
nous avons dit plus haut fur la caufe, l mvafion, la
marche & les terminaifons de ces maladies, de s’af-
furer de leur préfence. 2°. L’on peut en distinguer
les différentes efpeces par les fignes qui leur font
propres, & qu’on peut voir rapportés au long dans
les articles qui concernent les maladies inflammatoires
en particulier. ^ôye^PLEURÉSiE, PhrenÉsie , 6-c.
3°. La connoiffance des caufes qui ont difpofé, produit
, excité ces maladies, eft affez peu néceflaire
pour la curation ; on peut cependant, fi l’on en eft
curieux , l’obtenir par les rapports du malade 6c des
affiftans ; il eft peut-être plus important pour la pratique
de favoir fi la maladie inflammatoire eft épidémique
, dépendante d’une caufe générale ; un praticien
qui voit beaucoup de malades,peut s’en inftruire
lui-même.
Prognofiic. Les fymptômes effentiels aux maladies
inflammatoires, ou les accidens qui furviennent ordinairement
dans leur cours , en rendent le prognof-
îic toujours fâcheux ; on peut affurer avec raifon
que ces maladies font dangereufes. L’inflammation
ou le dépôt inflammatoire qui fe fait dans quelques
parties, n’en augmente qu’accidentellement le danger;
quelquefois, le plus fouvent même, il le diminue.
Ce dépôt débarraffe, comme nous l’avons déjà
remarqué-, le fang d’une partie du levain inflammatoire.
Il y a tout lieu de croire que la maladie inflammatoire
fer oit plus dangereufe s’il n’y avoit point
de partie particulièrement affe&ée. Nous voyons
que la fievre ardente ou caufus , efpece de maladie
inflammatoire qui n’eft décidée à aucune partie, eft
très-dangereufe ; Hippocrate la range parmi les maladies
mortelles ; lorfque les inflammations extérieures
font formées, la fougue du fang fe rallentit,
la violence des fymptômes s’appaife, 6c l’on jette
le malade dans le danger le plus preflant, fi l’on empêche
la formation de ces dépôts inflammatoires,
comme il eft arrivé à ceux qui ont voulu, facri-
èant leurs malades à une aveugle routine, accoutumer
la petite vérole à la faignée, 6c comme l’éprouvent
encore aujourd’hui ceux qui fans autre
indication veulent guérir les maladies inflammatoires
par la faignée ; on ne fauroit cependant difeonvenir
que ces inflammations attaquant des parties confi-
dérables dont les fondions font néçeflaires à la v ie ,
n’augmentent quelquefois le danger des maladies inflammatoires
; c’eft ce qui fait qu’on doit regarder les
maladies inflammatoires qui fe portent à l’extérieur,
comme les moins dangereufes : quant à celles qui
affeélent quelque partie interne , leur danger varie
fuivant la fituation, la nécefîité, la connexion, la
difpofition, la fenfibilité du vifeere enflammé , &
fur-tout fuivant la nature, le nombre 6c la vivacité
des fymptômes que cette inflammation détermine.
Pour porter un prognoftic plus jufte, il me paroît
quoi qu’on en dife, que l’on peut tirer quelque lumière
de l’examen de la constitution épidémique.
Si l’on obferve une certaine uniformité dans les
fymptômes de plufieurs maladies inflammatoires qui
régnent en même tems, ou un génie épidémique,
on peut régler fur les fuites plus ou moins fâcheufes
qu’ont eu les précédentes, les jugemens de celles
fur lefqu elles on eft obligé de prononcer.
Les maladies inflammatoires font des maladies très-
aiguës, dont le fort eft toujours décidé avant le
quatorzième jour, fouvent le fept, quelquefois le
quatre elles fe terminent à la fanté par une réfolu-
tion critique , quelquefois par la fuppuration ; la
gangrené entraîne toujours avec elle non-feulement
la mort de la partie,.mais celle de tout le corps;
il y a une efpece de maladie inflammatoire, l’angine ,
dont le fiége eft dans les parties glanduleufes du
gofier , qu’on a vu quelquefois fe terminer par l’in—
duration ; alors la douleur, la shaleui; de la partie
enflammée diminuent, la fievre fe rallentit fans que
la difficulté d’avaler foit moindre, & fans que ce
fentiment incommode que le malade éprouve d’un
corps comprimant, celle fenfiblement. Alors à l ’inflammation
fuccede un skirrhe.
