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favorable du zéphyr , qui enfle les
voiles du vaisseau, et le porte bientôt
à l’embouchure du fleuve Callichoré.
C ’est là qu’à son retour de l ’Inde Bac-
chus s’arrêta , et près d’un antre sacré
célébra ses mystères, qui furent accompagnés
de danses et de choeurs. C’est
de-là que le fleuve Callichoré a pris
son nom ( i ). On découvre ensuite le
tombeau de Sthénélus , iils d’Actor.
A son retour de la guerre des Amazones
, où il avoit accompagné Hercule,
ilfutpercé d’une flèche, etmourut
sur ce rivage, qui lui servit de tombeau.
Les Argonautes n’allèrent pas plus
loin ; car Proserpine, sensible aux
prières de l ’ombre de Sthénélus, qui
désiroit voir ces guerriers^ venus de
son pays, lui avoit permis de sortir
de son tombeau, et de se placer sur
cette éminence , afin de contempler
■ de-là leur vaisseau. Il étoit t e l , qu'il
.’paraissait lorsqu'il marchoit aux combats
; sa tête étoit couverte d’un casque
brillant, surmonté d’un panache rouge.
Après avoir joui de:ce spectacle, son
ombre rentra dans l ’ombre éternelle de
son' tombeau. Sa vue avoit étonné les
Argonautes , et Mopsus leur conseilla
d’aborder en ces lieux, pour aller faire
des libations sur la tombe de ce Héros
et appaiser ses mânes (2). En conséquence
on cale les voiles, on aborde,
et l ’on Va au tombeau de Sthénélus ,
sur-lequel on fait des libations, et l’on
dépose les chairs des victimes. On
élève ensuite un autel au Dieu du Soleil
, ou à Apollon, protecteur de la navigation
, et on y -brûle des victimes.
Orphée y consacre sa Lyre ; ce qui a
fait donner à ce lieu le nom de Lyre.
Cependant le vent s’élève ; on se rembarque
; et le vaisseau, poussé par un
souffle égal et soutenu , semblable au
Vautour qui plane dans les airs, vole
sur la plaine liquide, et arrive à Venir
(1) Ibid. v. 91e.
( il V. 925.
<3) V. S4V
N I V E R S E L L E .
bouchure du fleuve Parthenios, dan*
les eaux duquel Diane , fatiguée de la
chasse, venoit de se baigner, avant de
remonter aux Cieux. Ils continuent
leur route toute la nuit ; et passent
près de Sesame, près des monts Ery-
thiniens, de Crobiâle, de Cromna, des
forêts de Cytore ( 3 ). Après avoir doublé,
aux premiers rayons du jour, le Cap
Carambis, et voyagé tout le jour et la
nuit suivante , ils arrivent sur les rivages.
du sol Assyrien, où est bâtie
Sinope , qui prend son nom d’une
Nymphe liile de l ’Asopus, laquelle
fut aimée de Jupiter. Ici le Poète raconte
les moyens adroits, dont cette
Nymphe se servit pour tromper Jupiter
et Ap ollon , et conserver sa virginité
(4). Les Argonautes trouvent à Sinope
des Grecs, compagnons d’Hercule, qui
s’étoient fixés dans ce pays. C’étoient
les fils de Déimaque, Deilon, Auto-
lycus, Phlogius, partis de Tricca (/) j
ils vinrent au-devant des Argonautes,
et s’embarquèrent avec eux. Déjà
le vaisseau a passé l ’embouchure du
fleuve A ly s , et celle de l’Iris ( 5 ).
Le même jour ils doublèrent le Cap
des Amazones , où Hercule poursuivit
et prit autrefois Ménalippe , fille de
Mars , qu'il ne relâcha, que lorsqu’on
lui eut donné pour rançon la fameuse
ceinture d’Hippolyte. Ici le Poète nous
décrit l ’embouchure du Thermodon,
qui se décharge dans le golfe voisin ,
et il nous trace en grande partie la
course de ce fleuve , depuis sa source
jusqu’aux lieux où il mêle ses eaux à
celles de la mer (6). Les Argonautes
ne crurent pas pouvoir s’arrêter- en
ces lieu x , sans s’exposer à soutenir
quelques combats de la part des femme*
guerrières, qui habitoient cette contrée.
