■ 574 IM M » philofopheSj avoient donné une étendue aux ef-
» prits , infinie à Dieu , finie aux anges 8c aux âmes
» raifonnables. Il eft vrai qu’ils foûtenoient que cette
»étendue n’eft point matérielle, ni eompofée de
» parties, & que les efprits font tout entiers dans
» chaque partie de l’efpace qu’ils occupent : totiin
» toto y & toù in fngulis partibus, De-là font, fortis
» les trois efpeces de préfence locale, ubi circumfcrip-
» tivum y ubi defiriitivum, ubi rtpltùvum • la première
» pour les corps, la fécondé pour les efprits créés -,
» & la troifieme pour Dieu. Les Cartéfiens entrent
» verfé tous ces dogmes ; ils difent que les efprits
» n’ont aucune forte d’étendue, ni de préfence lo-
» cale ; mais on rejette leur fentiment comme très-
» abfurde. Difons donc qu’encore aujourd’hui pref-
» que tous nos Philofophes 8c tous nos Théologiens
» enfeignent, conformément aux idées populaires ,
» que la fubftance de Dieu eft répandue dans des
» efpaces infinis. O r , il eft certain que c’eft ruiner
» d’un côté ce qu’on bâtit de l’autre. C ’eft redonner
.» en effet à Dieu la matérialité qu’on lui avoit ôtée.
» Vous.dites qu’il eft un efprit, voilà qui eft bien ;
» c’eft lui donner une nature différente de la matière.
» Mais en même tems vous dites que fa fubftance eft
» répandue par-tout; vous dites donc qu’elle eftéten-
» due ? Or nous n’ayons point d’idée de deux fortes
» d’étendue : nous concevons clairement que toute
» étendue, quelle qu’elle foit, a des parties diftine-
» tes, impénétrables, inféparables les unes des au-
» très. C ’eft un monftre que de prétendre que l’ame
» foit toute dans le cerveau 8c toute dans le coeur.
» On ne conçoit point quel’étendue divine 8c l’éten?
» due de la matière puiffent être au même lieu, ce
feroit une véritable pénétration de dimenfions que
» notre raifon ne conçoit pas. Outre cela, les chofes
» qui font pénétrées avec une troifieme, font péné-
» trées entre elles, 8c ainfi le ciel 8c le globe de la
» terre font pénétrés entre eux ; car ils feroient pé-
» nétrés avec la fubftance divine, qui, félon vous ,
» n’a point de parties ; d’où il réfulte que le foleil
» eft pénétré avec le même être que la terre. En un
mot, fi la matière n’eft matière que parce qu’elle
» eft étendue, il s’enfuit que toute étendue eft ma*
» tiere : l’on vous défie de marquer aucun attribut
» différent de l’étendue par lequel la matière foit
» matière. L’impénétrabilité des corps ne peut venir
» que de l’étendue, nous n’en faurions concevoir
» que ce fondement ; 8ç ainfi vous devez dire que
» fi les efprits étoient étendus, ils feroient impéné-
» trables ; ils ne feroient donc point différens des
» corps par la pénétrabilité. Après tout, félon le
» dogme ordinaire, l’étendue divine n’eft ni plus ni
» moins ou impénétrable ou pénétrable que celle
» du corps. Les parties, appeliez les virtuelles, tant
» qu’il vous plaira, ces parties, dis-je , ne peuvent
» point être pénétrées; les unes avec les autres ; mais
» elles peuvent l’être avec les parties de la matière.
» N’eft-ce pas ce que vous dites de celles de la ma-
» tiere ? mais elles peuvent pénétrer les parties vir-
» tuelles de l’étendue divine. Si vous confultez
» exactement le fens commun, vous concevrez que
» lorfque deux étendues font pénétrativement au
» même lieu, l’une eft aufli pénétrable que l’autre.
