67ô I N D ie nom dans fon acception originelle , qui eft effen-
ïiellemènt indéfinie, il faut l’employer feul ; l’intention
eft remplie • parler en homme , c’eft-à-dire conformément
à La nature humaine ; fens indéfini, où il
h’eft queftion ni d’aucun individu en particulier, ni
de la totalité des individus. Ainfi l’introduôion de
f article indéfini feroit au moins une inutilité, li ce
n’étoit même une abfurdité & une contradi&ion.
Dans la fécondé hypothefe , où l’on admettroit
diverfes efpeces d’articles, l’idée commune du genre
devroit encore fe retrouver dans chaque efpece,
mais avec quelque autre idée acceffoirequi feroit le
caraûere diftinûif de l’efpece. Tels font peut-être
les mots tout, chaque, nul, quelque , certain, ce, mon,
ion , fo n ,u n , deux, trois, & tous les autres nombres
Cardinaux ; car tous ces mots fervent à faire prendre
dans un fens précis & déterminé, les noms avant lef-
quëls l ’ufage de notre langue les place ; mais ils le
font de diverfes maniérés, qui pourroient leur faire
donner diverfes terminaifons. Tout, chaque, »«/^articles
colleftifs, diftingués encore entre eux par des
huances délicates ; quelque, certain, articles partitifs ;
'•ce, article démonftratif; mon, ton ,fo n , articles pof-
feffifs ; un, deux, trois, &c. articles numériques, &c.
Ici il faut toujours raifonner de même : vous déterminerez
le fens d’uft nom, par tel article qu’il vous
plaira ou qu’exigera le befoin ; ils font tous deftinés
à cette fin ; mais dès que vous voudrez que le nom
foit pris dans un fens indéfini, abftenez-vous de tout
'article ; le nom a ce fens par lui-même.
30. Pronoms indéfinis. Plufieurs Grammairiens admettent
une claffe de pronoms qu’ils nomment indéfinis
ou impropres, comme je l’ai déjà dit ailleurs.
Voye^ Impropre. On verra au mot Pronom , que
cette partie d’oraifon détermine.les objets dont on
parle, par l’idée de leur relation de perfonalité,
tomme les noms les déterminent par l’idée de leur
nature. D ’où il fuit qu’un pronom, qui en cette qualité
feroit indéfini, devroit déterminer un objet par
l’idée d’une relation vague de perfonalité, & qu’il
he feroit en foi d’aucune perfonne , mais qu’ il feroit
applicable à toutes les perfonnes. Y a-t-il des pronoms
de cette forte ? Non : tout pronom eft ou de la
première perfonne , comme j e , me, moi, nous ; ou
de la fécondé , comme tu , te , toi, vous ; ou de la
troifieme, commefie, i l , elle , le, la , lu i, les, leurs ,
eux , elles. Voye^Pro nom .
4°. Tems indéfinis. Nos Grammairiens diftinguent
encore dans notre indicatif deux prétérits, qu’ils appellent
l’un défini, & l’autre indéfini. Quelques-uns,
entre lefquéls'fl'faut compter M. de Vaugelas, donnent
le nom de defini à celui de ces deux prétendus
prétérits., qui eft fimple, comme f aimai , je pris ,j e
reçus ,j e tins ; & ils appellent indéfini celui qui eft
compofé , comme y ’«i aimé , j'a i pris , j'ai reçu ,j'a i
tenu. D ’autres au contraire, qui ont pour eux l’auteur
de la Grammaire générale & M. du M ariais, appellent
indéfini celui qui eft ûmple, & défini celui qui
eft compofé. Cette oppofition de nos plus habiles
maîtres me femble prouver que l’idée qu’il faut avoir
d’un tems indéfini., étoit elle-même aftez peu déterminée
pat rapport à eux. On v erra , «mc/eTEMS, ce
qu’il fautpenfer -des deux dontil s’agit i c i , & quels
font, ceux qu’il faut nommer définis & indéfinis , foit
préfens , foit prétérits, foit futurs. ( B. E . R. M. )
INDÉLÉBILE, adj. ( Théologie. ) qui ne fe peut
effacer. Ce mot éft formé du latin dèlere effacer,
avec la prépofition in , prife dans un fens négatif.
