» révèrent le Phallus dans les mystères,
» dans les initiations et dans les sacri-
» lices ». On portoit le symbole viril au
temple de Bacclius, le meme que l’Osiris
Egyptien, et les parties sexuelles de la
femme dans celui ae Libéra ou de Proserpine
(1). Ainsi les Indiens portentleLin-
gam aux temples de Chiven. Le Lingam
est toujours la ligure principale consacrée
à ce Dieu. Comme les Grecs por-
toient le phallus ou le symbole de la
virilité et l’attribut de Priape suspendu
au c o l, les Indiens portent aussi le Lingam
attaché au col,et pendant sur la poitrine.
Le père Kirker fis) prétend qu’on a
trouvé le culte du Phallus établi jusqu’en
Amérique, et il s’appuie de l ’autorité de
Cortès. Si cela est, ce culte a eu la même
universalité , que celui de la Nature elle-
inême,qui réunit lesdeuxpuissanc.es active
et passive. Au reste, Diodore-de-Sicile
assure, (3) que ces emblèmes n’avoient
pas été consacrés par les Egyptiens seulement
, mais qu’ils l’avoient été encore
par tous les autres peuples. Ils l’étoient
chez les Assyriens et chez les Perses ,
comme chez les Grecs (4) , au rapport
du géographe Ptolemée ; et on les avoit
consacrés, comme organes de la génération
de tous les êtres animés, suivant
Diodore, et comme dés symboles destinés
à exprimer la force naturelle et sperma-
tiq ne des astres, selon lé même Ptolemée.
Lès docteurs Chrétiens, toujours occupés
à décrier et à dénaturer les idées
theologiques et les cérémonies j les statues
et les fables représentatives de Ces
idées, dans la religion ancienne-, ont
donc eu tort de déclamer contre les
fêtes et contre les imagés,qui avoient consacré
le culte de la fécondité universelle.
Ces images, ces expressions symboliques
des deux puissances de la Nature, étaient
toutes simples, et avoient été imaginées
dans des siècles , où les organes de la
génération, et leur union toute naturelle,
n’avoient point èncore été flétris
(1) August. de Civ. Dei, i. 6 , c. 9»
(2) (Edip. t. 1 , p. 42».
£5) Diod. b i,p. 55.
par le préjugé ridicule, que les decteurj
modernes, ou les abus du libertinage
les uns par esprit de mysticité, les autres
par la suite ae la corruption de notre
espèce, y ont fait attacher. Les ouvrages
de la Nature et tous ses agens étoient
sacrés comme elle : nos erreurs reli-
gieuses et nos vices les ont seuls profanés.
L ’union de la Nature avec elle-même
est un chaste mariage , que tous les
peuples ont cherché a. retracer, et l’u-
nion de l’homme avec la femme en étoit
une image toute naturelle, ainsi que leurs
organes, un emblème expressif de la
force double , qui se manifeste dans le
ciel et dans la terre , unis entre eux
pour produire tous lès êtres. « Le ciel,
**» dit Plutarque , parut aux hommes faire
» la fonction de père , et la terre celle
» de mère. Le ciel étoit le père , parce
x qu’il versoit la semence sur la terre,
» sur laquelle il répandoit ses pluies;
» la terre qui , en les recevant, sem-
» bloit devenir féconde et enfantait,
» paroissoit ' être la mère (5) ». Ce sont
effectivement là les comparaisons, qui
ont dû se présenter à l’esprit des premiers
hommes. La terre ne produit rien,
sans l’action du soleil, ou sans la chaleur
et sans le secours des pluies, que
verse le ciel ; sans l’heureuse température
des saisons , dont la marche est
déterminée par lés lieux du soleil dans j
le Zodiaque et par les astrés, qui pari
leur lever ou leur coucher, présidents
cette marche , et semblent la régler.
Toute la Nature'Sublunaire est dépendante
de la Nature sùpérieure ; l’être]
toujoürs changeant , de l’être toujours
immuable ; enfin , les effets que la terre
produit, des causes que le ciel renferme.
C’est du concours de l ’un et de l’antre;
que naissent les productions variées»
qu’on voit éclorre du sein de la terre-
Le ciel produit, mais hors de lui-même1
-il est donc père ; car il produit comme
(4) Ptoîem, Geogr. I. 1.
