f)6 R E L I G I O N U N I V E R S E L L E ,
qui tons deux ont écrit sur la religion
des anciens, et ont recueilli leurs dogmes
philosophiques et religieux, attestent le
respect des Egyptiens pour l’élément de
l ’eau , qu’ils avoient déifié, en recon-
noissance des bienfaits qu’ils recevoient
du N il, une de leurs plus grandes Divinités.
C’étoit en Egypte, que Thaïes avoit
puisé ses dogmes cosmogoniques sur la
divinité de l’eau, premier principe de
toutes choses. Moyse , Orphée firent
aussi sortir de l’eau rUnivèrs ; et les
Grecs regardèrent l’Océan , comme un
de leurs plus grands Dieux.
Les prières des Perses sont adressées
souvent à l’eau, qu’ils regardent comme
principe de génération dans la Nature.
Nous ne pousserons pas plus loin nos
recherches sur les opinions des anciens
philosophes, relativement aux élémens,
aux astres , au ciel et au feu Ether qui
compose leur substance , consicieres
comme causes actives et éternelles de
tout ce qui est produit ici-bas, et conséquemment
comme autant de Dieux
nés clu sein de l’Univers, ou du Dieu
immense dont ils font partie. On vient
de voir, que tout ce qu’il y a eu de plus
grands philosophes se sont accordés a
leur donner le rang de Dieux et de
chefs de l’harmonie eternelie du monde,
le grand Dieu par excellence , qu’ils
composent par leur réunion. C’est donc
encore ici une nouvelle preuve de ce
que nous avons avancé dans notre premier
chapitre intitulé , l ’ Univers-Dieu :
savoir, que l’idée la plus simple , la plus
naturelle, et la première qui a du se
présenter aux hommes , lorsqu’ils ont
commencé à raisonner sur les causes
des effets produits ici-bas, et dont ils
•font partie, a été de les placer dans la
«Nature même et dans ses agens les plus
apparens , dont Inactivité se manifestait
à leurs yeux. Ayant rendu l’idée de
cause éternelle et supérieure à eux par
le mot Dieu, c’est donc dans la Nature
et ses parties qu’ils ont vu leurs Dieux ,
et ils n’en ont pas dû voir d’autres ,
jlisqu’à ce que l’esprit, par ses abstractions
, s’en fût créé de nouveaux , sons
le nom de Dieux invisibles et intellectuels.
Certainement ce n’est pas par-là
qu’on a commencé, et cette chimère n’a
pu appartenu' à tous les peuples, ni pu
faire oublier les Dieux, que l ’on voyoit
habituellement Yerser leurs bienfaits sur
l ’homme.
Les poètes chantèrent les Dieux naturels
, long temps avant que les Métaphysiciens
et les Spiritualistes eussent imaginé
les leurs ; et ce sont-là ces anciens
Dieux , que la fable couvre de son voile
sacré ; ce sont-là ceux qui ont été peints,
ceux à qui on a élevé des statues et des
images emblématiques,et à qui on adressa
des hymnes. L ’accord parfait que nous
venons de trouver entre les dogmes des
plus grands philosophes, entre les fictions
sacrées et les chants de la poésie,
entre les témoignages des historiens de
tous les pays, de l'ancien et du nouveau
monde, entre tous les monumens politiques
et religieux ,. les images , les statues
, les médailles, les talismans et les
’ calendriers sacrés des anciens, qui tous
déposant en faveur du culte rendu à la
Nature,,de son antiquité , comme de sou
universalité, ne permettent plus d’élever
aucun doute sur cette importante vérité.
Il résulte de-là , qn’on s’est .étrangement
trompé sur l’antiquité religieuse ;
car ce n’est pas ainsi qu’on l’a envisagée
jusqu’à ce jour. Ce n’est pas là l’origine
qu’on a donnée aux Dieux, en qui nos
sàvans, pour la plupart,n’ont vu que d’anciens
rois oii des héros dont on avoit fait
l’apothéose , comme ils n’ont vu dans
leurs aventures bizarres, que d’anciennes
- histoires altérées , au lieu d’y voir l’histoire
même de la Nature écrite en style
allégorique, S ils ont quelquefois reconnu
que les astres avoient été aussi déifies,
ils n’ont fait de cette branche de culte
qu’une partie très - accessoire , dont ils
n’ont tiré aucuns résultats, tandis qu ils
dévoient y voir la base la plus ancienne
et la plus universelle des religions. 1'
s’ensuit donc qu’il n’y a encore rien
fait à cet égard , et que i’.explication a*
fan tiqué16
l ’antiquité religieuse est toute entière à
recommencer.
