’il avoit loué pendant fa vie.
L’empire de Rome en occident étcdt anéanti ; un
déluge de barbares, Goths , Hérules , Huns , Vandales
, inondoient l’Europe , quand Mahomet jet-
toit dans les déferts de l’Arabie les fondemens de la
religion & de la pùiflance mufulmane.
On fait que Mahomet étoit le cadet d’une famille
pauvre ; qu’il fut long-tems au fervice d’une femme
de la Mecque , nommée Cadifchée, laquelle exer-
çoit le négoce ; qu’il l’époufa 6c qu’il vécut obfcur
jufqu’à l’âge de quarante ans. Il ne déploya qu’à cet
âge les talens qui le rendoient fupérieur à lés compatriotes.
Il avoit une éloquence vive & forte , dépouillée
d’art & de méthode, telle qu’il la falloit à
des Arabes ; un air d’autorité 6c d’inlinuation , animé
par des yeux perçans 6c par une heureufe phy-
lionomie ; l’intrépidité d’Alexandre , la libéralité ,
6c la fobriété dont Alexandre auroit eu befoin pour
être grand homme en tout.
L ’amour qu’un tempérament ardent lui rendoit
néceffaire, & qui lui donna tant de femmes 6c de
concubines, n’affoiblit ni fon courage , ni fon application
, ni fa fanté. C ’eft ainfi qu’en parlent les
Arabes contemporains , 6c ce portrait eft juftifié par
fes allions.
Après avoir connu le caraâere de fes concitoyens
, leur ignorance , leur crédulité, 6c leur
difpofition à l’enthoufiafme, il vit qu’il pouvoit
s’ériger en prophète , il feignit des révélations, il
parla : il fe fit croire d’abord dans fa maifon, ce qui
étoit probablement le plus difficile. En trois ans , il
eut quarante-deux difciples perfuadés ; Omar , fon
.perfecuteur , devint fon apôtre j au bout 4® cinq
ans, il en eut cent quatorze.
Il enfeignoit aux Arabes , adorateurs des étoiles ;
qu’il ne falloir adorer que le Dieu qui les a faites .
que les livres des Juifs & des Chrétiens s’étant corrompus
6c falfifiés, on devoit les avoir en horreur :
qu’on étoit obligé fous peine de châtiment éternel
de prier cinq fois le jo u r , de donner l’aumône ,
6c lur-tout, en ne reconnoiflant qu’un feul Dieu ,
de croire en Mahomet fon dernier prophète ; enfin
de hafarder fa vie pour fa foi.
Il défendit l’ufage du vin parce que l’abus en eft
dangereux. Il conlèrva la circoncifion pratiquée
parles Arabes, ainfi que par les anciens Egyptiens,
inftituée probablement pour prévenir ces abus de
la première puberté, qui énervent fouvent la jeu-
neüe. Il permit aux hommes la pluralité des femmes
, ufage immémorial de tout l’orient. Il n’altéra
en rien la morale qui a toujours été la même dans le
fond chez tous les hommes, 6c qu’aucun légiflateur
n’a jamais corrompue. Sa religion étoit d’ailleurs
plus afliijettiflante qu’aucune autre, par les cérémonies
légales , par le nombre 6c la forme des prières
6c des ablutions , rien n’étant plus gênant pour la
nature humaine, que des pratiques qu’elle ne demande
pas& qu’il taut renouveller tous les jours.
Il propofoit pour récompenfe une vie éternelle ,
011 l’ame feroit enivrée de tous les plaifirs fpiri-
tuels, 6c où le corps reflufeité avec fes fens , goû-
teroit par fes fens mêmes toutes les voluptés qui lui
font propres.
Cette religion s’appella Vijlamifme, qui lignifie
rèjignation à la volonté de Dieu. Le livre qui la
contient s’appella coran , c’eft-à-dire, le livre , ou
l’écriture, ou la lefture par excellence.
Tous les interprètes de ce livre conviennent que
fa morale eft contenue dans ces paroles : « re-
» cherchez qui vous chafle, donnez à qui vous
» ô te , pardonnez à qui vousoffenfe, faites du bien
» à tous , ne conteftez point avec les ignorans ».
Il auroit dû également recommander de ne point
difputer avec lesfavans. Mais, dans cette partie du
monde , on ne fe doutoit pas qu’il y eût ailleurs de
la fcience 6c des lumières.
Parmi les déclamations incohérentes dont ce livre
eft rempli, félon le goût oriental, on ne laiffe pas
de trouver des morceaux qui peuvent paroître fu-
blimes. Mahomet, par exemple , en parlant de la
ceffation du déluge , s’exprime ainfi : « Dieu dit :
» terre , engloutis tes eaux : c iel, puife les eaux
» que tu as verfées : le ciel 6c la terre obéirent ».
