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aussi les siens,et que les agens subalternes
différeront entre eux, et formeront deux
ordres de Genies de nature aussi opposée
, que le sont leurs chefs. Car chaque
administration doit être complète dans
le monde ténébreux , et dans le monde
lumineux ; et comme , le bien u ayant
pas pu sortir de la même source que
le mal, on a donné à chacun son origine
et son chef, on n’a pas dû par
la même raison nommer les mêmes ministres,
pour opérer le bien et pour
opérer le mal. Ce qui amène nécessairement
deux administrations et deux cours
différentes, qu’on a dû composer pour
les deux grands rois de la Nature, ou
pour les deux premiers chefs, qui se
partagent également entre eux l'administration
du monde sublunaire, et la
dispensation des biens et des maux, qui
s’y trouvent mêlés à dose • à-peu-près
égale. Ainsi la grande distinction des
deux principes doit régner entre les
Génies ou les intelligences répandues
dans la Nature , comme elle règne
dans les effets , qui y sont produits, et
entre les deux causes premières, qui
les produisent, savoir, entre Oimusd et
Ahriman-, entre Osiris et Typhon , entre
Dieu et le Diable. Chacun de ces deux
chefs doit avoir ses agéns, ses ministres
et ses Anges particuliers. C’est une
suite nécessaire de la théorie que nous
venons d’établir sur les agens secondaires,
et sur les ministres de l’administration
universelle.
Cette conséquence se trouve justifiée
pàr le fait, et toutes les théologies ont
encore admis cette distinction entre les
intelligences, qu’ils ont partagées en
bonnes et en mauvaises, en Génies amis
de la lumière et du bien , et en Génies
amis des ténèbres et du mal. C’est surtout
chez les Perses , que cette théorie
est la plus complète. L’explication que
nous avons donnée plus haut du fameux
oeuf magique, dans lequel. les
Dieux ou les intelligences bonnes etmau-
(1) Plutarch. de Iside, p. 370.
(2) Yoy. ci-dess. I. 2 , c. 5*
N I V E f f S E L L Ë .
vaises, par groupes de six et de 'vin<rfj
quatre , se rangent chacunes sous leuJ
chefs, et se mêlent ou se combatteij
dans le inonde , en est la preuve. On v0j3
que les biens et les maux , que l’action
du ciel ou du monde , figuré par l’oeuf
répand sur la terre et verse danJ
toutes ses productions , sont distribués
par des intelligences, bonnes ou nian-
vaises et d’ordre différent. On Voit quel
la distinction des astres en astres bons]
et mauvais (a ) , que les Astrologues
de Chaklée avoient établie, pour rendre
raison du bien et du mal de la Nature,’
est attribuée par les Mages à des intelligences
, qui offrent entre elles des divisions,
telles que celles que l’Astro'.]
nomie a mises dans les deux, entre]
les douze signes et les trente-six constellations
, cjui se lient aux signes.
L ’extrait abrégé de la Cosmogonie
des Perses, sur le bon et sur le mauvais
principe, que nous avons donné dans
notre Chapitre V , et auquel nous renvoyons
le lecteur (2), offre un tableau
frappant de la distinction des intelligences
affectées aux deux principes , lumière!
et ténèbres , et de Ja manière dont elles
se groupent sons leurs chefs particuliers
, dans les différens combats, qu’eliés
se livrent clans le monde. On voit que,
si Ormuscl a ses Izeds ou ses esprits célestes
, Ahriman a ses Dews malfaisans. Les
Izeds, comme nos Anges. ( 3 ), sont des
Génies du second ordre, faits pour le
bien du monde ; esprits célestes son-]
vent confondus avec les êtres qu'ils;
protègent. Aussi nous avons vu pW
haut, que l’Ange de la terre et l’Ange
de l’eau furent confondus sous uiïi
même nom avec la terre et léau. Pa,
reillement cliez les Grecs , Jupiter,
Junon, Cerès, furent tantôt pris pour les
Dieuxcélestes et tantôt pour le feu, p011t;
Pair et pour la terre. Les Izeds (4) font m
juges du peuple pur, comme les Ange,s
qui formeront le conseil de Christ, quanti
il jugera le monde. Il faut s’attacher
(3) Zend-Av.t.i, 2' part. p. 82, n. 1 1, t. 2' P’ Gj
(4) Zend-Av. t. 2 , p. 325-^-336— 3^'
l leur plaire, et leur adresser des voeux , nions anciennes, en fait de religion ,
1 — .Zvîter la protection d’Ormnsd. sur-tout à "celles des Mages.