» On ne peut donc point dire que l’étendue de la
» matière différé d’aucune autre forte d’étendue par
» l’impénétrabilité : il eft donc certain que toute
» étendue eft aufli matière ; 8c par conféquent vous
» n’ôtez à D ieu que le nom de corps, 8c vous lui
» en Iaiflez toute la réalité lorfque vous dites qu’il
» eft étendu » ? Confultez Varticle de /’Ame , où l’on
prouve, à la faveur de la raifon & d e quelques étincelles
de bonne philofophie, qu’outre les fubftances
matérielles, il faut encore admettre des fubftances
purement fpirituelles 8c réellement diftinûes des
IMM premières. Il eft vrai que-nous ignorons ce que font
au fond que ces deux fortes de fubftances; comment
elles viennent fe joindre l ’une à l ’autre; fi leurs
propriétés fe-réduifent au petit nombre de celles que
nous connoiffons. C’eft ce qu’il eft impoflible de décider
; 8c d’autant plus impoflible, que nous ignorons
abfolument en quoi confifte l’effence de la matière,
8c ce que les corps font en eux-mêmes. Les modernes
, il eft v ra i, ont fait fur cela quelques .pas de
plus que les anciens ; mais qu’il leur en refte encore
à faire 1 :
, IMMATRICULATION, f. f. (Jurifprud.') fignifie
inscription de quelqu’un dans la matricule ou regif-
tre ; les nouveaux officiers font reçus 8c immatriculés
.dans le fiége où ils exercent leur fonûion.. Les nouveaux
propriétaires des rentes aflîgnées fur les revenus
du R oi j fe font immatriculer par les payeurs
pour pouvoir toucher les rentes. Voye^ Im m a t r i*:
cule £ Matricule. (A )
IMMATRICULE, adjeét. ( Jurifprud. ) eft l’afle
contenant l ’infcription de quelqu’un dans la matricule
ou regiftre commun. Uimmatricule d’un huiflier
pu autre officier eft l’a â e par lequel il a été inferit
au nombre- des officiers du tribunal. L'immatricule
d’un nouveau rentier ou propriétaire de quelque
partie de rente aflignée fur les revenus du R o i, eft
l’aâ e par lequel il eft inferit & reconnu en qualité
de nouveau propriétaire de cette rente, à l’effet
d’en être payé au lieu 8c place, du précédent propriétaire.
Voye{ Immatriculation £ Matricule.
(A )
IMMEDIAT, adj. (Gramm.) qui fuit ou précédé
un autre fans aucune interpofition, F. Medecine.
Immédiat fignifie aufli, qui agit fans moyen , fans
milieu. On dit dans ce fens, grâce immédiate, & caufo
immédiate.
On a vît depuis quelques années de grandes disputes
fur la grâce immédiate entre les Théologiens#
Il s’agifloit de favoir, fi la grâce agit fur le coeur &
fur l’efprit par une efficacité immédiate, indépendamment
des circonftances externes ; ou fi un certain
aflemblage, ou certain ménagement de circonftances,
jointes au miniftere de la parole, peuvent
produire la conyerfion des âmes. Voyei G r â c e #
Foyez le diclionn. de Trévoux. .
IMMEMORIAL, adj. ( Gram, & Jurifprd.) fe dit
de ce qui pafle la mémoire, des hommes qui. font
a&uellement vivans, & dont on ne connoît point
le commencement. On dit, par exemple, que de
tems immémorial on en a ufé ainfi, ou que l’on a
une pofleflion immémoriale d’un héritage. La poflefi-
lion de trente ou quarante ans, 8c même de cent
ans, n’eft point immémoriale, dès que l’on en connoît
l’origine. Foye{ Possession. CA)
IMMENSITÉ, f. f. (Métaphyjiq.) ce terme eft relatif
à l’étendue , comme celui d'éternité à la durée.
L’éternité eft un tems fans limites ; Yimmenfté eft un
efpace fans bornes.
On entend par Yimmenfté de D ieu, la préfence
de Dieu par-tout. Or on connoît que Dieu peut être
préfentpar-tout de trois maniérés: i°. par la con-
noiffance, parce que rien ne lui eft caché ; i ° . par
fon opération ou par fa puiflance, parce qu’il produit
8c conferve tout en tout lieu ; j° . par fon ef-
fence ou par fa fubftance, entant qu’il pénétré tout,
8c qu’il fe trouve par-tout fubftantiellement.
Parmi les anciens hérétiques qui ont erré fur Yimmenfté
de Dieu, les Valentiniens, les Gnoftiques,
les Manichéens admettant deux principes de toutes
chofes, l’un bon, 8c l’autre mauvais, plaçoient le
premier dans la région de la lumière , 8c le fécond
dans celle des ténèbres, par conféquent ils nioient
Yimmenfté de Dieu quant à fa fubftance.