Les facremens de baptême, de confirmation & d’ordre
impriment un caradere indélébile. Voyer C a r a c t
è r e . JCG)
INDELIBÉRÉ, adj. (Gramm. ) qui s’eft fait fans
attention , 1 ans examen , fans deliberation, prefque
machinalement. On dit un jugement indélibéré, un
gouvernent indélibéré,
I N D ÎNDËMNË, adj. m. & f. (Jurifprud.) eft celui qui
eft acquitté ou dédommagé de quelque chofe par
une autre perfonne ; celui dont le garant prend le
fait & caufe, doit [prive indemne de la conteftation*
Voye^ Ind em n it é. (^ )
INDEMNITÉ , f. f. (Jurifprud.) lignifie en général
ce qui eft donné à quelqu’un pour empêcher qu’il
ne fouffre quelque dommage.
Quelquefois par ce terme, on entend un écrit par
lequel on promet de rendre quelqu’un indemne. Ce
terme eft fur-tout employé dans ce fens pour exprimer
un écrit par lequel on promet d’acquitter quelqu’un
de l’événement d’une obligation ou d’une con-
teftation, foit en principal & intérêts, ou pour les
frais & dépens.
Indemnité eft quelquefois pris pour diminution ;
un fermier qui n’a pas joui pleinement de l’ effet de
fon b a il, demande au propriétaire une indemnité »
c’eft-à-dire une diminution fur le prix de fon bail.
Indemnité eft aufîi un terme propre pour exprimer
la garantie due à la femme par fon m ari, & fur fes
biens , pour les dettes auxquelles elle s’eft obligée
pour fon mari, ou qui font dettes de communauté ,
dont elle ne profite pas au cas qu’elle renonce à la
communauté. L’hypotheque de la femme pour ces
fortes d’indemnités eft du jour du contrat de mariage
en pays coutumier ; en pays de droit éc r it, elle n’a
lieu que du jour de l’obligation de la femme, à moins
que l'indemnité ne foit ftipulée par contrat de mariage.
Indemnité dûe au feigneur eft un droit en argent
que les gens de main-morte font tenus de payer au
feigneur de qui relèvent les héritages qu’ils acquièrent
, à quelque titre que ce fo i t , pour le dédommager
de ce que ces héritages font pour ainfi dire
hors du commerce, attendu que les gens de. mainmorte
cherchent rarement à aliéner, & qu’ils ne le
peuvent faire que difficilement, à caufe des formalités
néceffaires pour de telles aliénations, au moyen
de quoi, le feigneur eft privé des droits qu’il rece-
vroit à chaque~mutation, & autres droits cafuels
qu’il pourroit avoir fi les héritages n’étoient pas pof-
lédés par des gens de main-morte.
Le feigneur a néanmoins toujours un droit de relie
f à chaque mutation d’homme vivant & mourant*
Le droit d’amortiftement que les gens de mainmorte
payent au ro i, n’empêche pas qu’ils ne doivent
auffi un droit 8 indemnité, foit au r o i , fil’acqui-
fition eft dans fa mouvance, ou au feigneur particulier
dans la mouvance duquel eft l’héritage ; & s’il
y a un autre feigneur qui ait la juftice, le droit d'indemnité
fe partage entre e u x , de maniéré que celui
qui a la juftice prend la dixième partie du droit d'indemnité
, pour le dédommager des droits de deshér
rence, confifcation , & autres droits que donne la
juftice ; le feigneur de fief prend le furplus du droit.
Quand à la fixation du droit d1'indemnité, elle eft
différente félon les pays & les coutumes.
Au parlement de Paris on réglé ce droit au cinquième
du prix de l’héritage ; on obferve la même
chofe dans toutes les coutumes qui n’ont point de
difpofition contraire.
La coutume de Sens réglé ce droit à la valeur des
fruits de trois années de l ’héritage, ou au fixieme du
prix de l’acquifition, au choix & option des gens de
main-morte.
En Normandie l'indemnité eft du tiers pour les fiefs
& du quart pour les rotures.
En Dauphiné on l’évalue à un droit de lods de vingt
ans en vingt ans.
Mais ordinairement les gens de main-morte ont
foin de prévenir le feigneur du deffein qu’ils ont d’acquérir
& de compoféravec lui.
Ce payement du droit d'i/ndemnïté ne peut être
demandé
î N D demandé aiix gens dé main-morte qu’après qu’ils ont
obtenu des lettres d’amortiffement, étant incertain
jufques-là s’ils relieront pôffeffeurs de l’héritage.
