ü ü Jean Damafcene parut. Il profefla dans le
inonde le Péripatétifme qu’il ne quitta point dans
fon monaftcre. Il fut le premier qui commença à
introduire l’ordre didaûique dans la Théologie. Les
fcholaftiques pourroient le regarder comme leur
fondateur. Damafcene fit-il bien d’affocier Ariftote
à Jejus-Chrift, ôc l’Eglife lui a-t-elle une grande obligation
d’avoir habillé fes dogmes à la mode fcho-
laftique ? c ’eft ce que je laiffe difcuter à de plus ha- HB8 . , 1 Les ténèbres de la barbarie fe répandirent en
Grece au commencement du huitième fiecle. Dans
le neuvième la Philofophie y avoit fubi le fort des
Lettres qui y étoient dans le dernier oubli. Ce fut
la fuite de l’ignorance des empereurs, ôc des incursions
des Arabes. Le jour ne rëparuf, mais foible,
que vers le milieu du neuvième ; fous le régné de
Michel ôc de Barda. Celui-ci établit des écoles, ôc
ftipendia des maîtres. Les connoiflances s’étendirent
un peu fous Conftantin Porphyrogenete. Pfillus
l ’ancien ôc Léon Allatius fon difciple luttèrent contre
les progrès de l’ignorance, mais avec peu de
Succès. L’honneur de relever les Lettres ôc laPhilo-
•fophie étoit réfervé à cePhotius qui deux fois nommé
patriarche, ôc deux fois dépofé, mit toute l’E-
glife d’orient en combuftion. Cet homme nous a
confervé dans fa bibliothèque des notices d’un grand
nombre d’ouvrages qui n’exiftent plus. Il fit auffi
l’éducation de l’empereur Léon, qu’on a furnommé
le fage, & qui a paffé pour un des hommes les plus
inftruits de ion tems. On trouve fous le régné de
L é o n , dans la lifte des reftaurateurs de la Science,
les noms de Nicetas D avid, de Michel Ephefius, de
Magentinus, d'Euftratius , de Michel Anchialus, de
Nicephore Blemmides, qui furent fuivis de Geor-
gius de Pachemere, de Théodore Méthochile, de
Georgius de Chypre, de Georgius Lapitha, de Michel
Pfellius le jeune, ôc de quelques autres travaill
a i fucceflivement à reffufciter les Lettres, la Poé-
lie ôc la Philo.opbie ariftotélique ÔC péripatéticienne
jufqu’à la prife de Conftantinople, tems oii les con-
noiffances abandonnèrent l’Orient, & vinrent chercher
le repos en Occident, oit nous allons éxaminer
l’état de la Philofophie depuis le feptieme fiecle juf-
qu’au douzième.
Nous avons vu les Sciences, les Lettres ôc la Philofophie
décliner parmi les premiers Chrétiens, ôc
s’éteindre pour ainfi dire à Boëtce. La haine que
Juftinienportoit aux Philofophes ; la pente des ef-
prits à l’efclavage, lesmiferes publiques, les incursions
des Barbares, la divifion de l’Empire romain,
l ’oubli de la langue greque, même par les propres ha-
bitans de la Gre ce, mais fur-tout la haine que la fu-
perftition s’efforçoit à fufciter contre la Philofophie,
la naiffance des Aftrologues, des Genethliaques ôc
de la foule des fourbes de cette efpece, qui ne
.pouvoient efpérer d’en impofer qu’à la faveur de
l’ignorance, confommerent l’ouvrage ; les livres moraux
de Grégoire devinrent le feul livre qu’on eût.
Cependant il y avoit encore des hommes ; ôc
.quand n’y en a-t-il plus ? mais les obftacles étoient
trop difficiles à furmonter. On compte parmi ceux
qui cherchèrent à fecouer le joug de la barbarie,
Capella, Caffiodore, Macrobe, Firmicus Maternus,
Chalcidius, Auguftin ; au commencement du feptieme
fiecle, Ifidore d’Hifpale, les moines de l’ordre
de S. Benoît, fur la fin de ce fiecle Aldhelme, au
milieu du huitièmeBeda, Acca, Egbert, Alcuin, ôc
notre Chatlemagne auquel ni les tems antérieurs,
ni les tems poftérieurs n’auroient peut-être aucun
homme à comparer, fi la Providence eût placé à
côté de lui des perfonnages dignes de cultiver les
talens qu’elle lui avoit accordés. Il tendit la main
à la fcience abattue., & la releva. On vit renaître
par fes encouragemens les connoiflances profanes
& facrées, les Sciences, les Arts, les Lettres 8c la
Philofophie. Il arrachoit cette partie du monde à la
barbarie, en la conquérant ; mais la ltiperftition ren?
verfoit d’un côté ce que le prince édifioit d’un autre.
