Vj e p i t r e a m a f e m m e ,
recherches, par les charmes de la société la plus douce ?
Depuis vingt—deux ans cjue l hymen nous unit, tu as
répandu le bonheur sur tous les instans de ma vie. Bonne
mère, bonne épouse, bonne amie, bonne citoyenne, simple,
franche , généreuse , tu as joint à la philosophie des
moeurs celle des opinions , et la raison la plus épuree au
caractère le plus égal. La sérénité de ton fr o n t, image
de la tranquillité de ton ame , inspire une douce gaité à
ceux qui vivent dans ta société. Ton époux et les livres
ont toujours été ta passion la plus forte ; ï aimer et t'instruire
sont ton plus doux plaisir. L'éloge le plus grand,
qu'on puisse fo ir e d e jo n goût, c'est ton estime pour
Voltaire , à qui tu consacres tout le temps „ que te
laissent les soins économiques de ta maison , dont le
bon ordre est le fou it de ta surveillance et de ton travail.
S 'il te reste quelques momens , après avoir épuisé
toute ton admiration sur les productions de ce génie im-
jmortel, dont la nature n'offrit jamais que cet exemple ,
tu pourras jeter un coup-d'oeil sur les Ouvrages de ton
époux. Son esprit, comme son coeur, est à ton Son nom
augmentera pour toi l'intérêt de cette lecture , et ta tendresse
pour VAuteur te dérobera les déffauts de VOuvrage.
L is -m o i, et je serai amplement payé de mon travail.
C'est de toi seule, que le Public le recevra. I l eût été
brûlé sans toi. Je tiens plus à cette Epitre, qu'au reste
de l'Ouvrage.
D u p u i s .
P R È F A C E.
Q uoique cet Ouvrage porte le titre de Religion Universelle, il s’en faut
de beaucoup, que j aie prétendu y établir une Religion, qui dût être
admise par tous les Peuples. Une telle sottise n’entra jamais dans ma tête.
J ’analyse les opinions des autres, et me garde bien d’en créer une. Le
génie de l ’homme, qui peut expliquer les Religions, me paraît bien au-dessus
de celui qui en fait; aussi est-ce à la première gloire que j’aspire. C'est
au Public à décider, si je l ’ai méritée. Je ne dissimule pas, que je l’ai
cherchée, non point par la vanité de passer pour avoir fait ce que
d’autres navoient jamais fait avant moi ; mais par amour pour la vérité,
dont j’ai soif, ainsi que de la justice. Tout mon travail a pour objet
de connoître, dans quels rapports nos Pères nous ont mis avec la Nature et
avec la Divinité, et d’écarter le voile mystérieux, sous lequel ils ont
voilé la science religieuse. J’examine, non pas ce qu’on doit penser de la
Divinité ou de la cause éternelle, qui meut le monde, et qui m’a produit ;
mais ce qu’en ont pensé les hommes de tous les siècles et de tous les
pays. Existe-t-il un Dieu, ou une cause suprême, vivante, intelligente,
souverainement puissante, éternelle et incompréhensible à l ’homme ? C ’est
ce que je n’examine pas, et que je crois inutile d’examiner; non-seulement
parce que cela me paraît clair, mais encore, parce que cette question
n’entre pas dans le plan de mon Ouvrage ; puisque je ne suis que l’historien
des opinions des autres, et que je ne donne point la mienne, qui d’ailleurs
importe peu à mes Concitoyens.Qu’est-ce que l’Ame? est-elle immortelle?
Toutes ces questions philosophiques n’entrent dans mon travail, que comme
partie historique. et nullement dogmatique. Comme Citoyen, je donnerai
le premier l’exemple de la soumission à toutes les opinions, qui formeront
le voeu général ; sur-tout, quand elles tendront à fortifier le lien de la
morale et de la législation, et à rendre l’homme meilleur. Comme
Philosophe, je me garderai bien de commander aux autres une opinion,
et de me placer entre mon semblable et la Divinité, Tout homme a ,
comme moi, le droit de ne voir que lui et la Nature . et de fixer les
rapports, dans lesquels il croit devoir être avec elle, sans opinion intermédiaire.