médailles. Voyt^ Allô cutions. On en trouve auffi
quelques exemples parmi les modernes, 8c l’on n’oubliera
jamais celle que Henri IV. fît à fes troupes
avant la bataille d’Ivry : « Vous êtes François ; voilà
» l ’ennemi; je fuis votre roi: ralliez-vous à mon
» pannache blanc, vous le verrez toujours au che-
» min de l’honneur 8c de la gloire ».
Mais il eft bon d’obferver que dans les harangues
direâes que les hiftoriens ont fuppofées prononcées
en de pareilles occafions, la plupart femblent plutôt
avoir cherché l’occafion de montrer leur efprit 8c
leur éloquence, que de nous tranfmettre ce qui y
avoit été dit réellement. (£ )
HARANNES, (Hijl. mod.') efpece de milice hon-
groife dont une partie fert à pié 8c l’autre à cheval.
HARAS , f. m. (MaréchalLANous avons deux fortes
de haras, le haras du ro i, 6c les haras du royaume.
Le haras du roi eft un nombre de jumens poulinières
& une certaine quantité de chevaux entiers ,
pour faire des étalons. Ces animaux font raffem-
blés dans un endroit de la Normandie, aux environs
de Melîeraux, contrée oit les pâturages font
abondans, fucculens, propres à nourrir 8c à élever
une certaine quantité de poulains. Ce dépôt de chevaux
8c jumens appartient en propre à Sa Majefté,
pour être employé à multiplier i’efpece.
Sous le nom des haras du royaume, on entend une
grande quantité d’étalons difperfés dans les provinces
8c diftribués chez différens particuliers, qu’on
nomme garde étalons. Ces animaux appartiennent
en partie au Roi ; ils ne font employés qu’à couvrir
les jumens des habitans de la province, 8c dans la
faifon convenable à la copulation. Il eft enjoint aux
garde-étalons de ne pas leur donner d’autre exercice
qu’une promenade propre à entretenir la fanté
6c la vigueur de l’animal.
Nous ne nous arrêtons point à décrire la forme ni
la conftitution qu’ont les haras aujourd’hui, ni les divers
moyens que l’on employé pour leur entretien ;
ce feroit répéter ce que femblent avoir épuifé beaucoup
d’auteurs ; tels font MM. de Neucaftle , de
Garfault, de Soleyfel, &c. Ainfi nous nous bornerons
à quelques réflexions, i° . fur les efpeces de
chevaux qu’il faut de nécefîîté dans un état militaire
8c commerçant,tel que la France ; z°. fur l’obligation
d’avoir recours aux étrangers pour fuppléer à nos
befoins ; 30. fur la facilité que l’on auroit à fe paffer
d’eu x, fi on vouloit cultiver cette branche de commerce;
enfin fur les fautes que l’on commet au préjudice
de la propagation de la bonne efpece,foit par
le mauvais choix que l’on fait des mâles 8c des femelles
qu’on employé à cet ufage, foit par leur accouplement
difparate, foit enfin par la conduite que
l’on tient à l’égard de ces animaux, laquelle eft directement
oppofée à l’objet de leur deftination.
Les efpeces de chevaux dont la France a befoin
peuvent fe réduire à trois claffes ; favoir, chevaux
de monture, chevaux de tirage , & chevaux de
fomme.
La première claffe renferme les chevaux de felle
en général, les chevaux de manège, les chevaux
d’élite pour la chaffe & pour la guerre, 5c les chevaux
de monture d’une valeur plus commune 8c d’un
ufage plus général ; de forte que dans le nombre de
ces chevaux il n’y a qu’un choix judicieux 8c raifon-
né à faire pour les diftribuer 8c les employer à leur
ufage ; 8c c’eft quelquefois de ce choix 8c de cet emploi
que dépend le bon ou le mauvais fervice que
l’on tire des chevaux.
On tire de la fécondé claffe les chevaux de labour
fi utiles à l’Agriculture ; ceux qu’on employé à voi-
turer les fourgons d’armée, l’artillerie , les vivres ;
ceux dont on fe fert pour les coches, les rouliers, &
pour les voitures à brancart : les plus diftingués de
cette claffe qui font beaux, bien faits, qui ont lé
corps bien tourné, en un mot les qualités 8c la taille
propres pour le carroffe, font deftinés à trainer ces
voitures.
