d’idoles , ni d’images pour représenter
la Divinité sous aucune figure, soit
d’hommes, soit d’animaux ; mais Jes
Orientaux dans' la suite introduisirent
chez eux cet üsage. (1) Ils croyoient,
dit Tacite, qu’il, étoit indigne de la
majesté des Dieux, de les renfermer
dans l’étroite enceinte d’un temple,. et
de leur composer une image d’après
lés traits de foibles. mortéls. (if)' Cette'
idée dés Germaihb est absblumerit la
même : cjù’Héfodcite attribué Perses,
comme nous! venons de le voir. Les
mages proscri voient toute espèce d’image
et de statues, suivant Lactâncé (3), et n’a-
voient qu’un sëdl symbole de la divinité;’
qui était leur feu sacré; ; iis se tournoient
vers l ’Orient, pdur :adbrer la divinité ,
parce que c’est de qé côté-là que ment
la lumière , et que les astres commencent
à paroître (4)- ■
Arrien assure que les anciens Indiens
vi voient, comme tous les peuplés Nomades,
n’ayant ni villes, nitémpies. (5) Les'
Romains furent près de cent soixante dix
ans , sans avoir âdcunè statue, ni Aucune
image de leurs Dieux. (6) C’est cé
qu’attestent Varron, Augustin, Clément
d'Alexandrie,' et Eusèbe. Varron attribue
même à cette invention moderne'
d’images , et de simulacres dés Dieux ,
la dégradationfte la religion, plus respeb-’
table et plus majestueuse aux yeux dés
peuples dans'son ancienne simplicité. Il
cite l’exemplé dés Juifs qui ont conservé
leur religion dans sa pureté primitive en
proscrivant absolument le culte des
statués et des imdgës de là Divinité.
C’est une justice que leur rend aussi
Tacite, qui oppose le culte simple des
Juifs au culte Egyptien plus composé ,
et revêtu de toutes les formes symbo- 1
(1) Peloutier, p- 163.
(2) Tacit. de Morib. German. c. 9.
, (3) Lactanc. proem. p. 5.
liques les plus savantes. (7) Plutarque
dansla vie de Numa, parle des ordonnances
(4) Beausobr. Hist. Manich- t. 1 ,p. 165.
(5) Àrri. de Reb. Ind. p. 173.
(6) August, de Civ. T)’ei, 1. 4, c. 31.
(7) Tacit. Histor. 1. 5 , c. 5.
(8) Plut, in Vit. Nuna.
que fit ce princç contre le culte
des images et des statues; pensant que
c’étoit un sacrilège de-représenter par
• des choses périssables et terrestres, <Se
qui est éternel et divin. (8) Tertullien
dans son apologétique va plus loin ; il
prétend que Nuifiame vouloit pas• même
de temple. (9) L ’établissement du temple
de Janus dément cette opinion. Quelques
Uns attribuent Cette prohibition à
l’esprit de la secte pythagoricienne, à
laquelle étoit attaché Numa; d’âutrës
peuvent y voir aussi l’ancienne simplicité’
du culte qui ne s’altéra jamais que lorsque
les peuples devinrent riches et policés,
ou eurent communication avec ceux qui
l’étoient.
Clément d’Alexandrie(io) croit que Numa
étoit un Spiritualiste comme Moïse,-
(11) ét que comme lui il pen soit que la Di-
vinité ne devoit être aperçue que par la
raison. (12) Il est certain que le législateur
des Juifs Croit, comme les Perses, (13)
que C’étoit outrager la divinité, que de
vouloir la représenter ou la circonscrire ;
opinion qui étoitaussi celle des Germains;
Eh ! quelle demeure pouvez - VOUS me
construire, dit Dieu, dans ïsaïfe? ( 14)
le ciel n’est-il pas mon trône, et la terre
mon marChe-pied ?' Quel édifice 1 iâtirai-je
pour vous, lui dit Salomon, pour vous
que le ciel lui-même ne peut contenir ? Ils
pensoient comme Platon, que le monde
est -lé véritable temple de là divinité (V5):
Cette grande iiléè des' Spùifuahsteà
vient de l’opinion même bfi étaient'tans
les matérialistëà, qifé lfe nirrnde ét la
divinité, ne sont tpibinè Seule et même
chose; que l’Univers est le Dion qu’on
doit adorer, et le seul temple qui Soit
(9) Tenu!!. Apolog.
(xo) Clement. Alex, Strom. 1. 1 , p. 304.
Euseb. J,, 9 , c. 6, p. 410.
(11) Clement. Strom. 1. 5, p. 5^4-
(13) Herod-. in Clio. c. 13.