Quand un héritage eft donné pat teftament à déS
gens de main-morte, c’eft aux héritiers du teftateur à payer le droit d'indemnité : on fuppofe que le teftateur
en leur donnant l’héritage, a eu intention que
fes héritiers fiffent tout ce qui feroit néceffaire pour
les mettre en état de le pofféder ; fuivant la réglé ,
qui vultfinem , vult & media ; mais quand l’hérirage
eft donné entre-vifs, c’eft aux gens de main-morte
à payer le droit d1indemnité : on ne peut pas dans ce
cas admettre la même préfomption que dans le précédent
, parce que fi le donateur avoit voulu payer
le droit d'indemnité, il l’auroit fait lui-même de loir
vivant.
Le payement du droit d’indemnité eft fujet à prescription
par trente ans contre un feigneur temporel,
& par quarante ans contre l’Eglife.
Les gens de main-morte qui ont payé le droit à'indemnité
ne laiffent pas d’être tenus d’acquitter les
cens & rentes dûs fur l’héritage.
Il n’eft point dû d’indemnité pour l’acquifition d’un
héritage allodial.
Les gens de main-morte n’en doivent pas non-
plus lorfqu’ils acquièrent de la main du feigneur ou
de fon confentement.
Voye^ Dumoulin fur Part. 5 1. de la nouv. coût, de
Paris , gl. xj. ri. 68 ; la déclaration du 2 1 Novembre
172.4 ; l'arrêt du confeil du p Décembre 1717 ; Bac-
quet , des amortiffemens , ch. liij. & tjv. D ’Olive ,
liv. I I . ch. xij. & fuiv. Boniface , tome I. Uv. II.
tit. j /. ch. x x j. Salvaing, de t u f âge des fiefs, ch. IjX.
He vin-fur-Frain, pag. 26$ ; Du fait, liv. I . ch. ccxlj.
& liv. I I I . ch. ccxtïx.
yoye^aujjî AM O R T IS S EM E N T , H OM M E V IV AN T
e t Mo u r a n t , & Main-m o r t e . '(Jf)
INDÉPENDANCE , f. f. (Phjlofopfi. Morale.) la
pierre philofophale de l’orgueil humain ; la chimere
après laquelle l’amour-propre court en aveuglé ; le
terme que les hommes fe propofënt toujours , 6i qui
empêche leurs entreprises & leûrs defirs d’en avoir
jamais , c’eft l'indépendance.
Cette perfeâion eft fans doute bien digne des efforts
que nous faifons pour l’atteindre > püifqu’elle
renferme néceffaifement toutes les autres ; mais par-
là même elle ne peut point fe rencontrer dans l’homme
effentiellement limité par fa propre exiftence. U
n’eft qu’un fèul être indépendant dans- la nature; c’eft
fon auteur. Le' refte eft une chaîne dont' les anneaux
fe lient mutuellement, & dépendent lés uns des autres
, excepté le premier , qui éft dans la main même
du créateur. Tout fe tient dans- l ’univers : les corps
céleftes agiffent les- uns- fur les autres ; notre globe
en eft attiré , & les attire à! fort tour ; le fliix & reflux
de la mer a m caufe dans la lune ; la fertilité des campagnes
dépend de la chaleur du foîeil, de l’hùnfidité
de la terre ,■ de l’abondance de fes1 fèls , &e. Pour
qu’un brin d’hérbe croifïe, il faut pour ainfi dire ,
que là nature entière y conclure' enfin il y a dans
l’ordre phyfique un enchaînement dont l’étrangé
complication fait un cahos que l’on a eu tant de peine
à‘ débrouiller.
Il en eft dé rtiênie daris1 l’ôfdré moral & politique.
L’ame dépend du corps ; le éorps dépend de l’àme,
& de tous les objets extérieurs-: comment l’Homme,
c’eft-à-dire l’afferiîblage de deux parties fi ftibor-
donnéesyferoit-illui-même indépendant ? h £fociéré
pour laquelle FOUS fbmmes nés fioUs doririe des lois1
à fuivre, deè devoirs à remplir ; quel qüe foit’ le térig
que nous’ y tenions^ j là dépendance'eu toujours no-
tre apanage $ & celui qui commande à tbüHeç àü-
tTes' , lô'î fOU VèTàtfilâi.m®iUé’V6if aü-defluS de fat tête
les lois dont- il n’eft que le-premier fujet;
fymt VIIIy
ï N D 67 r
Cependant les homrtiés fe confuhient feh des efforts
continuels poùr arriver à cette indépendance,
qui n’éxifte nulle part. Ils croient toujours l’apper-
cevoir dans le rang qüi eft au-deffus de celui qu’ils
occupent ; & lorfqti’ils y font parvenus, honteux de
ne l’y point trouver, & non guéris de leur folle en-
vie , ils continuent à l’aller chercher plus haut. Je
les comparerois volontiers à des gens grofliers &
ignorans qui âurbieilt réfdtü de he fé repöfer qu’à
l’endroit où l’oeil borné eft forcé de s’arrêter, & ou
le ciel femble toucher à la terre. A méfure qu’ils
avancent l’horifon fe recule ; mais comme ils l’ont
toujours en perfpeftive deVaht eux ; ils ne fe rebutent
poilit, ils fe flatehtfans fceffe de l’atteindre dans
peu, & après avoir rtiârfché toute leur vie , après
avoir pafeoufu des efpacèé immerifës , ils tombent
enfin accablés de fatigue & d ’enrKii,& meurent avec
la douleur de ne fe voir pas plus piès du terme auquel
ils s’cfforçOient d’arriver , que le jour qu’ils
avoient commencé à y tendre.
