
Sfj'î N A P château de Capo-di-Monte, non par fon archi-
teélure, qui eft des plus lourdes, mais par la fameufe
colleélion des Farnèfe, q u i, de Parme fut tranf-
portée à Naples par Dom Carlos. C ’eft la plus pré-
cieufe de l'Italie en tableaux 8c en médailles. Ce
château renferme d’ailleurs une belle bibliothèque
& une collection d’hiftoire naturelle. On a donné 3a defcription des médailles en 2 vol. in-folio.
Un peu au-deffous du château de Capo-di-Monte,
dans l'églife de San-Severo, on voit une des trois
entrées des catacombes , qui s’étendent fous terre
au moins à 2 milles. Lorfque les corps y étoient
dépofés, l’ouverture des niches ou cavités étoit
fermée avec une longue pierre platte ou de grandes
tuiles fcellées à chaux & à ciment.
Vis-à-vis la porte de Conftantinople eft le bâtiment
de l’univerfité, fondée en 1616. On y en-
feigne la théologie, la médecine, la politique, le
droit c iv il, les mathématiques , la philofophie ,
l ’hiftoire, les humanités 8c les langues orientales.
Le palais des princes de Salem e avoit été acheté
par les Jéfuites en 1 5 8 3 ,8c formoit leur maifon
profefle où ils avoient une précieufe bibliothèque.
Leur églife étoit, ainfi qu’elle eft encore aujourd’hui,
la plus belle de Naples. Elle eft en forme
de croix grecque , avec une grande coupole qui
avoit été peinte de la main de Lanfranc. Le tremblement
de terre de 1688 renverfa la coupole, qui
fut refaite 8c peinte par un peintre d’un ordre inférieur.
Il ne refte que les quatre évangéliftes des
pendentifs , qui .font de Lanfranc. On y voit de
beaux morceaux de Solimene , du Guerchin, de
l ’Efpagnolet, de Raphaël, d’Annibal Carrache, 8c
un tréfor ftnguîiérement riche. Sur la place voiftne
s’élève une fuberbe pyramide , à laquelle on reproche
la profufion des ornemens ,' la multiplicité des
formes, des figures , des reliefs , des chantour-
nures.
L’églife de Sainte-Claire eft une des plus remarquables
de. cette ville: les marbres, les flucs, la
fculpture, les dorures, les peintures y frappent
de tous côtés les yeux. Les voûtes furent peintes
par Sébaftien Conca, 8c cet ouvrage eft très-eftimé.
La facriftie eft extrêmement riche en orfèvrerie 8c
en ornemens précieux. Le couvent de Sainte-Claire
eft le plus célébré de Naples, 8c il eft deftiné à
la noblefle. Il fut fondé par Robert, qui fut roi
de Naples en 1309, 8c par la reine Sancia, fon
époufe. On y a vu jufqu’à 400 religieufes : il n’y
en a guère que 250 aujourd’hui. Elles reçoivent
compagnie » fans grilles intermédiaires, dans des
pièces où l’on eft affis à côté d’elles, fans aucune
féparatioh : ufage qui a lieu dans la plupart des
maifons religieufes de Naples.
Le collège qui appartenoit aux Jéfuites, eft un
des plus beaux édifices de Naples, 8c l’églife en
eft très-ornée : l’efcalier eft magnifique, la bibliothèque
nombreufe, le cabinet de phyfique 8c d’af-
tronomie très-bien pourvu.
J1 fe trouve en cette ville un mont-de-piété, où
N A P l’on prête fur toutes fortes de gages, 8c fans intérêts
, pendant deux ans, fi la fomnie empruntée?
n’excède pas 43 liv., monnoie de France. Pour un'
tems ou pour des fommes plus confidérables on
exige l’intérêt courant. 11 y a encore dans la ville
d’autres établiffemens du même genre.
Le monaflère des Théatins occupe l’emplacement
d’un ancien amphithéâtre des Romains , dont
il fubfifte encore quelques veftiges , 8c qui fut celui
où l’empereur Néron chanta des vers de fa compo-
fition. Saint-Philippe-de-Néri eft une des plus belles
églifes de Naples, 8c même une des plus remarquables
de l’Italie. Elle eft aux pères de l’Oratoire ,
dits Hièronimites, parce 'qu’ils fuivent la règle de
Saint-Jérôme. La façade eft toute en beaux marbres
, 8c la nef du milieu eft formée par des colonnes
de granit d’une feule pièce. Le grand autel
eft d’une richeffe incroyable, 8c la bibliothèque de
cette maifon eft une des quatre bibliothèques publiques
de Naples. L’églife des Saints-Apôtres, qui
eft aux Théatins , n’eft pas moins remarquable par
fon éclat 8c fa richeffe.
