raifon ! Il vécut d’une vie fort agitée & fort diverfe;
il voyagea en Angleterre, en France & en Allemagne
; il reparut en Italie ; il y fut arrêté & conduit
dans les priions de l’inquifition, d’où il ne fortit que
pour aller mourir fur un bûcher. Ce qu’il répondit
aux juges qui lui prononcèrent fa fentence de m ort,
marque du courage : majori forfan cum timoré fenten-
tïam in me dicetis quant ego accipiam.
Les écrits de cet auteur font très-rares, 6c le mélange
perpétuel de Géométrie, de Théologie, de
Phyfique, de Mathématique 6c de Poéfie en rend la
Ieélure pénible. Voici les principaux axiomes de fa
Philofophie.
Ces a lires que nous voyons briller au-deffus de nos
têtes font autant de mondes.
Les trois êtres par excellence font D ieu , la nature
& l’homme. Dieu ordonne , la nature exécute,
l’homme conçoit.
Dieu ell une monade, la nature une mefure.
Entre les biens que l’homme puiffe pofféder, coq-
noître ell un des plus doux.
Dieu qui a donné la raifon à l’homme, & qui n’a
rien fait en vain, n’a prefcrit aucun terme à fon
ufage.
Que celui qui veut favoir commence par douter ;
qu’il fâche que les mots fervenr également l’ignorant
& le fage, le bon 6c le méchant. La langue de la v érité
eftfimple; celle de la duplicité, équivoque; 6c
çelle de la vanité, recherchée.
La fubllance ne change point ; elle ell immortelle,
fans augmentation, fans décroiflement, fans corruption.
Tout en émane 6c s’y réfout.
Le minimum e ll l’élément de tou t, le principe de
la quantité.
Ce n’ell pas alfez que du mouvement, de l’efpace
& des atomes ; il faut encore un moyen d’union.
La monade ell l’effence du nombre, & le nombre
un accident de la monade.
La matière ell dans un flux perpétuel, & ce qui
ell un corps aujourd’hui, ne l’elt pas demain.
Puifque la fubllance ell impérilfable, on ne meurt
point; on palfe, on circule, ainfi que Pythagore
l’a conçu.
Le compofé n’ell point, à parler exaélement, la
fubllance.
L ’ame ell un point autour duquel les atomes s’af-
femblent dans la naiffance , s’accumulent pendant
un certain rems de la v ie , 6c fe féparent enfuite juf-
qu’à la m ort, où l’atome central devient libre.
Le paffage de l’ame dans un autre corps n’ell point
fortuit ; elle y ell prédifpofée par fon état précédent.
Ce qui n’ell pas un n’ell rien.
La monade réunit toutes les qualités poffibles ; il
y a pair 6c impair, fini 6c infini, étendue 6c non
étendue, témoin Dieu.
Le mouvement le plus grand poflible , le mouvement
retardé , & le repos, ne lont qu’un. Tout fe
transféré ou tend au tranfport.
De l’idée de la monade on palfe à l’idée du fini ;
de l’idée du fini à celle de l’infini, 6c l’on defcend
par les mêmes degrés.
Toute la durée n’ell qu’un inllant infini.
La réfolution du contdhu en tes parties ell la fource
d’une infinité d’erreurs.
La terre n’ell pas plus au milieu du tout qu’aucun
autre point de l’univers. Si i’efpace ell infini, le
centre ell par-tout & nulle part, de même que l’atome
ell tout & n’ell rien.
. Le minimum ell indéfini. II ne faut pas confondre
le minimum de la nature 6c celui de l’art ; le minimum
delà nature 6c le minimumfenlible.
Il n’y a ni bonté ni méchanceté , ni beauté ni laideur
, ni peine ni plaiftr abfolus.
Il y a bien de la différence entre une qualité quelcolique
comparée à nous , & la même qualité côrt-
fidérée dans le tout : de-là les notions vraies & fauf-
fes du bien 6c du mal, du nuifible & de l’utile.
Il n’y a rien de vrai ni de faux pour ceux qui né
s’élèvent point au-delà du fenlible,
La mefure des fenfibles ell variable.
Il ell impoffible que tout foit le même dans 'deux
individus différens, 6c dans un même individu dans
deux inltans. Comptez les caufes, mais fur-tout ayez
égard à l’influ & à l’influence.
