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Les abbeffes t[uî lui ontfuccédé, 6nt été affei I
fouvent des plus anciennes maifons du royaume : I
on doit mettre de ce nombre Jeanne Chabot, I
quoiqu’elle ait été obligée d’abdiquer fa place, à
caufe de la religion proteftante qu’elle profeffoit,
& qu’elle profeffa hautement jufqu’à la mort,fans
néanmoins fe marier, ni quitter fon habit de reli—
^ieufe. ; v
.Comme Héloïfë n’entendoit pas feulement la
langue latine , mais favoit encore très-bieri la langue
greeque »relie 'fit chanter la meffe dans cette
langue tous les ans » le jour de la Pentecôte , qui
étoit la principale fête de l’abbaye du Paraclet ; 8c
cet ufage s’y obferve encore aujourd’hui.
Dès qu’Abélard fut mort, elle demanda fon
corps à l’abbé de Clugny; l’ayant obtenu, elle
Je fit mettre au Paraclet, & ordonna , en mourant
, qu’on la,mît dans le même tombeau. (R.)
PARAGOA. Voyeç Paragoya.
P A R A G O Y A , grande île de la mer des Indes ,
ontre les Philippines & l’île de Bornéo. Les Efpa-
gnols y ont un fort , & elle obéit à un roi tributaire
de celui de Bornéo. Long. 1 3 1 , 30— 135 ; lat.fept.
PARAGUAY ( le ) , grand pays de l’Amérique
méridionale , dont il n’en pas ailé de marquer l’étendue.
Les meilleures cartes que nous ayions du
Paraguay, nous ont été données par les Jéfuites;
mais ils y ont eu moins d’égard à ce qu’on doit
.appeler proprement Paraguay, qu’à ce qui formoit
la Terre de la Million, 8c qui obéifîbit à un feul
provincial de leur ordre.
Cette grande contrée, qu’on nomme auffi le pays
ie Rio de .la Plata, renferme fept provinces ; favoir
au nord, le Paraguay propre ; à l’occident de la
rivière de Paraguay, le Chaco ; à l’orient de cette
même rivière, le Guayra ; trois au midi, Rio de
la Plata, le long de la rivière de la Plata ; à l’orient
de cette rivière, l’Uraguay ou Urvaig ; & à l’occident,
le Tucuman. Le Parana, qui en la feptième ,
eft fitué le long de la rivière de Parana, au fud-
oueft du Bréfil. Les Efpagnols fe font affujétis la
plus grande partie de cette vafle région, & il y a
des fauvages naturels du pays qui n’ont point encore
été domptés, qui s’exercent dès leur jeuneffe
à la courfe & au manimeut des armes. Ils habitent
dans de longues cabanes , où plufieurs familles
logent enfemble. Avant l’arrivée des Efpagnols,
le Paraguay contenoit un grand nombre de peuplades
, formées d’un petit nombre de familles. La
chaffe, la pêche, les fruits fauvages , le miel dés
forêts, quelques racines qui croifïoient fans culture
, étoient la nourriture de ces peuples ; ils er-
roient perpétuellement d’une contrée à l’autre.
La première découverte s’en fit en 15 1 5 , par
Diez de Solis , Efpagnol ; mais il fut maffacré avec
la plupart des liens, ainfi que les Portugais qui
s’y préfentèrent quelques années après. Sébaftien
Cabot, Anglois'de nation , y ramena les Efpagnols
en 1526 ; & en 15.35, Mendoza en confolidala con-
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quêté. Lé climat en eft doux & falubrè. Le terroir
produit des pâturages, du bled , des fruits, du
coton, des cannes à fucre ; mais fa plus riche pro-
duéfion eft Y herbe du Paraguay, qui eft la feuille
d’un arbre de grandeur moyenne , dont le goût ^
approche de celui de la mauve, 8c la figure de
celui de l’oranger. Les feuilles, après avoir été
grillées, fe conservent dans des fofles creufées ea
terre, 8c couvertes d’une peau de boeuf. Les montagnes
de Maracayu produifent la meilleure herbe
du Paraguay. Pour en faire ufage , la feuille pulve-
rifée fe jette dans Un verre d’eau bouillante. Le
Pérou feul en tire annuellement pour plus de deux
millions de notre monnoie. Poye^ Paraguay
(herbe du ) , Bot an. exot.
On tire d’ailleurs beaucoup de cuirs du Paraguay.