Ici il nous peint le caractère belliqueux
des Amazones, filles de Mars et de la
Nymphe Harmonie. Un vent favorable
(4) V. 956.
m v- »«b
(6) Y . j 8 i
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pousse le vaisseau loin de ces parages,
et les porte au bout d’un jour et d’une
nuit sur la côte des Chalybes. Le Poète
nous peint les moeurs et les travaux
de ces peuples, qui négligent le soin
de l’agriculture et des troupeaux, pour
s’occuper d’exploiter les mines , et travailler
le fer. C’est de-là qu’ils tirent
les moyens de leur subsistance, à la
faveur du commerce et des échanges.
Après avoir dépassé ce pays, et le Cap
de Jupiter Génétéen , les Navigateurs
abordent sur les côtes des Tibaréniens,
dont le Poète nous fait remarquer les
coutumes étranges. Car c ’est là que les
hommes se mettent au lit, quand leurs
femmes sont accouchées ; et celles-ci
les soignent. Les Argonautes poussant
leur course au-delà, dépassent le Mont
sacré et le pays des Mosynéciens, dont
les usages et les'moeurs sont en opposition
avec ceux des autres peuples. Ils s’accouplent
en public ; leur roi est puni de
mort le jour où il rend un jugement injuste
(1). Les Argonautes arrivent enfin
près l’île Arêtiade ; c’est là qu’ils sont
attaqués par les oiseaux redoutables ,
qui infestoient cette île. Un de ces
féroces animaux blesse au bras, d’un
coup d’aîle, un des Argonautes, et lui
fait lâcher la rame. Les Navigateurs se
mettent en état de défense, et se préparent
à lancer des traits (2). Aphi-
dàmas propose à ses compagnons de
débarquer dans cette î le , et d’en chasser
ses oiseaux par le brait des cymbales
; moyen qui avoit réussi à Hercule
dans son travail contre les oiseaux
du lac Stymphale ; son avis est goûté.
Les Argonautés se couvrent la tête de
casques, sur lesquels flottoient des aigrettes
de couleur de sang. Les uns
rament; les autres forment un rempart
avec leurs lances et leurs boucliers,
et font retentir l ’air de leurs cris : aussitôt
les oiseaux disparurent. Arrivés
(>) Ibid. V. 1031.
(2} V. IO47.
§i v. *091.
N I V E R S E L L E . 50»
dans l ’îie, ils frappent leurs boucliers
les uns contre les autres ; et épouvantent
tous les oiseaux, qui l’infestoient, et
ui prennent aussitôt la fuite (3). C’étoit
ans cette île, qu’avoient abordé les fils
de Phryxus, partis de Colchide pour
aller à Orchomène recueillir la succession
de leur aïeul. Ils s’étoient embarqués
sur un vaisseau de Colchi-
diens, qui avoit fait naufrage ; et ils
s’étoient réfugiés dans cette île déserte
(4 ). Ces infortunés, voyant arriver
les Argonautes, leur demandent
du secours, après avoir fait l’exposé
de leurs malheurs ( 5 ). Le fils d’Eson ,
se rappelant alors les prédictions de
Phinée , leur fait plusieurs questions ,
sur leur n om, leur naissance, sur les
motifs qui les ont conduits en ces lieux.
Argus, l ’un d’eu x , lui raconte l'aventure
de Phryxus leur père, qui monté
sur son Belier avoit passé dans les
états d’Aëtès roi de Colchide , et
avoit épousé sa fille Chalciopë. Nous
sommes, lui dirent-ils, leurs enfans :
notre père est mort; nous allions .à
Orchomène recueillir la succession
d’Athamas son père. Si vous désirez
savoir nos noms , celui-ci s’appelle Ci-
tysorus, celui-là Phrontis , cet autre
Mêlas , et moi Argus (6),
A peine eut-il achevé ces mots, que
les Argonautes, transportés de joie, né
pouvoient se rassasier de les regarder-
Jason leur annonce , qu’ils voient en
lui leur parent ; puisqu’il est le petit-
fils de Créthéus, frère d’Athamas, leur
grand-père. Il leur dit , qu’il va lui-
même chez Aëtès. Sans leur expliquer
les motifs de son voyage, il les accueille
favorablement, et il leur fait donner
des habits. Ils vont tous ensemble sacrifier
à Mars, Dieu tutélaire de cette
î le , sur un autel que lui avoient élevé
les Amazones, et où elles étoient dans
l ’usage de lui sacrifier des chevaux. Le
(4) V . 112».
(5) V. 1136.
(6) V. IléO.