Il n’y a de plein abfohi que dans la folidité de
l’atome, & de vuide abfolu que dans l’intervalle des
atomes qui fe touchent.
La nature de l’ame ell atomique ; c’ell l’énergie
de notre corps, dans notre durée & dans notre espace.
Pourquoi l’ame ne conferveroit-elle pas quelqu’af-
finité avec les parties qu’elle a animées ? Suivez cet*
te idée, 6c vous vous reconcilierez avec une infi*
nité d’effets que vous jugez impolfibles pendant fon
union avec le corps & après qu’elle en ell féparée»
L ’atome ne fe corrompt point, ne naît point-, ne
meurt point,
11 n’y a rien de fi petit dans le tout qui ne tende à
diminuer ou à s’accroître ; rien de bien qui ne tende
à empirer ou à fe perfectionner ; mais c’ell relativement
à un point de la matière , de l’efpace & du
tems. Dans le tout il n’y a ni petit ni grand, ni bien
ni mal.
Le tout ell le mieux qu’il ell poflible ; c’ell une
conféquence de l’harmonie néceffaire 6c de l’exif*
tence 6c des propriétés.
Si l’on réfléchit attentivement fur ces propofi-
tions, on y trouvera le germe de la raifon luflifan-
te , du fyftême des monades , de l’optimifme, de
l’harmonie préétablie, en un mot, de toute la philofophie
léibnitienne.
A comparer le philofophe de Noie 6c celui de Lei-
pfick, l’un mefemble un fou qui jette fon argent dans
la rue, 6c l’autre un fage qui le fuit & qui le ramaffe.
Il ne faut pas oublier que Jordan-Brun a léjourné 6c
profefle la Philofophie en Allemagne.
Si l’on raffemble ce qu’il a répandu dans fes ouvrages
fur la nature de Dieu , il reliera peu de chofe
à Spinofa qui lui appartienne en propre.
Selon Jordan Brun, l’effence divine ell infinie. La
volonté de D ie u , c’ell la néceflité même. La né*
ceflité & la liberté ne font qu’un. Suivre en agiffant
la néceflité de la nature, non-feulement c’ell être libre
, mais ce feroit ceflër de l’être que d’agir autre*
ment. Il e ll mieux d’être que de ne pas être , d’agir
que de ne pas faire : le monde ell donc éternel ; il
ell un ; il n’y a qu’une fubllance ; il n’y a qu’un
agent ; la nature , c’ell D ieu.
Notre philofophe croyoit la quadrature du cercle
impoffible , & la tranfmutation des métaux poflible.
II a voit imaginé que les cometes étoient des corps
qui fe mouvoient dans l’efpace, comme la terre 6c
les autres planètes.
A dire ce que je penfe de cet homme , il y auroit
peu de philofophes qu’on pût lui comparer , fi l’im-
pétuofité de fon imagination lui avoit permis d’ordonner
fes idées, 6c de les ranger dans un ordre
fyllêmatique ; mais il étoit né Poète.
Voici les titres de fes ouvrages, i. La cene de la
cineri. 2. De umbris idearum. 3. Ars memorioe. 4, I l
candelago , comedia, c. Camus circaus ad memorial,
praxin ordinatus. 6. De la caufa , principio, ed unot
y. De l'infinito, univerfo e mondi. 8. Spaccio delà bef-
tia triomfante. 9. Cabala del cavallo pegafeo con Cag~
giunte dell' ajino cilleniço. 10. De gli heroïci furori,
1 1. De progrejfu & lampade venatoriâ logicorum.
1 2. Acratifmus ., five rationes articulorum Phyficorum
adverfus Arifiotelicos. 13. O ratio valediclotia ad profefdùdudres
ih academia Wïtcbcrgènfk 14. Defpe-
xïerürhfçrùtinïo. & {amp a de combinàtoriâKdi.mon6i lul-
li-. 1 5. O ratio confolotoria habita in academiajulia in f i -
heèxtquiarum principis Julii, ducis Brunfvicenfium.
i 6. De triplici minimo & menfurâ. 17. De monade,
humer0 & figura, conjequens quinque de minimo, magno
'& menfurâ y item de innumerabilibus , imrnenfo & infi-
■ gurabili rfeu de -univerfo & mundis. 18. De imaginum ,
fignorum & idearum compojîtiont. 19. Summa termino-
rum Metaphyficorum ad capejfendum Logicce & Meta-
phyficee Jludium. 20. Arùficium perorandi.
