La brèche des Pyrénées eft d’un fond brun, mêlé
de gris ôc de plufieurs autres couleurs. De ce marbre
font deux belles colonnes corinthiennes au fond du
maître autel de Saint Nicolas des Champs à Paris.
La breche groffe ou groffe breche, ainfi appellée
parce qu’elle a toutes les couleurs des autres breches,
eft mêlée de taches rouges, grifes , jaunes, bleues,
blanches & noires. Des quatre colonnes qui portent
la châffe de Sainte Génevieve dans l’églife de ce
nom à Paris, les deux de devant font de ce marbre.
La breche de Vérone eft entremêlée de bleu, de
rouge pâle ôc cramoifi. Ils’en trouve un chambranle
de cheminée dans la derniere piece deTrianon, fous
le bois du côté des fources.
La breche fauveterre eft mêlée de taches noires,
grifes & jaunes. Le tombeau de la mere de M. Lebrun,
premier peintre du R o i, qui eft dans fa chapelle à
Saint Nicolas du chardonnet, eft de ce marbre.
La breche faraveche a le fond brun & v iolet, mêlé
de grandes taches blanches ôc ifabelles. Les huit colonnes
corinthiennes du maître autel des grands Au-
guftins , font de ce marbre.
La breche faraveche petite, ou petite breche faraveche
, n’ eft appellée ainfi que parce que les taches
en font plus petites.
La breche fétu bafi ou de fept bafes, a le fond
brun , mêlé de petites taches rondes de bleu fale.
Il s’én trouve dans les magafins du Roi.
Il fe trouve encore à Paris plufieurs autres marbres
, comme celui d’Antin, de L a v a l, de Cerfon-
taine , de Bergoopzom , de Montbart, de Malpla-
quet, de Meriemont, de Saint-Remy ôc le ro y a l,
ainfi que quelques breches, comme celles de Florence
, de Florieres, d’A let, &c.
Les marbres antiques s’emploient par corvée , ôc
fe payent à proportion de leur rareté ; les marbres
modernes fe payent depuis douze livres jufqu’à cent
livres le pié cube, façon à part, à proportion de leur
beauté ôc de leur rareté.
Des défauts du marbre. Le marbre , ainfi que la
pierre , a des défauts qui peuvent le faire rebuter :
ainfi on appelle.
Marbre fier celui qui, à caufe de fa trop grande
dureté , eft difficile à travailler , ôc f'ujet à s’éclater
comme tous les marbres durs.
Marbre pouf, celui qui eft de la nature du grais, ôc
qui étant travaillé ne peut retenir fes arrêtes viv es , I
tel eft le marbre blanc des Grecs, celui des Pyrénées
& plufieurs autres.
Marbre terraffeux, celui qui porte avec lui des parties
tendres appellées terraffes , qu’on eft fouvent
obligé de remplir de maftic , tel que le marbre de
Languedoc, celui de Hon, & la plupart des breches.
Marbrefilardeux, celui qui a des fils qui le traver-
fent, comme celui de Sainte-Baume, le ferancolin,
le rance, Ôc prefque tous les marbres de couleur.
Marbre camelotté, celui qui étant de même couleur
après avoir été poli, paroît tabifé, comme le marbre
de Namur ôc quelques autres.
Du marbre félon fes façons. On appelle marbre brut
celui qui étant forti de la carrière en bloc d’échantillon
ou par quartier , n’a pas encore été travaillé.
Marbre digrojji, celui qui eft débité dans le chantier
à la fc ie , ou feulement équarri au marteau , félon
la difpofition d’un vafe, d’une figure, d’un prof
il, ou autre ouvrage de cette efpece.
Marbre ébauché, celui qui ayant déjà reçu quelques
membres de fculpture ou d’architeéhire, eft travaillé
à la double pointe (fig. £9.. ) pour l’un, & approché
avec le cifeau pour l ’autre.
Marbre piqué, celui qui eft travaillé avec la pointe
du marteau (fig-^t. ) pour détacher les avant-corps
des arriere-corps daps l’extérieur des ouvrages ruf-
tiques,
Marbre matte, celui qui eft frotté avec de la prêle
( a ) ou de la peau de chien de mer ( b ) , pour détacher
des membres d’architeéhire ou de fculpture de
deffus un fond poli.