(i'4) Ieaie. c. 66.
(13 ) Clem. Alex. Ibid. Strotn. !. 5, P- 5^4- Procl.
Comm. in Tim. p. 38.
égal à la divinité. On peut distinguer
plusieurs j causes, qui font qu’on ne
trouve chez certains peuples, ni temples
ni images. La première et la plus générale,
est tirée du genre de vie même des
peuples, et de leur peu de civilisation.
Celui qui n’a ni villes, ni maisons,
mais qui habite sous des tentes, ou
dans; les forêts, ne bâtit pas plus d’édifices
pour les Dieux, qu’il n’en bâtit
pour lui-même ; celui qui n’a point de
sculpture ni de peinture, ni aucun art
par lequel on représente soit les hommes,
soit les animaux, n’a .point non plus
d’images des Dieux, sur-tout n’en sentant
point le besoin,- puisqu’il peut les
voir et les admirer tous les jours dans la
réalité, à l’aide du spectacle brillant
que la Nature étale par-tout sous ses
yeux. I
Cet état a été originairement celui de
tout l’Univers (i) ; il est encore aujourd’hui
celui de presque toutes les nations
sauvages, suivant qu’elles ont plus ou
moins communique avec les peuples
civilisés. Les Caraïbes, les Indiens de
Tierra-Firme, les peuples du Brésil,
étoient dans ce cas-là. On ne leur
connoissoit ni temple, ni monument
religieux en honneur d’aucune divinité;
(a) ils levaient seulement leurs mains
vers le soleil, et vers la lune. Dans
une des Philippines on ne trouve d’autre
culte religieux que des mains jointes,
des yeux élevés vers le ciel. (3): Les
adorateurs du soleil lui sacrifient un
porc. Les prêtresses font plusieurs 'révérences
au soleil ; elles dansent ensuite
au son <lu chalumeau, et prononcent
quelques paroles en honneur de l’astre
révéré. Les Macassarois, ou les habitons
de l’île de Célèbes adoroient le
soleil, la lune et les astres, et n’avoient
aucun temple, ni aucuns prêtres ; (4) ils
pretendoient que c’eût été faire injure
(1) Euseb. præp. Ev. I. 1 , c. 9.
(1) Contant d’Orvill. t. 3., p. 7 1 ,1 5 1 , 389.
(3) Idem, t. a , p. 370..
(4) Id. 1 . 1 , p. 351.
à leurs Dieux, que de. .leur élever des
bâtimens fragiles, et. que la terre ne
produisoit point de matière assez purç
pour composer leur demeuré ; c’est pou?
cela que les sacrifices solemnels étoient
toujours faits dans la place publique,
et ceux des particuliers, devant la porte
des- maisons.
L.’ancienne religion des Chinois, dit
l ’auteur des recherches sur les Egyptiens
et sur les Chinois, (5) consistait principalement
dans des sacrifices qu’on offroit
sur des montagnes, où les empereurs
se rendoient avec le grand-prêtre. On
montre dans la province de Chan-Tong,
une montagne appelée Taï-chan ; on
sait par la tradition et par l ’histoire,
que c’est sur cette montagne que l’on
a long-temps Sacrifié.
Il est assez naturel, continue M. de
Paw, qu’on ait choisi ces asyles pour
y implorer le ciel de plus près, et pour
offrir des victimes au ciel visible; car,
l’invocation des génies est postérieure
au culte des astres et du firmament.
Les montagnes recevoient les premiers
et les; derniers rayons du Dieu de la
lumière , et. conséquemment étoient le»
lieux les plus favorables pour lui rendre
des hommages à son lever et à son
coucher.. Qui ne donneroit pas, dit le
Sophiste Alexandre, toute préférence à
des lieux où la lumière prolonge plus
qu’ailleurs la durée de son empire ? (6)
Appollonius deTyane, dans le discours
qu’il adresse aux Gyinnosophistes,
leur dit que les Bracbmanes qui habitent
sur les montagnes, (7) adorent le soleil
dans le lieu qui lui est le plus agréable, et
où il se plaît davantage; que le soleil
toujours voyageant dans, les ans, voit
avec plaisir ceux qui , pouf l’adorer,
s’approchent de son séjour, et semblent
comme lui habiter le haut des airs.
Aussi étoit-ce sur le sommet d’une haute
(5) Recherches sur les Egypt. & sur les Chin.
par M. Paw. t. 2, p. 206.
(6) Philostr. in Vie. Sophist. p. 573. in Alexandre.
(7) Philo&tr. !.. 6, c. 6-