fes maîtreffes , en un mot tout ce qui le regarde dans
la Mythologie, eft fi connu de tout le inonde, que
je me ferois un ferupule d’en ennuyer le le&eur.
Son culte, comme on fait, a été le plus folemnel
& le plus univerfellement répandu. De-là le Jupiter
Sérapis des Egyptiens; le Jupiter Belus des Affy-
riensv; le Jupiter Celus des Perfes ; le Jupiter Affabi-
nus des Ethyopiens ; le ƒ«/»*«/• Taranus des Gaulois ,
le Jupiter de Crète le plus célébré de tous , & tant
d’autres.
Il eut trois fameux oracles, celui de Dodone, celui
de Lybie & celui de Trophonius. Les viâimes
qu’on lui immoloit étoient la chevre, la brebis & le
taureau , dont on avoit foin de dorer les cornes.
Souvent fans aucune vi&ime, on lui offroit de la farine
, du fel & d e l’encens. Perfonne, dit Cicéron,
n’honoroit ce dieu plus particulièrement & plus chaf-
tement que les dames romaines ; mais il n’eût point
de temple plus renommé que celui qu’on lui fit bâtir
fur le mont Lycé dans l’Arcadie. Parmi les arbres,
le chêne & l’olivier qu’il difputoit à Minerve , lui
étoient finguliérement eonfacrés.
On le repréfentoit le plus ordinairement fous la
figure d’un homme majeftueux avec de la barbe,
aflis fur un trône tenant la foudre de la main d roite,
& de l’autreune viâoire ; à les piéseft une aigle avec
fes aîles éployées. On trouve dans les monumens de
l’antiquité quantité d’autres fymboles de ce dieu ,
fruits du caprice des artiftes, ou de l’imagination de
ceux qui en faifoient faire des ftatues.
Les anciennes infcriptions ne font pleines que des
noms & des furnoms qu’on lui a donnés. Les uns tirent
leur origine des lieux oü on l’honoroit ; les autres
des différens peuples qui prirent fon culte; d’autres
des grandes qualités qu’on lui attribuoit, d’autres
enfin des motifs qui avoient fourni l’occafion de lui
bâtir des temples, des chapelles & des autels.
On s’adrèffoit à lui fous les titres magnifiques de
Sanclitati Joyis, ou Jovi Opt. Max. Statori, Saluta-
ri , Feretrio , Inventoria Tonanti, Fulguratori, &c.
Jupiter très-bon, très-grand protefteur de l’amitié,
hofpitalier, dieu des éclairs & du tonnerre , 6* f i
quod aliud tibi cognomtn attonid tribuant Potta, dit
plaifamment Lucien s’adrefiant à ce dieu.
Le nom même de Jupiter , félon Cicéron, vient
des deux mots latins, juvans pater, c’eft-à-dire pere
fecourable.
Son titredeKctTet/jSciTJiç n’eft pas moins commun dans
les livres & fur les médailles. Il fignifie fimplement
dtfcendantfur la terre, fi l’on ne s’arrête qu’à la grammaire
; mais l’tifage déterminoit ce mot à l’appellation
de foudroyant, tenant la foudre, quoiqu’il ne
fût pas cenfé defcendre toujours fur la terre pour
punir : M. Burman a démontré tout cela dans une
dilfertation expreffe, intitulée ziZç K«Tct//3*THç, Jupiter
fulgurator. Çette differtation parut à Utrecht en
1700 : c’eft l’affaire des Littérateurs de la confulter.
Les Hiftoriens & les Philofophes font bien plus
embaraffés dans l’explication des contes ridicules
que les Poètes débitent fur le fouverain des dieux ,
& qui fervirent de fondement à la religion du paga-
nifme.
Diodore de Sicile prétend que Jupiter étoit un
mortel de grand mérité, d’uq caraftere fi différent
de fon pere , que fa douceur & fes maniérés lui firent
déférer par le peuple la royauté dont Saturne
fut dépouillé. Il ajoûte, qu’il ufa merveilleufement
de fon pouvoir ; que fon principal foin fut de punir
les fcélérats, & de récompenfer les gens vertueux
; enfin, que fes grandes qualités lui acquirent
après la mort, le titre de Zevç, de Jupiter ; & que lés
peuples qui l’adorerent fur la terre, crurent qu’ils
dévoient de même Fadorer dans le ciel, & lui donner
le premier rang parmi les dieux.
