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qu’il .a maintenant , la terre , avec ce
» qu’elle produit et ce qu’elle nouri■ it;
» enfin, l ’espace aérieu , avec tous ses
» phénomènes , ont toujours existé. »
Ocelln s ne nie pas qu’il ne se soit fait
des changement violens dans quelques
endroits de la terre , soit par le déplace^
ment de la iner, soit par des tremble-
mens de terre ; « mais malgré cela ,
» dit-il, j amais il n’est arrivé que sa
» constitution lût entièrement détruite ,
» et cela n’arrivera jamais a>. La Nature ,
suivant lui, conservera toujours ses divisions
tranchantes , celle des causes actives
et passives. Son svstême de générations
et de destructions se soutiendra
touj ours, ainsi que le concours des deux
grands principes , le ciel et la terre , qui
s’unissent pour former toutes choses.
» C’en est assez , dit-il, sur l’Univers ,
» sur les générations et les destructions,
» qui se font en lui, sur la manière dont
» il est actuellement, et dont il sera
» dans tous les temps, par les qualités
» éternelles des deux principes, dont
l’un toujours mouvant, et l ’autre tou-
» jours mû, l’un toujours gouvernant,
33 et l’autre toujours gouverné ».
"Voilà à-peu-près l’abrégé de la doctrine
de ce philosophe , dont l’ouvrage
est mi des plus anciens, qui soient parvenus
jusqu’à nous. Le" sujet qu’il y-
traite, observe avec raison M. Batteux
(i) son traducteur, occupoit de'son
temps tous les esprits ; les poètes chantaient
des cosmogonies et des théogonies;
les philosophes faisoient des traités
sur la naissance du monde, et sur ses
'élémens de composition ; et c’étoient
les seuls genres dans lesquels on écri-
voit. La cosmogonie des Hébreux, attribuée
à Moïse ; celle des Phéniciens ,
attribuée à Sanchoniaton ; celle des
Grecs , composée par Hésiode ; celles
des Egyptiens , des Atlantes et des Cretois
, rapportées par Diodore de Sicile,
les débris de la théologie d’Orphée,
épars dans différens auteurs (mm.)., lçs
{i) Traité dq Causer prçpi. Nçtes sur Qeeli.
N Ï V E R S E L L E .
livresdes Parses, ou leur Boundesh, ceui
des Indiens , les traditions des Chinois,
des Macassarois, &c. ; les chants cosmogoniques
, que Virgile met dans la
bouche d’Iopas à Carthage ; ceux du
vieux Silène , le premier livre des
métamorphoses d’Ovide ; tout dépose
en faveur de l’antiquité et de l’univer.
salité de ces lictions sur l’origine du
monde et sur les causes.
Socrate fut le premier , - chez des
Grecs , qui lit descendre la philosophie
du ciel, et l’occupa d’objets plus utiles
et plus près des besoins de l'homme,
en traçant les règles des devoirs ,: et
en organisant la morale. Avant lui, la
philosophie n’étoit que Pétude de la
Nature et des causes, et la poésie em-
bélissoit de ses charmes les spéculations
sublimes de la philosophie. A la tête
de ces causes , on plaçoit le ciel et la
terre, et les parties les plus apparentes
de l’un et de l'autre. Ces parties étaient,
comme vient de nous le dire Ocellus,
le soleil, la-lune, les étoiles lixes et les
planètes, et sur-tout le zodiaque, qui,
par son obliquité , changé la température
de l ’a ir, les saisons , ' et en général
tout ce qui tient à la terre ; ce
qui doit le faire placer au nombte des
causes premières de la génération. Les
parties de la cause passive étaient'les
élémens, dont les'transmutations successives
, et les combinaisons variées
des uns avec les autres , concouroient
à la formation des corps , tant dès animaux,
que des végétaux; et des minéraux,
et à celle des différens phénomènes
de l’air. Ce Sont-là présiséroeat
les objets, que Chérémon, dans le "fameux
passage que nous avons cite' au
second chapitre de cet ouvrage , nous
dit avoir été chantés par les anciens
Egyptiens, et avoir fait le sujet de toutes
les fables sacrées. On voit donc ici, que
la philosophie et la mythologie s’accordent
à nous donner les memes leçons
, dans un langage différent. PfoP'-
t. i , p. 8n
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I seulement on classa les causes dan-,
I l’ordre progressif de leur énergie , de
manière à placer le ciel et la terre au
sommet de la série , mais encore on
distingua en quelque sorte leur sexe
et on leur donna un caractère ana'
logue à la. manière dont elles concou-
roient à l’action génératrice universelle
comme nous venons de le voir, dans
l’extrait d’Ocellus de Lucanie, que nous
venons de rapporter.