On doit s’attendre à voir périr le malade fi l’on
n’obferve aucun relâche dans les fymptômes ni le
quatrième ni le cinquième jour, fi le pouls conferve
toujours un caraûere d’irritation ; l’on voit alors
furvenir différens phénomènes qui par leur gravité
ou leur anomalie .annoncent la mort prochaine. Ces
fignes varient fuivant les maladies. Voye^lem détail
aumot Signe, Fievre, Pleur ésie, Péripneumonie
, Phrénésie , &c. Si à des fymptômes extrêmement
vifs, à une fievfe violente, à une douleur aiguë
fuccede tout de fuite une fievre prefqué infenfible ,
des défaillances fréquentes, une apathie générale,
que le pouls devienne petit, mol & intermittent,
la couleur du vifage plombée, &c. la gangrené commence
à fe former, le malade ne tardera pas à mourir.
La réfolution dans les maladies inflammatoires
internes, eft de toutes les terminaifons la plus favo>
rable ; on a lieu de l’atttendre lorfque les fymptômes
font affez modérés, 6c tous appropriés à la maladie,
lorfque le quatrième ou le feptieme jour on
voit paroître des fignes de coftion, que les urines
fe chargent d’un fediment ou d’un nuage blanchâtre,
que le pouls commence à fe développer, que la
peau devient fouple & humide, en un mot que tous
les fymptômes diminuent : à ces fignes fuccedent les
fignes critiques qui annnoncent la dépuration du
fang, 6c l’évacuation des mauvais fucs , par les
couloirs appropriés. Si ces maladies ne confiftoient
que dans l’inflammation d’une partie, il ne faudroit
pour leur terminaifon qu’une fimple réfolution de
cette inflammation ; mais ce qui prouve encore
mieux ce que nous avons avancé, que le fang étoit
altéré, c’eft qu’il faut néceffairement une dépuration
6c des évacuations critiques. Ces évacùations,'
& l’organe par lequel elles doivent fe faire, font
prédits & défignés d’avance par différens fignes; les
plus sûrs 6c les plus néçeflaires font ceux qu’on tire
des modifications du pouls. Voye{ Pouls.
La fuppuration dans les maladies inflammatoires
extérieures, eft toujours un grand bien ; mais elle
n’eft pas toujours un grand mal dans celles qui attaquent
les parties internes; il n’eft pas néceflaire d’avoir
blanchi dans la pratique pour avoir vu beaucoup
de maladies inflammatoires fe terminer par la
fuppuration fans aucune fuite fâcheufe ; il m’eft
arrivé fouvent de rencontrer des péripneumonies
qui fuppuroient fans que le malade courût un danger
preflant ; on ne doit pas s’effrayer autant qu’on
le fait de ces fuppurations internes, pourvû que les
vifeeres dans lefquels elles fe forment, ayent des
tuyaux excrétoires: on peut fe flatter jufqu’à un
certain point, qu’ils donneront paflage aux matières
de la fuppuration : fi cette partie n’eft point un organe
excrétoire, la fuppuration eft plus dangereufe ;
mais dans ces cas même qui ignore les reffources
de la nature ? N’arrive-t-il pas fouvent des heureu-
fes métaftafes , des tranfports falutaires, des abfcés
d’une partie interne à l’extérieur ? N’a-t-on pas vu
des vomiques fe vuider par des urines, par des ab-
fcès aux jambes, &c.
J’ai obfervé un dépôt au cerveau fe vuider & fe
renouveller jufqu’à trois fois par le nez & les oreilles;
combien n’y a-t-il pas d’obfervations à-peu-près
femblables ? On en pourroit conclure qu’il faut fouvent
favorifer les fuppurations loin de les détourner;
c ’eft pourquoi il eft très-important de connoître
les cas oii la fuppuration doit terminer l’inflammation.
