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assez long espace de chemin parterre,
ils l’avôient mis sur un autre fleuve ,
qui «voit son embouchure dans l'Océan ;
et que, passant par.le nord et gagnant
le couchant , de manière ,à avoir le
continent à leur gauche , ils étaient
rentrés dans.la 'Méditerranée par le dé-,
troit de Cadix. Ils cri donnent pour preuve
la vénération que les Celfes.ont pour
les Dioscures. ,
C’eçt même une ancienne tradition
chez eux, que iCes Dieux étoient abordés
dans leur pays, du côté de l’Océan.,
parce que dans les , pays voisins de
l ’Océan, on retrouve les noms des
Dioscures et de plusieurs Argonautes;
parce qu’enfin, on trouve sur le continent,
près de Cadix, des traces de leur
retour. En effet, en passant près des
côtes de Toscane, ils abordèrent à
l ’île d’ëEthalie , et y creusèrent un Port
du nom d'Argo ; nom qu’il conserve
encore aujourd’hui. Il y à encore, à
quatre-vingt stades de llome , un port
d’Etrurie , appelé le port de Télainon.
Près Formies en Italie étoit le Port
d’Aëtès, aujourd’hui le Port de Cajète.
On ajoute ., que portés par la tempête
sur les Syrtes , ils ayoient appris de
Triton, roi de Libye, à conncître la
nature de cette mer, et à en éviter les
écueils. En conséquence, ils lui firent
présent d’un Trépied, sur lequel étoient
gravés d’anciens caractères , et qui existait
il n’y a pas encore long-temps ,
chez les Hespérides. D’autres Poètes ,
que réfu te Dioaore , prétendoient que les
Argonautes étoient entrés par l’embouchure
duDanube, qu’ils avoient remonté
jusqu’à sa source ; et avoient passé delà
dans,un autre fleuve, par lequel ils
étoient descendus dans la mer Adriatique
, où le nom d’Absyrthe et des
Argonautes est célèbre. Ici finit le récit
de Diodore de Sicile.
On a dû remarquer, dans cette nar-
ràison , qu’outre l ’expédition des Argonautes
, l’Historien à rassemblé toutes
les traditions Episodiques et Drârna,
tiques, répandues en Grèce sur Jason
et sur Médée. Il n’en est pas de même
du Poeme des Argon au liques , connu
sous le nom d'Argonautiques d ’Oi'pkée
dont nous venons de donner l’analyse.
L ’Auteur de cet Ouvrage n’a traité que
Içl seule conquête de la Toison-d’or,
avec le départ, le voyage et le retour
des Argonautes. Cet objet, une;.fois
rempli, le Poète abandonne Jason et
Médée, à leur arrivée de Thessalie, et
ne s’occupe plus des événemens , qui
ont suivi ce retour. Il y a dans le
Poème une action unique; savoir, la
conquête de la Toison-J’or par Jason,
aidé des secours de Médée, et la défaite
du fameux Dragon et des Taureaux,
qui gardoient ce dépôt. Le voyage
et le retour sont subordonnés à ce but
principal, et leurs circonstances ne
sont que les accessoires de l’action
unique , la conquête de la Toison-
d’or. Les circonstances varient dans
les deux récits (/•). Le retour dés-Argonautes
, dans Diodore ( 1 ) , se fait à-
peu-près parla même route, qu’ils ont
tenue pour aller. Ils ont parti d’Iolcos
pour se rendre à Sainothrace, de là
clans la Troade, où Hercule délivre
HésionS ; de-làen Thrnce, dans le pars
où régnoit Phinée ; puis ils font voile
vers le Pont. C’est à-peu-.près la même
route qu’ils tiennent à leur retour,
comme on l’a vu.
Dans le récit d’Orphée , . la route
pour aller en Colchide est, à quelques
détails près, la même. Mais le retour
est bien différent, puisqu’ils reviennent
par le Nord. De - là ils passent
dans l’Océan ; puis ils reviennent
dans la Méditerranée etc. Des îles de
Corfou et du Cap Malée , ils retournent
à Iolcos. Ces différences viennent de
ce que ce n’est point une Histoire,
mais un Roman, où chacun a eu la
liberté de tracer la route, qu’il a voulu
faire tenir au vaisseau, qui porta Jason
(1) Eiod. c. 171, 172, 173, p. 28S, 287, 288.
