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la barbe étoit semée d’étoiles. C’est
sous les voûtes de l’Éther, que circule
le Soleil, qui lui-même est le foyer le
plus apparent de la substance lumineuse
, qui compose l’Ether, suivant
la philosophie ancienne. Aussi Nonnus
donne-t-il à Hercule le nom A’Æ ther,
nuancé de feux de mille couleurs. Dans
la peinture que Martianus-Capella fait
du système du monde, sous l’emblème
d’un vaisseau dirigé par sept Pilotes ,
au grand mât,auquel est attachée l'image
du Lion ou de l ’animal céleste , dont
Hercule, ou le Soleil, prend la peau
pour manteau ( i ) ; on remarque la
lumière éthérée, qui inonde tout le
vaisseau, et qui se répand dans tous
les corps célestes. C’est devant ce symbole
sacré du feu éternel , que s’incline
la Philologie, et qu’elle adresse
le superbe hymne, dont nous avons
parlé plus haut. Oii voit encore ici ,
que l’image du Lion est l’emblème prin-
cipal, qui se fait remarquer dans ce
monument allégorique d’un vaisseau,
dans lequel voyage le Soleil (« ). Ce
Soleil est Hercule , non - seulement
parce que l ’attribut caractéristique, le
Lion , est commun à Hercule, et au
Soleil, mais encore parce que les anciens
ont feint, qu’Hercule parcourait
1 Univers porté dans le vaisseau du
Soleil. Telle étoit l’opinion des Egyptiens
, suivant Plutarque ( 2 ). Les Egyptiens
, dit ce Philosophe , pensent
qu’Hercule, assis dans le Soleil, fait
le tour du monde avec lui.; et ces
Peuples, suivant le même Auteur, don-
noient nn vaisseau aux deux Astres
principaux , qui éclairent le monde ,
pour désigner leur action sur l’élément
humide. Es pensoient la même chose
de leur Apollon , ou de l ’intelligence
chargée de la direction du mouvement
du 'Soleil, et ils disoient qu’Horus (3)
(1) Maman. Capell. de Nupt. Phil, 1. 2 ,.c. 2.
(2) De lside, p. 3JÎ7,ibid. 364.
(3) Ibid. p. 375.
(4) Theep. 123.
(5) Hieroglyph. b 1, c. 17.;
est la force, qui dirige la révolution
du Soleil. Or on remarquera, comme
nous l’avons dit, qu’ils appuyoient le
trône de leur Dieu Hôrus sur dés
ligures de Lion, pour exprimer les
rapports de cette Divinité avec le Soleil
auquel le Lion étoit .spécialement consacré
, suivant Théon ( 4 ), Cette obser.
vation estd’HorusApollon, Grammairien
^’Egypte (5). Cè Lion d’Hercule est
donc un attribut du Soleil. Osymandias
sur le tombeau duquel étoit tracée l’année
avec toutes ses divisions, avoit
aussi son Lion. La Théologie Egyp.
tienne conservée dans les Orphiques
et dans un passage d’Athénagore ’
suppose que du fluide cahotique et dn
sédiment des eaux, sortit nn Dragon,
ou serpent monstrueux , dont la tête
étoit celle d’un Lion, et dont le milieu
du corps étoit occupé par la figure
d’une Divinité, qu’on appeloit Hercule
et le Temps. Çe Dieu Hercule ou
le Temps étoit considéré comme
le grand Démiourgos, ou Dieu créateur
de la Nature ( é ) ; tel que le feu sacré
de l’Ether, qui bouillonne dans le Soleil,
et -qui a fait regarder cet Astre par Ché-
rémon et par les Egyptiens, comme
le Démiourgos ou l’ordonn ateur suprême
de toutes choses, épithète (7) que lui
a- conservée Hésychius. Les Gnostiques, -
qui adoroient le Soleil sous le nom
d’Iao , représentoiênt ce Dieu avec
une tête de Lion, environnée de rayons,
et le reste du corps étoit un serpent.
Ce symbole rentre assez dans l’idée
du Dragon, à tête de serpent, dont
parle Athénagore d’après les Orphiques.
Chez les Chinois ( 8 ), la mère de Fohi
devint enceinte de lui, en marchant
sur les traces d’un Géant. Sa grossesse
dura un nombre de mois, égal à celai
des douze travaux , ou des douze mois.
Fohi eut beaucoup d’esprit; son corps
(6) Athen. Leg. pro Christ, p. 18.
(7) Hésychius, v. Demiourg.