Sa définition de Dieu eft d’un genre plus véritablement
fublime. On lui demandoit quel étoit cet
Alla qu’il annonçoit : « c’eft celu i, répondit-il, qui
» tient l’être de foi-même 6c de qui les autres le
» tiennent, qui n’engendre point & qui n’eft point
» engendré , & à qui rien n’eft femblable dans toute
» l’étendue des êtres ».
Il eft vrai que les contradictions, les abfurditésj
les anachronifmes, font répandus en foule dans ce
livre. On y voit fur-tout une ignorance profonde
de la Phy fique la plus fimple 6c la plus connue. C ’eft-
là la pierre de touche des livres que les fauffes
religions prétendent écrits par la Divinité ; carDieu
n’eft ni abfurde , ni ignorant : mais le vulgaire qui
ne voit point ces fautes , les adore , & les Imans
emploient un déluge de paroles pour les pallier.
Mahomet ayant été perfécuté à la Mecque, fa
fuite , qu’on nomme égire , fut l’époque de fa gloire
6c de la fondation de fon empire. De fugitif il devint
conquérant. Réfugié à Médine , il y perfuada
le peuple 6c l’aflervit. Il battit d’abord avec cent
treize hommes les Mecquois qui étoient venus fondre
fur lui au nombre de mille. Cette v iâoire qui
fut un miracle aux yeux de fes feftateurs, les perfuada
que Dieu combattoit pour eux comme eux
pour lui. D ès - lo r s ils efpérerent la conquête du -
monde. Mahomet prit la Mecque , vit fes perfécti-
teurs à fes piés, conquit en neuf ans, par la parole
6c par les armes , toute l’Arabie, pays auffi grand
que la Perfe, 6c que les Perfes ni les Romains n’a-
voient pûfoumettre.
Dans ces premiers fuccès, il avoit écrit au roi
de Perfe Cofroès 11. à l’empereur Héraclius , au
prince des Coptes gouverneur d’Egypte, au roi des
A b iffin s ,& àu n roi nommé Mandar, qui régnoit
dans une province près du golfe perfique.
Il ofa leur propolèr d’embrafler fa religion ; 6c
ce qui eft étrange, c’eft que de ces princes il y en
eut deux qui fe firent mahométans. Ce furent le
roi d’Abiffinie 6c ce Mandar. Cofroès déchira la lettre
de Mahomet avec indignation. Héraclius répondit
par des préfens. Le prince des Coptes lui en- -
voya une fille qui paflbit pour un chef-d’oeuvre
de la nature , & qu’on appelloit la belle Marie.
Mahomet au bout de neuf ans fe croyant allez \
fort pour étendre fes conquêtes 6c fa religion chez I
les Grecs & chez les Perfes , commença par atta- j
quer la Syrie, foumife alors à Héraclius ■ , 6c lui !
prit quelques villes. Cet empereur entêté dedifpu-
tes métaphyfiques de religion, & qui avoit embraffé
le parti des Monothélites, efluya en peu de tems !
deux propofitions bien fingulieres ; l’une de la part
de Cofroès II. qu’il avoit long-tems vaincu, 6c l’au- ;
ire de la part de Mahomet. Cofroès vouloit qu’Hé-
raelius embraffâtla religion des Mages, 6c Maho- j
met qu’il fe fît mufulman.
Le nouveau prophète donnoit le choix à ceux
qu’il vouloit fubjliguer, d’embralfer fa feéle ou de j
payer un tribut. Ce tribut étoit réglé par l’alcoran
à treize dragmes d’argent par an pour chaque chef i
de famille. Une taxe fi modique eft une preuve que
les peuples qu’il fournit étoient très-pauvres. Le
tribut a augmenté depuis. De tous les légiflateurs ;
qui ont fondé des religions, il eft le feul qui ait >
étendu la fienne par les conquêtes. D ’autres peu- :
pies ont porté leur culte avec le fer 6c le feu chez '
des nations étrangères ; mais nul fondateur de fefte
n’avoit été conquérant. Ce privilège unique eft aux
yeux des Mufulmans l’argument le plus fort, que la
Divinité prit foin elle-même de féconder leur prophète.
Enfin Mahomet, maître de l’Arabie & redoutable
à tous fes voifins , attaqué d’une maladie •,
mortelle à Médine, à l’âge de foixante-trois ans 6c
demi, voulut que fes derniers momens panifient
ceux d’un héros & d ’un jufte : « que celui à qui j’ai
» fait violence 6c injuftice paroilfe, s’écria-t-il, 6c
» je fuis prêt de lui faire réparation». Un homme j
fe leva qui lui redemanda quelque argent ; Maho- i
met le lui fit donner, & expira peu de tems après,
regardé comme un grand homme par ceux même
qui favoient qu’il étoit un impofteur, 6c révéré
comme un prophète par tout le refte.
