
154 L A !NT ajouter à cette obfervation que la côte orient
a le , depuis Agdé jufqu au Rhône , s’eft confi-
dérablement accrtié par le terrein que la mer y a
•ajouté en fe retirant. Les principales rivières qui
■ l’ar refont, font le Rhône , la Garonne , le Tarn,
l ’Ailier , & la Loire ; Touloufe en eft la capitale.
Je ne dirai qu’un mot des révolutions de cette
province, quoique fon hiftoire foit très - intéref-
fante ; mais elle a été faite dans le dernier fiècle
par Catel, & daiis celui-ci, par Dom Jofeph Vaif-
fe t , & Dom Claude V ie , en deux volumes in-fol.
dont le premier fut mis au jour à Paris en 1730,
& le fécond en 1733.
Le Languedoc en de plus grande étendue que
n’étoit la fécondé Narhonnoile; & les peuples
qui l’habitoient autrefois , s’a p p e l l o i e n t î ,
Vole a.
Les Romains conquirent cette province ; fous
le confulat de Quintus Fabius Maxim us, 63 6 ans
après la fondation de Rome. Mais: quand l.îempire
vint à s’affaifler fous Honorius , les Goths s’emparèrent
de ce pays , qui fut nommé Gothie, ou Sep-
timanie, dès le v e fiècle; & les Goths en jouirent
fous trente rois , pendant 300 ans.
La Gothie ou Septimanie, après la ruine des
Wifigoths, tomba fous la domination des Maures ,
Arabes ou Sarazins, Mahométans, comme on vou- ;
dra les appeller, qui venoient d’affervir prefque j
toute l’Efpagne. Fiers de leurs conquêtes , ils s’a- !
vancèrent jufqu’à Tours ; mais ils furent entièrement
défaits par Charles Martel, en 725. Cette'1
vi&oire fui vie des heureux fuccès de fon fils, fournit
la Septimanie à la puiffance-des rois de France.
Charlemagne y nomma dans les principales v illes,
des ducs , comtes ou marquis , titres qui ne défi-
gnoient que la qualité de chef ou de gouverneur.
Louis le Débonnaire continua l’établiflèment que
fon père avoit formé.
Les ducs de Septimanie régirent ce pays jufqu’en
9 3 6 , que Pons Raimond, comte de Touloufe ,
prit tantôt cette qualité, & tantôt celle de duc de
Narbonne ; enfin , Amaury de Montfort céda
cette province en 1223, à Louis V I I I , roi de
France. Cette ceffion lui fut confirmée par le traité
de 1228 ; énforte que fur la fin du même fiècle,
Philippe le Hardi prit poffeffion du comté de Touloufe
, & reçut le ferment des habitans, avec pro-
meffe de conferver les privilèges, ufages, libertés
, & coutumes des lieux.
On ne trouve point qu’on ait donné le nom de
Languedoc à cette province avant ce tems-là. On
appella d’abord Languedoc tous les pays où l’on
parloit la langue touloufaine, pays bien plus étendus
que la province de Languedoc ; caron compre-
noit dans les pays de Languedoc, la Guienne , le
Limoufin, & l’Auvergue. Ce nom de Languedoc
vient du mot oc, dont on fe fervoiç en ces pays-là
pour dire oui. C ’eft pour cette raifon qu’on avoit
divifé, dans le x iv e fiècle, toute la France en deux
L A N
langues ; la langue d'oui, dont Paris étoîtla pte-
miere ville ,. & la langue d'oc, dont Touloufe eto^t
la capitale. Le pays de cette langue cToc eft nommé
en latin dans les anciens monumens, pairia occi-
tania ; & dans d’autres vieux ades, la province de
Languedoc eft appelée lingua d'oc.
Il eft .vrai cependant qu’on.continua de là nommer
Septimanie, à caufe qu’elle comprenoit fept
cités ; favoir , Touloufe, Eeziers, Nifmes, Agde*
Maguelone aujourd’hui Montpellier, Lodève , &
Ufez.
\ Enfin, en 1361 le Languedçc fut expreffément
reuni à la couronne , par lettres-patentes du roi
Jean. Ainfi, le Languedoc appartient au roi de
France pai4 droit de conquête, par la ceffion d’A -
maury de Montfort en 1223. & car le traité de
11228.