Il mànqüoit à Diodore de prouVet ce qu’il avàii-
çoit par des monumens hiftoriques , & d’indiquer
les fources de tant de vices & de crimes dont les
Poètes âvoient fouillé la vie de cet illuftre mortel.
La difficulté d’expliquer les fixions poétiques par
des allégories ou des dogmes de phyfiquc, étoit encore
plus grande. Si d’un côté l’on eft furpris de la
licence avec laquelle les Poètes fe font joués d’une
matière qui méritoit tant de refpeft, de l’autre on
eft affligé de voir des philofophes, tels que Chry-
lippe , perdre un tems précieux à chercher des myf-
teres dans de pareilles fables, pour les concilier avec
la théologie dgs Stoïciens.
En rejettant les dieux des Poètes, dieux vivans ôc
animés, & en leur fubftituant* des dieux qui n’a-
voient ni v ie , ni connoiffances , ils tomboient également
dans l’impiété. Dès qu’une fois ils regar-
doient Jupiter pour Yotther pur, & Junon pour l’air
qui nous environne, il ne falloit plus adreffer de prières
, ni faire de facrifices à l’un ôc à l’autre ; de tels
aâesdevenoient ridicules,& la religion établie crou-
loit en ruine. C ’eft ainfi cependant qu’ils firent des
profélytes, & qu’ils accoutumèrent les hommes à
prendre pour Junon l’air groflier, Jîmilitudo oetheris ,
cum eo intimé conjuntla, & pour Jupiter, la voûte
azurée que nous voyons fur nos têtes : Ennius en
parle fur ce ton dans Cicéron, de Nat. deor. lib. /.
cap, xj.
Afpice hoc
Sublime candtns , quart invocant ornnes Jovem !
Et Eurypide dans le même auteur, lib. II. cap. xxv,
s’exprime encore plus éloquemment & plus fortement.
Vides fublime fuj,Utn , immoderatum athera,
Qui tenero terram circumjeclu ampleSitur,
Hune fummum habeto diviim , hune perhibèto Jovem
! ( D . J. )
Jupiter C a p it o l in , temple d e , ([Ht/l.Rom.) cë
fameux temple de Rome, voué par Tarquin fils de
Demaratus, fut exécuté par Tarquin le Superbe fon
petit-fils, & entièrement achevé fous le troifieme
confulat de Publicola.
Ce temple étoit fitué dans cette partie du Capitole
qui regardoit le forum olitorium, ou le marche
aux herbes, aujourd’hui lapia^a Montanara. Il oc-
cupoit un terrein de huit arpens, & avoit deux
cens pies de long , fur 18 5 de profondeur. Le devant
étoit orné de trois rangs de colonnes, & les
côtés de deux ; la nef contenoit trois grandes chapelles,
celle de Jupiter au milieu, celle de Junon à
gauche , & celle de Minerve à droite. Il fut confa-
cré par Horace conful, la troifieme année de la foi-
xante-huitieme olympiade, 504 avant J. C. & brûlé
la deuxieme année de la cent-foixante-quatorzieme
olympiade, 81 ans avant la naiffance de notre-
Sauveur : il dura donc 423 ans.
Sylla le rebâtit, & l’orna de colonnes de marbre
qu’il tira d’Athènes du temple de Jupiter Olympien ;
mais comme Catulus eut la gloire de le conlacrer
67 ans avant la naiffance de J. C . Sylla difoit en
mourant, qu’il ne manquoit que cette dédicace à
fon bonheur. Il avoit fait ce magnifique ouvrage de
forme quarrée, ayant zzo piés en tout fens, & d’une
admirable ftruûure. Les embelliffemens dont
on l’enrichit depuis Sylla, les préfens magnifiques
que les provinces foumifes & les rois alliés y
envoyèrent fur la fin de la république, & fous les
premiers empereurs, rendirent ce monument un des
plus fuperbes du monde.
Cependant il périt auflï par les flammes l’an 69 de
l’ere chrétienne,lorfqueVitellius afliégea Fl. Sabinus
dans le Capitole, fans qu’on fâche, dit T acite, fi
ce furent les afîiégeans ou les afliégés qui y mirent
le féu.