Marbre poli, celui qui ayant été frotté avec le
grais ôc le rabot (c) ôc enfuite repaffé avec la pierre
de ponce, eft poli à force de bras avec un tampon
de linge, & de la potée d’émeril pour les marbres
de couleur, & de la potée d’étain pour les marbres
blancs , celle d’émeril les rouffiffant. Il eft mieux de
fe fervir, ainfi qu’on le pratique en Italie , d’un
morceau de plomb au lieu de linge , pour donner au
marbre un plus beau poli Ôc de plus longue durée ;
mais il en coûte beaucoup plus de rems ôc de peine.
Le marbre fale , terne ou taché, fe repolit de la même
maniéré. Les taches d’huile, particulièrement
fur le blanc , ne peuvent s’effacer, parce qu’elles
pénètrent.
Marbre fin i, celui qui ayant reçu toutes les opérations
de la main - d’oeuvre , eft prêt à être pofé en
place.
Marbre artificiel, celui qui eft fait d’une compofi-
tion de gypfe en maniéré de ftuc,dans laquelle on met
diverfes couleurs pour imiter le marbre. Cette com-
pofition eft d’une confiftance affez dure ôc reçoit le
poli, maisfujette à s’écailler. On fait encore d’autres
marbres artificiels avec des teintures corrofives1
fur du marbre blanc, qui imitent les différentes couleurs
des autres marbres , en pénétrant de plus de
quatre lignes dans l’épaiffeur du marbre : ce qui fait
que l’on peut peindre deffus des figures ôc des orne-
mens de toute efpece : enforte que fi l’on pouvoit
débiter ce marbre par feuilles très-minces, on en au-
roit autant de tableaux de même façon. Cette inven-'
tion eft de M. le comte de Cailus.
Marbre feint, peinture qui imite la diverfité des
couleurs, veines ôc accidens des marbres , à laquelle
on donne une apparence de poli fur le bois
ou fur la pierre , par le vernis que l’on pofe deffus.'
De la brique en général. La brique eft une efpece
de pierre artificielle , dont l’ufage eft très-néceffaire
dans la conftruftion des bâtimens. Non-feulement
on s’en fert avantageufement au lieu de pierre , de
moilon ou. de plâtre , mais encore il eft de certains
genres de conftru&ion qui exigent de l’employer pré-!
férablement à tous les autres matériaux, comme
pour des voûtes legeres, qui exigent des murs d’une
moindre épaiffeur pour eh retenir la pouflee ; pour,
des languettas (d) de cheminées , des contre-coeurs,
des foyers, &c. Nous avons vu ci-devant que cette
pierre étoit rougeâtre ôc qu’elle fe jettoit en moule ;
nous allons voir maintenant de quelle maniéré elle
fe fabrique , connoiffance d’autant plus néceffaire ,
que dans de certains pays il ne s’y trouve fouvent
point de carrières à pierre ni à plâtre, & que par-là
on eft forcé de faire ufage de brique, de chaux ôc
de fable.
De la terre propre à faire de la brique. La terre la
plus propre à faire de la brique eft communément
appellée terre glaife ,• la meilleure doit être de couleur
grife ou blanchâtre, graffe, fans graviers ni
cailloux, étant plus facile à corroyer. Ce foin étoit
fort recommandé par Vitruve, en parlant de celles
dont les anciens fe fervoient pour les cloifons, murs,
planchers , &c. qui étoient mêlées de foin & de
paille hachée, & point cuites, mais feulement fé-
chées au foleil pendant quatre ou cinq ans , parce
(a) Prcle, efpece de plante aquatique très-rude.
(b) Chien de mer, forte de poiflon de mer dont la peau d'une
certaine rudeffe eft très-bonne pour cet ufage.
(c) Rabot t eft un morceau de bois dur avec lequel on frotte
le marbre.
( d ) Efpece de cloifon qui fépare plufieurs tuyaux de cheminée
dans une fouche.
que ,difoit-il, elles fe fendent & fe détrempent'lorf-
qu’elles font mouillées à la pluie..
