on doit regarder comme agens de
Typhon , dit Plutarque ( 1 ) , non-seulement
la sécheresse ,• les vents dangereux
, la mer, les ténèbres, mais en
général tout ce que la Nature renferme
de nuisible , et de propre à engendrer
la corruption , et à produire la destruction.
C’est à la suite de cette réflexion,
que Plutarque développe la théorie des
deux principes opposés dans la Nature,
qui se retrouve dans toutes les Théologies
, et que nous avons exposée dans
notre deuxième Livre (2).
Il voit, dans Typhon ou dans l’ennemi
d’Osiris, le principe de corruption
de la matière ( cc ) , que rectifie
et corrige Osiris, non pas en
le détruisant, mais en y versant les
biens qu’elle n’a pas d’elle-même (3).
C’est de ce principe vicieux du monde
de ténèbres , ou du monde inférieur ,
auquel est attaché Ahriman ou Typhon,
que naissent les tremblemens et les secousses
violentes qu’éprouvé la Terre,
les agitations tumultueuses de l’air, les
ardeurs brûlantes , les foudres et tous
Ses météores ignés ; la corruption pestilentielle
, qui infecte l’air et les eaux.
Ce principe désastreux fait des excursions
jusqu’à la sphère de la Lune, et
obscurcit l’éclat brillant des Cieux et
des Astres, par d’épaisses ténèbres. Tel
en effet la théologie des Perses nous
peint Arhhnan ( 4)> et celle des Egyptiens
Typhon, dans le Poème de Non-
nus (5 ). Tel aussi le livre de l’Apocalypse
nous peint cet Ange malfaisant,
qui ouvre le puits de l ’abyme , d’où
sort la fumée qui obscurcit le Soleil (6).
Cette révolte du mauvais principe ,
contre le principe de bien et de lumière,
soit Ormusd , soit Osiris, soit le Dieu
créateur , père des Anges de lumière,
a été représentée dans toutes les Cosmogonies
sous toutes les formes. Osiris
<i) Ibid. p. 371.
(a) Ci-dessüs, 1. 2 , e. y.
(3) De Iside, p. 373.
{4) Ze'nd-Ayest. Buumlesh. p, 33 y.
(5) Nojious Dkmys. 1. 1.
au contraire , suivant Plutarque , remplit
la matière du monde, (7) par le
moyen d’Isis, des principes de bien
de pureté et d’ordre, par lesquels se
soutient Pharmonie de la Nature ( dd\
Comme c’est à l ’équinoxe de Printemps
que le Dieu créateur ou le principe
çctif du monde , le Dieu - Soleil,
organise les plantes, développe les.
germes , que recèle la Terre dans
son sein, et qu’il produit le bel ordre de
choses , que nous admirons dans nos
climats septentrionaux, depuis le Printemps
jusqu’à l’Automne j ce sera à
cette époque , que nous ferons commencer
l’exercice de la puissance féconde
et bienfaisante du Soleil. Ce sera par
la même raison à l'équinoxe cl’ Automne,
que nous la ferons cesser, lorsque le
principe Ténèbres reprend son empire
dans l’Univers. En cela , nous sommes
d’accord avec les traditions Egyptiennes,
qui rapportaient aux saisons, et aux
époques variées de la végétation annuelle,
les aventures d’Osiris, telles
que sa mort et sa résurrection. On pla-
çoit la mort à l'équinoxe d’Automne,
au lever du soir du Taureau ou des
Pléiades, et sa résurrection au Printemps
, lorsque la végétation reprend
une activité nouvelle (8). Ceci est 'vrai
dans nos climats ; mais ne s’accorde
pas exactement avec la végétation de
l’Egypte. Ce n’est donc pas en Egypte,
qu’on doit en chercher l’origine. Car
ce n’est point au sol d’Egypte que
cette idée. Cosmogoniqne étoit relative,
mais à tout notre hémisphère boréal (e<?).
Aussi Plutarque convient-il , que7 les
mêmes cérémonies , qui avoient pour
objet Osiris ou le Soleil en Egypte ,
se çélébroient en Grèce à la même époque
(g ). Dans toute l’Asie et à l’Occident
de l’Europe, l’on avoit conserve
des traditions, qui réveilloient les mêmes
(6) Apocalyps. ç. 9 , V. al
(7) De Iside, p. 374,
(8j Ibid. p. 377.