.Vortius, les Calviniftes 8c. les Soçiniens ont renfermé;
I MM fermé Dieu dans, le c iel, & ne veulent point qu’il
foit préfent ailleurs, autrement que par fa puiflance.
Defcartes 8c fes feâateurs ont nié, fuivant leurs
principes, que D ieu fut préfent quelque part par fa
lubftance ; ainfi, félon eux, Dieu n’eft immenfè que
par fa connoiflance & pa r fa puiflance. Il faut mettre
ici une grande' différence entre le fentiment de ces
derniers & celui des Soçiniens ; car du fentiment
des Soçiniens, il s’enfuit que Dieu eft renfermé dans
un lieu ; que par conféquent il eft fujet au changement
, ce qui eft une grande imperfe&ion ; au dieu
que dans le fentiment de Defcartes , c’eft au contraire
une grande perfeéHon à' D ieu.de ne pouvoir,
correfpondre à un lieu, paree qu’autrement il feroit
étendu 8c corporel, ce qui eft abfurde.
Ce qui a trompé les Manichéens 8c les Soçiniens,
c’eft qu’ils n’ont pas pris garde qu’on ne peut pas accorder
que Dieu foit préfent quelque part par fa fubftance,
qu’on ne foit en même tems forcéd’accorder
qu’il eft par-tout : car fi Dieu étoit feulement quelque
part, ou il y feroit librement & par fa volonté,
ou néceffairement & par fa nature. On ne peut point
dire qu’il y foit librement, parce qu’il pourroit paf-
fer de ce lieu dans un autre, Ce qui détruit entièrement
l ’infinité, ia fimplicité & l’immutabilité de
Dieu. On ne peut pas dire non plus que Dieu foit
borné quelque part par fa nature , parce qu’il fau-
droit dire en même tems que par fa nature il a une
maniéré d’exifter finie, ce qui eft ridicule ; 8c d’ailleurs
on n’apperçoit ni dans la nature de D ieu, ni
dans celle du lieu, rien par où D ieu doive être plutôt
là qu’ici.
Les Scotiftes admettent, i°. deux fortes d’étendue.
L ’une qui eft fubftance, l’autre qui eft modification.
La première a des parties fubftancielles, pofées les
unes hors des autres ; par conféquent elle eft divi-
fible, mobile 8c corporelle : la fécondé eft propre
aux efprits. Elle a aufli des parties hors les unes des
autres, mais diftinguées feulement d’üne maniéré
formelle, par conféquent cette étendue eft indivifi-
ble. z°. Ils foutiennent que Dieu a une étendue éternelle
, néceflaire , infinie, par conséquent immobile
; d e -là ils concluent que Yimmenfté de Dieu
n’eft point dans un lieu, mais qu’elle eft plûtôt le
lieu univerfel, 8c que Dieu eft tout entier fous chaque
partie de, Yimmenfté.
Les Thomiftes rejettent cette étendue formelle
pour en fubftituer une virtuelle ; mais ils admettent
a v ec les Scotiftes, que Dieu eft infiniment répandu
hors de lui-même, & qu’il exifte tout entier fous
chaque partie de l’étendue créée. Je n’entrerai point
dans le détail des raifons dont les deux partis appuient
leur opinion ; tout le monde tombe d’accord
qu’il y a plus de fubtilité que de vraie Logique. Foy.
D ieu & l’Espac e .
IMMERSION, f. f. (Gramm.) aâion par laquelle
on plonge quelque chofe dans l’eau, ou dans tel
autre fluide. Foyeç Fluide.
Dans les premiers fiecles du Chriftianifme, on
baptifoit par immerfon, par trois immerfons. On
prétend que cette coûtume fubfifte encore en Portugal
& chez les Anabatiftes. Foye^B a p t ê m e . Elle
a cefle dans le treizième fiecle dans l’églife latine,
8c on lui a fubftitué le baptême par infufion, comme
il fe pratique aujourd’hui : mais le baptême par
immerfon eft encore en ul'age dans l’églife greque.
(G)
Im m e r s ion , en termes dA(tronomie, fe dit quelquefois
lorfqu’une étoile ou une planete eft fi proche
du foleil, qu’on ne peut la vo ir , parce qu’elle
eft comme enveloppée dans fes rayons. Foyez O cc
u l t a t io n Hé l iaq ue.