La terrequi eft rougeâtre eft beaucoup moins efti-
mée pour cet ufage , les briques qui en font faites
étant plus fujettes à fe feuilleter & à fe réduire en
poudre à la gelée..
Vitruve prétend qu’il y a trois fortes de terre propres
à faire;de la brique ; la première , qui eft auffi
blanche que de la craie ; la fécondé , qui eft rouge ;
ôc la troifieme,.qu’il appellefablon mâle. Au rapport
de Pérault, les interprètes de Vitruve n’ont jamais
pu décider quel étoit ce fablon mâle dont il parle,
6c que Pline prétend avoir été employé de fon tems
pour faire de la brique. Philander penfe que c’eft
une terre folide ÔC fablonneufe ;Barbaro dit que c’eft
un fable de riviere gras que l’on trouve en pelotons,
comme l’encens mâie : & Baldus rapporte qu’il a
été appelle mâle , parce qu’il étoit moins aride que
l ’autre fable. Au refte , fans prendre garde fcrupu-
leufément à la couleur, on reconnoîtra qu’une terre
eft propre à faire de bonnes briques , fi après une
petite pluie on s’apperçoit qu’en marchant deffus elle
s’attache auxpiés Ôc s’y amaffe en grande quantité ,
fans pouvoir la détacher facilement, ou fi en la pai-
triffant dans les mains on ne peut la divifer fans
peine.
De la maniéré de faire la brique. Après avoir choifi
un efpace de terre convenable , ôc l’ayant reconnu
egalement bonne par-tout , il faut l’amafler par monceaux
ôc l’expofer à la gelée à plufieurs reprifes,
enfuite la corroyer avec la houe ( fig. 118. ) ou le
rabot {fig. n y - j t ôc la laiffer repofer alternativement
jufqu’à quatre ou cinq fois. L ’hiver eft d’autant
plus propre pour cette préparation , que la gelée
contribue beaucoup à la bien corroyer.
On y mêle quelquefois de la bourre ôc du poil de
boeuf pour la mieux lie r , ainfi que du fablon pour
la rendre plus dure & plus capable de refifter au fardeau
lorfqu’elle eft cuite. Cette pâte faite , on la
jette par inottè dans des.moules faits de cadres de
bois de la même dimenfion qu’on veut donner à la brique;
& lorfqu’elle eft à demi feche , on lui donne
avec le couteau la forme que l’on juge à-propos.
Le tems le plus propre à la faire fécher , félon
Vitruve , eft le printems & l’automne , ne pouvant
fécher en hiver , & la grande chaleur de l’êté la fé-
chant trop promptement à l’extérieur , ce qui la fait
fendre, tandis que l’intérieur refte humide. Il eft auffi
néceffaireI félon lu i , en parlant des briques crues ,
de les laiffer fécher pendant deux ans, parce qu’étant
employés nouvellement faites, elles fe refferent
ôc fe féparentà mefure qu’elles fe fechent : d’ailleurs
l’enduit qui les retient ne pouvant plus fe foutenir,
fe détache & tombe ; &c la muraille s’affaiffant de
part &c d’autre inégalement, fait périr l’édifice.
Le même auteur rapporte encore que de fon tems
dans la,ville d’Utique il n’étoit pas permis.de fe fervir
de brique pour bâtir qu’elle n’eût été vifirée par
le magiftrat, & qu’on eût été fûr qu’elle avoit féché
pendant cinq ans. On fe fert encore maintenant de
briques crues , mais ce n’eft que pour les fours à
chaux (fig. 2^9. ) , à tuile ou à brique (fig. 27. ).
La meilleure brique eft celle qui eft d’un rouge
pâle tirant fur le jaune, d’un grain ferré ÔC compafte,
& qui lorfqu’on la frappe rend un fon clair ôc net.
Il arrive quelquefois que les briques faites de même
terre ôc préparées de même, font plus ou moins rouges
les unes que les autres , lorfqu’elles font cuites ,
ÔC par conféquent de différente qualité: ce qui vient
des endroits oit elles ont été placées dans îe fou r,
& où le feu a eu plus ou moins de force pour les
cuire. Mais la preuve la plus certaine pour connoître
la meilleure, fur-tout pour des édifices de quelque
importance, eft de l’expofer à l’humidité & à la gelée
pendant l’hiver, parce que celles qui y auront ré-
fifté fans fé feuilleter, ôc auxquelles il ne fera arrivé
aucun inconvénient Confidérable , pourront être mi-
fes en oeuvre en toute fûreté.