Il cite lui-même quelques autres ouvrages qu’on
h’a point, comme le Sigillumjîgillorurn , & les livres
de imaginibus , de prinçipiis rerum , de fphoera, dePhy-
ficdy magiâ, & c . . . .
Ses juges firent tout ce qu’il étoit poflible polir le
fauver. On n’exigeoit de lui qu’une rétractation ;
mais on ne parvint jamais à vaincre l’opiniâtreté de
cette ame aigrie par le malheur & la perfécution,
6c il fallut enfin le livrer à fon mauvais fort. Je fuis
indigné de la maniéré indécente dont Scioppius s’eft
exprimé fur un événement qui ne devoit exciter que
la terreur ou la pitié. Sicque uftulatus miferé periit,
dit cet auteur, renuntiaturus , credo , in reliquis illis
quosfinxit mundis, quonampaclo homines blafphemi &
impii à romanis traciarifolent. Ce Scioppius avoit
fans doute l’ame atroce ; 6c il étoit bien loin de deviner
que cette idée des mondes, qu’il tourne en ridicule
, illuftreroit un jour deux grands hommes. ,
JORGIANE, ( Géog. ) riviere d’Afie dans la Per-
f e , qui donne fon nom à une ville qu’elle arrofe, 6c
fe déchargé dans l<a mer Cafpienne, à 89** de long.
6c à 3 8 de latit. La ville de fon nom qu’elle baigne
eft dans la Coraffane. Long. 85. latit. 37. {D .J . )
IO S , ( Géogr. anc. ) ifle de la mer Egée, près de
l ’ifle de Théra ; elle ell célébré par le tombeau d’Ho-
mere , qui y fut enterréj félon quelques anciens auteurs
; Etienne le géographe la met au nombre des
Cyclades ; Pline dit qu’elle fe nommoit autrefois
Phcenice : c’efl: préfentement Nio. ( D . J. )
JOSAPHAT, l a V a l l é e d e ( Géog. ) vallée de
la Paleftine, entre Jérufalem & la montagne des
Oliviers. Ce mot de Jofaphat lignifie jugement de
D ieu , 6c n’ell autre chofe qu’une expreffion fy mbo-
lique dans le fameux paffage de Joël, chap. iij. ÿ . z.
ainfi dans le même prophète, 6c dans le même chap.
j f . / 4. la vallée de Carnage, vallis concijfionis , ne
peut fe prendre que métaphoriquement. ( D . J. )
JOSEPH S a n , ( Géog. ) ifle de l’océan oriental *
6c l’une des ifles Mariannes. Voye[ Sa y p a n . (D .J .)
JOSUÈ, ( Théolog.') nom d’un des livres canoniques
de l’ancien tellament. C ’ell celui qui dans les
bibles fuit ordinairement le pentateuque ou les cinq
livres de Moïfe. Les Hébreux le nomment Jehofua.
Il comprend l ’hilloirede l’entrée du peuple de D ieu ,
de fes premières conquêtes > & de fon établiffement
dans la terre promife fous la conduite de Jofué, qui
après Moïfe fut le premier chef ou général des Hébreux.
La Synagogue 6c l’Eglife font d’accord à attribuer
ce livre à Jojùé,fils de Nun, o u , comme s’expriment
les Grecs, fils de Navé, qui fuccéda à Moïfe dans le
gouvernement théocratique des Hébreux, 6c à le re-
connoître pour canonique. On avoue cependant qu’il
s’y rencontre certains termes, certains noms de
lieux, & certaines circonllances d’hilloire qui ne
Conviennent pas au tems de Jofué, 6c qui font juger
que le livre a été retouché depuis lu i , & que les co-
pilteS y ont fait quelques additions & quelques corrections
: mais il y a peu de livres de l’écriture où
l’on ne remarque de pareilles chofes.
