une pleuréfie ; plufieurs en font feulement enrhumés.
Les caufes qui peuvent exciter une difpofition
inflammatoire déjà formée agiffent promptement ;
unepaflion d’ame vive, desexcès dans le boire & le
manger, l’expofition du corps chaud à un air froid,
des boiffons trop fraîches, &c. peuvent produire cet
effet.
Sujets. Les caufes qui difpofent aux maladies inflammatoires
6c qui les produifent, agiflant également
dans tous les fujets, iur-tout dans les conftitutions
épidémiques , il femble à raifonner théoriquement,
que tout le monde devroit indifféremment fubir ces
maladies ; & que les perfonnes les plus foibles de-
vroient y fuccomber d’abord, enfuite celles qui
font plus fortes, enfin les perfonnes les plus robu-
ftes. L’on verroit ainfi la force des tempéramens
graduée, pour ainfi dire, par ces épidémies. L’ob-
fervation, la feule qui doive nous conduire ic i, nous
découvre le contraire, comme Hippocrate l’a déjà
remarqué. lettons un coup d’oeil fur Les perfonnes
qui font attaquées des maladies inflammatoires ; nous
ne pourrons prefque appercevoir que des gens à extérieur
toreux, des payfans endurcis par les miferes
& les fatigues, beaucoup d’hommes, très-peu de
femmes, d’enfans, de vieillards, mais principalement
des adultes , qui paroiffent jouir de la fanté la
plus forte & la plus durable , & dans qui les forces
font au plus haut point de vigueur. Ainfi verrons-
nous dans ces épidémies des hommes qui par leur
tempérament 6c leur régime dévoient fe promettre
une fanté longue & floriffante , mourir viftimes
d’une maladie inflammatoire ; tandis qu’un jeune efféminé,
amolli par les délices, abattu par les débauches
ou une chlerotique délicate & languiffante ne
rifqueront pas du tout de l’éprouver. Il femble que
leur fang appauvri ne foit pas fufceptible des mau-
vaifes impreffions , qu’il ne foit pas propre à la fermentation
inflammatoire. Ces maladies fuppofent dans
les fujets qui en font attaqués une certaine force,
un certain ton dans le fang & les vaiffeaux. D ’ailleurs
les maux de tête, les dégoûts, les indifpoli-
tions ou incommodités qui les précèdent, font des
maladies réelles pour des corps délicats ; au lieu
que ces révolutions même réitérées, ne font que
des imprefüons Lourdes & peu fenfibles fur des corps
vigoureux.
11 eft à propos de remarquer en outre que certaines
perfonnes font plus difpofées à certaines maladies
inflammatoires, qu’à d’autres. Ainfi dans une con-
flitution épidémique, on verra régner des phréné-
fies, des angines, des pleuréfies, des rhumatifmes,
&c. Les enfans font, par exemple, particulièrement
fujetsà la petite vérole & à la rougeole ; maladies qui
femblent leur être propres. Les jeunes gens, fur-tout
ceux qui ont été pendant leur enfance fujets à des
hémorrhagies du nez, fon t, fuivant la remarque
d’Hippocrate, fingulierement difpofés aux angines.
Les phrénéfies font plus fréquentes dans les tempéramens
colériques, très-fenfibles dans les perfonnes
qui s’occupent beaucoup à la méditation & à l ’étude.
Il paroît qu’il y a dans la partie affeftée une difpofition
antécédente, une foiblefTe naturelle qui y
détermine le principal effort de la maladie : drap év ,
dit Hippocrate , v.a.i 7rpoitvno vuv.oi ti » irpo t» vonuv ,
trravôa ç-tip/Çei « vnaeç; fi avant que la maladie foit déclarée
, on a fenti quelque gêne dans quelque partie,
la maladie y fera plus forte. Aph. j j . liv. IV.
La théorie. La caufe des maladies inflammatoires ,
difent prefque tous les médecins , eft une inflammation
de quelque partie interne confidérable, d’où
les Méchaniciens font venir à leur façon la fïevre 6c
les autres accidens ; les Animiftés difent qu’il n’eft
pas poffible qu’une inflammation attaque un vifeere
néceffaire à la v ie , fans attirer l’attention bienfaifante
de l’ame qui détermine en conféquence les efforts
tout-puiffans de fa machine pour combattre
vaincre, 6c mettre en déroute un ennemi fi dangereux.