Autrefois on fe fèrvoit à Rome de trois fortes de
briques ; la première qu’on appelloit didodoron, qui
avoit deux palmes en quarré ; la fécondé, tetradoron,
qui en avoit quatre ; & la troifieme, pentadoron, qui
en avoit cinq : ces deux dernieres maniérés ont été
long-tems employées par les Grecs. On faifoit encore
à Rome des demi-briques Ôc des quarts de briqués,
pour placer dans les angles des murs ôc les
achever. La brique que l’on faifoit autrefois, au
rapport de Vitruve, à Calente en Efpagne, à Mar-
feiilé en France , & à Pitence en Afie , nageoit fur
l ’eau comme la pierre-ponce , parce que là terre
dont on la faifoit étoit très-fpongieufe , & que fes
pores externes étoient tellement ferrés lorfqu’elle
étoit feche, que l’eau n’y pouvoit entrer , ôc par
conféquent la faifoit furnager. La grandeur des briques
dont on fe fert à Paris ôc aux environs , eft
ordinairement de huit pouces de longueur, fur quatre
de largeur ôc deux d’épaiffeur, ôc fe ven d depuis
30 jufqu’à 40 livres le millier.
Il faut éviter de les faire d ’une grandeur Ôc d’une
épaiffeur trop confidérable, à moins qu’on ne leur
donne pour fécher un tems proportionné à leur grof-
feur ; parce que fans cela la chaleur du feu s’y communique
inégalement, & le coeur étant moins atteint
que la fuperficie, elles fe gerfent ôc fe fendent en
cuifant.
La tuile pour les couvertures des bâtimens , le
carreau pour le fol des appartemens , les tuyaux de
grais pour la conduite des eaux, les boiffeaux pour
les chauflès d’aifance, & généralement toutes les
autres poteries de cette efpece, fefont avec la même
terre , fe préparent Ôc fe cuifent exa&ement de la
même maniéré. Ainfi ce que nous avons dit de la
brique , peut nous inftruire pour tout ce que l’on
peut faire en pareille terre.
Du plâtre en général. Le plâtre du grec propre
à être formé , eft d’une propriété très-importante
dans le bâtiment. Sa cuiffon fait fa vertu principale.
C ’eft fans doute par le feu qu’il acquiert la
qualité qu’il a,non-ieulement de s’attacher lui-même,
mais encore d’attacher enfembie les corps folides.
Comme la plus effentielle eft la promptitude de fon
aélion , ôc qu ’il fe fuffit à lui-même pour faire un
corps folide, lorfqu’il a reçu toutes les préparations
dont il a beloin , il n’y a point de matière
dont on puiffe fe fervir avec plus d’utilité dans U
conftru&ion.
De la pierre propre à faire le plâtre. La pierre propre
à faire du plâtre fe trouve dans le fein de la
terre , comme les autres pierres. On n’en trouve
des carrières qu’aux environs de Paris , comme à
Montmartre , Belleville, Meudon , ôc quelques autres
endroits. Il y en a de deux efpeces : l’une dure,
ôc l’autre tendre. La première eft blanche ôc remplie
de petits grains luifans : la fécondé eft grifâtre,
ôc fert , comme nous l’avons dit ci-devant , à la
conftruétion des bicoques ôc murs de clôtures dans
les campagnes. L’une & l’autre fe calcinent au feu,
fe blanchiffent ôc fe réduifent en poudre après la
cuiffon. Mais les ouvriers préfèrent la derniere,
étant moins dure à cuir. .
De la maniéré de faire cuir le plâtre. La maniéré dé
faire cuir le plâtre confifte à donner un degré de
chaleur capable de deffecher peu-à-peu l’humidité
qu’il renferme , de faire évaporer les parties qui le
lient, ôc de difpofer auffi le. feu de maniéré que la
chaleur agifle toujours également fur lui. Il faut
encore arranger dans le four les pierres qui doivent
être calcinées , enforte qu’elles foient toutes égale