
i6o L A O Laon fu t, d it-o n , érigé en évêché Fan 496,
fous le règne de Clovis ; il faifoit auparavant une
partie du dioçèfe de Reims.
Au bas de Laon eft une abbaye de filles, appelée
Montreuil-les-Dames : cette abbaye eft principalement
connue par la Véronique ou Sainte-
Face de Jéfus-Chrift, que l ’on y conferve avec
fo in , & qui y attire en tout tems un grand concours
de peuple. L’original de cette image eft à
Rome; c e lle -c i n’eft qu’une copie, qui fut envoyée
aux religieufes, en 1249, par Urbain IV ,
qui n’étoit alors qu’archidiacre de Laon, & chapelain
d'innocent IV. Au bas du cadre où cette
image eft enchâftee, on voit une infcription , qui,
dans ces derniers tems, a donné de l’exercice à
nos érudits , & a fait voir combien ils doivent
le défier de leurs conjeélures ingénieufes. Le P.
Mabillon avoua cependant que les caraélères lui
étoient inconnus ; mais le P. Hardouin y découvrit
un vers grec hexamètre, Si. publia pour preuve
une favante diflertation , qui eût entraîné tous les
fuffrages, fans un Carme déehaufle, appelé le P.
Honoré de Sainte-Catherine, lequel dit naturellement
que l’infcription n’étoit point en grec ? mais
en fclavon. On méprifa le bon homme , fon ignorance
, & celle des Mofcovites , de l’autorité def-
quels il s’appuyoit. Le czar vint à Paris avec le
prince Kourakin, & les princes Narifquin «j on
leur demanda par pure curiofité, s’ils connoiifoient
la langue de l’infcription ; ils répondirent tous,
que l’infcription portoit en caractères fclavons,
les trois mots obras gofpoden naoubrons, qui lignifient
en latin, imago Domini in limen : u L'image
» de notre Seigneur eft ici encadrée ». On fut
bien furpris de voir que le bon Carme ayoit eu
raifon contre tous les favamj du royaume, & on
finit par fe moquer d’eux.
Charles F r, duc de Lorraine, fils de Louis d’Ou-
tremer, naquit à Laon en 953. On fait que Hugues
Capet trouva le ftçret de fe faire nommer
a fa place roi de France en 987. Charles tenta
vainement de foutenir fon droit par les armes ;
il y réuflit fi mai, qu’il fut arrêté, pris , & enfermé
dans une étroite prifon à Orléans , où ü
finit fa carrière trois ans après, c?eft-à?dire, en
$94-,
L ’églife cathédrale de cette ville eft un tres-beau
vaifleau rebâti en 1115. Plufieurs grands hommes
ont été chanoines de Laon , tels que le pape Urbain
I V , & le fameux Anfelme, ce prodige de
fcience, aux leçons duquel on accoproit des contrées
les plus éloignées.
-On y compte feize pareilles, une comffiande-
rie de Malthe , trois abbayes^d’hommes dans la
v ille , & deux de filles hors des murs ; celle de
Saint-Jean, fondée en 640 par Sainte Salaberge ,
pofsède le tombeau magnifique du cardinal Etienne
de Suifi, mort en 1311. Il y avoit reçu fa première
éducation. Cette abbaye eft aujourd’hui unie
g une école militaire.
L A O Le baillage de Laon , e ft, dit-on, le plus ancien
de France, ayant été inftitué par Philippe-
Augufte en 1180. Arnaud dè Pompone de Bel-
lièvre , fi connu dans l’hiftoire de François L f ,
en avoit été lieutenant-général. Le fameux Bodin,
l’un des plus grands génies de fon fiècle , en
fut procureur du roi ; perfécuté, pillé par les ligueurs
, comme royalifte , il mourut det chagrin à
Laon, en 1596, ne laiflant qu’une fille qui vécut
pauvre. ' •
La fociété royale d’architeélure a été établie à
Laon par arrêt du confeil du 7 feptembre 1761.
On fait à Laon des toiles & des baraçans ,
beaucoup de bas & de chapeaux : au fauxbourg
de Vaux eft une ipanufaâure de clous , depuis
»756. '
Le vin du pays eft eftimé, & les artichauds en
réputation ; l'on y recueille du lin , du chanvre
& peu de fruits.
