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ai'e ; telles font celles des plantes laiteufes de chon-
drille, d’hieraciiim, de taraxâcum, de fcorzonere ,
dç barbe dé bouc, Sc de laitues potagères. Leur fuc
vifqueux & laiteux , accompagné, d’une légère vertu
parégoriquç, difpofe merveilleufement au fom-
meil. .Telles font encore les douces émulfions d’amandes
,de.femences froides ,d e graines de pavots,
blancs: voilà pourquoi toutes ces plantes fetrouvoient
à l’entrée du palais de Morphée* La nuit, dit-on ,
en ramaffoit les fucs8c les graines , lesfemoit & les
répahdoit de toutes parts ;
Ante forés àntri ftzcunda papavera forent,
Innumerceque herbce , quàrïïm de laite fôportm
Nôx legit, & Jpargit per opacàs humida terras.
Enfin, en cas de continuation Yinfomnie, & longue
.tous les lignes indiquent qu’on n’a plus à craindre
l’inflammation du cerveau, on peut hardiment
employer les àrîodins, les parégoriques, les caïmans,
en les donnant avec ordre & avec prudence j
jufqu’au rétabliffement du fommeil néceffaire.
En même tems qu’on pratiquera les remedes qu’on
vient d’indiquer , il eft permis pour guérir les malades
attaqués.Y infomnie fébrile de recourir à plu-
fièurs des moyens inventés par le luxe, pour endormir
lesfybaritès en fanté.
, Les moyens dont je parle, confiftent à procurer un
froid modéré , à humeâer l’air de vapeurs aqueu-
fps, à imaginer quelque murmure doux, égal, continuel
& agréable aux fens. La lyre d’Orphée afloU-
pit Çèrbére, calma fa fureur, enchanta les puiffan-
ces infernales, & leur arracha des larmes. Le dieu
du fommeil àvôit établi fa demeure dans le pays des
Cimmeriens, & le feiil bruit qu’on y entendoit,
étoit celui du fleuve Léthé, qui coulant fur de petits
cailloux, faifoit un murmure perpétuel pour in-,
yiter au repos.
Saxo tamen exit ab imo
'Rivus dquoe Lethes, per quem cum murmure labens
Invitât fomnos crepitantibu's unda lapïllis.
Mais un fecret important pour appaifer Yinfomnie
fébrile,fecret pratiquable chez le pauvre comme chez
lé riche , c’eft d’éloigner de la vûe 8c des oreilles
du malade tous les objets qui peuvent frapper fes
fens, les émouvoir & les agiter. Pour y réuflirimmanquablement
, imitez en partie le domicile du
fils de l’Erebe & de la Nuit; Ovide l’a peint d’une
main de maître, & je crois que fon tableau fera plus
d’impreflïon fur l’efprit du lefteur, que les trilles
ordonnances de la Medeciné.
«Là , dit cet aimable poète, eft une vafte ca-
*> verne où les rayons du foleil ne pénétrèrent ja-
» mais. Toujours environnée de nuages obfcurs,
» a peiné y jouit-on de cette foible lumière, qui
» laiffe douter s’il eft jour ou s’il eft nuit. Jamais les
sjcocqs n’y annoncèrent le lever de l’aurore; ja-
» mais lés chiens , ni les oies qui Veillent à la garde
>> desmaifons, ne troublèrent ce lieii par leurs cris
» importuns. Jamais on n’y entendit ni mugiffemens
» de betes feroces ou domeftiques, ni querelle , ni
» fon de voix humaine ; tel eft le féjour de la Taci-
» turnite. D e crainte que la porte ne fafle du bruit
>> èn s’ouvrant ou en fe refermant, l’àntre refte tou-
» jours ouvért, & l’on n’y met point de garde. Au
» milieu du palais eft un lit d’ébene, dont les rideaux
» font noirs. C ’eft dans ce lit que repofe le dieu du
*> fommeil fur là plume & fur le duvet ». Lifèz-vous
même ici la defcription dé l’original, fans avoir be-
fom.de bouger de votre place, 8c vous trouverez
que c’eft un des beaux morceaux des Métamor-
phofçs.
Pîc nuhqiiafn radiis orient, mediufve cadenfque
Phoebus. adiré poièjl. Nebulie caligine mixtes
Jéùxhaldntur humo , dubioeque crtpufcula lucis.