Rien de plus varié que le fite de cette province;
il eft entremêlé de hauteurs & de plaines, de vallons
& de montagnes; le pays eft par-tout auffi
agréable à la vue qu’abondant en toutes fortes de
denrées. Les Cévennes font les .plus hautes & les-
plus efearpées de ces montagnes qui ne font fépa-
rées des Alpes & du Dauphiné que par le Rhône.
Elles traverfentleVivarais, leGévaudan, le Rouer-
g u e , les diocèfes d’A lby & .de Caftres,. pii elles
forment la montagne noire; de-là elles vont
fe rendre aux pieds des Pyrénées à travers le
pays de Foix. L’accès en étoit autrefois très-difficile
; mais depuis le commencement de ce fiècle
on y a pratiqué des chemins .qui ont été d’une
grande reffourceaux habitans. On ne doute point
que les Cévennes ne renferment des mines d’or ;
on en juge du moins par la rivière de Ceze, &
quelques torrens qui après- les grandes pluies, &
les fontes de neige, charrient des paillettes de ce
précieux métal.
Le Languedoc contient de très - belles forêts >
tant à l'ufage de la marine que pour les autres be~
foins. On trouve dans les Pyrénées & dans le Vi-
varais, au bois de Mercouire, de fuperbes fapins-
pour des mâts. Les Cévennes fournilfent une im-
menfe quantité de chênes. Enfin, le diocêfe de Mi-
repois & les environs d’Aigue-mortes font pour ainfi
dire couverts de bois de toute efpèce.
Dans le haut Languedoc le climat efi doux &
tempéré ; les pluies fréquentes, en tempérant les
chaleurs , contribuent à la fertilité de la terre. On
y recueille en abondance des grains & des fruits.
Le bas Languedoc efi plus aride & moins fertile *
quoique ce foit pourtant un bon pays. Le climat
fort chaud en été, efi fouvent très-froid en hiver ,
à caufe du voifinage des^nontaenes couvertes de
neige. Il femble qu’on n’y connoiffe niFautomne ni
le printems ; malgré cela l’air efi très-fain, excepté
cependant dans,^ quelques cantons voifins des marais
falans. Outre les legumes , les fruits de toutes
les efpèces, les plantes curieufes & médicinales
qui n’y abondent guères moins qu’en Provence,
on y recueille des yins excellens, tels que ceux de
LA N Prontignan, ds Lun'elS de Saim-Perny, de Cor-
m s ; de Langlade, de Saint.Gille, &c. On £ cultive
auffi une prodigieufe quantité de munefs
pour la nourriture des versa foie, & d oliviers ,
dont on tire année commune environ trois cents
mille quintaux d'huile, prefque égalé, pour la qualité
à celle de Provence. Parmi les produ&ons du
pays, ou diftingue, i° ,le paftel ou la guefde-glaf-
tum1 efpèce de plante qui donne une couleur bleue
auffi belle que durable ; quoique la découverte de
l’indigo ait nui beaucoup à cette branche de commerce,
cependant elle eft encore tres-conf.derable.
2°. Le falicot, petit arbriffeau rempli d un lue laie
mordant, dont on fe fert da'ns la fabrique du verre
& du favon. 3°. La morelle ou Tournefol . appelée
Ricinoïd' par les botaniftes, herbe recherchée
par les Hollandois, qu’ils emploient a la teinture
des toiles bleues & rouges , & pour colorer
leurs fromages. • I . .
Enfin , Cette province, produit jnfqua cent quatre
vingt plantes médicinales de toutes efpeces ,
que l’on trouve foit dans les Pyrénées, foit dans les
Cévennes v foit fur le bord delà mer.
