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de la course du soleil, qu’avoit autrefois
occupé le lion. La voix de ces
ânes (1) avoit effrayé et mis en fuite
les géaris, ou les suppôts du pririoipe
des .ténèbres , devant les Satyres et les
Silènes, compagnons de Bacchus, qui
les montoit. Autrefois ces mêmes
Géants avoient fui devant. Bacchus
métamorphosé en lion , repoussant
avec ses griffes et ses dents terribles le
fameux Rhoeïus , qui, avec les autres
Géants, avoit voulu escalader le palais
de Jüpiter,' ou du Dieu; qui distribue
la lumière fa). On sent bieny que cf’test
la même fable , faite à deux époques
différentes, sur le triomphe solstitial du
soleil, qui eut lieu Spù'S-le lionj ancien
trône d’Orus (3)-,et ensuite sous le Cancer
, où étoit Mùé' ÿ qtàié monte Bao-
clius dans le triomphe du soleil sur les
ténèbres, figuréespar les GéâiitS, comme
nous aurons occasion de le démpntrèr
ailleurs.
Nos principes sont absolument d’accord
avec ceux de la théologie ancienne
consignés dans les vers d’Orphée , et
dans ceux de l’oracle de Çlarûts , que
nous a conservés Macrobe (4). Lé soleil
y prend successivement les noms et les
attributs du jeune enfant des mystères';
d’Iao , de Bacchus , de Jupiter et de
Pluton , suivant les différentes saisons
dans lesquelles on le considère.
On voit par-là comment le seul Dieü-
Soleil a donné naissance' à plusieurs
divinités en apparence différentes, mais
qu’on peut rappeler à une seule, par
le moyen' de l’Astronomie et des considérations
tirées des diverses époques
de son mouvement annuel y et du mouvement
des fixes ou de préeessiqn. Ce
qui justifie Macrobe, Martianus-Capèlla,
et tous ceux qui „ analysant le système
religieux des anciens, ont cru trouver
dans le soleil l’origine du culte de'différées
Dieux, comme nous l’avons déjà
observé plus haut.
(0 Hyg'i- >•2-
(i) Horat. 1. 2, od, io, vt a»;
Nous aurons occasion bientôt de parler
d’une autre origine des at|Ébuts des
différentes images du soleil, urée des
-Constellations, qui,, par leur lever ou
leur coucher ; fixoient le départ de Lan-
née, et le commencement de ses quatre
principales divisions..Nous nous bornons
Ici-à parler des signes , dans lesquels il
■ se tfoïtfyoit au commencement de chaque
saison , sans’ qu’il soit encore question
des constellations prises hors leZodiaque,
■OU hors ce': cercle oblique ,. qu Ocellns
dit être aussi une causé de génération.
" Si l ’espoir -du retour, du. -soleil vers
nos’régions; 'si les. premiers- progrès
d'accroissement: dans la: durée''du jour,
qui depuis six mois [avoit déerû et menacé
les hommes d’une nuit éternelle^ donnèrent
naissance à des fêtés de joie , et
fournirent une époque de son monte-
mentnsséz frappante ,tpour que plusieurs
peuples aient cru devoir y: fixer le commencement
de la révolution annuelle
de l’astre du jour , le moment où ls
soleil arrivoit dans:notre hémisphère,
après avoir repassé la ligne, qui nous
sépare de l’hémisphère opposé , et ou
le jour étoit' assez accru pour reprendre
son empire sur les.'nuits , dont il s»nr-
passoit la durée , n’a pas paru moins
intéressant à d’autres peuples. Ils y virent
alors réaliser un bienfait qui, au solstice
d’hiver , n’étoit encore que l’objet de
leurs voeux et dè leurs espérances. La
Nature à ■ cette: époque , régénérée pat
l’action créatrice du soleif > et Par a
réproduction de tout ce que l’automne
et l’hiver avoient détruit, offrit aux
hommes le spectacle d’im nouvel ordre
de choses, et ils crurent- pouvoir attacher
le commencenjent de leur année
solaire au point où répondoit le: soleil
tous les ans | lorsque la terre prenoit
une face nouvelle , et lorsque , fécondée
par- l’action du. feu -Ether., elle: faiioit
éclorre de son sein tous les germes._
Cette nouvelle - année afembloif ïeaa
(3) Hor. Apôll. 1. r', c."r
(4) Maçrob- Sat. 'u '1 ,‘c.'àas
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plus particulièrement à la terre et aux
besoin&|!|:r laboureur et du navigateur ;
au lieu que celle qui commeuçoit au
solstice d’hiver paroissoit, comme l’observe
très-bien Julien, n’avoir pour objet
que le "Dieu-Soleil et sa lumière. Ic i,
au contraire-, le soleil et l ’homme entraient
en calcul dans cette fixation ,
puisque l’un reprenoit son empire- Sur
les ténèbres, et exerçoit sa plus 'grande
puissance , qui réside dans l’action
créatrice , et que l’autre se trouvoit
replacé sur la scène brillante, que l’automne
avoit' fait évanouiip, et devenoit
de nouveau le favori des cieux, et
l’heureux enfant de la Nature dans son
plus bel âge. Cette réflexion trouvera sa
place dans notre explication de l ’âge
d’or, èt du Paradis terrestre de Zoroas-
tre et de Moïse-.