Les Arabes contemporains écrivirent fa vie dans
le plus grand détail. Tout y reffent la fimplicité barbare
des tems qu’on nomme1 héroïques. Son contrat
de mariage avec fa première femme Cadifchée, eft
exprimé en ces mots : « attendu que Cadifchée eft
» amoureufe de Mahomet, & Mahomet pareille-
» ment amoureux d’elle». On voit quels repas ap-
prêtoient fes femmes, & on apprend le nom de fes
épées & de fes chevaux. On peut remarquer fur-
tout dans fon peuple des moeurs conformes à celles
des anciens Hébreux ( je ne parle que des moeurs),
la même ardeur à courir au combat au nom de la
Divinité, la même foif du butin , le même partage
des dépouilles, 6c tout fe rapportant à cet objet.
Mais en ne confidérant ici que les chofes humaines
, 6c en faifant toujours abftraftion des ju-
Tome IX .
gemens de Dieu 6c de fes voies inconnues , pourquoi
Mahomet & fes fuccefleurs , qui commencèrent
leurs conquêtes précifément comme les Juifs,
firent-ils de fi grandes chofes, 6c les Juifs de fi petites
? Ne feroit-ee point parce que les Mufulmans
eurent le plus grand foin de foumettre les vaincus à
leur religion, tantôt par la force , tantôt par la
perfuafion ? Les Hébreux au contraire n’aflocierent
guere les étrangers à leur culte ; les Mufulmans
arabes incorporèrent à eux les autres nations ; les
Hébreux s’en tinrent toujours féparés. Il paroît enfin
que les Arabes eurent un enthoufiafme plus courageux
, une politique plus généreufe & plus hardie.
Le peuple hébreux avoit en horreur les autres nations
, 6c craignoit toujours d’être aflervi. Le peuple
arabe au contraire voulut attirer tout à lui, &
fe crut fait pour dominer.
La derniere volonté de Mahomet ne fut point
executee. Il avoit nommé Aly fon gendre & Fati-
me ^a. P0l,r les héritiers de fon empire : mais
1 ambition qui l’emporte fur le fanatifme même , engagea
les chefs de fon armée à déclarer calife,
c’eft-à-dire , vicaire du prophète , le vieux Abubé-
ker fon beau-pere, dans l’efpérance qu’ils poür-
roient bien-tôt eux-mêmes partager la lucceffion :
Aly refta dans l’Arabie, attendant le tems de fe fi-
gnaler.
Abubéker raflembla d’abord en un corps les
feuilles éparfes de l’alcoran. On lut en préfence de
tous les chefs les chapitres de ce livre , & on établit
fon authenticité invariable.
Bien tôt Abubéker mena fes Mufulmans en Palestine^,
6c y défit le frere d’Héraclius. Il mourut peu-
apres avec la réputation du plus généreux de tous
les hommes , n’ayant jamais pris pour lui qu’envi-
ron quarante fols de notre monnoie par jour de tout
le butin qu’on partageoit, 6c ayant fait voir combien
le mépris des petits intérêts peut .s’accorder,
avec l’ambition que les grands intérêts infpirent.
Abubéker pafle chez les Mahométans pour un
grand homme & pour un Mufulman fidele. C ’eft un
des faints de l’alcoran. Les Arabes rapportent fon
teftament conçu en ces termes : « au nom de .Dieu
» très-miféricordieux , voici le teftament d’Abubé-
» ker fait dans le tems qu’il alloit palier de ce mon-
» de à l’autre, dans le tems oh les infidèles croient
» où les impies ceflent de douter, & où les men-
» teurs difent la vérité ». Ce début femble être d’un
homme perfuadé ; cependant Abubéker, beau-pere
de Mahomet, avoit vû ce prophète de bien près. II
faut qu’il ait été trompé lui-même par le prophète ,
ou qu’il ait été le complice d’une impofture illuftre
qu’il regardoit comme néceflaire. Sa place lui or-
donnoit d’en impofer aux hommes pendant fa vie 6c
à fa mort.
Omar, élu après lu i, fut un des plus rapides con-
quérans qui ait défolé la terre. Il prend d’abord Damas
, célébré par la fertilité de fon territoire , par
les ouvrages d’acier les meilleurs de l’Univers, par
ces étoffes de foie qui portent encore fon nom. II
chafle de la Syrie & de la Phénicie les Grecs qu’on
appelloit Romains. Il reçoit à compofition , après
un long fiége , la ville de Jérufalem, prefque toute
occupée par des étrangers qui fe fuccéderent les uns
aux autres, depuis que David l’eut enlevée à fes
anciens citoyens.
Dans le même tems, les lieutenans d’Omar s’a«
vançoient en Perfe. Le dernier des rois perfans, que
nous appelions Hormidas IV. livre bataille aux
Arabes à quelques lieues de Madain, devenue la
capitale de cet empire ; il perd la bataille & la vie.
Les Perfes paflent fous la dominaiion d’Omar plus
facilement qu’ils n’avoient fubi le joug d’Alexandre.
Alors tomba cette ancienne religion, des Ma-
R R r r r i j