Vefpafien le releva de fond en comble l’année qui
fuivit la mort de Vitellius , en l’élevant plus haut
que les deux autres ne l’avoient été. On peut voir
dans le IV. livre de l’hiftoire de Tacite le détail de
toutes les cérémonies qu’on mit en ufage à cette oc-
cafion : on marqua cet événement par des médailles
greques au nom de l’empereur , avec l’effigie de Jupiter
Capitolin, & une nouvelle époque d’années.
Ce temple qui avoit jadis échappé à la fureur des
Gaulois, dans la prife de Rome, & oit tant de peuple
à’affembloit tous les jours, paffoit pour renfermer
les deftins de l’empire;
Mais à peine Vefpafien fut décédé que le feu con-
fuma pour la quatrième fois & le Capitole & ce temple
qu’il avoit bâti onze ans auparavant. Domitien
le réédifia fans délai dès la première année de fon
régné, l’an 8'i de J. C. avec une dépenfe incroyable
; aufli mit-il fon nom à cet ouvrage, fans faire
mention des premiers fondateurs.
La feule dorure coûta plus de douze mille talens,
c’eft-à-dire plus de fept. millions d’or. Les colonnes
de marbre pentélique dont il le d écora, avoient été
tirées d’Athènes toutes taillées, & d’une longueur
admirablement proportionnée à leur groffeur ; mais
on voulut les retailler & les repolir à Rome, & l’on
gâta leur grâce & leur fymétrie : jamais Rome n’eut
la gloire de pouvoir difputer l’empire des beaux
Arts à la G rece ; voye^ le mot G recs , fi vous voulez
en être convaincu. ( D . J. )
Ju p it e r L a p i s , ( Mythol. ) Les premiers Romains
adoroient Jupiter fous ce nom de lapis,pierre,
comme lés Grecs fous celui de ô'/xopioç qui veut dire la
même chofe. C’étoit par ce nom à’o/xopiov que fe faifoient
leurs fermens les plus folemnels au rapport
d’Ariftote, de Demofthène & d^ Tite-Live. Les
Romains , à leur imitation, ne connurent point de
ferment plus facré, que lorfqu’ils juroient par Jupi-
ter lapis. Quidigitur cenfes ? jurabo per Jovem lapident
romano vetuflijjirno ri tu, dit Apulee dans fon
traité de deo facrads.
. Ju piter , ( Hijl. nat. ) nom donné par les anciens
Chimiftes à l’étain, voye^ Et a in .
JUPON, f. m. (Hijl. moder. ) habillement de
femme femblableà la jupe, plus court feulement,
& qui fe porte deffous la juppe. Vvye£ Jupe.
On a des jupons piqués ; ces jupons font ouattés, &
on les pique pour empêcher la ouatte de tomber. La
piquure forme différens deffeins de goût.
O.n trace ces deffeins par le moyen de moules,
Pour cet effet on a un établi de hauteur convenable ,
&de deux piés de large ou environ,fur cinq àfix piés
de long. On le garnit de drap bien tendu & bien cloué
fur fes bords de l’établi. Pour deffiner nn jupon, on
commence par la campane ou le bas du jupon. On
place le jupon.fur la longueur de l’établi; le bord
d’en bas du jupon, le long du bord de l’établi oppofe
à celui qu’on a devant foi. Pour donner à la campane
la hauteur, on a une corde qui porte un plomb
de chaque bout : on place eette corde fur le jupon.
On a à côté de foi deux ou trois morceaux imbibés
d’eau, & couverts de blanc, ni trop clair délayé, ni
délayé trop épais ; on prend le moule à campane,
on en frappe le côté gravé fur les morceaux de drap
blanchis ; & enfuite on applique ce moule fur le ju pon.
Appliqué ainfi, on a un maillet dont on frappe
le moule appliqué fur le jupon ; par ce moyen le
moule laiffe le deffein imprimé fur le jupon. On continue
ainfi la campane ; la corde dirige. On paffe
au refte du jupon, procédant de la même maniéré;
on laiffe fécher. Sec, on le donne à une ouvrière qui
le tend fur un métier & qui le pique : piquer, c’eft
Tome IX ,
faire une eoliture en fuivant tous les trais du deffein
imprimé par le moule.
