lorsqn’avant Homère, en Grèce on f’aisoit
des poèmes sur les Dieux , on peignoit
leurs actions, on chantoit leurs combats,
et on publioit leurs oracles, ou lorsque les
Chaldéens , les Perses , les Assyriens et
les Juifs leurs copistes , faisoient des
romans sur les Anges et les Archanges ,
et peignoient le grand Dieu dans l’as*
semblée des Dieux inférieurs , ses agens
et les ministres de ses volontés.
Le gouvernement de l’Univers , la
distribution du temps, de la lumière,
de la chaleur ou du froid, de la pluie ,
du vent, de l’humidité ou du sec, la
température variée des saisons, leur
retour périodique , la succession du
bien et du mal , de la génération et de
la destruction des corps dans la végétation
annuelle , enfin tout le système
météorologique , et la reproduction de
•tous les effets sublunaires , ne seront
plus simplement produits par des influences
d’étoiles , mais par la volonté
d’agens très-intelligens , qui siégeront
dans les astres , et qui auront la direction
de telle ou telle opération de la
Nature , dont l’exécution leur a été remise
par 1 intelligence première et universelle.
Chaque planète ne se mou-
vera plus par une force mécanique , ou
même simplement par une force vive
et animée, qui l’entraînera dans son
courant. Ses mouvemens seront l’effet
d’une volonté libre et sage , qui réglera
ses directions , ses stations et ses rétrogradations
, et qui dirigera sa route dans
les cieux , suivant des loix propres à la
faire concourir à l’harmonie universelle.
Un génie , soit Dieu, soit Ange ,
en aura la conduite, et voyageant dans
ce char lumineux parcourera les
plaines de l’Olympe , pour veiller sur
l ’ordre du ciel , d’où dépelid jtelui de
la terre soumise à l’action des corps
célestes. C’est la conclusion, qui découle
des principes que nous avons établis,
('■ j Cicer. de Nat. Deor. 1. i , c. a i.
(i) Batteux, çaus, prem. t. a , p. n 6 ,
f j ) Ut an. Petav. Ach. Tat. c. 23.
et que tire l’interlocuteur du dialom,9
de Cicéron , dont nous venons
parler. Après avoir examiné l’ordre
l’harmonie et la constance des mouved
mens de diverses sphères , il conclut
que les astres ne pourraient jamais
exécuter avec autant de régularité et de
constance ces divers mouvemens (1)
s’ils ne renfermoient en eux une force
et une intelligence divine , un principe
de raison et de sagesse. L ’auteur part
de là , pour conclure que les astres, tant
fixes qu’errans, sont autant de Divinités: !
Telle étoit l’opinion des anciens Philosophes
, suivant M. Batteux.(2),
la constance des mouvemens célestes1
et sur leur régularité, que rienn’altéroit,
Ils ne conCevoient pas, que l’exécution
ponctuelle d’un ordre , qui pou voit ,sé
varier de mille manières, différentes,
pût se faire constamment et toujours
de même , sans être réglée par une
intelligence. Les modernes font de h
force motrice des planètes une loi mécanique
, qu’ils expliquent par la combinaison
de deux forces , l’une d’impulsion
, et l’autre d’attraction , dont:
ils ne peuvent démontrer l ’origine,
mais dont ils calculent les effets. Les
anciens en faisoient une force intelligente
, qui prenoit sa source dans l’intelligence
première et universelle. Ainsi
les planètes, suivant Achilles Tatius (3),3
sont autant d’êtres animés, qui se meuvent
d’eux-mêmes , et qui se dirigent par leur
propre intelligence. Suivant le même auteur
( 4 ) , ou plutôt suivant Diodore qu’il
cite , une planète est un corps lumineux
et divin, de même nature et formé
de la même substance , que lis ciel
et l’Éther (5) , où elle circule dans un
mouvement éternel. Ce ciel lui-mèmèj
étoit formé du feu artiste intelligent,]
que les Stoïciens admettaient pour première
cause , ou dans lequel- ils pk-
çoisnt l’énergie de l’ame universelle (6)> j
(4) Ibid. c. 10.
m Ibid. c. 11.
(6) Cic. de Nat. Deor. 1. 2 , c. 22, 1. i \ C. *4* i
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détendent prouver que les astres sont
(mimés, par cela même qu’ifs sont com-
losés de la substance du feu Éther.
