
Ferdinand 6c Dona Ifabella 1’érigerent en duché le
z i Juillet 1475, pour récompent’er les fervices de
don Diégo Hurtado. {D. ƒ.)
INFANTERIE, f. f. {Art rnilit.') c’eft dans les armées
les troupes qui combattent à pié, & qu’on nomme
auffi fantajjîns 6c pilions.
L’infanterie fait la partie la plus importante & la
plus confidérable des armées en Europe. Elle combat
dans toutes fortes de terreins ; elle feule défend
& prend les villes ; dans les batailles elle n’eft pas
moins utile que la cavalerie, qui agit feulement dans
les endroits ouverts & fpacieux. La rafe-campagne,
dit Vegece, eft propre pour la cavalerie ; les villes,
les plaines 6c les lieux efcarpés font propres pour
l’infanterie.
Quelqu’utile que foit l’infanterie dans toutes les
aûions de la guerre , nous ne mettrons point en
queftion fi une armée doit être compofée feulement
ainfanterie ou de cavalerie. Les armées doivent être
par-tout en état de combattre ; il fuit de-là qu’elles
ont befoin des deux efpeces de troupes néceffaires à
cet effet.
Une armée qui n’auroit que de l’infanterie ou de
la cavalerie , fe trouvéroit privée de l’avantage qui
réfulte du concours de ces différentes troupes. Si
dans un pays de bois & de montagnes, la première
eft plus utile que la cavalerie, cette derniere a aufîi
quelqu’avantage en plaine ; car quoiqu’il foit poffi-
ble de gagner des batailles en terrein uni avec de
l 'infanterie, comme on l’a vît du tems des Romains,
& du tems que les piques étoient en ufage , la victoire
ne fauroit être complette à caufe de la facilité
que la cavalerie a de s’éloigner de l’infanterie. C ’eft
ce que Xénophon obferve dans la fameufe retraite
des dix mille : comme l’armée des Grecs n’avoit
point de cavalerie , elle ne pouvoit, dit cet auteur ,
rien gagner dans la victoire, & elle perdoit tout dans
une défaite.
La cavalerie eft encore très-utile pour foutenir
l’infanterie. Si l’on fuppofe qu’une ligne ^infanterie ,
derrière laquelle eft une ligne de cavalerie, foit battue
ou pouffée , la cavalerie peut, en tombant fur
les troupes viftorieufes, que la charge ne peut manquer
d’avoir dérangé , leur en impofer, fi elle ne
peut les rompre 6c arrêter leur pourfuite. Il en eft
de même d’une ligne de cavalerie foutenue par de
l’infanterie : c ’eft ainfi qu’on fortifie une arme par
l ’autre ; mais on. ne le fait point lorfqu’on partage
la cavalerie également aux ailes , 6c qu’on met l’ in-
fanteritdiU centre. Voye{ Armée & Ordre de b a t
a il l e .
Il ne faut pas s’épuifer en longs raifonnemens
pour démontrer l’utilité de la cavalerie dans les armées;
un peu d’attention & de réflexion fur les différentes
aâ-ions de la guerre fuffit pour s’en convaincre
; mais on ne doit pas conclure de-là, qu’on ne
fauroit la rendre trop nombreufe. Ce n’eft pas fon
ufage que M. le chevalier de Folard a blâmé dans
plufieurs endroits de fon commentaire fur P olybe,
mais l’abus du trop grand nombre. La cavalerie eft
fort couteufe ; la dépenfe de mille hommes à cheval
, dit M. le marquis de Santacrux, fuffit pour
payer 2500 hommes à pié. Cette dépenfe n’eftpas
le feul inconvénient qui réfulte d’une trop grande
quantité de cavalerie. Elle ne peut fe maintenir long-
tems dans un camp qu’il conviendroit quelquefois
de conferver, à caufe de la difette 6c de la difficulté
des fourrages ; d’ailleurs l’armée ne peut s’éloigner
des rivières , on en a befoin pour les chevaux ; 6c
quand on défend un camp retranché, il peut réfulter
de grands inconvéniens d’avoir trop de cavalerie
& peu d’infanterie. Il faut donc qu’il y ait une jufte
proportion entre l’infanterie 6t la cavalerie. Ce qui
peut feryu: | la déterminer, c’eft l’examen des difr
férentes avions propres à chacun de cés corps , ies
fecours mutuels qu’ils doivent fe procurer, la naa
ture du pays oii l’on doit faire la guerre, & l’efpece
d’ennemis que l’on a à combattre.