Lorfque les fymptômes font violens, qu’ils dimihuent
peu durant le tems de la coétion dont oh n’obferve
que quelques légers fignes, 6c qu’ils reparoif-
fent avec plus d’aélivité, que la fievr.e eft forte, que
le pouls quoiqu’un peu développé eft toujours dur,
fur-tout vibratil, &' qu’il y a une roideur confîdé-
rable dans l’artere, que les douleurs que le malade
éprouve dans la partie affeéiéé deviennent plus aiguës
, qu’il y fent un battement plus v i f 6c plus répété
, la fuppuration eft à craindre, 6c l’on peut
affurer alors que cette iffue fe prépare. L’abfçès eft
formé lorfque tous ces fymptômes difparoiffent,
qu’il ne refte plus qu’une pefanteur ; il furvient alors
pour l’ordinaire des frifions.. Si le pouls vient dans
ces circonftaaces à indiquer un mouvement critique
du côté de quelques couloirs, on peut préfumer que
le pus s’évacuera par les Organes dont le pouls annonce
l’aétion.
On peut pour completter entièrement ce prognoftic
, y rapporter toutes les prédictions, tous les fignes
qu’on trouve dans les ouvrages du divin Hippocrate,
concernant les maladies aiguës. Nous fouhaiterions
bien pouvoir entrer dans un détail circonftancié fi
utile; mais l’ordre propofé pour traiter ces matières
ne le comportant pas, nous renvoyons le leCteur
aux écrits immortels de ce prince de la Medecine ,
d’autant plus volontiers, que nous fommes affurés
qu’outre un prognoftic excellent 6c certain qu’on
en tirera, on y prendra du goût pour cette véritable
medecine d’obfervation, & une haine avantageufe
pour ces pratiques théoriques 6c routinières.
La curation. Les maladies inflammatoires font dès
maladies qui fe guériffent par leurs propres efforts :
la fermentation excitée dans le fang, pour parler
avec"Willis, fuffit pour brifer, atténuer, décompo-
fer, aflimiler, évacuer les matières qui l’ont excitée,
ou comme dit Vanhelmont, la colere 6c les efforts
de l’archée peuvent feuls arracher l’épine incommode
qui les a déterminés. Ainfi l’on doit laiffer à
la nature le foin de guérir ces fortes de maladies ;
l’art n’offre aucun fecours vraiment curatif ; il en
fournit qui peuvent modérer, diminuer la fievre 6c
la violence des fymptômes, ou même l’augmenter
s’il eft néceflaire, 6c favorifer telle ou telle excrétion
critique ; mais il n’y a point de remedes qui
rétabliffent 6c purifient le fang, & qui emportent les
engorgemens inflammatoires des vifeeres. Mais telle
eft l’inconféquence & le danger des théories les plus
reçues, qu’elles conduifent leurs adhérens à des pratiques
très-erronées 6c très-pernicieufes ; les uns
prenant un fymptôme pour la caufe , penfent que
dans ces maladies l’inflammation des vifeeres eft
le point capital, & y dirigent toutes leurs indications
; ils mettent tout en oeuvre pour prévenir,
empêcher, ou faire ceffer cette inflammation, 6c
en conféquence entaffent erreur fur erreur : ils ont
recours à ld faignée qu’ils répètent douze, quinze,
vin g t, trente fois, jufqu’à ce que le malade eft réduit
à la derniere foibleffe. D ’autres croient que ces
inflammations font toujours produites & entretenues
par la falure , par un levain, par un foyer fitué
dans les premières voies ; ils mettent tout leur foin
à détruire, épuifer ce foyer, 6c pour en venir plû-
tôt à bout, ils réitèrent tous les deux jours au moins
les purgatifs. Que de funeftes effets fuivent l’application
des remedes auflï peu convenables ! Que de
malades j’ai vu facrifiés à de femblables pratiques I
J’en rappelle le fouvenir avec douleur.
Qu’on confidere les effets de ces remedes pour
fe convaincre encore plus de leur importunité, 6c
en premier lieu pour ce qui regarde la faignée ; il
eft confiant i° . qu’elle n’attaque pas la caùfe de la
maladie , qu’elle relâche 6c affoiblit confidérable-
ment les malades quand elle eft fouvent réitérée.
%°. Qu’elle trouble & dérange les évacuations critiques.