La troifieme claffe eft compofée en partie des chevaux
de felle les plus grofliers 8c les plus mal faits ,
& en partie des chevaux de labour tropfoibles pour
cet exercice 8c trop défeéHieux pour le carroffe.
Quoique nous ayons chez nous tout ce qu’il nous
faut pour élever & nourrir une quantité fuffifante de
chevaux propres à remplir tous ces objets, nous n’en
fommes pas moins dans la néceflité d’avoir recours
aux étrangers, pour en obtenir à grands frais des
fecours qu’il ne tient qu’à nous de trouver dans le
fein de notre patrie : l’Angleterre, par exemple 9
nous vend fort cher une bonne partie de nos chevaux
de chaffe, qui pour la plupart ne valent rien *
la Hollande nous fournit prefque tous les chevaux de
carroffe ; l’Allemagne remonte une grande partie de
notre cavalerie 8c de nos troupes légères ; la Suiffe
attelle nos charrues, notre artillerie, & nos vivres ;
l’Efpagne orne nos manèges, peuple en partie nos
haras, monte la plûpart de nos grands feigneurs à
l’armée ; en un mot, la Turquie, la Barbarie 8c l ’Italie,
empoifonnent , par le mauvais choix des chevaux
qu’on en tire, les provinces qui devroient nous mettre
en état de nous paflèr dès fecours de ces contrées
éloignées.
En fuppofa-rit qu’on voulût adopter nos idées, qui
paraîtront peut-être un peu difpendieufes, il fau-
droit commencer par réformer tous les mauvais étalons
8c toutes les jumens poulinières défe&ueufes ;
être fort circonfpeâ: fur l’achat de ceux de Turquie,
de Barbarie ; 8c bannir pour jamais ceux d’Italie de
nos haras. On tireroit de bons étalons d’Arabie,
quelques-uns de Turquie 8c de Barbarie, 8c les plus
beaux d’Andafoufie, pour les mettre dans nos provinces
méridionales 8c dans le Morvant. Ces pro4
vinces , par la quantité & la bonté de leurs herbages
, 8c la qualité de leur climat, nous offrent des fecours
plus que fufïifans pour élever 8c nourrir des
poulains qui feroient l’élite des chevaux de la première
claffe : 8c avant d’être admis, lés étalons feront
fcrupuleufement examinés, pour voir s’ils n’ont
point de vices de conformation, d’accidens , ou de
maladies. L’énumération en feroit inutile ; ces vices
font connus de tous les bons écuyers.
Le fécond examen fe feroit fur les vices de cara-
û e re , pour voir par exemple fi l’animal n’eft pas
rétif, ombrageux, & indocile à monter, s’il ne mord
point, ou s’il ne rue pas trop dangereufement.
Le troifieme examen regarderoit les vices de con?
ftitution, de tempérament, ou de force : pour cela
on le monteroit deux bonnes heures, plus ou moins ,
au pas, au trot ou au galop ; on répéteroit cet exercice
de deux jours l’un ; 8c lorfqu’on jugeroit le cheval
en haleine,on augmenteroit la promenade par degrés
jufqu’à la concurrence de dix ou douze lieues.
Le lendemain de chaque exefcice,on le feroit trotter
pour voir s’il n’eft point boiteux. On obferveroit s’il
ne fe dégoûte point, ou s’il n’eft pas incommodé de
fes travaux. L’épreuve feroit continuée de deux
jours l’un, l’efpace de cinq à fix mois,plus ou moins,
8c fur toutes fortes de terreins. Par-là l’on verroit
s’il a de la force, de l’haleine, des jambes, des jarrets,
une bouche, 8c des yeux convenables à un
bon étalon.