(9) Ibid. p. >78.
R E L I G I O N U N I V E R S E L L E . 379
idées Cosmogoniques , sur.la marche du
Soleil dans l’hémisphère supérieur et
inférieur , et conséquemment sur
celle de la végétation , qui lui
correspond. La suite de ce traité va
prouver, que c’est effectivement d’après
la marche du Soleil dans le Zodiaque,
comparée avec le développement de la
végétation, avec ses progrès et son terme,
et avec les saisons, qui en mesurent la
durée, que toute l ’histoire d’Osiris et
ses aventures merveilleuses doivent s’expliquer.
C’est à tort que Plutarque ,
vers la fin de son traité, a voulu rappeler
aux idées métaphysiques des Platoniciens
, et au monde invisible une
fiction , qui toute entière a pour base la
physique et les phénomènes de l ’ordre
visible du monde. Osiris ou le Soleil
est le premier bien, et la source féconde
de toutes les beautés et de l’ordre
d’ici-bas, vers laquelle court sans cesse
Isis, ou la Lune, pour les communiquer
à la Terre. Elle en verse au Printemps
les germes dans l’a ir, dans les
eaux, et dans la terre, par le moyen
du feu céleste Démiourgique, qui organise
tout, et qui vivifie les élémens,
jusqu’au moment de la retraite du Soleil
vers les régions australes. Alors la
matière se trouve abandonnée aux outrages
et aux chocs de l’esprit tumultueux
et désordonné , qui la pénètre ,
et que le Ciel avoit subjugé jusques là ,
et enchaînée dans les organisations régulières
des plantes, et dans l’ordre et
l’heureuse harmonie des saisons, pendant
la demi - révolution du Soleil ,
c’est-à-dire, depuis le Printemps jusqu’à
l’Automne. Cette vérité va être démontrée
par des preuves Astronomiques,
tirées des constellations , qui figurent
dans l’histoire merveilleuse d’Osiris et
d’Isis ou du Soleil et de, la Lune,
dont la marche est mesurée par la succession
des leyers et des couchers des
Astres. Résumons , et reprenons le fil
de nos idées.
(ï ) De Iside, p. 36a,
fa) Ibid.
D’abord nous avons établi , comme
principe incontestable , que dans la
Théologie Egyptienne , Osiris étoit le
Soleil; a°. qu’ifétoit le Soleil, considéré
sous les rapports d’Astre fécond et bienfaisant,
de qui la terre reçoit les germes
de bien et d’ordre , durant tout le temps
destiné à l’action du bon principe ;
c’est-à-dire depuis l’Equinoxe de printemps
jusqu’à celui d’automne , termes
naturels de la durée au règne d’Ormusd,
ou du Dieu source de bien et de lumière.
Il résulte delà, que le signe du Taureau
et celui du Scorpion, qui répondoient à
ces deux Equinoxes , à cette époque
éloignée, doivent jouer un grand rôle
dans cette histoire , et apres eux les
autres Constellations voisines des Equinoxes
, qui fixoient les limites de la durée
de l’action féconde du Soleil. Or
c’est précisément ce que nous observons
, et ce qui est arrivé effectivement.
Osiris, comme Bacchus , étoit peint
avec des cornes de boeuf, ou .avCc les
attributs du Signe, qùi autrefois occu-
poit l’Equinoxe de printemps. Osiris
étoit le nom du Taureau de Bacchus (1).
Apis étoit l’image vivante d’Osiris, et
ces deux noms rentroient dans l ’expression
de la- même idée (2). IVJais Apis
lui-même étoit l ’image du Taureau
céleste (3) , et il portait tous les attributs
Astrologiques de ce signe. En effet
on voyoit sur son épaule le croissant de
la Lune , qui avoit son exaltation dans
ce signe , et outre cela les marques caractéristiques
de la planète Vénus, qui
y a son domicile , de Vénus Déesse de
la génération , dont le grand développement
arrivoit sous ce signe. Tant de
rapports déjà prouvés , et qui ne sont
réunis ici sous un même point de vue ,
qu’afin de faire mieux Voir la liaison,
qu’il y avoit entre le Soleil fécond ou
Osiris , et le Signe de l’Equinoxe du
printemps , achèveront de convaincre le
Lecteur, que c’est le Taureau équinoxial
qui figure dans - la fable d’Osiris.
(3) Lu dan de Astrol. p, 986.
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