Il s’y trouve quantité de tigres, de lions ,
8c de renards.
Le Paraguay eft borné au nord par le Pérou,
le Bréfil, & le pays des Amazones ; au midi, par
.les terres Magellaniques ; à l’orient, par le Bréfil
& par la mer du nord ; à l’occident, par le Pérou
8c le Chili. Il a pour capitale la ville de l’Aftomp-
tion..
Les Jéfuites avoient un grand nombre, de doctrines
ou de millions entre la rivière du Paraguay,
au-deffous de l’Affomption 8c le Parana, Ils en
avoient encore plufieurs le long de l’Urvaig, grande
rivière qui vient du nord-eft, 8c fe déchatge dans
Rio de la Plata, par le 34e d. fud.
Ces doélrines étoient des bourgades de^deux
ou trois mille Indiens, autrefois errans, que les
pères avoient raffemblés fur les montagnes 8c dans
les forêts ; ils les avoient civilifés, leur avoient
appris des métiers, 8c à vivre du travail de leurs
mains.
Rien ne fait plus d’honneur à leurs millions
/ que d’avoir vaincu , dans ces pays-là, la férocité
des fauvages, fans d’autres armes que celles de la
douceur. _ 7 1 .
L’auteur d’un mémoire fur ce fujet; imprimé à
la fin des voyages de Frézier , édition d’Hollande,
nous apprend que le premier établiffement des
Jéfuites dans ce pays, a commencé par cinquante
famille d’indiens errans, que les Jéfuites raffem-
blèrent fur le rivage de la rivière de Japfur, dans
le fond des terres. Cet établiffement a tellement
profpéré, qu’à s’en rapporter aux Jéfuites eux-
mêmes dans les mémoires de Trévoux, oélobre
1741 , les réduâions ou peuplades formées par
leurs millionnaires, étoient en 1717 au nombre de
trente 8c une ^répandues dans une étendue de pays
d’environ 60o lieues , 16 fur le bord du Parana ,
8c 15 le long de l’Uraguay, qui fe déchargent
tous deux dans le fleuve Paraguay. On comptait
alors dans ces peuplades cent vingt-un mille cent
foixante-un Indiens.
On affure que ces peuples civilifés occupaient
les plus belles terres de tout le pays fitué à 20a
lieues des Portugais pauliftes du côté du nord ;
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& vers le fud , à 200 lieues de la province de
Buenos-Aires, 180 lieues de celles de Tucuman,
& 100 lieues de celles du Paraguay.
Les terres de la million font fertiles, traverses
par beaucoup de rivières qui forment nom re
d’îles ; les bois de haute-futaie ,& les arbres fruitiers
y abondent ; les légumes y font excellens,
le bled, le lin , l'indigo, le chanvre, le coton,
le fucre , le piment, l’ipécacuanha , le jalap , ie
mechoacân , les racines pantrabunda , & pluiieuis
autres f.mples admirables pour les remedes y viennent.
Les favanes ou pâturages y font remplis
de chevaux, mules, vaches , taureaux isc troupeaux
de moutons : ces peuples font doux, tres-
foumis, adroits, laborieux, & exercent toutes fortes
de métiers. . ,
L’auteur du mémoire que nous avons cite, rapporte
que dans le tems qu’il écrivoit, ces peuples
étoient divifés en quarante-deux paroiffes, datantes
depuis une jufqu’à dix lieues l’une de 1 autre , oc
s’étendant le long de la rivière du Paraguay, il y
avoit dans chaque paroiffe un Jéfuite auquel tout
obéiffoit, 8c qui gouvernoit fouverainement. Un
feul homme commandoit de cette façon a quelques
mille âmes, 8c cette manière de gouverner
étoit égale dans toutes les peuplades. A la lou-
miflion de ces peuples fe joignoit un delinterelie-
ment fans exemple que les Jéfuites leur avoient
infpiré. Il y avoit dans chaque paroiffe de grands
magafins, où les fujets étoient obligés de porter
vivres 8c marchandifes, fans rien garder parde-
vers eux. . — .