(5) Piuurch. de Placit. Phil. 1, t , p. 379.
le
le mâle. La terre produit, et dans elle-
même : elle est donc femelle ,■ et mère
des effets , que le ciel fait sortir de son
sein fécond. Soumise au ciel , qui la
couvre et l’embrasse de toutes parts,
elle voit en lui l ’époux puissant, qui
s’unit à elle pour la rendre mère, et
sans lequel elle languiroit dans une stérilité
éternelle, ensevelie dans les ombres
du cahos et de la nuit. Leur union,
voilà leur mariage : les êfres produits
par eux, ou qui sont leurs parties, voilà
leurs en fans.
Comme nous avons annoncé, que cette
doctrine 11 étoit pas celle d’un ou de deux
philosophes , mais la doctrine commune
de tous , nous, allons reprèndre l ’examen
suivi de leurs ouvrages, de manière
à ce qu’il ne reste aucun doute sur les
preuves de l’universalité de ce dogme.
Nous ne croyons pas ces recherches
superflues, parce que pour être convaincu,
qu’une idée philosophique fait
la base de la théologie d’un grand
nombre de peuples , et quelle a dû être
consacrée par des fictions sacrées et des
monumens religieux , il faut prouver
que ce n’est pas le dogme d’un seul
homme, ou le dogme d’une seule secte ,
mais l’opinion généralement adoptée
par tous les .sages. M. Batteux ( 1 ) ,
dans son commentaire sur Ocellus de
Lucanie, à l’occasion de la double force
active et passive , qui a été distinguée
dans la Nature, assuré que ce dogme
est de toutes les philosophies.- » Toutes
» les nations, dit-.l, les Chaldéens, les
» Perses, les Egyptiens, les Grecs,
35 sont partis de-là. Un principe qui
M agit, un autre qui reçoit l ’action,
53 et qui la modifie , en la recevant. Ces
” idées entrant dans l’esprit par tous
1 les sens, ont du y être dans tous les
* temps et dans tous les pays. Qn divisa
” la- Nature, dit Cicéron (p), en deux
>3 parties, telles que l’une fut active,
G) Batteux, Causes prem. t. 2, p. 97.
(2) Academ. Qiiæft. 1, 6.
(3) Som. Scip... J, 1 , c. il.
Relig. Univ. Tonte /,
129
33 et que l’autre se prêtât à Cette action
» qu’elle recevoit et qui la modifioit.
» La première ’étoit censée être une
33 force, et l’autre comme une matière ,
» sur laquelle cette force s’exerçoit.
» On d ivisa le monde en deux parties,
» dit Macrobe (3), dont l’une agit ou
33 fait, et l’autre éprouve son action ;
33 on regarde comme active la partie
» du monde qui est immuable, et qui
» force l’autre aux changemens , dont
?3 elle contient la cause ; et comme pas-
» sive, celle qui éprouve ces change-
» mens ; on donne à la partie active
» toute l ’étendue, que mesure l’inter-
» valle, qui s’étend depuis la sphère des
» fixes, jusqu’à la lune ; et à la partie
33 passive tout l’espace, qui s’étend depuis
33 la lune, jusqu’à la terre; dans ces .
» limites est contenue la partie chan-
33 geante. On retrouve, dans ce passage
>3 de Macrobe, presque mot à mot ce
33 que nous a dit plus haut Ocellus de
» Lucanie.
Aristote, dans sa lettre sur l’ordre du
monde adressée (4)'à Alexandre, distingue,
positivement ces deux parties,
essentiellement si différentes, et qui
composent l’unité du tout ordonné ,
qu’on appelle le monde.
«Le monde, dit ce philosophe, est
» un composé du ciel et de la terre ,
« et de tous les êtres qu’ils renferment.
» Au centre du monde est la terre, fixe
» et immobile, mère féconde, foyer
» commun des animaux de toute es-
» pèce ; autour d’elle immédiatement
?? est l’air, qui: l’environne de toutes
33 parts ; au-dessus d’elle, dans la ré-
» gion la plus élevée , est la demeure
» des Dieux, qu’on nomme Uranus ou
» Ciel; il est rempli de corps divins ,
» que nous appelons Astres, et qui
» se, meuvent avec lui par la même
» révolution, sans interruption et sans
» fin, La substance du ciel et des astres
(4) Batteax, in Arist- de Mundo. t. 2, c. 5 ,
•est. 8. e. 2.
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