Mém. sur les Olin, par les Miss, de F t o >
t. I , p. IQ2 , I05.
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étoit comme celui d’un serpent, mais
surmonté d’une tête d’homme. Fohi fit
le Ciel et la Terre, régla les cinq élé-
mens, dirigea le cours des planètes ,
qui avoient un mouvement désordonné.
F Arabe Gelaldin parle d’un certain
[éesraïtn qui, monté sur un' Lion, alla
[porter sur les bords de l ’Océan le
culte du Soleil ( 1 ) , et éleva la statue
je cette Divinité ; il prenoit lui-Ynême
le titre de Mesraïm , Géant redoutable
par sa force. Ce Lion , sur lequel on
le dit monté ; est évidemment le Lion
isolaire, que nous retrouvons par-tout.
On trouve dans Kirker (2) des Abraxas ,
jeu l’on voit un Serpent à tête de Lion,
entourée de rayons solaires, avec ces
mots : Cnoubei et Chriouniisi'ei. -Ce sont
des monumens de la religion des Gnostiques
et des Ophionites. La tête du
lion donnée à l’animal symbolique ,
qui naît du limon, nous rappelle encore
au Soleil et au signe celeste qui
l’occupe, lorsque le Nil se déborde,
et à la constellation du Serpent, qui
termine par son lever le débordement,
et marque le moment où le limon se
durcit par l’action du Soleil. C’est à
cette action du Soleil sur le limon,
que le Nil laisse après la retraite des
eaux, que la Cosmogonie Egyptienne ,
rapportée par Diodore, attribue la formation
des animaux et celle de l’homme,
enfin l’organisation des êtres (3).»C’est
pà l’idée Cosmogonique qui a été con-
pervée dans ce passage de la Théologie
«Orphée. Aussi trouve-t-on dans la
partie du Ciel, où répond le Soleil à
tette epoqné de son mouvement an-
| | 1 > [ «ne figure absolument sem-
Wable à celle dont parle Athénagore ,
f ' '[-à occupe le milieu 'du corps d’un
,erpent, laquelle figure a conservé jus-
3« à nos j-ours le nom d'Hercule. C’est
® serpentaire ou 1 ’ Ophizicus , appelé
enule et Esculape ; il étoit adoré
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sous ce dernier nom à Sidon et à Car-
tlia^e , colonie de Sidoniens, comme
il l’etoit sous celui d’Hercule à Thèbes
en Grèce , et de Cadmus à Gortynie
en Crète, colonie de Gortys en Arcadie
, où on l’adorait sous celui d’Escu-
1-ape. T. ant son culte s’fest par-tout mul-
tiplie sous diverses dénominations.
La doctrine d Orphée sur Hercule ,
et sur ses rapports avec le Soleil, est
encore mieux développée dans un des
hymnes , qu Orphée lui-même adresse
à ce Dieu. L ’auteur ( 4 ), qui paraît
avoir ete . dans les- mêmes principes
Théologiques, que Nonnus a consacrés
dans ses Dionysiaques, qualifie Hercule
de Dieu, générateur du temps, dont
les formes varient ( / ) , de père de toutes
choses, et qui les détruit toutes; de Dieu,
qui ramène tour-à-tour l’aurore et la
nuit noire , et qui de l’orient au couchant
parcourt la carrière des douze
travaux; valeureux Titan, Dieu fort,
invincible et tout-puissant , qui chasse
les maladies , et délivre l’homme des
maux qui l’affligent. Peut-on à ces traits
méconnoître l ’Astre bienfaisant, qui
vivifie la Nature, et qui engendre l’an-
nee, que -divisent les douze mois ,
figurés par la carrière des douze travaux,
que de l’orient au couchant cet Astre
parcourt éternellement ? Aussi les Phéniciens
n ont-ils pas oublié ce rapport,
qu’a voit Hercule avec le Soleil, et que ses
douze travaux avoient avec la marche
de cet Astre, dans les douze signes qui
partagent le cours de l’année en mois.
On donna, dit Porphyre (5 ), le nom
d Hercule au Soleil ; et on désigna sa
marche à travers les douze signes, par
la fiction des douze travaux , qui lui
furent imposés. L ’explication que nous
donnerons bientôt de cette fable des
douze travaux par l’Astronomie et par
la course du Soleil à travers les signes ,
prouvera complètement la vérité de
(4) Hym. Orph. Poec Græci.
(J) Porph. Præp. Ev. 1. 3 , c. 11.