I N S- Non vieil aies ibi crißati cantibüs oris
Evoc'at Aüroram. Nec voce filïntiâ rumpuhi
■ S o l li c i t iv e - c a n e s , c a n ib u jy c f a g a c i o r a n fé r ÿ •
Non f e r a , n o n p c cu d e S , h o n t io t i f i d m i n e r am ï- '
Hu m a n c s v e fo iium r e d d u n t c o n v i c ia lin g 'u i s ‘9
Muta q u ïe s h a b i ta t .
Janua quce verfo ßridorem cardine reddat,
N.ulla donïo to'tà, cußos in limine nullus.
A t medio tont s eß ebenö fublimis in atrà ,
Plumeusâtricolor, pullo velamine teclus,
Quo cubât ipfe deus , mèmbris languorè folutis.'
Metam. lib. X L
Les prognoftics qu’on peut ti#er de Yinfomnie f é brile
, méritént d’être connus dés praticiens. Cette
affeéHon morbifique précédé quelquefois un fàigne-
ment de nez favorable ; mais s’ il eft accompagné de
lueurs froides, d’excrétions ou d’évacuations crues,
fans fçHilagement du patient, c’eft un mauvais augure.
Si elle eft jointe à de grandes douleurs de tête
à des vomiffeméns érugirieux, elle annonce le délire
ou la mort, dit Hippocrate , lib. I. Prorrhét. 10. Le
coma fuccédant à une infomniefébrile qui a été continuelle
, eft d’un dangereux préiagè, &c. ( D. J. )
INSÖNDO, f. m. ( Hiß. nat. ) c’eft ainfi que l’on
nomme en Afrique, dans les royaumes de Congo &
• d’Angola, un infeête qui n’eft gueres plus gros qu’une
fourmi, qui foüvent fait périr les élephans. II
entre dans leur trompe, & y excite un piquotement
fi incommodé, que l’élephant en devient comme fou,
Sc va fe heurter contre les arbres & contre les rochers
, oit contre tout ce qu’il rencontre enfon chemin
, jufqu’à ce qu’il tombe mort*.
INSOUTENABLE, àdj. ( Gramm. ) il fe dit des
chofes & dés perfonnes, & fignifie qu’on ne peut défendre
ou qu’on ne peut fupporter. Dans le premier
fens une propofition eft infoutenable; dans le fécond,
un homme eft infoutenable par l’impertinence de fes
propos & de fes maniérés. Les infoutènables les plus
cruels., ce font ceux qui ont encore des prétentions.
INSPECTEUR, f. m. infpeclor ; ( Hiß. anc. ) celui
à qui l’on confie le foin & la conduite de quel-,
que ouvrage. Voyt^ Int en d an t .
On appelloit infpeÜeurs chez les Romains des perfonnes
commifes pour examiner la qualité & la valeur
des biens & effets des citoyens, afin de proportionner
les taxes & les impôts aux facultés d’un
chacun.
Les Juifs ont aufli un officier dans leur fynagogue
qu’ils nomment infpecleur , ma^am. Il eft chargé
d’avoir l’oeil fur les prières & fur les leçons, de les
préparer & de les montrer au lefteur, & de fe tenir
auprès de lui pour voir s’il lit comme il faut,
& le reprendre lorlqu’il manque.
In sp e c t eu r , ( Art milit.') on appelle ainfi en
France des officiers, dont les fondions font de faire
la revue dés troupes, d’examiner les compagnies en
gros & en détail, pour connoitrè celles qui font en
état de fervir , & les foldats propres aux travaux
militaires ; de caffer ceux qui ne font point de la taille
qu’on les veut, ou qui ne peuvent pas fupporter
les fatigues. Ils rendent aufli compte au roiniftre de
l’exaftitude ou du fervice des officiers. C ’eftfur leurs
mémoires qu’on les caffe ou qu’on les avance. Ils retranchent
où réforment dans la cavalerie les chevaux
qu’ils jugent mauvais. Ils étoient obligés d’abord
de faire leurs revûes tous les mois, mais ils
ne la font plus güere qu’une fois l’année. Ces officiers
font choifis ordinairement parmi les brigadiers
ou les maréchaux de camp ; on en a vu qui étoient
lieuténans-généraux. Ces charges font de là Création
du roi Louis XIV.
IN S P E C T E U R de manufactures, ( Commerce & Finances.
) commis fur la conduite & exécution d’uho
manufacture conformément aux réglemehs.