On ramaffe proche de la ville du fable & des
caillous criftalliîès , dont on fabrique les glaces au
village de Saint-Godin, en y joignant de la foude
qu’on tire d’Alicante, & plus communément du
Languedoc.
Qn voit à Suzy des lits d’une terre inflammable
, qui font appercevoir des parcelles de fuccin ;
la cendre de cettp terre a la vertu d’améliorer les
terres à bled.
Depuis Laon jufqu?à la Fère, la terre eft remplie
de pierres numiféaïes pu lenticulaires : les
pierres mêmes dont la ville eft çonftruite font
pleines d’huîtres, & de ces pierres lenticulaires,
mêlées de dentales. On trouve des mines d’alun
dans les villages de Bouris Si. de Convient, qui
font de l’éleèlion de Laon.
M. Pluçhe, au troifième volume du Spe&acle
de la Nature , dit que la montagne fur laquele
la ville de Lapn eft fituée, a cinquante tpifes de
hauteur ; on peut voir dans ce volume comment
on y trouve de l’eau. Cet homme refpedable a été
principal du collège de Laon , dont il fut expulfé
par les intrigues des Jéfuites. {M. D. AL)
Laon ( Saint ) , abbaye d’hommes , ordre
de Saint Àuguftiii , diocefe de Poitiers , dans
Thouars.
LAONNOIS, petit pays de Frarice, en Picardie.
Il eft borné au nord par la Thiérarche, au
lçvant par la Champagne, au couchant & au midi
par le Soiffonpois. La capitale de ce petit pays
eft Laon. Les autres lieux principaux font Cor-
bigny , Lieffe , Couffi , Follenbray , Novion-le-
Vineux. Ce dernier endroit n’eft aujourd’hui qu’un
village , dont les habitans doivent à leur feigneur
une efpèce de taille de plufieurs muids de vin par
an. Il intervint arrêt du parlement de Paris en
1505, cpnfirm^tif d’une féntence qui déboute les
habitans de Novion-le-Vineux de leur demande,
à ce que cette rente annuelle- de vin fût fixée
en argent. La fin de cet arrêt qui eft en latin
mérite ÿêtfc remarquée ; «Sauf toutefois à l’in
j» tiraé
■L A O »■ rimé, de faire aux appeÜâns telle grâce qu il
» aviferà bon être, à caufe de la mifere bi. cala-
» mité du tems ». Cette claufe, qui fem-bleroit de
nos jours inutile & ridicule, étoit alors fans doute
de quelque poids , pour infinuer à un homme de
qualité des confidérations d’équité que le parlement
n’ofoit preferire lui-même. •
LAOR , bourg de l’île Minorque. Ce lieu eft
très-peu de chofe, quoiqu’on lui dpnne aflèz fou-
vent le nom de ville.
LAPONIE ( l a ) , ou Lapponie , grand pays
au nord de l’Europe & de la Scandinavie, entre
la mer Glaciale, la Ruflie, la Norwege & la Suède.
Comme il eft partagé entre ces trois couronnes,
on le divife en Laponie Rufîe, Danoife, & Suédoise.
^
Saxon le grammairien qui fleuriflbit fur la fin
du XIIe fiècle, eft le premier qui ait parlé de ce
pays & de fes-habitans ; mais, comme le dit M.
de Voltaire ( dont le leétèur aimera, mieux trouver
ici les réflexions , que l’extrait de 1 hiftoire
mal digérée de Scheffer ) , ce n’eft que dans le
XVIe fiècle qu’on commença de connoître grof-
fiérement la Laponie, dont les Rufles, les Danois
& les Suédois même n’avoient que de foibles
notions. |
Ce vafle pays , voifin du pôle, avoit été feulement
défigné par les anciens géographes fous le
nom de la contrée des Cynocéphales, des Himanto-
podes, des Troglotites 6* des Pygmées. En effet, nous
apprîrpes par les relations des écrivains de Suède
& de Danemarck, que la race des Pygmées n eft
point une fable , Si. qu’ils les avoient retrouves
fous le p ô le , dans un pays idolâtre, couvert dé
neige , de montagnes Si. de rochers, rempli de
loups, d’élans, d’ours, d’hermines & de rennes.
Les Lapons, continue M. de Voltaire (d ’après
le témoignage de tous les voyageurs), ne paroif-
fent point tenir des Finlandois dont on les fait
fortir , ni d’aucun autre peuple de leurs voifins.