Ehrysippe , dans son Livre de la Pro-
idence et des Dieux , Aristote , dans
Ion Livre sur le Ciel, et Platon , continue
touj ours Achilles T atius, soutenoient
a même opinion. C’est-là sans doute
lussi l’origine des huit Dieux de Xéno-
«rate , qui en plaçoit cinq dans les
Iriql planètes , deux dans le soleil et
jans la lune , et un huitième dans la
lotalité du ciel ( 2 ) , qui comprend
loutes les fixes, dans lesquelles circule
a substance éthérée et intelligente, qui
lompose la masse du ciel,
j Ou sent bien , que si on décompose
le dernier dans toutes ses parties , soit
!n constellations , soit en étoiles, on
terra éclore de son sein une foule de
ivinités. Chaque astre deviendra un
pieu , ou un être animé et intelli-
lent , qui partagera la divinité ou la
lature cle la cause universelle, qui agit
ans les cieux. Héraclide de Pont,
^orti de 1 école de Platon (3) , professât
la même doctrine sur la divinité
les planètes , sur celle du ciel et de la
jerre, oU d’Uranus et de Ghê, père et
■ ère de tous- les Dieux. En faire des
lieux -, c’étoit nécessairement y placer
les substances animées et intelligentes",
jOurces de la yie et de l’intelligence des
jutres êtres , puisque la cause ou la
Jivmite doit avoir éminemment en elle
|e que Peffet n’a que dans un degré
ortinférieur, ce qu’il n’a que par elle,
* qu’il ne tire que d’elle.
Theopliraste donnoit la divinité1 au
. Par cela même, qu’il y. reconnois-
Pit un principe de vie éternelle'(4) ,
Hu|Me supposoit animé. Simplicius,’
( après la doctrine d’Aristote qu’il com-
r nt®, ne veut pas qu’on voie dans les
astres des corps inanimés , mais il soutient
, qu’ils ont la vie et l’intelligence
en partage , et qu’ils agissent en conséquence.
Il les croit éternels dans
le sens le plus étendu (5) , n’ayant
jamais été faits et ne devant jamais
être détruits , exempts de changement
et d’altération , impassibles et affranchis
de toutes les affections malheureuses
, qu’on éprouve ici-bas ; c’est-à-
dire , qu’il leur donne tous les caractères
de la Divinité (6). Il prétend , que
tous les corps célestes ont le mouvement
par eux-mêmes , comme tous les
animaux ; qu’ils sont effectivement des
êtres animés et divins , dont l’activité
éternelle ne peut être arrêtée par rien ;
ce [ qui convient à des Dieux. Aussi
Aristote prétendoit-il, que cliaqüe astre
( y ) avoir une intelligence immortelle ,
qui présidoit à sa marche , et voyageoit
avec lui durant toute sa révolution. Ce
n’étoit, comme nous l’avons déjà remarqué
, qu’une conséquence du principe
de ce philosophe ( 8 ) , qui pensoit
que le ciel ét les astres étoient animés
; qu’ils renfermoient dans leur
propre vie le principe de leur mouvemen t:
et de leur activité ; et qu’ils n’étoient
pas simplement des corps bien ordonnés,'
dénués d’ailleurs de vie et d’intelligence.'
Ce sont des âmes , dit Simplicius ( 9 )
toujours d’après la doctrine de son.
maître , qui impriment le mouvement
aux sphères, dans lesquelles së meuvent
les fixes et les planètes. Le c ie l, le plus
divin et le plus élevé de tous les corps
qui. composent l ’assemblage , que nous
appelons Monde,s’embrasse lui-même de
ses contours ; il se cherche lui-même,
ainsi que l’ame et l’intelligence (10) qui
le meuvent. C’est là le but qu’il veut
atteindre par cette rotation éternelle
sur lui-même, qui est l’espèce de mouvement
le plus parfait, celui qui a le plus
(’) Achill, Tat, c. 13.
ft CiMr. de Nat. Deor. 1. 1 1 c. 13.
■ Cicer,Tbid. I
w in Tim. p. 177.
Df «mph in Arist. de Ciel. 1. 3 ,' p. 137,
(6) Ibid. 1. 2, p. 90.
(7) Arist. Metaphys. 1. i l , c. 7 et 8.
(8) Plut. de. Piacit. Philos. I. 2, c. 3.
(y) Simpl. de Cæl. p. 18. id. 1. 2 , p. 92.
(10) Ibid. p. i j .