de Jupiter, et qui, tenant immédiatement
à l’a ir, passa pour Jupiter qui
s’unissoit à Junon ( i) . C’est de cette
manière, qu’on transporta les noms des
Divinités supérieures et célestes dans
les élémensauxquels ellesprésidoient, et
qui recevoient plus partieulièremen t leur
influence, ou avoient le plus d’afiinité
avec leur Nature. Ainsi l’air tenoit de
la Nature de la lune , et le feu Ether
de celle du soleil, les deux grandes
Divinités'de tous les peuples.
C’est une distinction bien importante
à faire dans l’explication de la mythologie
, où l’on est souvent exposé à
confondre le Dieu avec l’élément, .eu
avec l’effet produit par son action. Voilà
pourquoi quelques-uns ont pris le blé
pour Cérès et le vin pour Baechus ,
c’e'st-à-dire la chose soumise à l’influence
et aux domaines de'ces Divinités, pour
ces Divinités elles-mêmes. C’est une
grande erreur, qu’il faut sur-tout éviter.
cc Ce n’a jamais pu être , qu’une
» métonymie ou un trope , dont se
35 servent les Poètes ( 2 )'. Qui seroit
33 jamais assez insensé pour avoir un
33 Dieu qu’on boit et qu’on mange, dit
» Cicéron. Cet Orateur philosophe n’a-
voit pas encore la mesure de la crédulité
de l’homme. S’il eût vécu quelques
siècles plus tard, il n’auroit pas tenu ce
langage ; et il auroit vu des peuples
s’entregorger pour maintenir ce dogme
religieux d’un Dieu que l’on peut boire
et manger. Mais oublions nos erreurs,
et revenons à celles des anciens , ou
à leurs opinions sur les Dieux, qui ont
leur siège dans les élémens, ou qui y
président.
L ’air étoit sous le domaine de Junon,
reine des Dieux de l'Olympe. Elle fut
la Divinité tutélaire de cet élément,
avec lequel souvent on l’a confondue,
comme nous l’avons déjà dit, et comme (i) *3 4
( i) Fulgent. 1. i , de Saturn.
(a) Cicer. de Nar. Deor. 1. 3 , c. 16.
(3) Macr.Somn. Scip. 17,id.Bat. 1. i,c. 17.
(4) Orph. Hÿaù in Junçn, Pcët. Græfc. t. 1,
P-5C 5*
on peut s’en assurer par le témoignage
de plusieurs auteurs qui, dans jfa j
explications , sont tombés dans cette
méprise (3). Orphée dans ses hymnes
a exprimé 4es rapports de cette Déesse
avec l’air , en lui donnant une ligure
aéri-formë (4), en lui attribuant la fonc.
tion de fournir aux mortels le smil'f|s
aérien qu’ils respirent, et d’alimentet
les pluies et les vents favorables à lj
végétation 1 qu’elle esf chargée d’eritre.
tenir. Dans la distribution des douze
grandsDieux, dans les douze figures du
Zodiaque, où étoient casés les élémens,
Junon avoit son siège au verseau (3),;
sous lequel étoit placé l’élément de l’air,
Macrobe- ( 6 ) regarde Junon Comme
la souveraine de l’air, et la confond
avec plus de raison avec la lune. Cm
la substance de l’air roule dans ses cotr
rans, suivant Philolaus cité plus haut,
le principe humide qu’il extrait .de le
lune. La lune, suivant les anciens pliî-
losophes, & même suivant les natura.
listes, tels que Pline, s’alimentoit d(t
eaux douces des fontaines , tandis, que
le soleil se nourrissoit des vapeurs dt
la mer. Junon, comme la lune, descro
doit tous les ans clans les eaux dpucei
de la fontaine de Kanathè (7 ) en Ar-
golide , pour .y reprendre sa virginité. ‘
Nous ne suivrons pas plus loin l’est
men des rapports qu’il y avoit entre II
divinité de Junon, celle de la lrnieft
celle de l’élément de l’air, qui leur otoit
subordonné. Nous ajouterons seulement;
que la partie inférieure de l’air, la p»
voisine de la terre, étoit celle où Juno»,
avoit établi son domaine, d’après la
principes théologiques consignés cia®
Varron ; le milieu (8) étoit le siège
Jupiter , et le sommet le séjour de »j
chaste Minerve. Cette partie la OT
élevée étoit ce qu’on appeloit le M
et .l’Ether en étoit la portion la pi
(5) Mariil. Astron. 1. 2, v. 438.
(6) Macrob. Saturn. 1. 1 , c. 16.
(7) Paus. Corinth. p. 80.
Macreb. Sat. 1. 3 , c. 4.
