» ni qu’une matière sans qualité soit
» orennisée et ordonnée par une seule
>■> raison ou providence , maîtresse de
=> toutes choses , comme l’ont dit les
» Stoïciens ; car il n’est pas possible
3> qu’un seul Etre , bon ou mauvais ,
» soit la .cause de tout, Dieu ne pou-
» vant être la cause d’aucun mal.
v L'harmonie de ce monde est une
x combinaison de contraires, comme
» les cordes d’une Lyre , ou la corde
v d’un A rc, qui se tend et se détend. Ja-
» mais, a dît le poète Euripide, le
» bien n’est séparé du mal. Il faut qu’il
»5 y ait un mélange de l’un et de l ’autre,
» afin que tout aille bien. Or cette
» opinion sur les deux principes, re-
i> prend Plutarque , est de toute anti-
» qùité. Elle a passé des Théologiens
» et des Législateurs aux Poètes et aux
x Philosophes. L ’Auteur n’en est point
» connu, mais l’opinion elle-même est
x constatée par les traditions du genre
» humain ; elle est consacrée par les
» mystères et lés sacrifices, chez les
» Grecs et chez les Barbares. On y
» reconnoît le dogme des principes
3> opposés dans la Nature , qui par leur
» contrariété, produisent le mélange
» du bien et du mal. On ne peut donc
m pas due, que c’est un seul dispensa-
» teur qui puise les événemens, comme
» une liqueur, dans deux tonneaux,
» pour les mêler ensemble , et nous en
x faire boire la mixtion ; car la Nature
» ne produit rien ici-bas, qui soit sans
» ce mélange. Mais il faut reconnoître
x deux causes contraires, deux puis-
z sances opposées, qui portent lune
» vers la droite , l ’autre vers la gauche,
» et qui gouvernent ainsi notre vie ,
» de même que le monde sublunaire ,
» qui par cette raison est sujet a tant
» de changemens et d’irrégularités de
x toute espèce. Car si rien ne peut sé
» faire sans cause , et si le bon ne
» peut être cause du mauvais ; il est
fiVIbid. de Kde, p. 369.
De Iside, ibid. p. 370.
» absolument nécessaire, qù il yait
» cause pour le mal, comme il y en
33 a une pour le bien. Ce dogme, ajoute
33 Plutarque, a été généralement reçu
» chez la plupart des peuples, et sur-
33 tout chez ceux qui ont eu une plus
3» grande réputation de sagesse ( 1 ). I]s
33 ont tous admis deux Dieux , de mé-
33 tier différent , pour me servir de
33 cette expression, dont l’un faisoit
33 le bien et l’autre le mal, qui se trouve
33 dans la Nature. Ils.donnoient aupre-
33 mier le titre de Dieu par excellence:
33 et au second celui de Démon. Les
33 Perses ou Zoroastré, chef de leur
33 religion, nommoîent le premier Oro-
33 mazé, et le second Ahriman. Ils dj-
33 soient que l’un étoit de la nature de
33 la Lumière, et l’autre de celle deS
33 Ténèbres. Les Egyptiens appeloienf
33 le premier Osiris, et le second Typhon,
33 ennemi éternel du premier.
Lés Juifs et les Chrétiens ont le boa
Dieu et le Diable, le mauvais et le mai
lin esprit, toujours opposé â Dieu. Dieu
est chef des anges de lumière , et le
Diable chef des anges de ténèbres.1:
Celui-ci cherche toujours à empoisonnes
le bien que Dieu fait, et à lui ravit;
ses ainis et. ses sectateurs.
Les Chaldéens , continué Plutarque,
avoient leurs Astres bons et mauvais)
et nous verrons bientôt que c’est cette,
division entre les astres affectés à l’un
ou à l’autre des principes, qui a donnai
naissance à la distinction des génies ou
anges , en bons et inàuvais, ou et
génies dé lumière et génies dépendait
du chef des ténèbres. Les Grecs, dans
les temps fabuleux, eurent leur Jupitet
& leur Pluton, poursuit Plutarque (aW
J’ajouterôis qu’ils avoient leurs Geans
et leurs Titans, qui empruntoient te
attributs du serpent, dont Pluton (J
ou Sarapîs s’entortille ; dont Typhon,
Ahriman et le Diable prenent la forma
dans la Théologie des Egyptiens, de*
(3) Ibid. p. 362.
Perses, des Juifs et des Chrétiens. Il n’y
a point de peuple qui n’ait eu quelque
chose d’équivalent.