Chez lés Grecs , qu’on peut regarder comme les
premiers inventeurs de la fcience militaire, la cavalerie
, fuivant les Ta&iciens, étoit la fixieme partié
de l’infanterie, c’eft-à-dire qu’elle étoit à l’infanterie
comme 1 eft à 6. La phalange étoit compofée dé
16384 hommes pefamment armés, & de 8192 hommes
de troupes légères. Ces deux nombres font en-
féinble 24576 hommes. La cavalerie étoit de 4096
hommes ; ce qui fait voir qu’elle étoit la fixieme partie
du nombre précédent, & par conféquent la fep-
tieme partie de celui de l’armée. Chez les Romains
le rapport de l’infanterie à là cavalerie étoit beau-
coup plus petit, il étoit à peu-près comme 1 eft à
20 , ou comme 3 eft à 50. Ce rapport n’étoit pas
fuffifant ; auffi les Romains fe trouverent-ils fouvent
dans des circonftances fâcheufes pour l’avoir adopté.
Quoique le rapport de la cavalerie à l’infanterie
fût établi de 1 à 6 par les Tatticiens grecs, les généraux
ne s’y bornoient pas toujours ; ils le va-
rioient fuivant les occafions. « Dans l ’armée que les
» officiers grecs formèrent pour le fervice du roi d’E-
» g yp te , il n’y avoit pas plus de 5000 hommes de
» cavalerie pour 70000 hommes d’infanterie. Le der-
» nier Philippe fit la guerre au proconful Flamini-
» nus avec 2000 cavaliers joints à la phalange ; la
» Theffalie, dont on fit le théâtre de la guerre, étoit
» un pays montagneux, oit une cavalerie plus nom-
» breufeauroit été inutile. On remarque mieux cette
» proportion dans l’armée d’Alexandre le grand ; il
» marcha en Afie avec 30000 hommes d’infanterie
» 6c 5000 de cavalerie. Note de M. Guifchardt fur la
Tactique d’Arrien.
Les Romains qui dans les tems brillans de la république
, avoient peu de cavalerie 6c beaucoup
d’infanterie , n’eurent prefque plus que de la cavalerie
quand ils furent dans leur décadence , ce qui
fournit cette réflexion à M. le préfident de Montef*
quieu, « que plus une nation fe rend favante dans
» l’art militaire , plus elle agit par fon infanterie ; 6c
» que moins elle le connoît, plus elle multiplie fa
» cavalerie. C ’eft que , ajoute cet illuftre auteur ,
» fans la difcipline , l'infanterie pefante ou légere
» n’eft rien, au lieu que la cavalerie va toujours dans
» fon defordre même. L’a&ion de celle-ci confifte
» plus dans fon impétuofité & un certain choc ; celle
» de l’autre dans fa réfiftance & une certaine immo-
» bilité ; c’eft plutôt une réaûion qu’une afrion. En-
» fin la force de la cavalerie eft momentanée ; Vin-
»fanterie agit plus long-tems ; mais il faut de la difci-
» pline pour qu’elle puiffe agir long-tems. Grandeur
des Romains t & c . chap. xviij.
C ’eft en effet la bonne difcipline qui peut rendre
à l’infanterie fon ancienne fupériorite fur la cavalerie
, 6c peut-être le renouvellement des piques. Les
Grecs ne négligoient rien pour exercer leur infanterie
; mais ils fe foucioient fort peu du maniment
de la pique ; c’étoit les évolutions qu’on enfeignoit
aux troupes, comme la chofe la plus effentielle, dit
un auteur que nous avons cité dans cet article ; 6c
M. le maréchal de Saxe e ft , dit-il, entré dans l’ef-
prit des anciens, quand il met le fecret de l’exercice
dans les jambes 6c non dans les bras.