C e t une vérité dont nos érudits se
fâclieront peut-être ; mais il n’en est
pas moins certain que tout est à refaire,
et qu’il y aura de bien gros livres à
brûler,; car une nouvelle méthode, aussi
différente des anciennes, doit nécessairement
donner des résultats différens.
En effet, si c’étoit sur des sphères que
les prêtres Egyptiens , comme nous Ta
dit Synésius, formoient le modèle des
statues de leurs Dieux et composoient
les emblèmes sacrés de leur religion ,
ce sera avec des sphères désormais qu’on
devra chercher à les décomposer. Si les
fables et les aventures des Dieux n’étoient
que des fictions sur les phénomènes célestes
, sur le soleil, sur la lune , sur les
planètes , sur les signes du Zodiaque,
sur les décans, sur les horoscopes, sur les
hémisphères, sur la lumière , sur les ténèbres
, sur les phases de la lune , sur
les saisons , -sur le Nil , enfin, sur la
Nature en général, comme l’ont pensé
Cherémon et lès plus sa vans prêtres
Egyptiens, ce sera par le ciel, par les
astres, par les élémens , et par le jeu
de toutes les causes physiques qu’il faudra
les expliquer , c’est-à-dire , tout autrement
qu’on a encore fait. La physique
et l’Astronomie doivent nécessairement
nous fournir les moyens de résoudre
tout ce qui a été fait sur les agenS de
la Nature et sur la sphère ; c’est la première
manière d’expliquer qu’on doit
employer, puisque ce culte incontestablement
a été le plus ancien ; c’est aussi
celle qui doit nous procurer le plus de
solutions, puisque le Sabisme a été la
Religionila plus universelle, et celle dont
les traces sont empreintes, sur plus de
tnonumens de toute espèce. : tant autre
système ne nous conduira jamais à la
véritable intelligence de ces monumens
et de ces fables , puisqu’il supposerait
ou d autres Dieux que les Dieux naturels,-
que pourtant nous avons retrouvés partout
, ou d’autre objet à ces statues et
à ces fables que les Dieux ; ce qui serait
Relig. Univ. Tome I.
vr
contradictoire dans de* monumens religieux.
Si les hommages rendus à des hommes
se sont quelquefois mêlés à ceux qu’on
rendoit aux véritables Dieux, auxquels
la flatterie les associa, ce ne fut jamais
qu’une tache légère & passagère sur le
culte de la Nature , qui resta constamment
en possession de ses autels. Il se
passa sans doute bien des siècles jusqu’à
ce qu’il se trouvât un mortel assez hardi
pour oser les partager , & des hommes
assez dégradés pour y porter leur encens.
Le despotisme des empereurs avilit
assez les Romains, pour les porter
à leur accorder les honneurs , que l ’onj
rendoit aux Dieux ; mais ce culte ne
dura qu’autant de temps , que la crainte
ou l ’intérêt eurent besoin de le perpétuer.
Jupiter tint toujours la .foudre du
Capitole , et ces - pou veaux Dieux ne
rivalisèrent pas long-temps avec ceux
de Nmna.
La taisop des obstacles qu’a toujours
trouvé le culte d’un homme à s’établir
et à subsister parmi ses semblables, est
tirée de a nature même de l’homme.
Tout est foible en lui; dans l’Univers
tout est grand. L ’homme naît, croît et
meurt, et partage à peine un instant
la durée éternelle de la vie du monde
et de la terre , dont il occupe un point
infiniment petit ; à peine sorti de la
poussière , il y rentre tout entier :
la Nature; seule reste et recompose de
nouveaux êtres de ses débris. L ’image
de ce petit être, passager peut elle effacer
du coeur de ses semblables celle
de la grandeur et de la majesté de la
Nature P Si c’est à la force que l’on a cru.
devoir dresser des autels, quel mortel,
fût-ce Hercule ou Thésée;, a pu copi-
parer la sienpe à cejttç force universelle
répandue daips toutes les parties du
monde , qui balance le soléil au centre
du système planétaire, entraîne la terre
et les astres dans son courant, soulève
ou calme les mers, enchaîne les tempêtes,
ou donne l'impulsion aux vents,
et qui enfin meut tout l ’Univers f Si c'est
N