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corps d’un des Chiens célestes , il fut
aisé de composer un tout unique et
monstrueux , tel que le Cerbère à tête
de chien et à queue de serpent. Ces réunions
sont dans le goût des anciens, et
le planisphère Egyptien de Kirker en
est une preuve. Il est bon de remarquer,
que ce planisphère place également,
sous le signe des Gémeaux, un homme
à tête de chien, qui tient un trait d’une
main, symbole composé des parties du
chien, qui se couche avec les Gémeaux,
et de la flèche, qui monte à l’Orient
en même temps. Ainsi, tout s’accorde
à nous autoriser à placer un, et même
deux chiens, pour Paranatellons des derniers
degrés des Gémeaux, où nous les
avons mis. D’où il résulte, que le Poète
qui chantoit les triomphes d’Hercule ,
sur les animaux célestes, qui par leur
lever ou leur coucher fixoient les époques
du mouvement du soleil, dans
chaque mois , eut, pour matière du
onzième chant, sa victoire sur un chien
monstrueux, dont les formes s’unis-
soient à celles du serpent. C’est son
triomphe sur le terrible Cerbère. Ce
chien est le fameux Chien céleste, situé
dans la partie Méridionale de la sphère,
ou du monde, où les anciens plaçoient
les enfers. Nous verrons souvent des
exemples de cette dénomination donnée
à cette partie des signes, connue sous
le nom des signes inférieurs, ou de
partie affectée aux enfers. C’est ce chien
qui fut honoré en Egypte, sous le nom
d’Ânùbis ( 1 ) , .et que Statius appelle
Lethtæus Janitor,tm Gardien des portes
des enfers. Cette correspondance entre
les trois chiens Sirius , Anubis et Cerbère
, semblé nous être indiquée dans
un passage de Lucien, où Socrate ,
pour justifier son serment familier, dans
lequel il juroit par lé chien, dit: Ne
remarquez-vous pas combien est grande
la divinité du chien ? Il est au ciel sous
le nom de Sirius (a) ; dans les temples
(i) Statius Sylvarum , 1. 3, n°. 2, v. U2.
(-) Lucian, t. i , p. 372, de vita au ci.
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d’Egypte , sou3 celui d’Anubis, et aux
enfers, sous celui de Cerbère. Or
nous venons de voir d’un côté Anubis
caractérisé par l’épithète d’infernal
que l’on donnoit à Cerbère ; et d’un
autre, nous savons qu’Anubis, ou le
chien adoré dans les temples d’Egypte
n’étoit que l’image vivante du Chien
céleste (3 ) , à l’influence duquel cet
animal étoit soumis. En voilà plus qu’il
n’en faut, pour justifier les rapports que
nous avons établis entre le chien des
enfers, dont triomphe Hercule, et la
constellation du Chien ', à laquelle, durant
ce mois, s’unit le Soleil, et qu’il
semble enchaîner à son char, pour le
fairepasser dans l’hémisphère lumineux,
dont le Soleil et le jour sont toujours
le centre. Depuis ce moment , le
Chien céleste ne paroît plus la nuit,
mais il accompagne ou précède, durant
le jour, le char du Soleil. Aussi la
fable dit - elle S qu’Hercule amena Cerbère(
4 ) à la lumière. La doctrine des
enfers étant un des principaux dogmes
de l’initiation d’Eleusis , comme nous
le ferons voir ailleurs , l’auteur du
Poème d’Hercule a placé, sous le titre
de ce chant, l’origine des mystères institués
par Orphée , et a supposé que son
héros, avant de descendre aux enfers,
s’étoit fait initier à Athènes. Le nom
de Linus fils d’Orphée, qui l’initia ,
amène naturellement le souvenir dé son
père, et fournit au Poète un morceau
épisodique, dans lequel il raconte l’aventure
touchante d’Orphée, qui descendit
aux enfers, pour en retirer Eurydice
, comme Hercule alloît en retirer son
ami, comme Bacchus alla y chercher
Sémélé sa mère.
Nous ne’ dissimulerons pas au reste,
que ce travail pourroit être aussi-bien
placé sous le signe suivant qu’ici , et
former le douzième travail, comme 3
forme le onzième. Car la plus grande
partie du Cliîen se lève avec le Cancer,
(3) ÀElian. 1. 10, c. 47.
{.) Diod. 40, p. 271, t. 26.
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Uni à Sirius. Voilà donc le fondement
des deux fictions et des deux victoires
remportées , l’une sur un chien redoutable
, et l’autre sur le héros Cycnus.
Diodore place la victoire sur Cycnus
entre deux époques remarquables. La première
est celle où Hercule défit le fleuve
Acheloüs, métamorphosé en taureau (3),
dont il rompit la corne , qui devint ensuite
la corne d’abondance ou d’Amal-
thée {/) ; allusion manifeste au signe du
Taureau, qui a sous lui le fleuve Eridan,
et au-dessus la chèvre Amalthée , que
nous avons projetés dans notre dixième
division ; la seconde est l’époque où Dé-
janire lui envoya la robe du Centaure,
qui causa sa mort, et fixa le terme de
ses travaux. Ainsi , d’après les traditions
recueillies par Diodore , le combat
contre Cycnus suit le dixième travail,
et ne peut passer le douzième ou la fin
de ses travaux'; ce qui le place à l’époque
même que fixe Ifésiode , au tempe
où la Cigale annonce les ardeurs de l’été,
et où la Canicule va en redoubler les
chaleurs.
Nous- regarderons donc la victoire sur
Cycnus, comme un épisode du onzième
ou du douzième chant du Poème , dans
lequel on célébroit les rapports de ces
derniers mois avec la constellation du
Cygne céleste , qui par son lever du soir
y correspond. D’ailleurs , le calendrier
des Pontifes marque sous ce mois, oit
dans l’intervalle du temps que le Soleil
met à parcourir les Gémeaux , le lever
du Dauphin , lequel est placé immédiatement
sous le Cygne , et qui ne monte
jamais sur l’horizon sans- lui. Quelques
jours auparavant, le même calendrier
place le lever de l’Aigle , lequel monte-
aussi avec le Cygne. Ainsi nous avons
été fondés à projeter sous les Gémeaux
ce dernier animal céleste , comme nous
le sommes à établir des rapports entre
cette apparence Astronomique , et la
victoire d’Hercule sur Cycnus , puisque
(0 Ev-ato‘stîi. c. 2-5.
(2) Hesiod. Scut. Here. v. 39U
(3) Dicdor, e. 35 , p: 280,