Pour faire fentir l’inconféquence 6c le faux de
fcette affertion, je n’ai qu’à préfenter à des yeux qui
veuillent voir, le tableau des maladies inflammatoires:
il fera facile d’y obferver i 9. que la fïevre commence
à fe manifefter au-moins auffi-tôt que l’inflammation
6c pour l’ordinaire quelques jours auparavant ; 20.
que cette inflammation eft fouvent peu confidérable
, comme on peut s’en convaincre par les fymp-
tômes, & après la mort du malade, par l’ouverture
du cadavre ; tandis que la fievre eft très-aiguë, quelquefois
même après des pleuréfies violentes, on
n’apperçoit aucune trace d’inflammation; 30. que
toute inflammation même des vifeeres, n’eft pas
maladie inflammatoire. On feroit un aveu manifefte
d’inexpérience, fi on confondoit une inflammation
du poumon, de la p levre, furvenue à la fuite d’un
coup d’épée dans ces parties avec une pleuréfie ou
péripneumonie ; 4 °. qu’on faffe attention aux caufes
qui produifent l’inflammation & à celles qui excitent
les maladies inflammatoires, 6c qu’on examine leur
maniéré d’agir ; 50. qu’on jette un coup d’oeil furies
maladies inflammatoires externes, &c. elles feules
foumifes au témoignage de nos fens, peuvent nous
guider sûrement, & nous éclaircir cette matière ;
6°. enfin, que l’on confidere l’invafion, la marche,
& les terminaifons de ces maladies. C ’eft une erreur
manifefte de croire que les pleuréfies furviennent
après s’être expofé tout chaud à un air froid, parce
que le froid refferre les vaiffeaux, retient la tranf-
piration, & donne lieu par-là à un engorgement inflammatoire.
Si cela arrivoit, les inflammations fe-
roient dans la peau, 6c non pas dans la plevre, par
exemple, & feroient une engelure, 6c non pas une
maladie inflammatoire ; alors de toutes ces confidé-'
rations réunies, nous concluons que l’inflammation
des vifeeres ou les exanthèmes inflammatoires, font
plutôt l’effet que la caufe de la fievre putride , qui
fait la bafe & l’eflence de toute maladie inflammatoire.
Au refte, quand je dis une fïevre putride, je ne
parle pas de ces fîevres putrides imaginaires, prétendues
produites par un levain vicieux placé dans
les premières voies dont il s’échappe continuellement
quelques parties qui vont épaiflïr le fang, donner
lieu aux redoublemens, &c. Ces fîevres font
bannies de la vraie medecine hippocratique, & n’e-
xiftent que dans les cayers ou livres de quelques praticiens
routiniers. J’entends par fievre putride, une
fïevre préparée & travaillée de loin par des caufes
qui agiflant peu-à-peu fur le fang & les humeurs,
les changent 6c les altèrent. Ainfi les fîevres qui méritent
le nom de putrides, font toûjours jointes avec
une dégénération des humeurs qui eft réparée 6c
corrigée par les efforts fébrils & par les évacuations
critiques, toûjours néceflaires dans ces maladies.
La maniéré dont ce changement opéré dans le
fang excite la fïevre, eft encore inconnue; la matière
eft trop obfcure, 6c la théorifomanie trop générale,
pour qu’on n’ait pas beaucoup raifonné , théorifé ,
difputé ; mais tout ce que nous avons jufque ici là-
deflus, prouve la difficulté de l’entreprife & le courage
des entrepreneurs bien plus que leur capacité.
Je n’entreprendrai point d’expofer ni de réfuter tout
ce que cette queftion a fait éclore de faux, de ridicule,
&c. un pareil détail feroit trop long ; peut-être
ennuyeux, 6c sûrement inutile. Je remarqueraifeu-^
lement que l’idée de Willis fur la fïevre eft la plus
naturelle, la plus fimple, & la plus pratique. Cet
auteur penfe, & prefque tous les médecins en çon»
viennent aujourd’hui, que le fang eft dans un mouvement
continuel de fermentation, femblable, dit-
il , à celui qui agite les parties du vin. Si ce mouvement
augmente 6c devient contre-nature, le fang
bouillonnera, fe raréfiera , excitera la fïevre. Or
cette fermentation peut augmenter de deux façons ;
i° . parla furabondance de quelques principes aétifs,
des foufres & des efprits ; par exemple, comme il
arrive dans le v in , lorfque le tartre eft trop abondant,
il s’excite une fermentation, ou plutôt celle
qui eft toûjours préfente, s’anime, devient plus violente.