épurée-
J n . J i J j l U J . U J M u p . 1 V U J t S
épurée. Le feu qui restoit engagé dans
);l basse région de l ’air entroit dans la
composition des météores , et sur-tout
Je l’éclair et de la foudre. C’étoit lui qui
en fournissoit la matière aux cyclopes
chargés de forger les foudres du Dieu
qui habite I Ether , ou. de- Jupiter
maître des Dieux. Cet élément actif
étoit casé .dans les eieux sous le signe
Idu Bélier Ainmon , qui fournissoit ses
| attributs au Dieu soleil, au moment de
j son triomphe sur les principes ténébreux,
autrement sur les géans. Les
exhalaisons ignées qui slélevoient de la
terre dans- les hautes régions dé l’air
formoient la foudre que reprenoit Jupiter
au printemps. « Aussi voyons-nous dans
, Hésiode (1) la terre, qui en s’unis-
i sant au ciel enfante les redoutables
eyclopesi, Brouté , Steropê’, et le
, brillant Argê , qui ont mis le ton-,
. nerre aux mains de Jupiter, et l’ont
f33 armé de la foudre qjr’ils ont' forgée'>3.
! Hésiode place la génération des cyclopes
Ichargés de forger la foudre, à la suite
de la. formation : de la terre1, de celle
du ciel et de- ses astres , après' la formation
dé" la mer et des Divinités des-
leaux.La cosmogonie phéniciennede San-
clioniaton présente la même série d'idées-
let dans le même ordre. Elle suppose,
[qu’aussitôt que le. ciel eût été formé '
que le-soleil, la lune, les planètes et
[les constellations eurent commencé à
briller (2) , alors l’élément de l’air s’enflamma
par l’effet de la chaleur que
|la terre et la mer éprouvèrent, les vents
soufflèren t , les nuages se formèrent au
sein de l’air, des torrents d’eau se précipitèrent
^sur la terre , et lorsque les
vapeurs divisées et élevées par Faction
du soleil, se furent de nouveau réunies,
et choquées dans l’air, il en résulta
,s. éclairs et des, tonnerres. Tout ce
tecit de Sanchoniaton n’est qu’une expli-
catuin pure et simple de la formation
0 1 ecla-ir et de la foudre/, qui n’est
(O.Hesîod. Theog. v. 140.
VJ f-usfb. Præp. Ev., f. I, c. 10.'
13) Euseb præp. Ev.1.’ r, c 6, ç. à,
Umy. Tome I*
JS Jj JL, Jb. 190
que l’effet des exhalaisons'humides et
sèches qui s’élèvent de la terre et des
eaux, et vont former ces météores dans
l ’air échauffé par l ’action du soleil. Ce
sontlà les idées physiques qu’a rendues
poétiquement Hésiode dans sa théogonie
ou dans son poème théologique sur les
causes naturelles, considérées comme
les véritables Divinités} de l’action desquelles
tout dépend ; dogme consacré
par la théologie des Egyptiens et des
Phéniciens ( 3 ), comme nous l’avons
annoncé dans le chapitre second du
premier livre dé'cet ouvrage:
Pline attribue à l’action des trois planètes
supérieures au soleil la formation
de la foudre , et principalement à
celle de la planète Jupiter ( 4). Hésiode
nomme aussi pour forgerons de la foudre
trois Génies, qu’il appelle trois Cyclopes,
qui n’ont qu’un oeil chacun, (5). Qn
voit encore ici le Poète d’accord avec:
la mauvaise physique du Naturaliste ;
et on trouve une nouvelle preuve de la
nécessité de comparer les idées physiques
des anciens bonnes ou mauvaises,
avec leur cosmogonie et leur
mythologie', qui n’est rien autre chose
queJ la théologie naturelle. On remarquera
aussi, que la cause active se mêle
sans cesse avec la cause passive pour
la modifier, et combien il est nécessaire
de tenir compte de chaque partie de
l'une ou de l’autre qui entre dans la
fiction ; ce qui exige une grande sagacité
, et beaucoup d’exercice dans ce
genre de travail.
L élément du feu fut aussi soumis à un
Dieu, que l’on confondit souvent avec
lui. Ce Dieu étoit Vulcain , le plus ancien
Dieu de la théologie Egyptiehtxe.
Grand nombre de philosophes' ont regarde
le feu comme le premier de tous
les élémens, et comme le principe universel
de toutes choses (6). Héraclite
prélendoit que' le feu étoit le principe
de tout; il dit que tout est composé
(4) Pline, h 2, c. 20.
m Hesiod. Théog. p. 140.
(6) Açlùll, Tatius j c, 3.
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