qui conten oient le tableau hiérarchique
des puissances célestes et les principes
de leur Astrologie et de leur théologie ;
on les appeloit les Genèses , ou livres
Géniques de Mercure. Orphée avoit
aussi écrit un livre, appelé le Testament,
où il parloit des trois cent soixante
Dieux, ou d’un ordre de génies en
nombre égal à celui des dégrésdu cercle
du zodiaque et des jours de l’année ,
sans épagomênes ; c’est St. Justin qui
nous l’apprend (i). Hésiode avoit aussi
écrit sur les étoiles.
Apollodore commence ainsi sa bibliothèque
des Dieux , ou sa théogonie (a) :
» Au commencement, Uranus, ou le
c i e l , fut le seigneur de tout le monde ;
il prit pour femme Ghê , ou la terre ,
et en eut plusieurs enfans «.
Proclus , parlant du cycle épique (3),
qui n’est autre chose que la collection
des poésies cosmogoniques, qui avoient
pour objet le ciel et les cycles , ou les
révolutions du temps , le fait commencer
au mariage, ou à l’union mythologique
d’Uranus et de Ghê.
Les Atlantes (4) reconnoissoient pour
leur premier roi Uranus , à qui ils don-
noient pour épouse la terre, qu’ils ap-
peloient Thitéa, la nourricière. Il eut
de son mariage avec elle un grand
nombre d’enfans ; on en comptoit qua-
rantë-cinq , nombre égal à celui des
dégrés de la partie supérieure du ciel ,
lorsqu’on distingue en partie supérieure
et inférieure le ciel, qui s’étend au-dessus
de la terre, depuis l’horizon jusqu’au
zénith, ou lorsqu’on partage en deux
également le ciel visible , par un cercle
parallèle à l ’horizon. Les petits-en-
fans, qui naissent de ce mariage , sont
le prince Soleil et la princeffe Lune sa
soeur, qui , dans la suite , furent placés
dans les deux grands astres , qui éclairent
le Monde. De la même famille
paissent Hespérus , ou l’étoile du ber- 1
(1) Justin, de Monarch, p. 104.
(2) Apollod. 1, 1.
(3) Apttd Phot. Bibl. p. 982. Codex. 239.
y ) üiçd. Sic. 1. 3 , c. 56 St 57 , p. 224.
ger ; les Atlantides , ou les Pléiades :
Allas , qui porte le ciel , est leur père,
Le caractère allégorique de cette pré-
tendue histoire des anciens rois de
l’Atlantide perce de toutes parts dans
le récit de Diodore, qui nous a conservé
les débris de cette Cosmogonie, qu’il
appelle l’ancienne histoire dès Atlantes,
Mais nous n’y verrons, que l’histoire du
ciel, conservée par les peuples qui habitaient
la partie la plus occidentale
de l’Afrique , à l’endroit où la médi-
terranée communiqueà l’océan, comme
nous n’avons vu également, qu’une
semblable histoire, dans celle des Phéniciens
, qui habitoient le bord oriental
de la même mer, et qui faisoient des
voyages continuellement le long des
côtes de cette même mer, jusqu’aux pays
voisins du mont Atlas 3 d’ailleurs , ces
deux histoires cosmogoniques ont entre
elles beaucoup de traits de ressemblance.
Nous les mettrons donc dans la
même classe ; peut-être même ont-elles
une commune origine, comme elles ont
certainement le même objet, c’est-à-dire,
la Nature et ses causes.
La théogonie des Crétois (5) donne
auili à Uranus pour femme la princesse
Ghê , et pour fils , le Dieu du temps, ou
Saturne.
L ’histoire anonyme attribuée à Bé-
rose , et qui contient les principes cosmogoniques
des Arméniens , sur la nature
des causes premières , suppose un
premier Dieu , ou un premier chef des
grands et des petits Dieux, qu’il appelle
Noah, le ciel (6) et la semence <lu
monde ; il lui donne pour femme Aretia,
ou la terre , dans le sein de laquelle le
ciel verse sa semence et d’où nous voyons
tout éclore.
Euhemère, dans le récit qu’il fait de
ses voyages dans l’île de Panchàïe (7)1
au midi de l’Arabie , suppose qu’on J
honoroit Uranus, ou le c ie l, prenne!
(5) Diod. 1. 5 , c. 56, p. 382.
S Beros. 1. 3.