L’églife de Saint Janvier eft la cathédrale de
Naples , mais elle n’eft point à beaucoup près une
des plus belles. Ce n’eft qu’une vieille églife du
plus mauvais gothique. C ’eft dans une petite chapelle
fouterreine , revêtue de marbre blanc , que
repofe le corps de Saint Janvier , patron du
royaume. La plus belle partie de la cathédrale eft
la chapelle de Saint-Janvier, de forme ronde,
ornée de 42» colonnes de brocatelle , environnée
de niches, où font les ftatues en bronze de 19
faints, 8c où les ornemens accumulés ne laiffent
à l’oeil aucun repos ; la coupole en eft de Lanfranc.
Les richefles immenfes que l’on conferve dans cette
chapelle 8c dans la facriftie voifine forment le tréfor
de Saint Janvier.
Dans une niche à porte d’argent, qui eft derrière
l’autel, On conferve précieufement deux fameufes
ampoules ou fioles, réputées contenir du fang de
Saint Janvier, qui, deux fois par an , miraculeu-
fement,, dit-on , fe liquéfie à la vue de tout le peuple
; le 19 feptembre, jour de la fête du Saint, 8c
le 6 mai, jour auquel il fut déclaré patron du
royaume de Naples. C ’eft aux approches du chef
de Saint Janvier que s’opère le miracle de laliqué-
faâion, qui fe répète 8c fe continue pendant l’octave
de la fête , où il fut reconnu patron du
royaume,
Mais le miracle de Saint Janvier rencontre tant
d’incrédules à Naples, qu’il n’eft pas étonnant qu’il
s’en trouve encore un plus grand nombre ailleurs.
Bien des gens penfent qu’il y a quelques préparations
furtives. M. de la Lande rapporte qu’un
favant, diftingué par fa naiffance 8c fes talens, a
fait faire un oftenfoir femblable à celui de Saint
Janvier, avec des fioles ou ampoules de même
forme, remplies d’une amalgame d’or 8c de mercure
, avec du cinabre qui imite par fa couleur le
fang coagulé ; que pour rendre cet amalgame fluide,
N A P il y a dans le creux de la bordure un réfervoir
de mercure avec une foupape , qui admet à volonté
le mercure dans les fioles. L’amalgame fe liquéfie
alors , la liquéfaâion fe fait. Voyeç les obfervations
fur l'Italie, par M. GrOSLÉE. Voyeç HUBNER ,
Gèogr. univ. tome 11, pag. 4 0 5 ,8cc. &c.
Près de l’Eglife de Saint-Janvier, les regards
s’arrêtent fur une fuperbe pyramide, qui cependant
ne doit pas être citée comme un monument de
goût. ^ I
La vicairie fut le palais des anciens rois de Naples
jufqu’à Ferdinand I. C ’eft aujourd’hui le lieu
où fe tiennent les tribunaux de juftice. L’hôpital
de l’Annonciade eft vafte 8c très-riche ; les malades
y font reçus fans recommandation. C ’eft d’ailleurs
l ’afyle des enfans-trouvés, des orphelins, des filles
repenties, des femmes qui vivent mal avec leurs
maris. L’églife , de l’architeâure de Vanvitelli, eft
un chef-d’oeuvre d’architeélure moderne. On y voit
d’ailleurs de bons tableaux de Luc Jordan. Le fer-
rail eft un hôpital dont les bâtimens immenfes font
deftinés à fervir d’afyle aux pauvres. On lit fur le
front de l’édifice : Regiurn totius regni pauperum
hofpitium.
Près du pont de la Magdeleine eft le Conferva-
toire de Sainte-Marie de Lorette , hôpital deftiné
à des orphelins qui font inftruits dans la mufique.
Il en eft forti grand nombre de muficiens 8c de
chanteurs excelle ns.
Naples eft pavée de larges dalles de pierre ,
ainfi que plufieurs autres villes d’Italie. Il y a a
Naples plufieurs milliers d’hommes qui n’ont ni
fe u , ni lieu ou habitation ; on les nomme L a r rons
; ils vont prefque nuds, couchent dans les
rues lur les bancs ; 2 fols par jour fuffifent pour
leur nourriture, 8c le climat de la ville les difpenfe
de logement, en quelque forte de vêtemens. Nous
nommons les maladies vénériennes mal de Naples,
parce qu’en effet c’eft à Naples que les François
le prirent lorfqu’ils allèrent à la conquête de ce
royaume, fous Charles VIII.
La mufique de Naples eft la meilleure de l’Europe.