Les hommes en Finlande, en Norwege, en Suède,
en Ruflie, font blonds, grands & bien faits. La
Laponie ne produit que des hommes de trois
coudées de haut, pâles , bafanés, avec des cheveux
courts , durs & noirs; leur tête groffe, leurs
yeux enfoncés & chaflieux, leurs oreilles , leur
nez court & plat, leur ventre, leurs cuiffes &
leurs pieds menus , les différencient encore de tous
les peuples qui entourent leurs déferts.
Ils paroilTent une efpèce particulière faite pour
le climat qu’ils habitent, qu’ils aiment, & qu’eux
feuls peuvent aimer. La nature , qui n’a mis les
rennes que dans cette contrée, femble y avoir
produit les Lapons •; Si comme leurs rennes ne
font point venues d’ailleurs,- ce n’eft pas non plus
d'un autre pays que les Lapons y pa-oiffent v e nus.
Il n’eft pas vraisemblable que les habitans
d’une terre momq. fàuvage, aient franchi les glaces
& les défèrxs pour fe tranfplanter dans des
terres fi ftériles , fi ténébreufes, qu’on n’y voit
Géographie. Tome II.
L AP 1 (y l
pas clair trois tr.ois de l’année, & qu’il faut changer
fans ceffe de canton pour y trouver de quoi
fiibfifter. Une famille peut être jetée par la tempête
dans une île déferte, & la peupler; mais on
ne quitte point dans le continent des habitations
qui produifent quelque nourriture, pour aller s’établir
au loin fur des rochers couverts de moufle,
au milieu des frimais, des précipices, des neiges
& des glaces, où l’on ne peut le nourrir que de
lait de rennes & de poiflons fecs, fans avoir aucun
commerce avec le refte du inonde.
De plus , fi des Finlandois, des Norvégiens,
des Rufles , des Suédois, des Iflandois , peuples
aufîi feptentiionauxque les Lapons, s’étoient tranf-
plantés en Laponie , y auroient - ils abfolument
changé de figure ? Il femble donc que les Lapons
font une nouvelle efpèce d’hommes qui fe font pré-
fentés pour la première fois à nos regards & à nos
obfervations dans le x m e fiècle; tandis que l ’Afié
Si. l’Amérique nous faifoient voir tant d’autres
peuples, dont nous n’avions pas plus’de connoif-
fance. Dès - lors la fphère de la nature s’éft
agrandie pour nous de tous côtés, & c’eft parla
véritablement que la Laponie mérite notre attention.
Il femble que ce: peuple foit la dernière race
des mortels, tant à caufe du lieu qu’il occupe fur
le globe , que par fa petite taille , fa mauvaile
mine, fes qualités corporelles, & le caractère de
fon efprit. Errant & vagabond , comme les Tar-
tàres, il habite tantôt vers la mer Glaciale , tantôt
fur les bords de quelque la c , tantôt près dù
golfe de Bothnie.
Maupertuis, qui a mefuré le dégré polaire, nous
a donné une belle defeription de ces peuples ;
nous en avions' déjà une autre du fameux poète
comique Regnard , qu’une bizarre curiofité porta
à aller voir ce pays, & qui laifla gravée à l’extrémité
du nord une infcription qui finit par ce
vers :
S ijlimus hic tandem , nobis ubi defuit orbis.
Ce peuple laid & fale, qu’on peut appeler le
rebut de l’efpèce humaine , & qui eft privé de
I l vue du foleil pendant plufieurs mois de l’année
eft éclairé prefque toutes les nuits, d’un feu
détaché de Fatmofphère folaire, d’une aurore plus
. célefte encore dans fon origine que ne l’eft celle
qui, comme difent lés poètes, vient tous les jours
avec fes doigts de rofe , nous ouvrir les portes
de, Forient.
Piron dans fon Gujlave, caratlérife ainfi ce pays
& ceux du nord :
Tombeaux de la nature , effroyables rivages9
Que l'ours difpute encore à des hommes [ay.va.ges.
Nous allons parler principalement de la Laponie
Suédoife ; qui eft la plus import: n t i , & la
feule un peu peuplée, relativement à la rigueur
du climat. Elle confine vers d'orient à 1& Bothnie