Le rapport de la cavalerie à l'infanterie, qui pa-
roît être le plus communément fuivi aujourd’hui
dans les armées, eft à peu-près celui d’ i à 2 , ou de
2 à 5 ; enfOrte que la cavalerie eft environ le tiers
ou les deux feptiemes de l’armée. Ce rapport s’accorde
affez exaftement avec celui que M. le maréchal
de Saxe établit dans fes rêveries ou mémoires
fur la guerre. Mais cet illuftre général diftingue U
cavalerie en deux efpéces ; favoir, eh groffe cavalerie
& en dragons. « De la première qui, dit-il, eft
» la véritable ■> il en faut peu , parce qu’elle conté
» beaucoup ». Il éftime que quarante efcadronS de
cette cavalerie font fuffifans pour une armée de quarante
à cinquante mille hommes ; mais qu’à l’égafd
des dragons il en faut au moins le double.
Ces quarante efeadrons à 150 hommes chacun,
font 6000 hommes ; fi on leur ajoute le double de
dragons, c’eft-à-dire douze mille, on aura 18000
hommes pour la cavalerie de l’armée dont il s’agit.
Cette armée étant fuppofée de quarante à cinquante
mille hommes, on peut par conféquent la regarder
comme de quarante-cinq mille ; dans cette fuppo-
fition dix-huit mille eft les deux cinquièmes. On
voit par-là que M. le maréchal de Saxe met à peu-
près les deux feptiemes de l’armée en cavalerie 6c
dragons. C ’eft le double de la cavalerie des Grecs.
M. le marquis de Santacrux ne demande point
une cavalerie auffi nombreufe. Il prétend que fi le
pays oit l’on fait la guerre eft un pays de plaines,
il fuffit que là cavalerie, en y comprenant les dragons
, foit la quatrième ou la cinquième partie de
l ’armée ; que îi l’armée doit agir dans un pays de
montagnes, entrecoupé de bois & de ravins , la cavalerie
peut être réduite à la fixieme partie de l’armée.
Ce fentiment paroît mériter d’autant plus d’attention
, que cet illuftre auteur, en diminuant le
grand nombre de cavalerie qu’on emploie actuellement
dans les armées , fe rapproche davantage de
l’ufage des Grecs, qu’on ne peut fe difpenfer de regarder
comme nos maîtres dans l’art militaire.
A l’égard des différentes maniérés dont on a formé
l'infanterie , 6c des différens corps dont on l’a com-
pófé , voye{ Phalange , L égio n , C ohort e ,
Manipule , R ég im en t , Ba ta il lo n , Br ig a d e ,
C ompagnie , &c.
INFANTICIDE, f. m. (,Jurifprud.) eft le crime de
celui ou celle qui procure la mort à Ion enfant.
Tout homme qui tue en général méritant la mort,
à plus forte raifon celui qui tue fon enfant, une telle
aâion faifant frémir la nature.
Les femmes 6c filles qui font périr leur fruit durant
leur groffeffe par l’avortement, foit par des
breuvages 6c autres mauvaifes voies, commettent
auffi-bien un infanticide, que celles qui font périr
leurs enfans par le fer ou autrement après leur accouchement.
La loi deMoïfe diftinguoit;fi l’enfant dont la femme
fe faifoit avorter, étoit formé, ou vivant 6c animé
, elle étoit punie de mort ; s’il n’étoit point encore
animé, la loi ne prononçoit point 4e peine contre
elle.
Les Romains faifoient une autre diftinéfion entre
celles qui défaifoient leur fruit, étant corrompues
par argent, 6c celles qui le commettoient par haine
& averfion contre leur mari, ou par quelque autre
motif de paffion ; au premier cas on les condamnoit
à mort. En effet Cicéron dans l’oraifon pro Cluentio,
fait mention d’une femme miléfienne qui fut punie
du dernier fupplice pour avoir, après le décès de fon
mari, fait périr l ’enfant dont elle étoit enceinte,
moyennant une fomme d’argent qui lui avoit été
donnée par leshéritiers que fon mari avoit fubftitués
à ce pofthume ; au fécond cas elles étoient feulement
bannies pour un certain tems, fuivant les ref-
crits des empereurs.
La religion chrétienne plus pure que les lois des
Juifs & des Romains, tient pour homicide celle qui
détruit fon fruit avant qu’il foit vivant, auffi-bien
que celle qui le détruit après lui avoir donné la naif-
fance ; il femble néanmoins que dans ce dernier cas
le crime foit plus-grand, parce que l’enfant eft privé
«lu baptême.