Les Samaiitains ont aufïi un livre de Jofué qu’ils
confervent avec un grand refpeû , 6c fur lequel ils
fondent leurs prétentions contre les Juifs. Mais cet
ouvragé èifl fort différent de celui que les Juifs 6c
les Chrétiens tiennent pour canonique. Il comprend
quarante-fept chapitres remplis de fables, d’abfur-
dités, de traits & de noms hiftoriques , qui prouvent
qu’il eft poftérieur à la ruine de Jérufalem par
Adrien. Ce livre n’eft point imprimé. Joféph Scali-
ger,à qui il appartenoit,leléguaà la bibliothèque de
Ley de, où il eft encore à préfent en caraderes fama-
ritains, mais en langue arabe 6c traduit fur l’hébreu.
Les Juifs modernes attribuent encore à Jofué une
priere rapportée varYabncius,apocryph.tom. K. qu’ils
recitent ou toute entière ou en partie en fortant de
leurs fynagogues. Ils le font auffi auteur de dix ré-
glemens, qui dévoient, félon eux, être obfervés dans
la terre promife , & qu’on trouve dans Selden , de
jure nat. & gent. lib. F I. ch. ij. Dom Calmet, diction,
de la bib l.
* IO T A , f. f. ( Gram.') c’eft le petit i des Grecs.
JOTTEREAUX, {Marine.) Foyer]O U T E R E A U X .
JOTTES, ou JOUES, f. f. { Marine. ) Ce font les
deux cotes de 1 avant du vaiffeau depuis les épaules
jufqu’à l ’étrave. ( Z )
JOUAILLERIE, 1. f. ^ Commerce. ) ce mot comprend
toutes fortes de pierreries, montées ou non
montées , brutes ou taillées, diamans, rubis, fa-
phirs , grenats , émeraudes , turquoïfes , topafes ,
amétiftes, cornalines , agates, opales, criftal, ambre
, corail, perles, 6c toutes fortes de bijoux d’or ,
d’argent ou autre matière précieufe.
JOUAILLIER, f. m. £ Commerce. ) qui fait le commerce
de jouaillene. Les Jouailliers font du corps
des Orfèvres. Les Merciers peuvent vendre les mêmes
marchandifes que les jouailliers ; mais ceux-ci
peuvent mettre en oeuvre, monter & fabriquer.
JOUBARBE , f. {.{BotanJ) Sedum, genre de plante
à fleur en rofe, compofée de plufieurs pétales difpo-
fés en rond; Il fort du calice un piftil qui devient
dans la fuite un fruit compofé de plufieurs capfules
Ou gaines qui forment une tête : ce fruit renferme
des femences qui font pour l’ordinaire très-petites.
Tournefort, Jnji. rei herb. Foye^ P l a n t e .
Ce genre de plante eft confidérable par fes efpe-
ees; M. de Tournefort en compte 3 7 , au nombre
desquelles il y en a trois qui font d’ufage ordinaire
médicinal; favoir, la grande joubarbe^fedum majus
vulgare ; la petite joubarbe, fedum minus teretifolium
album, & la vermiculaire âcre,fedumparvum, acre y
flore luteo.
La racine de la grande joubarbe eft petite 6c fi-
breiife ; elle pouffe plufieurs feuilles oblongues,
groffes, graffes, pointues, charnues, pleines de
fuc j attachées contre terre à leur pédicule ; toujours
vertes, rangées circulairement, 6c comme difpofées
en rofe, convexes en dehors, applaties en dedans,
tant foit peu velues dans leurs bords. Il s’élève de
leur milieu une tige à la hauteur d’un pié ou davantage
, droite, affez groffe, rougeâtrè , moëlleufe,
revêtues de feuilles femblables à celles du bas, mais
plus étroites, plus pointues, 6c qui la rendent comme
écailleufe. Cette tige fe divife vers la cime en
quelques rameaux réfléchis qui portent une fuite de
fleurs à cinq pétales,difpofées en rofes ou en étoiles,
de couleur purpurine , avec dix étamines à fommets
arrondis. Lorfque ces fleurs font paffées, il leur fuc-
cede des fruits compofés de plufieurs filiques ou
vaiffeaux féminaux, creux, en urnes, & contenant
des femences fort menues.
La petite joubarbe que le vulgaire appelle trique-
madame , ou tripe-madame, différé peu de la grande
joubarbe. Sa racine eft femblable ; fes tiges font longues
d ’environ fix pouces, dures, ligneufes , rougeâtres
, portant des feuilles épaiffes, fucculentes,
rondes, émo.uffées par la pointe, 6c rangées alternativement.
Aux fommités des tiges naiffent des