Immerfon, fe dit plus ordinairement pour lignifier
|e commencement d’une éçlipfe de lune,c’eft-à-dire, Tome FUI,
I M M 575 le moment où la lune commence à être obfcurcie, 8c
à entrer dans l’ombre de la terre.
On dit la même chofe, mais moins proprement,
de 1 éclipfe du foleil, lorfque le difque de la lune
commence à le couvrir, 8c k le dérober à nos yeux.
Foyei E cliï>se.
Emtrfion eft le terme oppofé à immerfon , & c ’eft
le moment dans lequel la lune commence à fortir de
1 ombre de la terre, celui où le foleil commence A
montrer les parties de fon difque que la lune nous ca-
choit.
Comme la lune n eft jamais entièrement obfcurcie
dans fesechpfes, mais qu’elle conferve une couleur
rougeâtre, le moment précis de fon immerfon, ou de
fon entrée dans l’ombre, n’eft pas aifé à déterminer
par obfervation ; il en eft de même du moment précis
de Yémerfon, Au contraire dans les éclipfes de
foleil, le moment de Y immerfon r ou le commencement
de l’éclipfe eft inftantané 8c très-remarquable ,
parce que la partie édipfée du difque du foleil n’eft
pas Amplement obfcurcie, mais entièrement cachée.
Le moment de Y immerfon, dans les éclipfes de lune ,
arrive en même tems pour tous les peuples de la terre
, il en eft de même du moment de Yémerfon ; cependant
comme ces momens font difficiles à déterminer
, il eft très-rare que deux obfervateurs placés
dans le même endroit, les déterminent précifément
à la même heure.
Immerfon, fe dit aufli en parlant des fatellites de
Jupiter, 8c fur-tout du premier fatellite, dont l’ob*
fervation eft d’une fi grande utilité pour la découverte
des longitudes. Voye^ Satellites.
On appelle immerfon du premier fatellite, le moment
auquel cette petite planete nous paroît entrer
dans le difque de jupiter ; 8c émerfon, le moment
auquel elle paroît en fortir.
On obferve les immerfons depuis la conjon&bn de
jupiter avec le foleil jufqu’à fon oppofition, 8c les
émerfions, depuis fon oppofition jufqu’à fa conjon-,
élion. La commodité de ces obfervations confifte en
ce qu’on les peut faire de deux jours l’un au moins «
pendant onze mois de l’année.
Vimmerfon des fatellites de jupiter dans l’ombre
de cette planete, eft beaucoup plus aifée à déterminer
avec précifionque Y immerfon de la lune, parce
que ces fatellites étant fort petits, s’obfcurciflent
& difparoiflent prefque dans un inftant. C ’eft ce qui
fait que les éclipfes des fatellites de jupiter donnent
la longitude avec plus de juftefle que les éclipfes de
lune. Foyei Lo n gitude. Chambers. ( O )
IMMEUBLES, f. m. pl. ( Jurifpr. ) font des biens
fixes qui ont une aflïete certaine, 8c qui ne peuvent
être tranfportés d’un lieu à un autre, comme font les
terres, prés, bois, vignes, 8c les maifons.
Il y a néanmoins certains biens, q u i, fans avoir
de corps matériel ni de fituation fixe, font réputés
immeubles par fi&ion , tels que font les droits réels ,
comme cens, rentes foncières, champart, fervi-
tude, 8c tels font encore les offices ; tels font aufli,
dans certaines coutumes, les rentes conftituées, lef>.
quelles, dans d’autres, font réputées meubles.
Les immeubles fe règlent par la loi de leur fituation
; ils font fufceptibles d’hypotheque.
En cas de vente, le vendeur peut être reftitué
lorfqu’il y a léfion d’outre-moitié du jufte prix.
Si le pofleffeur d’un immeuble eft troublé, il peut
intenter complainte.
Quand on difeute les biens d’un mineur, il faut
prifer les meubles avant de venir aux immeubles.
Le retrait lignager a lieu pour tous les immeubles
réels, tels que les héritages, & même pour certains
immeubles fiefs, tels que les cens 8c rentes foncières
non-raçhetables; mais les offices, les rentes confti-
D d d d •