Prefque tous les caftrats qui chantent en
Italie ont été opérés à Naples, parce que c’eft l’endroit
où cette opération fe fait avec le plus d’adreffe.
L’appât du gain eft caufe que les payfans ou^ les
pauvres pères de famille , qui ont beaucoup d’en-
fans , ne manquent guère d’en facrifier un. Il y a
trois théâtres à Naples, dont le plus célèbre eft
celui de Saint-Charles. Il communique au palais
du roi. Il n’a pas moins de 6 rangs de loges. Le
théâtre neuf 8c le théâtre Florentin font pour les
opéra-bouffons.
Malgré les affauts terribles que Naples a effuyés,
c’eft encore une des belles villes du monde, 8c une
des plus également belles. La plupart de fes maifons
font à toits plats, 8t d’une ftruélure uniforme.
Mais les richefles prodigieufes enfevelies dans les
églifes de Naples, le nombre exorbitant de couvons
, de monaftères, de prêtres, de religieux 8c de
Gtogr, Tome I I .
N A P 4?î religieufes qui fourmillent dans cette ville, la con-
fument 8c l’appauvriffent tous les jours davantage.
Naples fut célèbre pour les fciences 8c pour les
lettres : Cicéron 8c Sénèque appellent cette ville la
mère des études ,‘^on y a vu fleurir en divers tems
beaucoup de grands hommes qui n’y étoient pas
nés, tels que Virgile, Sénèque; 8cdans le X iv *
fiècle Bocace, qui étoit Tofcan , 8c Pontanus, né à
Cerreto en Umbrie ; mais il y a eu aufli d’illuftres
Napolitains, entre lefquels on doit compter parmi
les anciens : Velleius Paterculus, Stace , 8cc. Dans
les derniers fiècles , Jean-Baptifte Marin , Borelli ,
Gravina, Jean-Baptifte Porta , grand phyfteien ;
Colonna, célèbre botanifte, qui a donne fon nom a1
une plante fort connue , Valeriana Columnoe ; François
Fontana, qui donna en 1646 des obfervations
curieufes en aftromonie ; 8c dans la poéfie ; le Taffe ,
Sannazar 8c Coftanzo. On peut aufli citer M. Ma-
zocchi 8c le Père de la Torré Somafque, qui fe
font fait connoître par leur érudition : Luc Jordan ,
Solimène 8c Salvator Rofa, trois des plus grands
peintres de l’Italie ; Fuga 8c Vauvitelli, architectes
du premier ordre. Le célèbre Chevalier Bernin
naquit aufli à Naples en 1598 , ainfi que Pergolèze.
Paterculus Caïus, d’autres difent Publius ou Marcus
, (Velleius, ) hiftorien latin , naquit, félon les
apparences, l’an de Rome 735* jjff 0CCUPa les eiP”
pjois qu’il pouvoit fe promettre par fes talens distingués
8c par fon illuftre naiffance. Il fut tribun
des foldats , commanda la cavalerie des légions
en Allemagne fous Tibère , fuivit ce prince pen-,
dant neuf ans d'ans toutes fes expéditions , en
reçut des récompenfes honorables, 8c devint pre-<
teur de Rome l’année de la mort d’Augufte. ^
Son ftyle enchanteur eft du beau langage^du fie-
cle d’Augufte. Il excelle fur-tout quand il blâme on
loue ceux dont il parle : c’eft toujours dans les plus
beaux termes 8c avec les expreflions les plus délicates.
On blâme néanmoins Velleius Paterculus , 8c
avec raifon , d’avoir proftitué fa plume aux
louanges d’un Tibère 8c d’un Séjan ; mais voila
ce qui doit toujours arriver aux écrivains qui
jj travailleront pour donner pendant leur vie l’hif-
toire des princes, ou de ceux de qui les fils régnent
encore. x , a
Stace, célèbre poète, ne 8c mort a Naples, tio-,
riffoit fous l’empereur Domitien.
Sannazar (J a cqu e s), né en 1458 , seft fait
un nom par fes poéiies latines 8c italiennes : il
a compofé en latin des élégies, des églogues ; 8c
un poème fur les couches de la fainte vierge,
qui eft eftimé malgré le mélange qui s’y trouve
des fiâions de la fable avec les myfteres de la
religion. Son Arcadie eft la plus célèbre de fes
pièces italiennes : les vers 8c la profe de cet ouvrage
plaifent parladélicateffe des expreflions, &
par la naïveté des images. Il mourut en 153O. Ses
oeuvres latines ont été publiées à Amfterdam en
16 8 9 ,8c plus complettement à Naples en 1718,