J N S ^ L ’établiffemènt des‘injpecleiirs eft dû à M. Côlbert.
£i cè fut.un bon établiflèment que celui-là , dit l’au-r
teur des confidérarions fur les finances, dont les remarques
orneront cet article ; c’eft un établiffement
bien plus habile d’avoir formé une école à ces mêmes
infpecteurs > & de les avoir aftreints à travailler
fur le métier ■ , ou plûtôt c’eft lui avoir donné
le feul genre d’utilité qu’il fût poflible d’en retirer. Il
feroit defirable fans doute qu’ils puflent avoir voyagé
dans tous les pays où fe confomment les ouvrages
des manufactures qu’ils font deftinés à conduire : car
c’eft le goût du confommateur qui doit régler la fabrication
; c’eft dans le pays, de la confommation
que l’on prend connoiffance des étoffes étrangères
qui fè pourroient imiter, de l’avantage ou du defa-
vantage que les uns & les autres ont dans leur concurrence
mutuelle, & des caufes qui y contribuent.
La manière dont l’opération du commerce s’y fait,
influe encore d’une maniéré effentielle fur les mefu-
ïes que les manufacturiers ont à prendre. Enfin,
plus les infpecteurs s’approcheront de la fonction des
tonfultans avec les manufacturiers ou de profeffeurs
des-arts, plus ils feront utiles.
Mais que perifer des amendes décernées par M.
Colbert contre l’impéritie des ouvriers à chaque article
de fès réglemens de manufactures ? Des amendes
ne font point des raifons, c’eft tout au plus l’indication
d’une vdlonté rigoureufe ; à moins qu’elles
ne regardent des chofes faites Contré la bonné foi ;
& peut-être dans ce cas les amendes ne fuffifent-
elles pas. Celui qui fe défie de fa main & dé fon
adreffe, né peut lire ce réglement de M: Colbert
fans frémir. Sa première penfée eft , qu’on eft plus
heureux en ne travaillant pas, qu’en travaillant. Si
par malheur le réglement eft impraticable , comme
cela s’eft vû quelquefois , l’ouvrier fe dégoûté , Sc
ceffe au moins fon travail pendant le tems de la tournée
de Yinfpecieur.
On demande à tout hohime de bonne foi s’il feroit
bien invité à une profeflîon , en lui difant : « au
» cas que vos ouvrages ne foient pas faits confor-
» mément au réglement, pour la première fois ils
» feront confifqués Sc attachés fur un poteau avec un
» carcan, votre nom au-defliis pendant 48 heures ;
» pour la fécondé fois pareille peine, Sc vous ferez
» blâmé; pour la troifiemefois vous ferez vous-même
» attaché au poteau ». On répOndroit que cette ordonnance
eft fans douté traduite du japonnois. Non ;
c’eft le difpbfitif d’un réglement de 1670, extorqué
fans doute au fage miniftre que nous avons nommé;
par quelque fubalterne qui comptoit bien de n’entrer
jamais en qualité d’ouvrier dans aucune manufacture
foumife a un infpecleur.
In s p e c t e u r des conjiruclions, (^Marine. ) c’eft un
officier commis à la conftruttion Sc aux radoubs
des vaiffeaux. Il examine les plans Sc les profils
"avant qii’on' commence de mettre le vaiffeau fur le
chantier ; fait faire un devis exaft des bois qui doivent
y entrer, Sc enfeigne aux charpentiers les méthodes
les meilleures de faire les fonds, les hauts ;
les ponts, &£. ( <2 )
INSPIRATION , f. f. tn termes de Théologie ; eft
une grâce eélefte qui éclaire l’ame & lui donne des
Connoiffances Sc des mouvemens extraordinaires Sc
furnaturels. Voye1 C o n n o i s s a n c e & S c i e n c e .
Les prophètes ne parloient que paf Yinfpiration
divine , Sc le pécheur fe convertit quand il ne ré-
fifte pas aux infpirdtions de la gra’ce. Vpye{ G r â c e ,
P r o p h é t i e . .
lnfpiration fo dit particulièrement au fujet des livres
de l’Ecriture-fainte : on la définit un mouvement
intérieur duSaint-Efprit, qui détermine un homme
à écrire , Sc qui lui fuggere le choix des chofes
qu’il doit écrire. L’idée Yinfpiration. fuppofe donc
Tome VIIU
I N S 793
dans 'celui qui écrit un mouvement du Saînf-Efprit
qui le porte à écrire ce que la révélation lui a appris
, ou ce qu’il fait par lui-même ; Sc qui lui fuggere
le choix des chofes qu’il doit écrire. Mais comme
dans les livres faints on diftihg'ue les.chôfes oit
les matières , Sc les termes ou le f ty le , Sc que les
matières fe divifent en prophéties, en hiftoires 8c
en doctrines , Sc que les doctrines fe divifent encore
en philofophiques Sc en théologiques ; que ces dernières
enfin fe fubdivifent en fpeculatives 8c en pratiques.