Ocellus n. est pas le seul philosophe,
qui ait établi cette distinction entre les
| deux causes premières. Sa doctrine est
celle de tous ; tant cette distinction se
présentait naturellement à tous. Les
| Egyptiens Envoient faite avant lui ,
quand ils choisirent des animaux en qui
ils croyoient reconnoître ces qualités
emblématiques, pour peindre le double
[sexe du monde , au rapport. d’Horusr
Apollon (i). Leur Dieu Cnepîi, vomissant
de sa bouche l’oeuf orphique , d’où
|l’auteur des Récognitions Clémentines
(2) fait sortir une ligure hermaphrodite,
r]ui reunit en elle les deux principes
dont le ciel et la terre sont formés,
et qui entrent dans l’organisation de
tous les êtres, que le ciel et la terre
Engendrent par leur concours, fournit
Encore un emblème de la double puis-
;sanCe active et passive, que les anciens
ont reconnue dans le monde, qu’ils ont
(Comparé à l ’oeuf, comme nous le dirons
bientôt. Orphée , qui étudia en
Pgypte, emprunta des théologiens de
P PaY,s les formes mystérieuses, sous
lesquelles la science..de là Nature était
Voilee, et porta en Grèce l'oeuf symbolique
, avec sa distinction, en deux
Parties ou deux causes , figurées par
Jetre hermaphrodite qui en sort , et
|nont le ciel et la terre se composent.
I Ces Brachmanes , dans l’Inde (3)
|avoient rendu la même idée cosmogo-
(0 Hor. Apoll. l. 1, c. ii.
:• 30 Cotélerii Patres Apostolij 1 .1 , p, 5$y, I, I0;
P) Porphyr. m Styge. .
LJ Zend. Avest. 1.1, p. 139,
i x 7.
nique, par une statue représentative da
Monde ;l laquelle réunissoit, les deux
sexes. Le sexe mâle portoit l’image du
soleil, centre du principe actif ; et la
sexe féminin celle de là lune , qui fixe le
commencement et les premières couches
de la partie passive de-la Nature , comme
y,enor;s de le voir dans le passage
cl Ocellus- de Lucanie.
• ^r,,*1nSatn ’ que les Indiens encore
aujourd liui révèrent dans leurs temples,
et qui n est autre chose que l'assemblage
des organes de la génération des
eux sexes , ligure la même chose.
Les. Indiens ont la plus grande vénération
pour ce symbole (4). de la Nature
toujours reproduisante. Le Linga-
nisine , chez .eux, remonte à la plus
haute antiquité. Les Gourous sont charges
d orner le Lin gain de fleurs , à peuples
comme les . Grecs paroient le Phallus.
Le T a ly , que le Brame (5) consacre,
et que le nouvel époux attache
au col de son épouse , alîn qu’elle le
porte tant qu’il vivra , est souvent un
Lingam , ou 1 emblème de l’union des
deux sexes.
Ecs Greqs avoient consacréles mêmes
.symboles1 de la fécondité universelle
dans leurs mystères. Le Phallus et le
Cteis, ou les parties sexuelles de l’homme
et delà femme, étaient mis en spectacle
daps les sanctuaires d’Eleusis (6). Ter-
tullien accuse les Valentiniens (7) d’avoir
adopté cet usage de la consécration des
parties de la génération des deux sexes ;
U8ag?> dit-il, que Mélampus avoit ern-
(Pmnt^dulJSgypte, et qu’il établit en
Grèçe. E$s Egyptiens, en effet, avoient
consacré le Phallus dans les mystères
1 Gûj'js et d’Isis , comme. un peut le
kM H H b dans Diodore-
de-Sicile. « Voilà pourquoi , dit ce der-
>’ nivrx:las Grecs , qui ont emprunté de
® 1 Egypte leurs orgies et leurs fêtes,
: fr) cr0naeraV it- 1 > !• 1 , c. 3 , p. 79. là. p.74i.
(6; Mursms Elans. c. 11. Ckm. Alex. Frôtrép.
P- T9- . . ' ................... ,
(7} TertuL Àdvé Valent*
X®5 Piut. de Isid. p. 365. Diod. L i , c* 154