Cependant les écoles qu’il forma fnbfifterent, ÔC
c’eft de-là qu’eft fortie la lumière qui nolis éclaire
aujourd’hui. Qui eft-ce qui écrira dignement la v ie
de Charlemagne ? Qui eft-ce qui confacrera à l’immortalité
le nom d’Alfred, à qui la Science a les mêmes
obligations en Angleterre, qu’à Charlemagne
en France ?
Nous n’oublierons pas ici Rabanus Maurus, qui
naquit dans le huitième fiecle, & qui fe fit diftinguer
dans le neuvième ; Strabon, Scot, Enginhard, An-
legifus, Adelhard, Hincmar, Paule-Wenfride, Lu-
pus-Servatus, Herric , Angilbert, Egobart, Clément,
Wandalbert, Reginon, Grimbeld, Ruthard,
& d ’autres qui repoufferent la barbarie, mais qui
ne la diffiperent point. On fait quelle fut encore
l’ignorance du dixième fiecle. C ’étoit envain que les
Ottons d’un cô té , les rois de France d’un autre, les
rois d’Angleterre & différens princes offraient des
afyles ôc des fecours à la Science, l’ignorance du-
roit. Ah , fi ceux qui gouvernent, parcouroient
des yeux l’hiftoire de ces tems, ils verroient tous
les maux qui accompagnent la ftupidité ; ôc combien
il eft difficile de reproduire la lumière, lorfqu’une
fois elle s’eft éteinte ! Il ne faut qu’un homme 8c
moins d’un fiecle pour hébéter une nation ; il faut
une multitude d’hommes & le travail de plufieurs
fiecles pour la ranimer.
Les écoles d’Oxford produifirent en Angleterre
Bridferth, Dunftan , Alfred de Malmesburi ; celles
de France, Remy, Conftantin Abbon; on vit en
Allemagne Notkere, Ratbode, Nannon, Bruno, Bal-
dric , Ifrael, Ratgerius, &c.. . mais aucun ne fe distingua
plus que notre Gerbert, fouverain pontife
fous le nom de Sylveftre fécond, ôc notre Odon ; cependant
le onzième fiecle ne fut pas fort inftruit. Si
Guido Arétin compofa la gamme, un moine s’avifa
de compofer le droit pontifical, ÔC prépara bien du
mal aux fiecles fuivans. Les princes occupés d’affaires
politiques, cefferent de favorifer les progrès de
la Science , ôc l’on ne rencontre dans ces tems que
les noms de Fulbert, de Berenger ôc de Lanfranc, ôc
des Anfelmes fes difciples, qui eurent pour contemporains
ou pour fueceffeurs Léon neuf, Maurice,
Franco, WilleramyLambert, Gérard, Wilhelme,
Pierre d’Amien, Hermann Contrade, Hildebert,
& quelques autres, tels que Rofcelin.
La plûpart de ces hommes, nés avec un efprit
très-fubtil, perdirent leur tems à des queftions de
diale&ique ôc de théologie fchoiaftique ; ôc la feule
obligation qu’on leur a i t , c’eft d’avoir difpofé les
hommes à quelque chofe de mieux.
On voit les frivolités du Péripatétifme occuper toutes
les têtes au commencement du douzième fiecle.
Que font Conftantinus A fe r , Daniel Morlay, Robert,
Adélard , Oton de Frifingue, &c, ils traduifent
Ariftote , ils difputent, ils s’anathématifent, ils fè
déteftent, 8c ils arrêtent plûtôt la Philofophie qu’ils
ne l’avancent, Voyc^ dans Gerfon ôc dans Thoma-
fius l’hiftoire 8c les dogmes d’Alméric. Celui - ci
eut pour difciple David de Dinant. David prétendit
avec fon maître , que tout étoit D ieu , 8c que Dieu
étoit tout ; qu’il n’y avoit aucune différence entre
le créateur ôc la créature ; que les idées créent 8c
font créées ; que Dieu étoit la fin de to u t , en ce
que tout en étoit émané, ôc y retournoit, 6rc. Ces
opinions furent condamnées dans un concile tenu
à Paris, 8c les livres de David de Dinant brûlés.
