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 ou  le matin  ,  fixoient  cette  importante  
 époque  de la fécondité rendue  à  la Nature. 
  Telleétoit., par exemple,  la  chèvre  
 Amalthéè,  dont la corne s’appela corne  
 d’abondance,  et  qui  se  trouvoit  placée  
 sur  le  point  équinoxial,  ou  sur  le  taureau  
 ,  lequel  répon doit à l ’équinoxe  de  
 printemps.  Telles sont aussi les Pléiades,  
 qui  sont  sur  la  croupe  de  ce meme  taureau  
 ,  et  qui  furent  long-temps  l'indication  
 des  saisons,  et durent  en  conséquence  
 entrer  sons  différens  noms  et  
 sons  diverses  formes  dans  une  infinité  
 de  fables.  Aussi  la  cosmogonie  des  Atlantes  
 ( 1 )  suppose-t-elle ,  qu’elles  ont  
 donné  naissance  à  la  plupart des héros  
 connus  dans  les  fables  de  la  Grèce.  
 L ’utilité dont elles ont été aux hommes,  
 dit  Théon  (a),  leur  a  acquis  la  plus  
 grande  célébrité  dans  toute  l’antiquité.  
 Elles  doivent  donc  y  jouer  un  grand  
 rôle.  Elles  régloient  le calendrier au  laboureur, 
   comme  on  peut  le  voir  dans  
 Hesiode  (3) ,  qui  en  fixe  les principaux  
 travaux  à  leur lever  et  à leur  coucher.  
 Aussi l’Osiris Egyptien, dont le taureau,  
 qui porte les  Pléiades,  est  l’image, pas-  
 soit-il  pour  l’inventeur du  labourage. 
 Cette année équinoxiale,  que je pour-  
 rois  appeler  l’année  de  la  terre  et  du  
 cultivateur,  étoit  celle,qu’avoient  les  
 Romains, avant que Numa, qui réforma  
 leur  calendrier  et  leur  religion  ,  eût  
 reporté le commenceraient de leur année  
 à  l’époque  du  terme  du  décroissement  
 des  jours  et  de  la  renaissance  de  la  
 lumière,  afin  de mieux  atteindre  le but  
 religieux ,  qu’il  se  proposoît  dans  tout  
 son  système  politique.  Le  calendrier  
 Romain  et  le  cérémonial  religieux  çnt  
 conservé  des  traces  de  cette  ancienne  
 année,  dont  le  commencement  se fai-  
 soit  sous le  bélier ,  signe  consacré  à la  
 planète  de Mars.  Le nom  de Quintilis,  
 ou  de  cinquième mois,  donne au mois  
 qu’on  appela depuis Juillet,  à  cause de 
 (0  Diôd. Sic. 1.  3 , c.  56. 
 (-)  Theon- ad Arat. Phæn. p.  13.3. 
 (3)  Hesiod. Opéra 6c Dies. v.  381. 
 Jules-César  ;  celui  de  Se^tilis  ou  de  
 sixième, donné  au mois suivant,  qu’on  
 appela  mois  cl’Augùste  ou  d’A oût,  les  
 noms de Septembre ou de septième mois,  
 &c.  donnés aux mois  suivans,  prouvent  
 que Mars  ,  ou que le mois qui répond au  
 signe  de l’équinoxe  de printemps,  étoit  
 autrefois  le  premier  mois  de  l’année.  
 La  cérémonie  du  feu  nouveau  allumé  
 dans  le  temple  de  Vesta,  le  renouvellement  
 des  lauriers  consacrés  à  Apollon  
 ,  les  fêtes  religieuses  en  honneur  
 d’Anna-Perenna,  ou  du temps  éternellement  
 renouvelé  ,  qui  avoient  lieu  
 pendant  ce mois, sont encore une  nouvelle  
 preuve  de  cet  ancien  com tnence-  
 ment  d’année,  qui  avoit  autrefois  lieu  
 au  printemps (4). 
 Voilà donc  deux  époques différentes  
 du  mouvement  du  soleil,  auxquelles ,  
 chez  le  même  peuple,  on  a  fixé, le  
 commencement  de  l ’année.  C’est  une  
 considération  à  laquelle  il  faudra avoir  
 égard dans l’explication  des  fables  religieuses  
 et  des  monumens  du  culte  des  
 Romain s ,  et en  général  des  peuples qui  
 ont  changé  leur  commencement  d’année., 
  CeS  ehangemens  ont  eu .souvent  
 lieu,, et  nous-mêmes  avions  encore  le  
 commencement de la nôtre à l’équinoxe  
 de  printemps,  jusqu’au règne  de Charles  
 IX ,  qui  le  transporta  au  solstice  
 d’hiver ,  huit  jours  après  celui où l’on  
 célébroitie natalis salis, ou la naissance  
 du Dieu  principe  de  toute lumière. 
 Les  Perses  commencent  aussi  leur  
 année  sous  le  signe  de  l’agneau  du  
 printemps (5)., et c’est à l’entrée du  soleil  
 dans  ce  signe,  qu’ils  célèbrent  leur  
 grande fête du  Neurouz,  ou  du  nouvel  
 an,  au  lever  de  la  constellation  , de  
 Persée ,  dont  ils  se  disent  issus  (6),  
 de  ce  Persée  ,  qui  le  premier  fit  descendre  
 sur  la  terre  le  feu  céleste  qui  
 fut  consacré  dans  leurs  temples.  Cette  
 fjetion  contient  une  allusion  manifeste 
 (4)  Macrob.  Satuur. 1. t , c.  ta. 
 (5)  Hyd. de Vet. Pers.  c.  15. 