Un ancien arrêt du 22 Décembre 1480, condaih-
na une femme qui avoit fuffdqué ou autrement tué
fon enfant, à êtfe brûlée vive.
La peine n’eft pourtant pas fi rigoureufe fuivant
l’édit d’Henri II. de l’année 1556, donné contre les
filles & femmes qui celent leur groffeffe & leur enfantement;
cet édit veut que celles qui fe trouveront
dans ce cas fans en avoir pris témoignage fuffifant *
même de la vie 6c de la mort de leur enfant lors de
l’iffue de leur yentre, & l’enfant ayant été privé du
baptême & de la fépulture publique 6c accoutumée,
elles foient tenues pour avoir homicidé leur enfant,
& pour réparation publique,punies de mort & du dernier
fupplice , de telle rigueur que la qualité particulière
du cas le méritera.
Ôn renouvelle de tems en tems la publication de
cet qdit, & depuis il y a eu plufieurs exemples de
femmes pendues pour avoir tué leurs enfans. Voye7
Enfant & Ex po sit io n d’En fa n t, & Suppression
de Part. { A)
INFATIGABLE , adj. ( Gramm. ) qu’on ne peut laffer. Voye^ Fatigue*
INFATUER, infatuare, { Hiß. anc. ) préoccuper,
prévenir tellement quelqu’un en faveur d’une personne
ou d’une chofe qui ne le mérite pas, qu’on ait
de la peine à l’en defabufer.
Ce mot vient du latin infatuare, qui lignifie rendre
fo l, mettre une perfonne hors de fon bon fens. Ce
verbe vient de fatuus fo l, dérivé du verbe fari, qui
eft tiré du grec <pa.yay.ai, d’oii vient <paynç , qui figni-
fie la même choie que vates en latin, 6c devin en
françois ; à caufe que les devins étoient faifis d’une
efpece de fureur ou de folie, quand ils alloient pro*
noncer leurs prédirions & leurs oracles. Voyei Pro*
phéties 6c Enthousiasme.
Les Romains appelloient infatués, infatuati, ceux*
qui croyoient avoir des vifions, qui s’imaginoient
avoir vû le dieu Faune , qu’ils appelloient Fatuosi
Voye{ Fatuaires. Dittion. de Trévoux.
INFECOND,^0^1 Fécond & Fé c o n d it é . Ej
IN FECON Dl ; ( Hiß. litt. ) c ’eft le nom que prit
une fociété littéraire qui s’établit à Rome en 1650.
Ils eurent pour devife un terrein couvert de neige
avec cette infeription, germinabit.
INFECT, INFECTER , (çàfrramm. ) ces mots
viennent du latin inficere, imprégner, teindre ; &nous
les avons tranfportés de la couleur aux odeurs. Un
lieu, un air, un corps font infects, lorfqu’ils offenfent
l ’odorat par une forte odeur de putréfaâion.
Infect ne fe prend'qu’au phyfique. Infecter fe prend
encore au moral. L’héréfie a infecté cette province.
L’air du monde eft infefté, & il faut y être fait pour
n’en être pas corrompu.
INFÉODATION, f. f. ( Jurifprud. ) eft l’aftion de
mettre en fief une chofe qui ne l’étoit pas.
On entend auffi par inféodation I’afte par lequel le
feigneur dominant a donné à quelqu’un un héritage,
ou autre immeuble, à la charge de le tenir de lui en
fief.
L’ufage dés inféodations eft, comme on le .conçoit,
auffi ancien que l’établiffement des fiefs, fi ce n’eft
qu’on veuille dire que les grandes feigneuries qui
ont formé les premiers fiefs, furent établies fans afte
à ’inféodation ; & que les ducs & les comtes, & autres
grands officiers de la couronne, profitant de la
confufion où étoit le royaume vers la fin de la fécondé
race & au commencement de la troifieme,
fe rendirent eux-mêmes propriétaires des offices 6t
terres dont ils n’avoient auparavant que l’adminif-
tration , fans en avoir aucun afre de conceffioii du
fouverain.
Mais lorfque les chofes rentrèrent un p«it dan?