Ce fut alors qu’on profcrivit la do&rine d’Ariftote
; mais tel eft le çaraâere de l’efprit humain, qu’il
fe porte avec fureur aux chofes qu’on lui défend. La
profcription de l’Ariftotélifme fut la date de fes progrès
, & les chofes en vinrent au point qu’il y eut
plus encore de danger à n’être pas péripatéticien
qu’il y en avoit eu à l’être. L’Ariftotélifme s’étendit
peu-à-peu, ôc ce fut la philofophie régnante pendant
le treizième 8c le quatorzième fiecles entiers.
Elle prit alors le nom de fchoiaftique. Voye[ S c h o la
st iq u e philofophie. C ’eft à ce moment qu’il faut
auffi rapporter l ’origine du droit canonique, dont
les premiers fondemens avoient été jettes dans le
cours du douzième fiecle. Du droit canonique, de
la théologie fchoiaftique 8c de la philofophie, mêlés
enfemble, il naquit une efpece de monftre qui fub-
fifte encore, 8c qui n’expirera pas fi-tôt.
JESUS-CHRIST, ordre militaire de Portugal, Voyeç
C h r is t .
Jésus - C h r is t , nom d’un ordre de chevalerie,
inftitué à Avignon par le pape Jean XXII, en 1310.
Les chevaliers de cet ordre portoient une croix d'or
pleine, émaillée de rouge, enfermée dans une autre
croix pâtée d’or de même façon, mais d’émaux différens
que celle de Chrift en Portugal. Voy. C h r is t .
Favin, théat. cThonn. & de chevalerie.
J é s u s e t M a r i e , ordre de chevalerie connu à
Rome fous le nom deJefus & Marie du tems du pape
Pari V. qui à ce'qu’on croit en forma le projet. Par
les lois de cet ordre, que l’on a encore, il eft ordonné
que chacun des chevaliers porterait un habit
blanc dans les folemnités, ôc qu’il entretiendroit un
chev^ ôc un homme armé contre les ennemis de
l ’éjpt eccléfiaftique. Les chevaliers portoient une
croix bleu-célefte, dans laquelle étoient écrits les
noms de Jcfus & Marie. Le grand-maître étoit pris
d’entre trois chevaliers que le pape propofoit au
chapitre, comme dignes d’être revêtus de cette charge
, & capables d’en remplir les fondions. Ceux qui
demandoient d’entrer dans l’ordre fans faire preuve
de leur nobleffe , étoient obligés de fonder une com-
manderie de deux cens écus de rente pour le moins,
dont ils jouiffoient eux-mêmes pendant leur v ie , ôc
qui à leur mort demeurait à l’ordre. Bonami, cata-
log. ordin. equeftr.
* JET, f. m. (Gratnm.') il fie dit, i° . du mouvement
d’un corps lancé avec le bras, ou avec un infiniment
; le jet de la pierre avec la fronde eft plus
violent qu’avec le bras : 20. de l’efpace qu’il mefure
à deux jets de pierre : 30. de la pouffée d’une branche:
40. des effains d’abeilles: 50. des eaux jaillif-
fantes : 6°. du calcul par les jettons : 70. en fauconnerie
, en pêche, en fonderie, en peinture, en marine
, en artifice, en plufieurs autres arts, voyei les
articles fuivans.
J e t des bombes y ( Artillerie.) eft le nom qu’on
donne à la partie des Mathématiques qui traite du
mouvement des bombes , de la ligne qu’elles décrivent
dans l’a ir , de la maniéré dont il faut difpofer
le mortier pour qu’elles aillent tomber à une diftan-
ce donnée, &c. Voyez les articles Ba l is t iq u e 6*
P r o je c t il e , çù font expliquées les lois du mouvement
des bombes, ou plûtôt en général de tout
corps pefant lancé avec une vîteffe & une direâion
donnée. Voyt{ aufji Jet , Art milit. (O )
J e t d'eau ( Hydraulique. ) eft une lance ou lame
d’eau qui s’élève en l’air par un feul ajutage qui en
détermine la groffeur. Les jets croifés en forme de
berceaux, font appelles jets dardans, ôc les droits
perpendiculaires. Il y a encore des gerbes, des bouillons.