20. Lorfque quelque corps étranger, non mifei-
ble avec les humeurs, troublera la fermentation ordinaire
, l’analogie le conduit encore ic i; fi on jette
dans un tonneau plein de vin quelque corps hétérogène
, du fuif, par exemple, la fermentation eft
réveillée, & par fon moyen les parties étrangères,
ou furabondantes qui l’avoient excitée, font bri-
fées, atténuées , decompofées, renvoyées à la circonférence
, ou précipitées fous forme de lie au fond
du tonneau. Ne voit-on pas, fi l’on veut accufer
ju fte, arriver lit même chofe dans le fang ? Y a-t-il
rien de plus conforme à ce qui fe paffe dans les fîevres
putrides fimples, ardentes, ou inflammatoires ?
C’eft avec bien de la raifon que Sydenham qui n’en-
vifageoit les maladies que pratiquement, confidé-
roit la fïevre fous ce point de v û e , 6c l’appelloit
ébullition, ejfervefcence, mouvement fermentatif , &c.
6c il partoit de cette idée dans la pratique sûre 6c
heureufe qu’il fuivoit. C ’eft pourtant là cette théorie
qui eft fi fort décreditée aujourd’hui; il eft vrai
qu’elle eft confondue avec des erreurs, ou des cho-
fes moins évidentes ; il eft peut-être sûr auflî que le
zele pour la fermentation a emporté "Wïllis trop loin ;
mais n’eft-on pas tombé dans un excès au-moins
auflî condamnable, quand on a voulu la rejetter ab-
folument? L ’efprit humain dans fes connoifîances 6c
fes opinions, reflemble à un pendule qui s’écarte
de côté & d’autre, jufqu’à ce qu’il revienne après
bien des ofcillations, fe repofer à un jufte milieu ;
nous pouffons d ’abord à l’excès les opinions nouvelles;
nous les appliquons indifféremment à tous
les cas ; prifes trop généralement elles deviennent
faiiffes, abfurdes ; on le fent, on les abandonne, 6c
au lieu de les reftreindre, donnant dans l’écueil op-
pofé, on les quitte entièrement. Enfin, après bien
des difputes & des difeuflions, on entrevoit la vérité
; on revient fur fes pas ; on fait revivre les anciennes
opinions : fouvent bien furpris de répéter
en d’autres mots fimplemcntce quiavoit déjà été dit,
on parvient par-là à ce milieu raifonnable, jufqu’à
c e qu’une nouvelle révolution , dont les exemples
ne font pas rares en Medecine, faffe recommencer
les vibrations. C ’eft ainfi qu’Hippocrate & Galien
ont été regardés pendant long-tems comme les lé-
giflateurs cenfés, infaillibles delà Medecine ; enfuite
ils ont été perfiflés & ridiculifés ; leurs fentimens ,
leurs obfervations , ont été regardés comme des
fauffetés, des chimères, ou tout au-moins des inutilités.
De nos jours en notant leurs erreurs, on a
rendu juftice à leur mérite, 6c l’on a vu prefque
toutes leurs opinions reparoître fous de nouvelles
couleurs. La circulation du fàng offre un exemple
frappant 6c démonftratif de cette vérité : depuis
qu’Harvey eût fait ou illuftré par des expériences
cette découverte, qui a plus ébloui qu’éclairé, on a
été intimement perfuadé que le fang fuivoit les routes
qu’Harvey lui avoit tracées. On commence cependant
aujourd’hui à revenir un peu à la façon de
penfer fur cette matière des anciens ; le peii d’utilité
que cette prétendue découverte a apporté, a dû d’abord
infpirer de la méfiance fur fa réalité ; lés foup-
çons ont été principalement confirmés par les mou-
y émeus du cerveau , que le célébré M. de la Mure
a le premier obfervés &favamment expofés dans un
excellent mémoire lû à la fociété royale des Sciences
de Montpellier, & inféré dans les Mémoires de
üacadémie royale des Sciences de Paris, année
On ne tardera pas, je penfe, à revenir de même à
l ’égard des Chimiftes ; le tems de leurs perfécutions
eft paffé ; on corrigera les uns , on modérera l’ardeur
de ceux qu’un génie trop bouillant ou un en-
thoufiafme fougueux avoit emportés trop loin ; &
l’on appliquera de nouveau 6c avec fuccès, les principes
chimiques mieux conftatés & plus connus au
corps humain qui en eft plus fufceptible, que de
toutes les démonftrations géométriques, auxquelles
on a voulu infruâueufement & mal-à-propos le
plier 6c le foumettre.
