chargés à Rome d’entretenir le feu sacré
sur ses autels. Ces iilles remplissoient
en Occident les fonctions de Prêtresses
du feu, comme les Mages des Perses ,
celles de Prêtres de ce même Dieu.
Zenon et tous les Stoïciens ( 1 ) ad-
mettoierit la dissolution de tous les élé-
niens par le feu , qui étoit un principe
incréé et corporel, mais sans forme (2) ;
au lieu que 'les élémens étaient déj à
une matière conformée.' On voit que
ce feu dissolvant étoit le feu Ether ,
d’une Nature supérieure aux élémens,
et conséquemment à celle du feu éle’-
mentaire, que souvent on a confondu
avec le feu Ether , premier principe,
auquel il est contigu, et qui circule
dans les sphères planétaires. Empe-
docle ( 3) a très-bien établi cette distinction
, lorsqu’il dit que la première
substance, qui se dégagea du cahos, fut
l’Ether, ensuite le feu qui se plaça au-
dessous ; que l’Ether composa la substance
du ciel. La terre se forma après
le feu , et ensuite les deux élémens
intermédiaires qui devinrent le lien qui
Punit au feu. Platon nommoit d’abord
le feu , ensuite lether; ce qui est une
inversion vraisemblablement dans Plutarque
, qui rapporte son opinion; puis
l ’air , ensuite l’eau, et enfin la terre.
Quelquefois aussi il lioit ensemble le
feu et l’éther ( 4 ) ; confusion qu'il faut
éviter, et qui a été faite souvent par
les anciens. Aristote n’a pas fait cette
faute. Il admet d’abord l’éther, tel qu’il
est, comme substance active et non pas
passive telle que le feu élémentaire. Il
en fait la cinquième substance , après
laquelle il range le feu, l’air ; l’eau et
la terre subordonnés à son activité. Ce
sont ces quatre derniers , qu’il appelle
passifs , tandis qu’il caractérise l ’autre
par une impassibilité absolue. Telle est
effectivement la Nature du feu éther
qui compose le principe actif dont nous
(?) Diog. Laer. L 7 , p. 519.
(2) Plut. dePlac. phil. 1. 1 , c. 2 , p. 87;. IbitL
p. 8B7, 1. 2, c. 9.
(3) Plut, de P lac. phil, l . i , ç. 6 , p-887.
avons
encore
du monde. 11 donnoit au feu éther, :qyj
compose la substance des corps célestes
le mouvement circulaire, tandis qu’il
attribuoit aux élémens le mouvement
perpendiculaire, de bas en haut pour
les élémens légers , tels que le feu et
l ’air, et de haut en bas pour les élémens
is parlé, et dont nous parlerons
vre, quand il sera question de l’aina
pesons, tels que l’eau et la terre.
Empédocle 11’assignoit point de place
déterminément constante à ces quatre
élémens, qu’il disoit souvent en changer
(5 ). .
Pythagore, outre le feu élémentaire,
admettait aussi la cinquième substance
ou le cinquième élément, dont nous
ne devrions pas parler ic i, puisqu’il ne
fait point partie de la cause passive,
mais dont il étoit indispensable cependant
de parler, puisqu’il a été confondu
avec l ’autre, et que, sans cet
avertissement, on auroit pu les confondre
dans l’explication des allégories
sacrées faites sur’ le jeu des Causes actives
et passives de la Nature. Pline,
par exemple , a commis cette erreur,
quand il dit (6) qu’il n’y a aucune
incertitude sur le nombre dés élémens,
lesquels sont au nombre de quatre , que
le plus élevé de tous est le feu , d’où sont
formés ces yeux brillans du ciel étoilé
( /JTf ) • On voit évidemment que Pline
a pris le feu élémentaire pour le feu
éther ; ce qui n’ést pas exact. C’est du
feu élémentaire, mêlé aux vapeurs que
l’air soutient, qu’est formée la foudre
et les autres météores ignées ’: c’est de
la substance'du second que’ Sont tirés
les astres. Au reste Pline range les quatre
élémens dans leur ordre connu , et sur
quatre couches concentriques , dont la
terre occupe le centre, placée au point
le plus bas du monde où elle reste immobile
, suivant Pline. Ce naturaliste attribue
au feu en général, une force fé-
(4) Ibid. 1. 2 , c, 7 , p. 887.