 (6}  Cedreir.  c.  1  , p. 23, 
 à ce qu’éprouve  la terre à  cette  époque,  
 pur  l'action  puissante  du  soleil  ,  qui  
 vient  la  réchauffer,  et rallumer le flam-  
 [ beau de la Nature,  que l’automne avoit  
 éteint. Touteslescéréinoniesreligieuses  
 qui  se  font  à  cette  époque,  ont  pour  
 but  de  rappeler  aux  hommes  Je  renouvellement  
 ae  la  Nature,  et  le  triomphe  
 ; d’Ormusd  ( 1 ) ,  ou  du  Dieu-lumière  sur  
 les  ténèbres  ,  ou  sur  Ahriinan  leur  
 chef.  Nos  cérémonies  de  la  Pâque,  ou  
 :  de  la  fête  du  passage  du  soleil  sous  le  
 même  signe  de l’agneau équinoxial,  en  
 sontunecopie, et n’ontpasd’autre objet. 
 Le  législateur  des  Juifs  fixa  aussi  au  
 mois  Nisan ,  qui répond  au  signe équinoxial  
 de printemps, le commencement  
 ; de  l’année  Judaïque  ,  en  mémoire  du  
 renouvellement  de  la  Nature,  après  
 qu’elle eut été dévastée par un prétendu  
 déluge ,  que  nous  ferons  voir  ailleurs  
 11’être  qu’une  fiction  cosmogonique.  
 C’étoit aussi à cette époque, qu’ils avoient  
 , été  tirés  de  la  terre  malheureuse,  où  
 ils  vivoient  sous  l ’oppression,  et  que,  
 par l’immolation d el’agneau,  ilsalloient  
 passer  à  une  terre  délicieuse,  et  à  un  
 état  plus  heureux.  L ’agneau  céleste  est  
 toujours  le  grand  héros  de  tontes  les  
 fables faites sur le passage des ténèbres de  
 l'hiver,  et  des  maux  qu’il  traîne  à  sa  
 suite ,  aux  délices  du  Printemps.  C’est  
 ainsi  que  Bacchus et son  armée,  après  
 de  longs  voyages  dans  des  déserts  brû-  
 lans  , avoient  été  conduits par  ce  bélier  
 dans des prairies agréables, et  aux sources  
 qui  arrosoient  le temple de  Jupiter-  
 Aramon.  Pour  des Arabes  et  des Ethiopiens, 
  dont Bacchus  étoitla grande divinité  
 , une terre entre-coupée de ruisseaux  
 etoit  une  terre  promise ,  et  un  séjour  
 délicieux.  Chacun  peint  Je  bonheur  à  
 sa.manière  5  mais  dans  quelque  chose  
 qu on l’ait placé, quelque idée  différente  
 que  les  différens  peuples  s’en  soient  
 faite, c’étoit  toujours  à  l’agneau ou  au  
 belier  ,  signe  sous  lequel  la  Nature  
 se régénéroit  au  printemps,  qu’ils 
 1 attribuoient.  Le taureau avant lui avoit  
 joui  de  cette  prérogative, comme  nous  
 l’avons  déjà remarqué.  Ces  deux  signes  
 équinoxiaux ont été les sources fécondes  
 des  biens,  que  le  bon  principe  versoit  
 sur l’homme ,  et qui découloient du ciel  
 sur  la  terre.  Nous  ferons  voir  ailleurs ,  
 par une conséquence nécessaire de cette  
 théorie,  que les signes d’automne furent  
 sources  de maux  et  causes d’effets  contraires. 
 Par  la même  raison ,  le  soleil  ou  ses  
 images,  à  l’époque  du  printemps,  porteront  
 les .caractères,de virilité les mieux  
 prononcés, et là sera fixée là célébration  
 ües  fêtes Ithyplialliques. Ainsi Apis  ,  ou  
 le taureau vivant, qui représentait Osiris,  
 ou  le  soleil  placé  au  taureau  céleste  ,  
 aura  toutes  les  marques  de  la  faculté  
 génératrice,  et les parties  sexuelles hors  
 des .mesures  ordinaires.  Ainsi  Pan ,■ ou  
 le  Dieu  qui empruntoit  les  attributs  de  
 la  chèvre  et  des  chevreaux  placés  sur  
 le  taureau ,  déploiera  tous  les • organes  
 de  la  virilité  la  plus  vigoureuse,  et recevra  
 leé hommages des  femmes à Men-  
 dès, comme la chèvre céleste les recevoit  
 en Grèce chez les Phliassiens,  et à Rome  
 dans  les  temples  de  Fàtua  ,  ou  de  la  
 Bonne-Déesse, au premier mai,  au lever  
 même  de  cette  constellation. 
 Toutes  les  fois  que  les  fêtes  ou  Ie3  
 images des divinités .retraceront quelque  
 chose  d’obscène en apparence ,  c’est  au  
 printemps  qu’il  faut  se  reporter.  C’est  
 au  printemps ,  qu’Osiris  fécondoit  la  
 lune ,  suivant  Plutarque  (2) ;  et  c’est  
 au  printemps, que l’Ange  Gabriel vient  
 féconder la mère de Christ,  au moment  
 où  Virgile  chante  l’union  de  l'Ether  ,  
 ou  du  Dieu  puissant  qui  meut  la. Nature  
 ,  avec la terre ,  ou avec Cérès,  dont  
 la  vierge  de nos  constellations  porte  le  
 nom ,  et  qui  fixoit  cette  époque  par  
 son  lever  du  soir.  La  terre  amoureuse  
 alors  demande au, ciel  ,  dit  Virgile  (3) ,  
 la  semence  qui  doit  la  féconder. 
 (')  Hyd.  de  Vet.  Pers.  Relig.  c.  19.  (3)  Virg.  Georg.  1.  2 ,  y .  334. 
 (*)  Plut,  de  Isid.  p.  368.