Il y a tout lieu de croire que la difpofition inflammatoire
qui eft dans le fang, pouffée à un certain
point,ou mife en jeu par quelque caufe procatarûi-
que furvenue , réveille fa fermentation , ou pour
parler avec les modernes, fon mouvement inteftin
de putrefaftion ; il n’en faut pas davantage pour
augmenter fa circulation, foit, comme il eft affez naturel
de le penfer, que la contra&ilité des organes
vitaux, 6c en conféquence leur aétion, foit animée
par-là, foit que l’augmentation de ce mouvement
inteftin fuffife pour faire la fievre, fans que l’aélion
des vaiffeaux y concoure, de même lorfque le vin
eft agité par une forte fermentation, 6c qu’il eft:
dans un mouvement rapide, les parois du tonneau
n’y contribuent en rien.
Le fang ainfi enflammé, 6c mû avec rapidité, fe
portera avec plus d’effort fur les parties qui feront
difpofées, 6c s’y dégagera peut-être d’une partie
du levain inflammatoire ; il femble en effet que ces
inflammations des vifeeres ou d’autres parties, foient
des efpeces de dépôts falutaires quoiqu’inflamma-
toires ; ce qui prouve que les vifeeres font dans ces
maladies pour l’ordinaire réellement enflammées,
c’eft qu’on y obferve i° . tous les fignes de l’inflammation
, les mêmes terminaifons par la fuppuration ,
l’induration 6c la gangrené. La partie oii fe fera l’inflammation
, décidera la qualité 6c le nombre des
fymptômes, &c. Ainfi l’inflammation de la fubftance
du cerveau fera accompagnée de foiblefTe extrême,
de délire continuel, mais fourd, tranquille, d’abolition
dans le fentiment 6c le mouvement, à l’exception
d’une agitation involontaire des mains, qu’on
nomme carpofalgie, tous fymptômes dépendans de la
fécrétiontroublée6c interceptée du fluide nerveux;
celle qui aura fon fiege dans les membranes extrêmement
fenfibles qui enveloppent le cerveau, entraînera
à raifon de fa fenfibilité des fymptômes
plus aigus, un délire plus violent : lorfque la maladie
inflammatoire portera fur la poitrine, la refpiration
lèra gênée, &c.
Cette croûte blanche, jaune, ou verdâtre qui fe
forme fur le fang qu’on a tiré des perfonnes attaquées
de ces maladies, paroît ri’être qu’un tiffu des parties
lymphatiques, du fuc muqueux, nourricier, dont la
fécrétion eft empêchée : on obferve auflî cette qualité
de fang chez les perfonnes enceintes 6c autres,
où il y a pléthore de lue nourricier ; on pourroit
avancer, dit fort ingénieufement M. Bordeu, que le
fuc muqueux qui nage dans le fang, a quelque rapport
au blanc d’oeuf qui clarifie une liqueur troublée
dans laquelle on le fait bouillir. C e fuc porté dans
tous les vaiffeaux par le moyen de la fievre, entraîne
avec lui toutes les parties d’urine, de bile & d’autres
liqueurs excrémenticielles ; il clarifie pour ainfi
dire le fang ; c’eft ce qui fe paffe dans les maladies
putrides inflammatoires.
Partie thérapeutique. Le diagnoftic. Le diagnoftic
des maladies inflammatoires eft très-fimple & tout
naturel. i° . 11 eft facile, en fe rappeilant ce que