ont des mauvais Genies pro- On sentbien, que nous n’ayonspaspu
fruits par Ahriman (1). Ils. sont les faire éclore ce double monde de Génies
Ennemis nés clés Izeds ou des esprits ou d’intelligences de nature , ou d’inclï-
fcélestes, et ils s’assemblent sons leur chef nations si opposées, du sein de la même
fejiriinan, pour leur faire la guerre aine unique universelle, appql.ee Dieu-
Ljnsi qu’à Ormusd. Il en est sept plus suprême , par la raison que le. bien et
fcéclians que les autres , qui s’attachent le mal ne peuvent découler de la même
kux sept planètes. Ils viennent du source, et qu’il y a nécessairement du.
Nord (2 ) , . qontrée de l’hiver et clés plicité d’ame et d’intelligence , où il
[roids, ou dü Pôle , cju’entortille le fa- y a duplicité de cause première. Aussi
Leux Dragon ou Python , que tua le . î’ame universelle, qui a pour substance
bitu-Lumière Apollon. Ils sont mâles le feu Éther intelligent, et que nouç
k femelles ( 'à ) , et ont un commerce appelons proprement l’arne ùpivenselle
harnel les uns avec les autres. De-là qui meut et organise tout dans le monde,
rissent tous les Daroudis , qui corn- n’exclut-elle pas une autre ame pu force:
losent un autre ordre de Génies mal- qui appartient à la matière grossière
faisans, placés plus près de l’homme ( 4 ) , de la terre et des élémens , clans les,
lu i l’obsèdent, qui trompent les âmes, et quels Paine céleste prolonge son action
lésolent publiquement le monde, où ils pour y verser, l’ordre et le bien , que
îultiplient la mort. Les Dcws pro- cette matière n’a point par elle-même t
lu ise n t ( 5 ) aussi les Kharfestères , et pour vaincre la résistance que sa
loin qui comprend tous les reptiles et Natureoppo8e.àcequ,eleDemiourffoséta-
bus les animaux malfaisans. Car 011 blisseèn elle l'harmonie, que le feu artiste
rimpute, comme à leur chef, toutes entretient éternellement aux deux, où
jes productions mauvaises de la Na- siège Ormusd au sein de la lumière
lire ( 6 ) , tous les maux du corps et ceux Ethérée.
bl'âme. On suppose que, comme ces Les Perses, selon tous les auteurs (o),
génies n’ont lieu que dans notre monde, représentoient la Divinité suprême ,
la lui du monde tous ces Dews seront comme un feu animé et intelligent,
néantis , à l’exception du chef Ahri- dont les rayons et l’action se répan-
pan, cet éternel ennemi d’Ortnusd (7)3 dolent dans tout l’Univers ; feu dont,
nais alors il sera enchaîné et sans force, selon toute apparence , le soleil étoit
omme le diable de l’Apoealypse l’est au sinon la source , au moins le mi-
noment où le monde est régénéré. Il roir de réflexion, et qui de-là réjail-
put sans cesse que l’homme soit en lissoit dans ,les. astres et dans toutes
ardeçontre ces mauvais Génies, et qu’il les parties de, la Nature, où se propagé
p combatte ainsi que les méchans. la lumière à travers différens milieux,
dui qui les sert sera détruit dans Les feux des astres, ceux des météores,
on corps, dans son ame et dans ses et en général tous les feux n’étoient
uns (U). Voilà mot pour mot nos que des, émanations du feu principe
ogmes religieux sur le. Diable et sur plus ou moins, pures, suivant qu’elles
os An,
iné
ges. Car nous n’avons rien îma-
ni même rien changé, aux, opi
(0 Zend-Avest. t. 1 , 2 part. p. 80-421
ïyy) *w• i , f2 rpart. p. 109-155.
W Ibid, P* 3a$*
(4) Zend-Av. t. 1 , part. 2 j p. 108-126-167.
avoient reçu en elles plus : ou ; moins
(le substance étrangère. Comme ce feu
(5) T . 2 , p. p. 169.'
(6 ; T . 1 , part. 2 , p. 321-420.
(7) T. 2 ,o . 124, t. 1 , part. 2, p. 229.
(8) Zeiid-Âv. t. i,part.2,p.242-243,:t. 2,p.§o.
(9) Batteux caus, piém. t. 1 , p. 39—42.
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