
5 66 I M B tfoofe, ou que nous ne déterminions rien fur leur état
«i venir il ne fera ni meilleur ni pire. Les imbécilles
•font entre les mains d’un créateur plein de bonté ,
qui ne difpofe pas de fes créatures fuivant les bornes
étroites de nos opinions particulières, & qui ne les
•diftingue point conformément aux noms, & aux
chimères'qu’il nous plaît de forger. ( D . J. )
* IMBIBER, verb. a£t. & paff. (Gramm.) on dit
imbiber, ôc s'imbiber. L’éponge s'imbibe d ’eau. On
imbibed ’huile unemeche. La maniéré phyfique dont
fe fait Fimbibition ne nous eft pas toujours diftinâe-
mént connue. Par quel m échanifmefi un fil trempe
d’un bout dans un verre plein d’eau, & tombe de
l’autre bout au-dehors du verre, fera-t-il fonâion
•defiphon ; s 'imbibera-t-il fans cefle d’eau, & en vui-
dera-t-il le verre ? Si ces petits phénomènes étoient
bien expliqués, on èn appliqueroit bien-tôt la raifon
à de plus importans. L’aCtion dé imbiber o\\ de s'imbiber
s’appelle imbibition, terme que les Alchimifles
■ ont tranfportës dans leur a r t , oît il n’a aucune acception
claire.
IMBIBITION, f. f. ( Chimie. ) c’eft une efpece ou
une variété de la macération, dont le caraCtere dif-
tinttif confifte en ce que le liquide appliqué à une
fubftance concrète, eft abforbé tout entier, ou pref-
que entier par cette fubftance ; c’eft ainfi qu’une
éponge eft imbibée d’eau, &c. Cette opération eft
peu en ufage dans les travaux ordinaires de la Chimie.
On l’emploie dans quelques arts chimiques ;
par exemple , dans la préparation de l’orfeil, du
tournefol, 8c de quelques autres fécules colorées,
tlans laquelle on imbibe avec de l’urine les plantes
defquelles on travaille à les extraire. ([b)
IMBLOCATION, fubft. m. (Hijl. des Coûtum.)
terme confacré chez les écrivains du moyen âg e,
pour défigner la maniéré d’enterrer les corps morts
des perfonnes excommuniées ; cette maniéré fe pra-
tiquoit en élevant un monceau de terre ou de pierres
fur leurs cadavres , dans les champs, ou près des
grands chemins, parce qu’il étoit défendu de les en-
fevelir, & à plus forte raifon de les mettre en terre
fainte. Imbiocation eft formé de bloc , amas de pierres.
Voye^ du Cange, Gloffaire latin, au mot imblo-
catus. (D . J.)
* 1MBRICÉ, adj. ( Art. ) c’eft par cette épithete
qu’on diftingue les tuiles concaves des tuiles plates.
On prétend que la couverture avec des tuiles imbri-
cées dure plus ; mais il eft fur qu’elle charge davantage.
Imbricé vient d'imbricatus, fait en gouttière.
IMBRIM, f. m. (Hijl. nat.') nom que l’on donne dans
les îles de Feroe ou Farroe à un oifeau de la groffeur
d’une oie, q u i, dit-on, ne fort jamais de l’eau. Cet
oifeau a le cou fort long ainfi que le bec; fes plumes
font grifes fur le dos & blanches fur la poitrine ; fon
cou eft tout gris à l’exception d’un cercle blanc qui
forme comme une efpece de collier. Il vit dans l’eau
parce que fes piés font placés en arriéré, & font
d’ailleurs fi foibles qu’ils ne pourroient point foute-
tiir fon corps ; & fes aîles font trop petites pour qu’il
puiffe voler. Sous chaque aîle il a un creux capable
de contenir un oe u f, & l’on croit que c’eft là qu’il
tient fes oeufs cachés & qu’il les couve ; d’autant plus
qu’on a remarqué que l'imbrim ne fait jamais éclore
que deux petits. Ces oifeaux paroiffent fur les côtes
à l’approche des tempêtes. On les a mal-à-propos
confondus avec les alcyons, dont ils different fuivant
la defcription qui vient d’être donnée. Voyt^
A cia Hafnienjia, ann. iCyi & y2 , obferv. 4g.
IMBRIKDAR-AGA, fubft. m. (Hijl. mod.) nom
d’un officier de la cour du fultan, dont la fonction
«ft de lui donner l’eau pour les purifications ordonnées
par la loi mahométane.