Il y a dans ce pays des mines de ja y s, de
vitriol, d’antimoine, de bitume, de foufre, de
charbon de terre, de fe r , de plomb , d etain, ;
de cuivre , d’argent & d’or ; mais ces dernieres
font fi peu abondantes qu’on a cru devoir les
abandonner entièrement. Les carrières de pierre
& de plâtre y font par-tout fort communes, ce es
de marbre n’y font pas rares : les plus belles
font celles de Cofnes , au diocefe de Narbonne ,
qui donnent ce magnifique marbre a fond rouge-
V if, avec de grandes taChes blanches, connu tous
le nom de marbre de Languedoc, & qui eft dun
bon revenu pour la province. On trouve a Caltres
& dans d’autres endroits, des mines de turquoi-
fes ; peu inférieures à celles qui nous viennent
d’Orient. : , , ,
A Boutonnet, petit village près de Montpellier ,
oh remarque un rocher & une couche d environ
, trois toifes de profondeur, remplis de pétrifications
qui portent l’empreinte de Pre^ l\e,fous
les coquillages qu’on trouve dans la Médite r-
Stinnée. „ . r • t
De toutes les falines qui etoient autrefois le
long de la côte , on n’a confervé que celles de
Pécais, fituées près du Rhône , celles de Peiriac,
de Mardirac & do Sigean, dans le diocéfe de
Narbonne. Ces trois dernieres donnent un fol 1
affez b on , mais qui a beaucoup moins de force
■ que celui de Pécais. On en tranfporte dans les
provinces'voifines;, dans la Suiffe & même dans
; la Savoie. ! -
Il n’eft guères dé pays en France plus riche
en eaux minérales que le Languedoc. Les principales
font celles de Maine, de V als, de Lodeve »
de Camarès , de Gabian , d’Olargues , de la
Baftide, dé Pômeiroux, de Vendres , de Guih
lâret, de C am p agn ed e Rennes, de Maillât, de
L A N 1 5 s
Saint Laurent d’Youfet, de Peyret, de Montfrin,.
de Balarue , d’Ala is , de Saint-George , de Ser-
v a s , &c.
On voit près de Narbonne, cinq abîmes nommés
oeliels, d’une profondeur extraordinaire &
fort poiflbnneux. La terre qui les environne
tremble fous les pas de ceux qui ont la curieufe
hardiefie de les obferver: néanmoins les payfans
des environs y pêchent fouvent. Les bouillons des
eaux de ces abîmes forment un canal qui fe
joint à celui de la Robine.
Près du village de Pérouls , ou Peirolt, à une
lieue f. e. de Montpellier, on trouve un creux
appelé Boulidou, formé par la nature , ou l’eau
qui s’y ramafle bouillonne continuellement, fans
cependant rien perdre de fa fraîcheur primitive.
Ce creux n’eft ordinairement plein qu’en hiver
pendant les pluies; dans le^ temps des grandes
chaleurs de l’é té , il eft entièrement à fec ; mais
fi l’on y jeté- alors de l’eau de fontaine, elle
bout fur le champ.
NonHoin de Boulidou, au village même de
Peyrolt , on remarque un puits fingulier d’environ
17 pieds de profondeur, & conftruit depuis
plufieurs années. Il ne reçoit fon eau d’aucune
fource vifible , mais peut-être par la pluie, ou
par filtration, ou par forgent. On boit de l’eau
de ce puits fans nulle incommodité. Mais quand
il eft à fée , ce qui arrive pendant l’é té , il s’en
élève une vapeur méphitique , qui eft mortelle
pour les hommes comme pour les animaux. On
voit les chiens tomber dans l’inftant en convul-
fion , & perdre bientôt la vie , . f i on ne les retire
promptement. Cette vapeur éteint auffi la flamme
qu’on en approche.
Il y a au diocéfe de Mirepoix une fontaine
célèbre, appelée Fontejlorbes, ou fontaine interrompue,
q u i, après avoir coulé pehdant 9 à i O
mois de l ’année avec une extrême abondance,
•ne coule plus que par intervalle , depuis la fin
d’août jufquau commencement de novembre. On
croit que la caufe de ce phénomène eft de ce
qu’après les grandes chaleurs de l’é t é l a plupart
des récipiens d’eaux fouterraines font épuifés. Au
diocéfe de Nifmes, entre Sauve & Quiflàc, on
voit une autre fontaine périodique du même
genre. •
On ramafle fouvent de petites perles fines dans
les rivières de Fraiffinet & de Plantats, dans le
Gévaudan. Il croît dans les bruyères du bas-
Languedoc, & for-tout vers le bois de Gram-
mont , une efpèce de chêne v e rd , de la hauteur
d’un arbriffeau , for lequel on trouve un petit
infefre nommé Kermès ou vermillon: il eft couleur
de brique, & de là groffeur d’un petit pois.^ Il
fert à faire une confeâion appelée Alkermès,
& on s’en fert pour teindre en écarlate.
Nous ne devons pas oublier de parler de^ ce
fameux canal qui jqintla Méditerraneée à.l'Océan.
Il a été conftruit par ordre de Louis XIV en
V ii