(5) Ibid. .p. 887.1 .
(6) Plin. 1. 2., c . j .
conde qui le raproclie de la Nature du
principe actif. Il est le seul, dit-il, des
élémens ( 1 ) qui se propage lui-même,
et qui d’une foible étincelle devienne
un vaste incendie. C’est là sans doute
ce qui a fait associer le feu élémentaire
à la Nature active et féconde du
feu éther, ou du feu artiste, qui constitue
l’ame universelle du monde, suivant
Varron , lequel fait tout dépendre
du feu modérateur de la Nature (2).
Cette idée théologique sur l’activité
du premier élément étoit consacrée dans
le cérémonial du mariage chez les Romains
; on obligeoit la nouvelle épouse
à toucher le feu et l’eau (3). Plutarque
examinant la raison de cet usage croit
la trouver dans l’opinion philosophique,
qui faisoit du feu un principe mâle,
et de l’eau un principe femelle. Il Voit
dans le feu l’élément actif qui fournit
le principe du mouvement , ef dans
l’eau le sujet ou la maière qui le
reçoit. De même que le feu sans humidité
est aride et incapable de rien alimenter,
et que l’eau sans la chaleur est
stérile et oisive, de même le mâle et
la femelle ne peuvent rien produire
séparément , et sans leur mutuelle
union. Ceci s’accorde avec l’opinion attribuée
à Hermès, savoir que le feu avoit
fécondé l’eau et l’avoit rendu mère.
Les vestales dépositaires du feu sacré
étaient aussi chargées de garder l’eau
(4)- rut
Lactance regarde le feu et l’eau (5),
comme les deux principaux élémens,
de l’union desquels 'résultent tous les
Corps sublunaires. Il appelle le premier
un élément mâle et un principe actif;
et le second nu élément-femelle et un
principe passif. Il rappelle à ce sujet
la cérémonie du mariage chez les Romains,
celle dont nous venons de parler,
et donne pour raison, que tout foetus
ou production qui résulte de l’imion
(0 Plin. 1. 2, ç. 107.
<>) Ibid. Orig. ,1. 8, c. 6.
(3) Plut. Quæat.Rom.p. 263,
*97
des deux sexes, ne se forme que par
le concours de l’humidité et de là chaleur
, et que c’est de cette union au
feu principe, que vient la vie du corps
animé ; que dans l’humide réside la
matière qui s’organise , et dans la chaleur
la force organïstique qui constitue
l ’ame ou la vie de l’animal. Il tire
un exemple de la génération des oiseaux
, dont l’oeuf contient un fluide
qui ne s’organisera jamais, et jamais
ne sera animé, que par la force active
de Ja chaleur qui lui est communiquée
par l’incubation ou’ par tout autre
moyen. Cette comparaison de l’oeuf a
été appliquée au fluide sphérique,.dont
s’est formé l’Univers par la chaleur du
feu éther, principe de mouvemen et de
vie. Lactance voit une conséquence de
cette opinion dans ia peine portée à
Rome contre*les exilés, à qui on inter-
disoit le feu et l’eau, c’est-à-dire les
deux principes de la vie, et les deux
élémens premiers de toute organisation
; ce qui étoit équivalent à une
peine de mort. Le feu , suivant Lactance,
est l ’élément propre à l ’homme,
qui est un animal céleste, et qui comme
le feu tire son origine du ciel; au lieu
que l’eau entre en plus grande quantité
dans la formation des autres animaux
(g'ffgg)- L ’eau est un élément cor-
porèl ; le feu tient de la Nature de
l’amè.
D’autres philosophe? attribuoient à
la terre la Nature passivey et laissaient
au feu sa Nature active. Ainsi peu soit
Proclus. On a coutume, dit ce philosophe
, d’appeler mâle le feu et de
donner le titre de femelle à la terre (6) ;
celle-ci fournit la matière et le premier
lui applique les formes. Le feu parmi
les élémens tient le rang de principe
actif, et renferme une énergie qui le
rend propre à faire et à organiser les
différens Etres ; il les pénètre tous
(4) Cedrenus, p. 148.
(5) Lactance, î. 2, 0. 10. ’
(6) Procl. a^Tirn, 1. 1 , p. 33— 34.