Si on lui trouvoit toutes ces qualités, & qu’il fût
exempt, autant qu’il eft poffible, des vices de conformation,
de caraâere, 8c de tempérament, alors
on lui dellineroit des jumens qui auroient fubi les
mêmes épreuves ; ces jumens leroient de la même
taille, de la même figure, & de la même bonté que
l’étalon, & du pays le plus convenable, quoiqu’en
général les bonnes jumens de nos contrées'To’îént très-propres à donner à toutes efpeces d’étalons une
belle progéniture. Elles feroient couvertes depuis
l’âge de cinq ans accomplis jufqu’à quatorze ou
quinze : l’étalon feroiterriployé à la propagation depuis
fix ou fept ans jufqu’à. quinze, ou feize. L’on
donnerpit à chaque étalon douze jumens à fervir
tous, les ans, pendant le temps de la monte y qui eft
ordinairement depuis le.1 commencement d’Avril
jufqu’à la fin de Juin. On fent bien que ces précautions
exigent;; de'la part des officiers des haras9
i°. une connoiffance du cheval auffi parfaite qu’il
eft poffible de l’acquérir ; z°. les talens de le ,mon-'
te r , pour être en état de juger de fes qualités bonnes
ou mauvaifes : enfin ,du zele pôur le bien dç la I
chofe, fans quoi tout le refte n’eft rien.; .
Ainfi le-Morvant, le Limoufin, l’Auvergne, la
Navarre, & en général toutes nos provinces méridionales
étant en état de fournir-au royaume affez
de chevaux de felle de l’efpece la plus précieufe, le
Poitou, la Bretagne, l’Anjou, la Normandie, nous,
fourniroient nos chevaux de carroffe & les chevaux
de felle communs. Pour cet effet onmettroit dans ces
provinces des étalons d’Allemagne, de Danemark,
d’Hanovre, de Brandebourg, de Frife, & quelques-
uns d’Angleterre, les uns de cinq piés un ou deux
pouces pour la plus grande taille, de ftruaure 8c de
conformation propres à aller au carroffe. On choi-
firoit des jumens pareilles à ces étalons ; ils fubi^
roient les uns & les autres le même examen qiie
nous avons prefcrit pour les étalons 8c jumens de là
première claffe ; avec cette différence, qu’ils fe-
roiènt exercés 8c éprouves au chariot ou au carroffe
par un fage & bon cocher. Cet exercice feroit
continué pendant cinq ou fix mois, en l’augmentant
par degré jufqu’à ce qui s’appelle un travail
pénible ; 8c quand ôn feroit afsûre de leur bonté à
tous égards, ce ne feroit qu’après un mois ou plus,
de repos 9 qu’on les employeroit à la propagation
dans la faifon ufitée. i
Les étalons de quatre piés dix pouces 8c au-def-
fous feroient employés à produire les chevaux de
felle pour la cavalerie, les dragons 9 8c pour le commun
des gens à cheval, & on en tireroit des bidets
pour le carroffe ; on Ieurdeftineroit auffi des jumens
de la même taille, & les épreuves feroient les mêmes.
Pour fe procurer affez de chevaux pour monter
nos dragons nos troupes legeres, l’on mettroit
dans les Ardennes, dans l’Alface, 8c dans une partie
de la Lorraine 8c de la,Champagne, des étalons
tartares, hongrois, 8c des tranfilvains, avec des jumens
du même pays. Ces étalons & ces jumens feroient
de la même taille de quatre piés fix à fept
pouces ou environ, fubiroient le même examen 8c
les-mêmes épreuves, pour s’afsûrer de leur bonté.
Avec les mêmes précautions, la Beauce, le Perche
, le Maine 8c fes environs produiroient fuffifam-
ment de chevaux pour monter les poftes-, fans y
mettre ni jumens ni étalons étrangers.
La Flandre, le pays d’Artois , la Picardie, la
Franche-Comté 8c la Brie nous; fourniroient les chevaux
de labour 8c de charroi. En général, Il ne s’a-
giroit que de choifir dans ces provinces & dans la
Suiffe des étalons 8c des jumens bien affortis, après
avoir bien examiné fi les uns 8c les autres font propres
à l’ufage auquel ils font deftinés.
Il eft à préfumer qu’avec ces précautions, 8c la
réforme qu’il y auroit à faire dans la conduite que
l’on tient à l’égard des étalons, des jumens & des
poulains pendant 8c après la copulation, nous aurions
affez de bons chevaux de toutes les efpeces
pour remplir les trois claffes qui nous font nécef-
laires, 8c que nous pourrions par-là nous paffer des
chevaux étrangers.