Conlultez ces articles à leur lettre. (X ) ^
Mariotte démontre qu’un jet d'eau ne peut jamais
monter auffi haut qu’eft l’eau dans fon réfervoir. En
effet, l’eau qui fort d’un ajutage devroit monter naturellement
à la hauteur de fon réfervoir , fi la ré-
fiftance de l’air & les frottemens des tuyaux ne l ’en TqtncriII. "
empêchoient. Voye^ l ’article Flu id e . Mais cette ré-
fiftance ôc ces frottemens font que l’eau perd nécef-
fairement une partie de fon mouvement, & par confisquent
ne remonte pas auffi haut. Ce même auteur
a auffi fait voir que lorfqu’un grand je t fe diftribue
en un grand nombre d’autres plus petits, le quarré
du diamètre du principal ajutage doit être proportionnel
à la fomme de toutes les dépenfes de fes
branches ; & que fi le réfervoir a cinquante-deux
pies de haut, ôc l’ajutage fix lignes de diamètre,
celui du conduit doit être de trois pouces. Les différentes
réglés pour les jets d'eau fe trouvent renfermées
dans un ouvrage exprès de M. Mariotte , imprimé
dans le recueil de fes oeuvres. Chambers. (O)
J E T fe dit, dans l'Art militaire, des armes propres
à lancer des corps avec force pour offenfer
l’ennemi de loin. Chez les anciens, la fronde, l’arc,
la balifte, la catapulte, &c. étoient des armes de jet.
Dans l’ufage préfent, les canons, les mortiers, les
fufils, &c. font les armes de jet qui ont été fubftituées
aux anciennes.
Jet fe dit particulièrement de la bombe jettée ou
lancée par le moyen du mortier. On appelle le je t
des bombes, l’art ou la fcience de les tirer avec méthode
pour les faire tomber fur des lieux déterminés.
Cette fcience fait la principale partie de la baliftique9
qui traite du mouvement des corps pefans jettes ou
lancés en l’air fuivant une ligne de direction oblique
ou parallèle à i’horifon. Voye{ B a l i s t i q u e ou
Pr o je c t il e .
On a vû au mot B o m b e quelle eft à peu-près
l’époque €e l’invention de cette machine. Les premiers
qui ont fait ulage des bombes, les tiroient
avec très-peu de méthode.
Ils avoient oblervé que le mortier, plus ou moins
incliné à l’horifon, portoit la bombe à des diftances
inégales ; qu’en éloignant la dire&ion du mortier de
la verticale, la bombe alloit tomber d’autant plus
loin que l’angle formé par la verticale & la direction
du mortier approchoit de 45 degrés ; ôc que
lorfqu’il fu^paffoit cette valeur, les diftances où la
bombe étoit portée , alloient en diminuant ; ce
qui leur avoit fait conclure que la plus grande portée
de la bombe étoit fous l’angle de 45 degrés.
Muni de cette connoiffance que la théorie a depuis
confirmée, lorfqu’il s’agiffoit de jetter des bombes,
on commençoit à s’affûrer, par quelques épreuves,
de la portée fous l’angle de 45 degrés ; ôc lorfqu’on
vouloit jetter les bombes à une diftance moins grande
, on faifoit faire au mortier un angle avec la verticale
plus grand ou plus petit que 45 degrés. Cet
angle fe prenoit au haïàrd ; mais après avoir tiré
quelques bombes, on parvenoit à trouver à peu-
près la dire&ion ou l’inclinaifon qu’il falloit donner
au mortier pour faire tomber les bombes fur les lieux
propoiés.
Telle étoit à peu-près la fcience des premiers
bombardiers ; elle leur fervo.it prefque autant que fi
elle avoit été plus exafte, parce que la variation dé
l’a&ion de la poudre, la difficulté de faire tenir fixement
&fôlidement le mortier dans la pofition qu’on
veut lui donner, font des caufes qui dérangent prefque
toûjours les effets déterminés par la théorie.
Les premiers auteurs qui ont écrit fur l ’Artillerie,'
comme Tartaglia de Brefce, Diego Ufano, & c . . .
croyoient que la bombe, ainfi que le boulet, avoit
trois môuvemens particuliers ; fa voir, le violent ou
le droit, ls'm ixte ou le courbe, & le naturel ou
perpendiculaire.
Le mouvement étoit droit, félon ces auteurs,
tant que l’impulfion de la poudre l’emportoit confi-
dérablement fur la pefanteur d ç la bombe : auffi tôt
que cette impulfion venoit à être balancée par la pefanteur
t la ligne du mouvement du mobile de venoit y v v îj