JURA, (Géog. ). haute montagne qui fépare la
Suiffe de la Franche-Comté : les anciens l’ont nommé
Jurajfus, & les Allemans l’appellent Leberberg.
Cette chaîne de montagnes commence un peu au-
delà de Genève, oîi elle fait le célébré pas de l’E-
clufe, ne laiffant qu’un chemin étroit entre le Rhône
& la montagne ; & ce .chemin eft fermé par une
fortereffe qui appartient à la France ; de-là le mont
Jura court du fud oueft au nord-oueft, couvrant le
pays de Vaud, celui deNeuf-Châtel & le canton de
Soleurre, jufqu’au Botzberg, appellé Vocatius par
Tacite. ( D . J. )
Ju r a , Y île de (Géog.') petite île d’Ecoffe , l’une
des Wefternes, de huit lieues de long fur deux de
large ; elle abonde.en pâturages, & on y pêche de
bonsfaumons. Long. 11 deg. 12. min. 5 o Jïc, lat. 5G
deg. l 5 min. Sg.fec. ( D . J. )
JURANDE, f. f. (Jurifprud.) eft la charge ou
fonâion de juré d’une communauté de marchands
ou artifans. Les jurandes furent établies en même
tems que les arts & métiers furent mis en communauté
par faint Louis : on établit dans chaque communauté
des prépofés, fuprapojid, pour avoir l’infpe-
étion fur les autres maîtres du même état. Une ordonnance
du roi Jean porte, qu’en tous les métiers
& toutes les marchandifes qui font & fe vendent à
Paris, il y aura vifiteurs, regardeurs & maîtres , qui
regarderont par lefdits métiers & marchandifes ,
les vifiteront& rapporteront les défauts qu’ils, trouveront
aux commiffaires, au prévôt de Paris ou aux
auditeurs du châtelet. Dans la fuite ces prépofés ont
été nommés jurés, parce qu’ils ont ferment à juf-
tice dans les fix corps des marchands , & dans quelques
autres communautés, on les appelle gardesy
dans d’autres, jurés-gardes.
Cette charge fe donne par éleâion à de,ux ou
quatre anciens, pour préfider aux affemblées &
avoir/oin des affaires de la communauté,faire, recevoir
les apprentifs & les maîtres ; & faire obfer-
ver les ftatuts & réglemens ; les jurés n’ont cependant
aucune jurifdiftion ; ils ne peuvent même faire
aucuns procès verbaux fans être affiliés d’un huiffier
ou d’un commiffaire;
Le tems de la jurande ne dure qu’un an ou deux.
( ^ )
JUR AT, f. m. ( Commerce. ) nom d’une charge
municipale de plufieurs .villes de Guienne, entre
autres de Bordeaux. Voyeç C onsuls , Ech evin s.
JURATOIRE, adj. (Jurifprud.) fe dit de ce qui
eft accompagné du ferment. La caution juratoire eft
une foumiffion que l’on fait à l’audience ou au greffe,
de fe repréfenter, ou quelques deniers ou effets,
toutes fois & quantes que par juftice fera ordonné.
Voye[ C aut ion 6* Serment. ( A )
* JURÉ, f. m. ( Commerce. ) marchand ou artilàn
élu à la pluralité des v o ix , pour avoir foin des affaires
du corps ou de la communauté.
Le nombre des jurés n’eft pour l’ordinaire que de
quatre dans chaque corps ; il y a pourtant certaines
communautés d’Arts & Métiers à Paris qui en ont
jufqu’à fix , quelques-unes cinq, & d’autres un fyn-
dic avec les quatre jurés, & quelques-unes feulement
deux.
L’éle&ion des jurés fe fait tous les ans, non de tous
les quatre , mais de deux feulement ; enforte qu’ils
font en charge chacun deux années ; ce font toujours
les deux plus anciens qui doivent fortir, &
quinze jours apres l’éle&ion des nouveauxjurés, ils
doivent rendre compte de leur jurande.
Il y a auffi des maîtreffes jurées dans les communautés
qui ne font compofées que de femmes & de
filles, telles que les lingeres, couturières , &c. . ,
1 B