On demande fi le Saint-Efprit a infpiré les auteurs
facrés 8c quant aux chofes, 8c quant aux termes
dont ils fe font fervis pour les énoncer.
Les fentimens dès.Théologiens font fort partàgéè
fur ces deux queftions. Les uns foutiennent que le
Saint-Efprit a dicté aux écrivains facrés toutes les
chofes dont ils ont parlé , Sc qu’il leur a même fug-
géré les termes dont ils fe font fervis. C ’eft le fem
timent des facultés de Théologie de Douai Sc dé
Louvain dans leur cenfure de 1588. .
D ’autres prétendent que les écrivains facrés onî
été abandonnés à eux-mêmes dans le choix,des termes
; qu’ils n’ont eu ni révélation ni infpiration dans
tout ce qu’ils, ont écrit, mais que le Saint-Efprit à
tellement dirigé leur-plume Sc leur efprit iorfqu’ils
écrivoient, qu’il a été impoflible qu’ils tombaffent
dans l’erreur. Leflius Sc quelques autres jéfuites ont
foutenu ce fentiment, qui occafionna la cenfure dont
nous venons de parler ; 8c M. Simon l’a embraffé
depuis.
Holdén, dans fon ouvrage intitulé, Fidel divincè
analyfis , foutient que les écrivains facrés ont été
infpirés par le Saint-Efprit dans tous les points de
doétrinè, Sc dans tout ce qui a un rapport effentiel
à la do&rine, mais qu’ils Ont été abandonnés à eux-
mêmes dans lès mêmes faits, Sc en général dans toutes
les queftions étrangères à là religion.
M. le Clerc a été encore plus loin. II . prétend'
i° . que Dieu a révélé immédiatement aux écrivains
facrés les prophéties qü’on trouve dans leurs livres ;
mais il nie que ce foit lui, qui les ait portés à les
mettre par écrit, Sc qu’il les ait conduits dans lé
moment même qu’ils les ont écrits. i ° . Il avancé
que Dieu n’a point révélé immédiatement aux écrivains
facrés toutes les autres chofes qui fe rencontrent
dans leurs ouvrages , 8c qu’ils les ont écrites ,
on fur ce qu’ils avoient vû de leurs propres yeux ;
ou fur le récit dé perfonnes véridiques, ou fur des
mémoires écrits avant eux, fans infpiration fc fans
aucune afîiftànce particulière du Saint-Efprit ; en un
mot, il enfeigne que les livres faints font l’ouvrage
eje perfopnes de pro fité, qui ri’ont pas été féduites
8c qui n’ont voulu féduire perfonne. Sentimens de
quelques théologiens f Hollande, lettre x j. & xij. La
Chambr. traité de la relig. tonv. lV . dijfert. iij. pag\
i5y & fuiv.
Le fentiment le plus commun e f t , que le Saint-
Èfprit à infpiré les écrivains facrés quant aux prophéties
; aux points d’hiftoire Sc aux doftrines relatives
à la religion , Sc que quant au choix Sc à
l’arrangemeht des termes, il les a laiffés à la difpo*»
fition de( chaque écrivain.
Les Payens prétendoient que leurs prêtres Sc
leurs fibiles étoient divinement infpirés , lorf-
qti’ils rendôient leurs oracles. Les Poètes, pour pa-
roîtr e infpirés , invoquent Appôllon Sc les Mu fes
iorfqu’ils veulent commencer quelque grand ouvrage.
roye{ IN VOC AT IO N.,
I n s p i r a t i o n , f. f. ( Jurifprud. ) fe dit de l’élection
d’un pape, Iorfque tous les fuffrages fe font réunis
en faveur du même fujet, Sc principalement quand
cela s’eft fait au premier ferutin. Grégoire IX. en
parle dans fes décrétales, liv. F I > tit. v j , chap. 42*
( ^ )
H H h fi h i;