Les habitans du royaume de Pégu (1)
admettent deux principes, l ’un auteur
du bien et l’autre auteur du mal. Ils
invoquent souvent ce dernier clans leurs
maladies, et cherchent à le fléchir et
à se le rendre propice, tandis qu'ils
négligent assez l’autre, le croyant incapable
de faire du mal. C’est avec
l’attention la plus scrupuleuse, qu’ils
s’acquittent des promesses qu’ils . ont
faites à cette affreuse Divinité, aussitôt
qn ils se persuadent avoir obtenu
grâce, fin Prêtre , qui se dit ministre
et confident de cet esprit, est
appelé^ pour diriger les cérémonies superstitieuses,
qui doivent accompagner
leurs remercimens. ; Plusieurs Péguans,
au commencement du jour, ont pour
habitude de sortir de leurs, maisons ,
avec une poignée de riz dans une rnain,
et un flambeau dans l’autre. Ils crient
de toutes leurs forces , qu’ils cherchent
le mauvais; esprit pour lui donner sa
nourriture, afin qu’il daigne les laisser
tranquilles pendant la journée.. C’est
bien le cas de dire ici, que la crainte
a f ait les Dietix. 11 semble que ce n’est
qu au malin esprit, que les Péguans
rend ent un culte solemnei 3 il lui dressen t
des autels, ils les ornent de fleurs, et
les chargent d offrandes. La persuasion,
dans laquelle ils sont de sa méchanceté
et de sa puissance , en fait autant de
zélés adorateurs, qui étudient tous les
moyens de ée rendre favorable cette
terrible^ Divinité: C ’est sans doute par
une suite de cette opinion , qu’ils révèrent
singulièrement le Crocodile. Il
semblèrent que lé respect,que ces peuples
avihs ont pour leurs empereurs et leurs
rois, prend sa sburce dans le même
sentiment de crainte. Ils ont traité leurs
, eux, comme leurs despotes , qu’ils
a adorent que-parce qu’ils en ont peur.
(0 Cont. d’Orv. t. 1 , p. 306.
y ) Cont. d’Orvül. t. 2, p. 280.
(3) Ibid. p. }3i.
Relig. Univ. Tome I.
Les habitans de l’île de Java (5.) rr-
connôissent un chef suprême de l’Univers
j mais c’est au malin esprit, ou
au mauvais principe qu’ils adressent
leurs prières et leurs offrandes, pour
qu’il ne leur fasse, pas de mal.
Les Moluquois ont des sorciers (3)
a ppelés Z wangis, qui évoquent le malin,
esprit.
Les Sauvages des Philippines adorent
le soleil, la lune et les étoiles; et rendent
aussi un culte au malin esprit (4) , à
qui ils font des sacrifices. Le premier
Dieu est le Dieu qui lance le tonnerre ,
et ils l’appellent; Maglante.
Les Nègres de la Côte-d’Or (â) admettent
aussi deux Dieux, l’un bon ,
l’autre mauvais ; l ’un blanc, et l’autre
noir et méchant; ils les traitent à-peu-
près comme font les Péguans, dent nous
avons parle ci-dessus. Us s’occupent
peu du premier,qu’ils appellent Bossum,
et Jingu Mon, c est-à-dire, Bonhomme.
Us, redoutent le second, auquel, d’après
les Portugais, ils ont donné Je nom
de Démon, ou de Diable. De-là, sans
doute, l’opinion où ils sont, qu’après
leur mort ils seront transportés clans
le pays des Blancs, et qu’ils prendront
leur couleur. On voit dans cette persuasion
des vestiges de la théorie des
deuxprincipesOrmusd et Ahriman, dont
1 un habite le séjour de la lumière, et
1 autre celui des ténèbres. Les fictions
sacrées des Chrétiens, et leurs livres
Apocalyptiques peignent les Élus vêtus
de blanc, et habitant le séjour ltimi-
neux de l’Agneau , ou du signe sous
lequel le soleil et la lumière, au printemps
, reprennent leur empire sur les
ténèbres.
Les Hottentos ont aussi leur Divinité
méchante, qu’ils nomment Tou-
quoa (6). Ils la représentent petite,
courbée , de mauvais naturel , enne -
mie des Hottentos., et source de tous
les maux qui affligent le monde, au-
(4) Ibid. p. 368.
(5) Cont. d’Orvill. 1.4 . p. *8t.
(6) Çont. d’OrvilI. t. 4, p. 440.