Euseb. Præp. Er . 1. 2 , c. u
Jloi du pays. On kii dônnoitpour femme
Estia, ou Vesta, la même que tous les
(incicns disent représenter la terre. Do
cette union était né Saturne,’ ou le Dieu
du temps, Jupiter, &c. dont les noms
sont les mêmes, que ceux que portent les
deux planètes , que le ciel ou Uranus
comprend ou enferme dans sa révolution
, et qui se trouvent placées immédiatement
au-dessous de lui. On mon-
troit tute haute montagne dans ce pays,
sur laquelle le Prince Uranus alloit
observer les astres (1). Les Atlantes
en disoient autant d’Hesperus et d’Atlas,
ou de la haute montagne, qui est à
l'autre extrémité de l’Afrique , opposée
à la Panchaïe d’Euhemère.
Par-tout l’être allégorique , qui représentait
le ciel, ou quelque agent de son
mouvement, était censé avoir inventé
l ’Astronomie. Euhemère ajoute, qu’on
voyoit dans un temple de l’île de Panchaïe
une colonne, où étaient gravées
|en caractères sacrés les histoires d’Uranus,
de Jupiter, d’Apollon et de Diane,
lécrites par Mercure, c’est-à-dire , par
le fameux Thaut, qui, suivant Sancho-
uiaton, grava l’iiistoire et les portraits
des Dieux de Phénicie. On remarquera,
|que les Phéniciens étaient (2) originairement
partis de ces pays, pour s’établir
sur la Méditerranée ; ce qui rapproche-
poit ces cosmogonies l’une de l’autre,
si le récit d’Euhemère peut être regardé
comme exact et véritable.
| b paroît certain, si nous en epoyons
pimplicius, que la plupart des peuples
ne faisoient point remonter leurs ori-
gines au-delà du mariage d’Uranus et
de Ghê (3) , les deux premiers principes,
dit-il, sacrés et incorruptibles.
| Chérémon enditautant desEgyptiens,
tau ils ne remontaient pas au-delà du
monde visible dans la recherche des
jcauses. Aussi Vulcain , ou le principe
[du feu et le soleil sont-ils placés à la
(0 Diod. sic. 1. c. 44.'
(2) Ibid. c. 46. 5
(3) Simplic. de CcbIo. 1. 2.
4) Herod. in Clio. c. 131. Melpoûrène, t. 34.
i 35
tête de leur généalogie des Dieux et
des Rois. Les Chinois révèrent le soleil
et la terre, comme leurs plus grandes
divinités.
On trouve dans les livres des Perses
des prières adressées à la terre , dans
lesquelles on lui donne le titre de femelle
, qui porte un homme.
On trouve ailleurs , dans un autro
livre sacré de ces peuples, un passage,
où il est dit que le ciel est le mâle ,
et la terre la femelle. C’est cette idée
théologique, qui a été exprimée par le
Lingam, dont nous avons parle plus
haut.
Diodore-de-Sicile, sur la foi d’un
ancien voyageur, nous parle de deux
îles de l’Océan méridional, dont les ha-
bitans reconnoissoient le ciel pour leur
première divinité. II l’étoit aussi des
Perses, qui, suivant Hérodote ( 4 )»
l’appeloient Jupiter. Les Scythes don-
noient à ce Jupiter la terre pour femme.
Elle étoit aussi la grande divinité des
Germains, qui l’honoroient sous le nom
de Herta (5).
Chez lès Celtes, la culte du ciel n’était
pas séparé de celui de la terre, nous
ditPeloutier(é), et ces peuples disoient,
que l’une auroit été stérile sans l’autre,
et que leur mariage avoit produit l’Univers.
Les Scandinaves reconnoissent pour
premier R o i, Bur, ou le ciel , et ils
donnent à Furtur son fils la terre pour
femme. Olaüs Rudbek (7) ajoute , que
leurs ancêtres étaient persuadés , que le
ciel se mariant avec la terre, et unissant
ses forces avec celles de son épouse,
avoit produit les animaux et les plantes.
C’est ce mariage du ciel et de la terre,
qui donna naissance aux Azes,ou aux
Génies fameux dans la théologie du
Nord. La théologie des Phrygiens et des
Lydiens faisoit naître les Asii du mariage
du Dieu suprême avec la terre,
( j) Tacit. de Morib. Ger. c. 40.
(6) Pelout. Hist. des Celf. t. 5 , p. 189.
(7) Atlant. Olaüs Rudbek, t. 1 , p. 6S9. - 694.;
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