Tome f u i ;
Mais^pour cela il ne faudroit pas énerver les éta-»
Ions foit par le coït trop fréquent, & continué juf--
qu’à l’âge où ces animaux n’ont plus ni force ni
vigueur ; foit par un travail journalier 8c quelquefois
forcé, qu’on leur fait faire en certains endroits,
8c contre les ordonnances; foit en les b iffant
languir trop long-tems dans l’écurie, où ils
s’ennuient, s’engourdiffent, ou s’épuifent à force
de fe tourmenter ; foit enfin en les faifant faigner,
comme l’on fait après la monte. Cette pratique répugne
au bon fens & à la raifon. Le coït eft un épui-
fement que l’animal éprotive pendant le tems de la
monte ; la partie la plus pure 8c la plus fpiritueufe
des liqueurs s’évacue dans cet atte. L’étalon qui
l’aura fréquemment foûtenu pendant les trois mois
du printems, a befoin,alors d’être rétabli & réconforté
par des alimens reftaurans 8c une bonne nourriture
, pour réparer la déperdition de fes forces ; au
contraire on lui donne du fon, nourriture peu fuc-
culente ; enfuite on le faigne pour achever de l’é-,
puifer. Nous fommes d’accord là-deffus avec M.de
Bourgelat. Il réfulte de cette pratique que l’étalon
trop v ieu x, ou epuifé pour quelque caufe que ce
puiffe être, ne peut produire que des poulains fluets
8c d’une mauvaife conftitution.
Si l’on fait des fautes contre la propagation de
l’efpece à l’égard de l’étalon, l’on en fait de plus
groffieres encore à l’égard de la mere, 8c ces fautes
n’influent-pas peu fur les poulains. M. deBuffon,
qui les a bien fenties,ne les a pas affez combattues.
L’on a la pernicieufe habitude de faire couvrir les
jumens tous les ans, quelques jours après qu’elles
ont pouliné, pour tire r , dit-on, plus de profit.
Voyons quel eft le réfultat de cette économie. Le
partage de la nourriture que la jument pleine eft
obligée de donner à fon poulain nouveau-ne 8c à
celui qu’elle porte, influe beaucoup fur fon tempérament,
ainfi que fur celui des deux nourriffons;
deforte qu’étant obligée de fournir doublement le
plus pur & le plus fubftantiel de fa nourriture, il
ne lui en refte pas fuffifamment pour elle : enforte
qu’après un certain nombre de nourritures, cette
jument a les organes tellement affoiblis, qu’elle ne
produit plus que des poulains d’une complexion
débile & délicate, d’une ftru&ure mince, peu propres
à réfifter au travail.
Or cette jument qui auroit en huit ans produit a
fon propriétaire quatre bons poulains qu’il auroit
vendus fort cher, lui auroit été plus utile qu’en lui
en donnant un chaque année dont il ne le défait
qu’à vil prix. Aux maux qui réfultent de cette épargne
mal entendue pour les poulains qui ont été engendrés
par une jument nourrice, & nourris enfuite
par une jument pleine, il s’en joint de plus graves
encore.
La jument, quoique pleine, a pendant les premiers
mois la même attache & la même amitié pour
fon nourriffon, qu’au moment qu’elle lui donna le
jour. Ce petit par des mouvemens de gaieté s’écarte
çà & là de fa mere, cabriolant 6c bondiffant à
fon aife : cette mere qui craint de le perdre, court
après lui; elle hennit avec foreur, s’agite avec violence,
ce qui peut nuire au poulain qu’elle porte :
le nouveau-né revient avec précipitation fur fa
mere, en lui détachant des coups de pié fur le ventre
, fouvent même des coups de tete en voulant
prendre fes mamelles. Cette mere eft-elle couchée,
elle a l’attention de ne pas nuire à fon nourriffon ;
tandis que celui-ci fait tout ce qu’il faut pour la
bleffer, en fe couchant 6c s’agitant fur elle. Eft-il
couché auprès de fa mere , elle a la complaifance
de fe mettre dans une fituation defavantageufe à
fon état, de-peur d’incommoder fon poulain.
Que le poulain échappe aux dangers qu'il coutt
F ij