3 l 4 R e l i g i o n u
Iniser contre ses flancs. Les taureaux
' attaquent avec leurs cornes, sans pou-
voir 1 ebranler L ’air retentit de leurs
affreux mugissemens. La flamme , qui
soit de leurs n arin es,ressemble à ces tourbillons.
qui s’échappent avec bruit d’une
fournaise (1) , et qui successivement
«arrêtent et se précipitent de nouveau
au dehors $ mais l ’activité de la flamme
est émoussée par la force de la drogue
dont s est frotté le Héros. Jason, toujours
invulnérable , saisit un des taureaux^
par la corne ; d’un bras vigou-
reux il 1 attire vers le joug d’airain, et
1 attere : il en fait autant au second , et
il les tient tous deux abattus. Aëtès
reste interdit à la vue du triomphe de
ce héros. Cependant les Dioscures lui
soulèvent le joug, auquel il-attache les
taureaux. Jason reprend ensuite ses
armes , presse les flancs des taureaux
avec sa pique , et conduit la charrue.
Ces animaux furieux veulent faire quelque
résistance ; mais la pique de Jason
les force d’avancer. Déjà il a tracé plusieurs
sillons, malgré la dureté du terrain
, dont le sol se brise avec bruit j
et il a semé les dents du Dragon , regardant
toujours en arrière , dans la
crainte d’être attaqué par les guerriers,
(i) Tbîd. v. ijeo.
(i) V. 1345.
N I V E R S E L L E .
qui en doivent naître. Jason laboure
tout le champ , dételle les boeufs , et
retourne à son vaisseau (2). Ses compagnons
lui font le plus grand accueil ;
il puise de l ’eau du fleuve dans son
casque pour se désaltérer , et il se prépare
à un nouveau travail. Déjà les
Géans, nés de la terre-, couvroient de
leurs armes les sillons, qu’il avoit tracés
et ensemencés. L ’éclat de leur armure
jaillissoit jusqu’aux nues. Jason, fidèle
aux conseils de Médée , lance au
milieu d’eux une pierre , que quatre
hommes n ’auroient pu soulever ; il la
jette, et se retire aussi-tôt couvert de
son bouclier. Les Colehidiens poussent
un cri semblable au bruit que fait la
mer. Aëtès est étonné ; les Géans se
disputent aussi-tôt et s’entre - tuent.
Jason profite de cet instant, pour les
charger l’épée à la main , et le fer de
ce héros en fait une ample moisson. Ils
tombent les uns sur les autres , et là
terre, qui lés a produits, reçoit leurs cadavres
dans son sein. Ce spectacle
étonne et afflige Aëtès, qui retourne
vers sa ville tout rêveur , méditant de
nouveaux moyens de perdre Jason et
ses Compagnons. La nuit survient , et
termine le combat (3).
(3) V. 1406.
C H A N T Q U
T i E Poète , après avoir commencé ce
Chant par une nouvelle invocation à la
Muse , qu’il invite à raconter ce que
fit Médée pour' son amant, et sa fuite
loin de sa patrie , nous représente
Aëtès dans son palais , tout occupé de
nouveaux moyens de perdre les Argonautes
(1). Il soupçonne ses filles d’intelligence
, et Médée ne peut se dissimuler
les soupçons de son père 5 elle en
conçoit les plus vives alarmes , que le
Poète nous décrit. Elle alloit même se
porter aux dernières extrémités du désespoir
, si Junon ne lui eût inspiré le
dessein de fuir avec les fils dePhryxus (2).
Cette idée releva son courage. Elle
cache dans son sein les trésors de sa
cassette magique , qui renfermoit ses
herbes puissantes ; elle baise son lit et
les portes de son appartement ; elle détache
une boucle de cheveux qu’elle y
laisse , pour servir de souvenir à sa
mère ; elle prononce un discours, qui
Contient les adieux tristes, qu’elle fait à
sa mère , à sa soeur , et à toute sa maison
; elle verse en même temps des
torrens de larmes ; puis elle s’échappe
furtivement du palais, dont les en-
chantemens lui ouvrent les portes (;).
Elle étoit nuds pieds ; elle soutenoit de
la main gauche l ’extrémité d’un léger
v oile , qui s’abaissoit sur son front, et
de la main droite elle relevoit le pan
de sa robe. Médée traverse ainsi la ville
d’un pied agile , en prenant des rues
détournées ; elle est déjà hors des murs,
sans que les sentinelles l’aient apperçue.
(1) Apollon. 1. 4 , v. 2.
(2) Ibid, v* sa.
A T R I E M E.
Elle dirige sa fuite vers le Temple, dont
les routes lui étoient connues , et près
desquelles elle avoit été cueillir souvent
des plantes, quicroissoient près des tombeaux.
Son coeur battoit dans la crainte
d’être surprise. La Lune, qui la voit, se
rappelle ses amours avec Endymion ,
dont ceux de Médée pour Jason lui
retracent l’image. Le Poète met. à cette
occasion un discours dans la bouche de
cette Déesse , qu’elle^ adresse à Médée
(4) , tandis que celle-ci Y°l°it à
travers la plaine dans les bras de son
amant. Elle dirige ses pas le long
du rivage vers les feux , qu’elle voit
briller dans le camp des Argonautes.
Sa voix se fait entendre au milieu des
ombres de la nuit : elle appeloit Phrontis
, le plus jeune des fils de Plnyxus ,
qui bientôt , ainsi que ses frères et
que Jason , reconnurent la voix de la
Princesse : les autres Argonautes restèrent
surpris. Trois fois elle cria ; trois fois
Phrontis lui répondit. Les Argonautes
rament vers le bord du fleuve , où déjà
son amant s’est élancé pour la recevoir.
Phrontis et Argus , les deux fils de
Phryxus , y sautent aussi. Médée tombe
à leurs genoux en leur criant : amis ,
saüvez-moi ; sauvez-vous vous-mêmes. :
nous sommes perdus : tout est découvert,
Embarquons-nous avant que le
Roi ait monté ses coursiers. Je vais
vous livrer la Toison, après avoir asr
soupi le terrible Dragon qui la garde-
Et t o i , Jason , sonviens-toi des se)r
mens que tu m’as fais ; et si je quitte
Ttt 2