IMBROS, (Géog.) île vers la Querfonnèfe de
^Thrace, féparee par un petit trajet de mer de la
I M I Theffalife. Philippe de Macédoine s’en rendit maître,'
& y exerça un pouvoir abfolu. Le géographe Etienne
place une ville de même nom dans cette île de l’Archipel
, & dit qu’elle étoit confacrée à Cérès & à
Mercure ; quoi qu’il en foit, l’île à'Imbros fe nomme
aujourd’hui l’île de Lembro. f^oye^ L em b ro . (Z?. Z.)
IMI, f. m. (Commerce.') mefure de liquides en ufage
dans le duché de Wirtemberg, qui tient environ
onze pintes.
IMIRETTE, (Géog.) petit royaume d’Afie entré
les montagnes qui féparent la mer Cafpienne & la
mer Noire. Il eft enfermé entre le mont C aucafe, la
Colchide, la mer Noire, la principauté de Garcil,
& la Géorgie. Sa longueur eft de fix vingt mille fta-
des, fa largeur de foixante mille. Les peuples du
mont Caucafe, avec qui l'Imirette confine, font les
Géorgiens & les Turcs au midi ; aufeptentrion, ces
Caraciolqs ou Circafiiens noirs, que les Européens
ont appellé Huns, & qui firent tous les ravages en
Italie & dans les Gaules, dont parlent les hiftoriens,
& Cédrénus en particulier.
L'Imirette eft un pays de bois & de montagnes,
comme la Mingrélie, mais il y a de plus belles vallées
& de plus délicieufes plaines. Il s’y trouve des
minières de fer ; l’argent y a cours, & l ’on y bat
monnoie. Quant aux moeurs & aux coûtumes, c’eft
la même chofe qu’en Mingrélie, qui a été autrefois
fous fa domination, ainfi que les peuples du Guriel ;
ils font tous aujourd’hui tributaires du Turc. Le tribut
du meppe, c’eft-à-dire du roi dé Imirette eft de
80 enfans, filles & garçons, depuis dix ans jufqu’à
vingt ; il envoie fon tribut au pacha d’Akalziche, &
dans les lettres qu’il fait expédier , il fe nomme le
roi des rois : qu’eu donc le pacha du grand-feigneur
vis-à-vis de lui ?
La Turquie ne s’eft point fouciée de s’emparer de
tous ces pays limitrophes, où il eft impoffible d’ob-
ferver le Mahométifme, parce qu’ils n’ont rien de
meilleur que lé vin & le cochon, défendus par la loi
mahométane ; outre que le peuple y eft épars, errant
& vagabond : de forte que les Turcs fe font contentés
de faire en forte que toutes ces provinces
leur ferviffent de pepinieres d’efclaves. On dit qu’ils
en tirent fix ou fept mille chaque année.
Des égards & des obftacles à peu près fembla-
bles , empêchent encore apparemment les Turcs
d’incorporer à leur empire les vaftes plaines de Tar-
tarie & de Scythie, & les pays immenfes du mont
Caucafe. C ’eft une obfervation remarquable que cet
ancien ufage de tribut d’enfans pour efclaves. La
Colchide le payoit à la Perfe dès les premiers âges
du monde ; c’eft une autre chofe bien finguliere ,
que dans tous les fiecles , ces régions maritimes de
la mer Noire, aient produit de fi beau fang, & en fi
grande quantité. (D . J.')
IMITATIF, adj. (Gramm.) qui fert à l’imitation ;
c’eft le nom général que l’on donne aux verbes ad-
jeCtifs qui renferment dans leur lignification un attribut
d’imitation.
Ces verbes dans la langue greque, font dérivés du
nom même de l’objet imité, auquel on donne la ter-
minaifon verbale ïQuv pour cara&érifer l’imitation :
etTTiKiÇuv , de amiioç ^ aiKtXiî^uv , de mxtXcç ; ^apCapiÇuir T
de /SetpCaplç f &c. La terminaifon <£/)'pourrait bien venir
elle-même de l’adjeûif Uoç, pareil, femblable, qui
femb.le fe retrouver encore à la terminaifon des
noms terminés en tapéoc, que les Latins rendent par
i f mus, & nous par ifmes, comme archaïfme, néolo-
gifme, hellénifme , &c. Il mefemble par cette raifon
même , que l’on pourroit les appeller aufli des noms
imitatifs.