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,1'Iolcos en Colchide, «t qui le.ramena
, ü.suite chez Pélias à ïêflcosUjAu reste;
piodore convient, quil y avoit'bien des
manières de conter ce fameux voyagé,
et qu’il existait de grandes discordances
entre tous les récits qu’on faisoit du
voyage de Jason, et des aventures de
Medée, qui fournissoient le sujet de plusieurs
Pièces tragiques; et i l ‘Convient,
que dans toutes les anciennes Fables (1),
011 ne peut se flatter de trouver cette
concordance, qui ramène tous les' faits
à l’unité simple, qui caractérise la vérité.
Ainsi, d it - il, on ne doit pas
s'étonner, que souvent nous Soyons en
contradiction avec les récits de certains
Historiens et de certains PoêtéS. Il setoit
trop long et en même-temps très-inutile
, ajoute Diodore, de rapporter ici les
différentes histoires, qu’ont débitées sur
Médée une foule d’écrivains. Nous nous
bornerons seulement à quelques vraiantes
du récit de l’expédition des Argonautes.
L’Auteur parle ensuite d’un retour par
le Nord , et par l’Océan, à-peu-près
tel que celui qui est décrit dans le
poème d’Orphée (2). Il suppose, que les
Argonautes , apres avoir enlevé la
Toison, remontèrent le Tanaïs jusqu’à
sa source , et par le moyen d’un autre
fleuve avoient été conduits dans l’Océan
ou dans la mer du Nord ; qu’ils ayoient
regagné le couchant ou l’Océan Atlan-
tique, et étoient revenus par le détroit
de Cadix, dans la mer Méditerranée.
Il en apporte des preuves , tirées des
dénominations que gardent encore les
lieux , par où les Argonautes ont passé,
et qui appartiennent aux noms, soit
du vaisseau Argo, soit à ceux de plusieurs
des Héros de cette expédition.
U les fait même toucher les Syrtes de
Libye, contre lesquels la tempête les
porte, comme Virgile suppose que les
1) D io d .l.4 ,c . 180, p. *99; c. 172, p. 288.
2) Diod. I. 4 , c. 180, p. 300.
(3) Ibid. c. 181. p. 3C0.
(4) Apollon. 1. 4 , v. 290 , 315—470—
î°7- I
. (5) V. 598.
Troycns y furent portés en sortant de
Sicile' (-3 ).
D’autres Auteurs ne. leur faisoiént
pas prendre un si long détour ; mais
simplement remonter Te Danube jusqu’à
sa source, et de-là se rendre dans
la mer Adriatique,par une autreIbranché
de ce fleuve.
‘ .Cette dernière marche est presque celle
que leur trace Apollonius, qui d’ailleurs
semble n’avoir fait en grande partie ,
‘qu’amplifier le Poème d’Orphée, à quelques,
circonstances près, telles que celles
de la mortcd'Absyrthe, ou du Cocher
céleste , tué par-; Jason if près des îles
Electrldes, et des bords de l’Eridan (4) ;
circonstance qui prouve , que la mort
de Pliaéton et celle d’Absyrthe sont
une même Fable, reproduite sous des
noms différens ( s ). Du reste, Apollonius
fait, comme Orphée , voyager les
Argonautes par les côtes de Toscane,
par la Sicile, par les embouchures du
g, près. deâJieqx , dit le Poète , où
Phaéton fut foudroyé ( 5) ; et où pleurent
les Héliades, dont les larmes se changent
en ambre (6 ). Ils passent aussi près
des Bouches du Rhône , et des côtes
de Ligurie (7 ) , par l’île de Circé (8) ,
dans l’île des Phéaciens ( 9 ). Enfin ,
Apollonius leur fait lever toute la
carte , dont Orphée , dans ses Argo-
nautiques, avoit tracé le plan pour le
retour des Argonautes (10). Il ajoute
seulement une circonstance; c’est celle
de la tempête, dont sont accueillis près
du Peloponèse les Argonautes, et qui
les pousse sur les sables de Libye (11),
conformément à un des récits , dont
nous a parlé Diodore. Ce morceau
forme un assez long épisode, qu’Apol-
lonius ajoute au récit d’Orphée , pour
rendre son Poème plus intéressant.
Cette digression finie, le Poète nous
(6) V. 60;.
(7) V. 626.
(8) V. 647.
(9) V- 690.
(10) Y. 770.
(11) y . 1*35.