Il eft pourtant une ëfpece d’indépendance à labtiellè
il eft permis d’afpirer : c’eft celle que donne là Phi-
lofophie. Elle n’ôte point à l’hômmè tous fes liens,
mais elle ne lui laiffe que ceiix qu’ il à reçus de là
nfain même dé la raifon. Elle ne le rénd pas abfolu-
ment indépendant, mais elle hé le fàit dépendre que
de fes devoirs.
Une pareille indépendance he peut pàs êtfé dange- •
reufe. Hile ne touche point à l’autorité du gouvernement
, à l’obéiflance qui eft dûe àu i lois, au ref-
pêft que mérite la religion : elle né tend pas, à, dé^
truire toute fubordination, & à boulevêrfer l'état,
comme le publient certaines gens qui crient à l’a-
narehie , dès qu’on refnfe dë reconnôître le tribunal
orgueilleux qu’ils fe fönt eux mêmes élevé. Non, fi
le philofophe eft plus indépendant que le refte des
hommes , c’eft qu’il fe forgé moins de chaînes nouvelles.
La médiocrité des defirs le délivre d’une foule
de befoins auxquels la' cùpidité affujèttit les autres.
Renfermé tout entier en lui-même, il le détache par
raifon de ce que la malignité des hommes pourroit
lui enlever. Content de Ion obfcurité, il ne va point
pour en fortir ramper à la porte des grands, 6c cher«
cher dès mépris quM ne veut rendre à perfonne.
Plus Ü eft dégagé des préjugés, & plus il eft attaché
aux vérités de la religion , ferme dans les grands
priricipes qui font l’honnête homme, lé fidèle luiet
& le bon citoyen. Si quelquefois il a le malheur dé
. faire phri de bruit qü’il ne le voudroit, c’eft dans le
monde littéraire où quelqués nains effrayés bû envieux
de fa grandeur, veillent lé faire pafft f pour ùrt
Titan qui elcàlade le c ie l, & tâchent aihfi par leurs
cris d’attirer là foüdre fur l’a tête dé celtii dôht leurs
propre* dards pourroient à' pëihe piquer légèrement
les piés. Mais que l’on ne fe laiffe pàs étourdir par
ces accnfàtions vagues dönt les auteurs reftém-
blenf affez à‘ cës enfahs qui crient au feu lorfqüè
leur maître les corrigé. L’on n’a jufqu’ ici guère vü
de philofophes qui aient excité des révoltés , fén-
verfé lé gouvernement, changé la formé dés états •
je ne vois pas que ce fbh eux qui aient occafionné
les guetres civiles'en France , fait les proferiptions à
Roriié , détruit les républiques dé ia Grèce. Je le*
vois par font entoures d’uhe foule d’èrtnêmis , mais
par tout jé lès vois perféclités & jamais peffécû-
teuts; C ’éff là leur deftihéé , & le prince mêihe deà
Philöföphes , lé grand & véhûeiix Socrate, leur
apprend qu’ils dôîvertf S’eftimer heureux Iorfqü’oii
he lènr drefîèp'as des écHafautls âvanr de leur élever
dés nàètfeS. ' * J ’
iNDËËËNÏj'ANT , Ùrh. (Jthéologie.') iridépendàhs±
hotii qii’oh dbhfié à qûe^lifeÿ féôaires d’Angleterre
& dés Provinèés-iiniés. Ils oht’été ainfi appellés
paTcéUù’iîk1 fourprôfélffori de ne dépendre d’aücurié
Q Q q q