Athéniens. Aussi Homère, dans son
dénombrement des vaisseaux, ne donne
le nom de peuple qu’aux seuls Athé-
niens.
Je n’ai pas cru cette digression étrangère
à mon abrégé de la vie de Thésée par
Plutarque , parce qu’encore bien qu’il
ne s’agisse ici que d’une fiction sur le
Soleil, il n’est pas indifférent d’observer,
que l’Auteur de cet ancien poème
n ignoroit pas combien le nom de
peuple étoit sacré , puisqu’il met au
nombre des bienfaits de son Héros envers
l’humanité l’hommage, qu’il sut
rendre à la souveraineté du peuple , à
laquelle il sacrifia la royauté , dont il
avoit hérité de son père. Il en est de
même du principe d’égalité , qui met
au même niveau tous ceux que le Soleil
appelle à la jouissance de sa lumière,
de sa chaleur , et des autres bienfaits
qui. en découlent.
De même qu’on suppose qu’IIercule,
Osiris et Bàcchus élevèrent des colonnes
, et y gravèrent des inscriptions,
de même on parle d’une fameuse colonne
élevée sur l ’isthme de Corinthe.
On y lisoit cette inscription simple d’un
côté : Ce n’est pas ici le Vêloponèse ,
mais l ’Ionie ; et de l’autre côté : C’ est
ic i le JPéloponèse , et non pas l ’Ionie.
Comme Hercule avoit établi des fêtes
et des jeux dans la Grèce , Thésée en
établit aussi dans l ’Isthme (1) , afin que
les Grecs célébrassent les jeux Isthmiques
, par ses ordres, en sa mémoire ,
et en honneur de Neptune, comme ils
célébraient en Elide , par les ordres , et
en mémoire d’Hercule , les jeux Olympiques
en honneur de Jupiter.
Thésée entreprit aussi le voyage du
Pont-Euxin , pour suivre Hercule dans
son expédition contre les Amazones ,
au rapport de Philochorus et de quelques
# autres Ecrivains ; il en reçut An-
tiope pour prix de sa valeur.
Toute la Grece (2), et Athènes en
( ') Hygin. fa b . 3 7 3 .
Ç ) Pausaa, Cor. p. 75.
particulier, renfermoitbeaucoup de mo.
numens (i) , qui retràçoient le souvenir
des anciennes fictions faites sur le*
Amazones , et sur leur prétendue invasion
dans l’Asie et dans la Grèce ; et
néanmoins nous avons vu dans le neuvième
Travail d’Hercule, Ce qu’on doit
entendre par cette fable des Amazones.
On les faisoit combattre jusques dans
l’enceinte des murs d’Athènes , et dans
le Pnyx. On y montrait, encore du
temps de Plutarque les tombeaux de
plusieurs d’entr’elles (3). Mais nous
savons réduire à leur juste valeur ces
sortes de monumens , puisque la plû-
part des astres , le Soleil et les Constellations
, , avoient des tombeaux ,
comme ils avoient des autels. Après un
combat opiniâtre , dont les succès furent
variés , la paix enfin se conclut
par l’entremise d’Hippolyte, une de
ces Amazones, qui s’étoit attachée à
Thésée. D’autres prétendent , -qu’elle
fut tuée en combattant vaillamment
près de Thésée , en. mémoire de quoi
on éleva sur son tombeau la colonne
qui est près du Temple de la Terre
Olympique ou dé la Lune. Le lieu où
cette paix fut jurée , s’appela Orcomo-
sion ; il est vis-à-vis du temple de Thésée.
Tous les ans on fait un sacrifice
aux Amazones la veille des fêtes de ce
Héros.
Le poète de la Théséide , dit Plutarque
, écrit qu’elles avoient entrepris
cette guerre contre Athènes , pour venger
l’affront que Thésée avoit fait à
Antiope en la quittant, d’autres disent
en la tuant ( 4 ) , pour épouser Phèdre ,
et quTIercule les mit à mort. Plutarque
observe, que Thésée n’épousa Phèdre
qu’après la mort d’Antiope, dont il
avoit eu un fils nommé Hippolyte , ou .,
suivant Pindare , Démophoon. On dit
aussi de Thésée, qu’il avoit enlevé la
N ymphe Anaoco ; qu’il épousa Péribée ,
mère d’A ja x , et Phérébée et Ioppé,
(3) Pausan. Attic, p. 37.
(4) Hygin. fab. 341.
filles d’Iphiclès (1) ; qu’étant devenu
éperduement amoureux d’AEglé , fille
de Panopée , il quitta honteusement
Ariadne , à qui il avoit de grandes obligations
; qu’enfin l’enlèvement d’Hélène
mit toute - l’Âttique en feu, et
causa son exil et Sa mort. Il avoit cinquante
ans, clit-on,quand il ravit Hélène,
qui étoit encore trop jeune pour être
mariée ; d’aiitres supposent , "au contraire
, qu’elle devint mère, et qu’elle
accoucha à Argos (2).