La principale fonétion des caciques ou officiers
de police, étoit de connoître le nombre des familles
, de leur communiquer les ordres du pere,
d’examiner le travail de chacun fuivant fon talent,
8c de promettre des récompenfes à ceux qui tra-
vailleroient le plus 8c le mieux. Il y avoit d’autres
infpeâeurs pour le travail de la campagne, auxquels
les Indiens étoient obligés de déclarer tout
ce qu’ils recueilloient, 8c tout devoit entrer dans
les magafins fous des peines rigoureufes. Il y avoit
enfuite des diftributeurs pour fournir à chaque famille
félon le nombre des perfonnes , deux fois
par femaine, de quoi fubfifter. Les Jefuites veil-
loient à tout avec un ordre infini, pour ne laifler
introduire aucun mauvais ufage chez leurs fujets,
& ils en étoient bien récompenfes par les profits
qu’ils tiroient du travail de tant de gens.
On infpiroit à tous les habitans dès la plus tendre
enfance la crainte de Dieu, le refjaeél pour le pere
Jéfuite, la vie {impie , 8c le dégoût des biens temporels.
Le gouvernement militaire, dit le même auteur,
n’étoit pas moins bien réglé que le civil ; chaque
paroiffe donnoit un certain nombre de foldats dif-
ciplùiés par régimens, 8c qui avoient leurs officiers
■ Les armes des Indiens confiftoient en fufils, baïon
nftttps . 8c frondes : on prétend r t n e ♦nnM»C 1
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hommes fur pied, & c’étoit les meilleurs foldats
du Nouveau-Monde.
Les Jéfuites n’apprenoient point à leurs Indiens
la langue efpagnole, 8c les empêchoient, autant
qu’il étoit poffible, de communiquer avec les étrangers.
Les quarante-deux Jéfuites qui gouvernoient
les paroiffes étoient indépendans les uns des autres ,
8c ne répondoient qu’au provincial du couvent
de CorduaJ dans la province de Tucuman. Ce
père provincial vifitoit une fois l’an fes miffions.
11 faifoit rendre compte , pendant fon féjour, aux
Jéfuites de chaque paroiffe, de la fourniture des
magafins, 6c de la confommation qui en avoit
été faite depuis fa dernière vifite. Toutes les marchandises
de vente étoient tranfportées des millions
à Santa-Fé, qui étoit le magafin d’entrepôt, 8c do
Santa-Fé à Buenos-Ayrès par terre, où il y avoit
auffi un procureur-général. C ’eft de ces deux endroits
que l’on diftribuoit ces marchandifes dans
les provinces du Tucuman , du Paraguay 8c de
Buenôs-Ayrès, 8c dans les royaumes de Chili 8c
du Pérou.
Obfervons enfin que les Jéfuites, ainfi que les
Incas, avoient établi un ordre qui prévenoit les
crimes, 8c difpenfoit des châtimens. Rien ryétoit
fi rare dans leurs peuplades que les délits-, 8c
les moeurs y étoient belles 8c pures par des moyens
encore plus doux qu’au Pérou.
Outre les mémoires fur les mijjions du Paraguay,
joint au voyage de Frézier, les Jéfuites de T révoux
ont donné dans leur journal, novembre
1744, l’extrait d’un livre publié fous le nom du
célèbre Muratori, 8c intitulé: Il chrîflianefimo delle
miffioni de' Padri délia compagnia di Giefu. Venezia,
1743 , in-40.
Cet ouvrage eft tout à la gloire des miffions du
Paraguay, 8c paroît venir de la main des Jéfuites ;
l’auteur dit dans le chap. xij , que le baptême fait
dépofer aux enfans fauvages du Paraguay la férocité
qui leut^eft propre; mais il leur relie une indolence
invincible qui les rend incapables de fe
gouverner eux-mêmes, enforte qu’ils ont befoin
d’être toujours en tutèle.
Le corrégidor 8c fon lieutenant étoient nommés
par le gouverneur; mais ils dévoient être choi-
fis dans la bourgade même , 8c tous les autres officiers
étoient élus par les Indiens, c’eft-à-dire, je
penfe par les Jéfuites, püifque les Jéfuites font
leurs maîtres.
Il y avoit des portions de terrein qui fe culti-
voient à frais communs pour les befoins qui fur-
viennent, pour les veuves^ les orphelins, les malades
, 8c tous ceux qui doivent être entretenus
aux dépens du public. La pêche, là chaffe, les
fruits qui viennent fans culture, le miel 8c la cire
qu’on recueille dans les bois étoient de droit commun.
Si quelque calamité affiigeoit une bourgade ,
& faifoit manquer la récolte, ou la rendait in-
fuffifante , toutes les autres y pourvoyoiént.
: L’auteur dit au fujet du gouvernement militaire