Nous avons confervé en françois la même termi-,
naifon imitative, en l’adaptant feulement au génie
de notre langue, tyrannifer, latinifer yfrancifer. Anciennement
I MI ciennement on écrivôit tyranniser ; latiniser, franciser
, comme on peut le voir au traité de La Gramm.fr.
de R. Etienneimprimée en 1569 (page 42.) : &
cette orthographe étoit plus conforme que la nôtre,
& à notre prononciation & à l’étymologie. Par quelle
Tantàifie l’avons-noüs altérée?
Les Latins ont fait pareillement une altération à
la terminaifon radicale, dont ils ont changé lé 1 en
j f : attïcijfarc , jîciliffare, pdtriffart. Vôffius (Gramm.
lat. de derivitatis) remarque que les Latins ont préféré
la terminaifon latine en or à la terminaifon greque
en ifiare y & qu’en conféquence ils ont mieux
aimé dire groecari que groedffare,
-, Si j’ofois propofer une conjecture contre l’affer-
tion. d’un fi lavant homme ; je dirois que cette différence
de terminaifondoit avoir un fondement plus
raifonnable qu’un fimple caprice ; & la réalité de
J ’exiftence des deux mots latins groecijfare & groecari
eft une preuve de mon opinion d’autant plus certaine
., que'l’on fait aujourd’hui qu’aucune langue n’admet
unè exaCté fynonymie. Il me paroît affez vraif-
femblable que la terminaifon; i f are n’exprime qu’une
imitation de langage, & que la terminaifon ari exprime
une imitation de conduite, de moeurs : aiti-
ciffare (parler comme les Athéniens) ,patrijfare (parler
en pere) ; groecari (boire comme les Grecs), vul-
pinari (agir en renard, rufer). Les verbeS imitatifs
.de la première efpece ont une terminaifon aCtive ;
parce que l’imitation de langage n’eft que momentanée
, & dépendante de quelques aftes libres qui fe
fuccedent de loin à loin 9 ou même d’im feul afte.
Au contraire les verbes imitatifs dé là fecônde efpece
ont une terminaifon paflive ; parce que l’imitation
de conduite & de moeurs eft plus habituelle,
plus continue , & qu’elle fait même prendre les paf-
îions qui cara&érifent les moeurs * de maniéré que le
fujetqui imite eft pour ainfi dire transformé en l’objet
imité : groecari (être fait g r è c ) , vulpinàri (être fait
renard : .de forte qu’il eft à prélumerque ces verbes,
réputés déponens à caufe de la maniéré aâive dont
nous.jes traduilons, & peut-être même à caufe du
fens a d if que les Latins y avoient attaché > font au
fond dé vrais verbes paflifs ; fi on les confiüere dans
leur origine & félon le véritable fens littéral. Dans
la réalité, les uns & les autres, à raifon de leur fignh
fication u fuelle, font des verbes a&ifs, abfolus ; actifs
, parce qu’ils expriment l’adion d’imiter ; abfolus
, parce que le fens en eft complet & défini en foi ;
& n’exige aucun complément extérieur.
Remarquons que la terminaifon latine en ifare ne
fuffit pas pour en conclure que le verbe eft imitatif :
l’affonnance feule n’eft pas un guide affez fur dans
les recherches analogiques ; il faut encore faire attention
au fens dés mots & à leur véritable origine.
C ’eft en quoi il me femble qu’a manqué Scaliger
( Z?e cauf, ling. làt. cap. cxxiij. ) , lorfqu’il compte
parmi les verbes imitàtifs le verbe cyathijfarc : ce n’eft
pas qu’il ne fente qu’il n’y a point ici de véritable
imitation : neque enim, dit-il, aut imit'dmur aut fequi-
mur Cyatkum ; mais il aime pourtant mieux imaginer
une métonymie , que d’abandonner l’idée d’imitation
qu’il croyoit voir dans la terminaifon. Lé verbe
grec qui correfpond à cyathijfare , c’eft xv*QoÇuv,
oc non pas xvaùlÇtiv, comme les vrais imitatifs ; ce qui
prouve que l’affonnance de cyathijfare avec les verbes
imitatifs eft purement accidentelle, & n’a nul
traita l’imitation.
* IMITATION, f. f. (Gramm. G Philôfoph.') c’eft la
représentation artificielle d’un objet. La nature aveugle
n’imite point ; c’eft l’art qui imite. Si l’art imite
par des voix articulées, Y imitation s’appelle difeours ;
& le difeours eft oratoire ou poétique. Voyt{ Eloquence
&, Poésie. S’il imite par des fons, Yimita-
fion s’appelle mujîque, Voyez l'article MUSIQUE, S’il
Jm t VIU<
î M I 567
imite par des couleurs; Yimitation s’appelle peinture.