Ici Plutarque entre dans quelques détails
sur cet enlèvement. Quelques Auteurs
ont prétendu , que ce ne fut pas
Thésée qui l’enleva , mais qu’Ida et
Lyncée , les véritables ravisseurs , la
1 mirent en dépôt entre ses mains , et
qu’il la garda , sans vouloir la rendre à
ses frères Castor et Pollux. D’autres
disent, que ce fut Tyndare lui-même ,
père d’Hélène , qui la lui donna en
garde, pour la mettre à l’abri des poursuites
d’Enarsphorus, fils d’Hippocoon,
qui cherchoit à toute force à l’enlever,
quoiqu’elle ne fût encore qu’un enfant ;
[mais voici une tradition plus vraisemblable
et plus accréditée.
[ On publie, que Thésée et son amiPi-
tithoiis allèrent ensemble à Sparte , et
ravirent Hélène (3), qui dansoit à une
fête, dans le temple de Diane, surnommée
Oi-thia. Ceux qu’on envoya après
eux çe contentèrent de les poursuivre
[jusqu’à Tégée , et n’allèrent pas plus
loin. Ces ravisseurs se voyant en sûreté,
après avoir traversé le Péloponèse,
tirèrent au sort à qui aurait cette Princesse
> et ils convinrent, que celui qui
l’auroit, aiderait son compagnon à en
enlever une autre. Le sort favorisa
i Thésée , qui , en. attendant qu’Hélène
fut en âge , la mena à Aphidnes, où
(0 Athen. 1. 13 , c. 2.
(2) P.lus. Cor. p. 63.
! 0)' Pausan. Laconie, p. 101,102. Cor. p. 65—■
p ‘ Hygin. fol. 79. Ciem. Alex. Strom. 1. 1, p. 336.
êoerat. Helenæ Laud. p. 435.
U). Tzetés, Chiliad. 2 , y, 745 , etc.
iî) Pausan. Ibid. p. 65.
il fit venir AEthra , sa mère, afin qu’elle
en eût soin. Il la confia à celui qui com-
mandoit dans cette place , et qui étoit son
ami ; et après lui avoir recommandé le
secret , il ne songea qu’à Accomplir
l'engagement qu’il avoit pris avec Piri-
thoiis. Ils allèrent donc tous deux en
Epire ( 4 ) , dans le dessein d’enlever Proserpine
, fille d'Aidonéus, roi des Molosses
(5). Ce prince avoit un chien ,
appelé Cerbère , contre lequel il faisoit
combattre les amans de sa hile , promettant
de la donner en mariage à celui
qui l’aurait vaincu. Les deux amis (6)
ne furent pas plutôt arrivés en Epire ,
que le R oi, averti que Pirithoüs yenoit à
dessein , non de demander ouvertement
sa fille , mais de 'l’enlever , les ht arrêter
sur l’heure même ; il donna Pirithoüs à
déchirer à Cerbère , et il garda Thésée
prisonnier. On doit regarder ce récit,
plutôt comme une explication et un
commentaire des anciennes fictions sur
Thésée, que comme la fable originale,
que l’on trouve dans d’autres traditions
qui font descendre Thésée aux enfers
(7) > Pour Y enlever Proserpine , épousa
de Pluton , appelé Adês ou Adonéus.
La fable des Travaux d’Hercule le suppose,
comme on peut le voir dans notre
explication du onzième Travail de ce
Héros, travail qui répond au signe des
Gémeaux, freres d’Hélène. Hésiode avoit
fait un poème sur la descente de Thésée
aux enfers (8). On sent, que si Thésée
est le Soleil, il n’y a pas de raison
pour qu’on ne l’ait pas fait descendre
aux enfers, comme Hercule , Bacchus ,
Osiris , Adonis , Christ, etc. qui ne
sont que le Soleil sous différens noms.
Quoi qu’il en soit du choix , qu’on
pourra faire entre ces deux fictions , il
est un fait sur lequel tous les Auteurs
(6) Hygin. fab. 257. Plut, de Amico. p. 93.
Moschus et Bion. Id. in Hyacinth.
(7) Isocfat. Helenæ Laud. p. 443. Luc. t. 2 ,
de Lactu , p. 428. Hygin. Fab. 79 et Fab. 251.
Apollod. 1. 2. Servius Comment, ad AEneid. 6 ,
v. 618—122.
(8) Pausan. Boiotic. p. 306.