(1e commencement: .d’année nous panât
au moins aussi naturel que le premier
car il tient aux besoins de
l’homme, et le besoin a presque toujours
été son premier guide. Aussi
Ovide dans sés Fastes demande à Janus,
pourquoi il fait l'ouverture de l’année
en hiver, tandis-qu’il eut'été'plus naturel
de la faire commencer au printemps.
Tout fleurit au printemps’; 'continué'le
Poète ( l ) ; c'est alors véritablement,
que le temps vient renouveler toutes
choses. Après une description agréable
des heureux effets du printemps , qui
donne à la Nature une jeunesse nouvelle
, Ovide conclut, qù’avec beaucoup
plus de raison ; où auroit dû’ y fixer le
renouvellement de l’année. Hygin (2) -,
parlant du bélier ; ou de l’agneau céleste,
dans lequel se trouvoit tous les ans le
soleil, au commencement de l’année
équinoxiale, nous dit, que Bacchus bâtit
temple à Jupiter-Ammon , à qui il
donna une statue, dont la tête étoit
surmontée des cornes du bélier, et qu’il
plaça la figure dè Cet animal dans les
constellations , afin que tous les, ans ,
lorsque le soleil occuperoit ce signe ,
foutes les productions du printemps
commençassent à reparoître. Eusèbe (3)
nous représente ce même bélier , s’unissant
au soleil, pour faciliter l ’accouchement
de la Nature. Le. bélier , ou
l’agneau, car c’est ainsi que le nomment
les Perses, sera donc le régénérateur de
la Nature dans son union avec le soleil.
Deux mille ans auparavant, c’étoit le
taureau, qui remplissoit cette importante
fonction. Aussi le Dieu bienfaisant
des Perses , le fameux soleil Mithra
etoit-il représenté montant un taureau 5
de même le grand Dieu-Soleil, chez les
Egyptiens, Osiris prenoit pour attribut
le taureau, qui ,-dit Plutarque (4), étoit
son image; et le Bacchus Grec, copie
de l’Osins Egyptien, arma son front des
cornes de ce même animal, et fut peint
avec une queue et des pieds de taureau ,
attributs: empruntés cl« signe qui renferme
les Hya'des , qu’on disoit avoir
élevé Bacchus.
Ces deux signes, taureau et agneau,
ou bélier , ayant' successivement passé
à l’équinoxe de printemps , sont devenus
1 ■’emblème clu) Soleil vainqueur des ténèbres;
de l’hiver, et réparateur du désordre
de la Nature, qui tous les ans
étoit régénérée sous ces signes. Nous
donnerons à cette théorie un plus grand
développement, lorsque nous exposerons
le dogme des deux principes , lumière
et ténèbres, Osiris et Typhon ,
Ormusd et Ahriman, Nôus nous bornons
ici à dire, que l’on doit sur-tout observer
ces deux signes, sous lesquels la terre
successivement, pendant plus de quatre
mille ans, se rëgenéroit et reprenoit la
parure, dont le scorpion et le serpent
d’automne l’avoient dépouillée , et auxquels
le commencement de l’annéè et le
retour de la végétation furent attachés.'
Il en sera de même des constellations
prises hors, du Zodiaque, lesquelles,
par leur lever ou leur coucher, le soir
(3) Euseb. præp. Ey. 1. 4, c. 9 ; ,p.j58.
(4) Plut, defei«fc p. 359,- 364."
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