Voyc{ l'article Peinture. S’il imite avec le bois, la
pierre , le marbré, bu qùelqtte autre matière femblable
, Yimitation s’appelle fculpture. Vdyez l'article Sculpture. La nature eft toujours vraie ; l’art ne
rifquera donc d’être faux dans fon imitation qüè
quan^ il s’écartera de là nature, ou par caprice ou
par l’inipoffibilité d’en approcher d’affez près. L’art
de Yimitation en quelque genre que cë foit, a fon enfance
> fon état de perfection, & fort moment dé décadence.
Ceux qui ont créé l’a r t , n’ont eu de modelé
que la nature.Ceux qiii l’ont perfeftionné, n’ont
été , à les juger à la rigueur, que les imitateurs des
premiers ; ce qui ne Ieiir à point ôté le titre d’hommes
de génie ; parce que nous apprêtions moins le
mérité des ouvragés parla prèmiere invention & là
difficulté des obftacles fiirmontés; que par le degré
de.perfefftion & l’effet. II y a dans la nature des ob^
jets qui nous affefrent plus que d’autres ; ainfi quoique
Yimitation des premiers foit peut être plus facile
que Yimitation des féconds, elle nous intéreffera davantage.
Le jugement de l’homme de goût & celui
de l’artifte font bién différens. C’eft: la difficulté dé
rendre certains effets de la nature, qui tiendra l’artifté
fufpendu enadmiration. L’homme de goût ne connoît
guerece mérite de Y im ita t io n tient trop au technique
qu’il ignore: ce fontdes qualités dbnt la connoiè
fance eft plus générale & plus commune, qui fixeront
fes regards. L’imitation eft rigoureufe oit libre ;
celui qui imite rigôureufement la nature en eft l’hif-
torien. A’ôyg^HiSTOiRE. Celui qui la compofe, l’exa-
gere, l’affoiblit', l’embellit ; en difpofe à fon gré, eil
èft le poète. Voye^ Poésie. On éft hiftorien oü co-
pifte dans tous les genres d'imitation. On eft poète,
de quelque maniéré qu’on peigne ou qu’ori imite;
Quand Horacé difoit aux imitateurs, ô imitatores
J'eryum pecus , il ne s’adreffoit ni à ceux qui fe propo-
fôient la nature pour modèle, ni à ceux qui marchant
fur les traces des hommes de génie qui les
avoient précédés > cherch’oient à étendre la carrière.
Celui qui invente un genre d’imitation eft un hommé
de génie. Celui qui perfectionne un genre d'imitation
inventé, ou qui y excelle, eft aufli un hommé
de génie. Voye^ l'drticiè fuivant.
Im it a t io n , f. fi (Poéfie. Rhétor.) on peut la définir
, l’emprunt dés images, des penfées, dès fertti-
mens, qu’on pûifè dans les écrits de quelque auteur,
& dont On fait un u fage, foit différent, foit approchant
, foit en enchériffant fur l’original.
Rien n’eft plus permis que d’ufer des Ouvrages qui
font entre les mains de tout le mondé ; ce n’eft point
un crime de les copier; c ’eft au contraire dans leurs
écrits, félon Quintilien, qu’il faut prendre l’abondance
& Iaricheffe des termes, ia variété des figures*
& la manière de cômpofer : enfuite , ajoute cet ora-r
teur, on s’attachera fortement à imiter les perfections
qué l’on voit én eux ; car on né doit pas douter
qu’une bonne partie de Part ne confifte dans l’i-
mitation adroitement déguiféè.
Laiflbns dirè à certaines gens que Yimitation n’eft
qu’une efpece dé fefvitiide qui tend à étouffer la v igueur
de la nature ; loin d’affoiblir cette nature, les
avantagés qu’on en tire ne fervent qu’à la fortifier.
C ’eft ce que M. Racine a prouvé folidement dans
un mémoire agréable ; dont le précis décorera cef
article.
Stéfychore, Archiloque ; Hérodote, Platon ,i ont
été des imitateurs d’Homere ; lequel vraiffemblable-
ment n’a pû lui-mêmè ; fans imitation de ceux qui
Font précédé, porter tout d ’un coup la Poéfie à fon
plus haut point de perfection. Virgile n’écrit prefque
rien qu’il n’imité ; tantôt il fuit Homere, tantôt
Théocrite, tantôt Héfiode , & tantôt les poètes de fou tems : & c’eft pour avoir eu tant de modèles.
m . ^ *