3°. D ’un autre côté les avantages gù’on prétend
en retirer ne font rien moins que folidefbent
confiâtes. La faignée fréquente, publient hautement
fes amis, empêche, prévient, diminue l’inflamma-
tion. Quand le fait feroit aufîï vrai qu’il efi faux ,
elle n’en feroit pas plus avantageufe ; elle empê-
cheroit par-là le fang de fe dégorger & de fe purifier
en partie. Que penleroit-on d’iin homme qui pro-
poferoit de prévenir la formation des exanthèmes
inflammatoires dans la petite v érole, ou des bubons
dans la pefte ? on le trâiteroit de charlatan, & cette
propofition feroit hauffer les épaules, 6c exciteroit
la riféq; la plûpart des rieurs feroient dans le même
cas. Nous devons raifonner des maladies inflammatoires
internes, comme de celles qui ont leur fiége
à l’extérieur. C ’eft la même maladie & le même
méchanifme ; mais heureufement il eft rare que les
faignées empêchent l’inflammation; elles produifent
plutôt l’effet oppofé, en relâchant, affoibliffant les
vaiffeaux ; elles augmentent la difpofition de la
partie affeétée, qui n’eft probablement qu’une fôi-
bleffe, & elles rendent par-là l’engorgement irréfo-
luble.
Autre prétendu avantage de la Alignée, que fes
partifans font fonner bien haut, c’eft de prévenir
la fuppuration^ Il confie , par un grand nombre
d’obfervations, que vingt 6c trente iaignées n’ont
pu dans bien des cas détourner la fuppuration ,
quand l’imflammation a pris une fois cette tournure.
Je ferois plus porté à croire que cette terminaifon
eft amenée & accélérée par les fréquentes fai-
gnées, fur-tout fi on les fait dans le tems qu’une évacuation
critique va terminer la maladie inflammatoire
par la réfolution ; j’en ai pour garant plus de cinquante
obfervations dont j’ai été le témoin oculaire
: je n’en rapporte qu’une. Un jeune homme
étoit au neuvième jour d’une fluxion de poitrine ;il
avoit été faigné quatre ou cinq fois ; le pouls étoit
fouple, mou, rebondiffant, critique, fans caraétere
d’irritation ; l’expe&oration étoit affez facile ; on fai-
gne le malade ; les crachats font à l’inftant beaucoup
diminués ; la fievre, les inquiétudes.augmentent ;
on veut calmer ces fymptômes; on refaigne, le malade
s’affoiblit, la fievre petfifte, le pouls fe concentre
, l’artere devient roide, les crachats font entièrement
fupprimés ; il furvient des friffons, crachement
de pus ,.fueurs noûurnes ; le malade meurt le vingt-
unieme jour* Mais je vais plus loin ; quand il feroit
pôfïible dé prévenir la fuppuration, il feroit
fouvent dangereux de le tenter : s’eft-on jamais avifé
de vouloir empêcher la fuppuration des pullules va-
riolèufes ? A-t-on pû y réuflir , ou fi on l’a fait, la
mOrt du malade n’a-t-ellë pas fuivi de près une en-
treprife fi téméraire ? La même chofe doit arriver à
l’intérieur ; il vaut mieux laiffer fubir au malade l’é-
venement incertain d’une fuppuration interne, que
de l’expofer à une mort affurée ; la nature a mille
reffources pour évacuer le pus, quand même ( ce
qui eft le cas le plus fâcheux ) le vifeere n’auroit
point de tuyau excrétoire. Si la fuppuration eft extérieure
, il ne faut rien oublier pour la favorifer ;
elle eft toujours falutaire, 6c n’a aucun inconvénient
remarquable ; elle épargne beaucoup de remedes ,
6c procure un prompt & fûr rétabliffement. On peut
jugerpar-làquela faignée ( je parle fur-toutde celle
qui eft fouvent réitérée ) elt nuifible 6c dangereufe ,
loin de produire les effets heureux qu’on a coutume
d’en attendre. Au refte, quand je blâme ces daignées
, je n’en blâme que l’abùs, qui a fait plus de
mal qu’on ne tirera jamais d ’utilité des faignées modérées.
Je n’ignore pas qu’une fécondé ou troifiemé
faignée peuvent très-bien convenir dans le tems de
crudité ou d’irritation des maladies inflammatoires ,
pour diminuer, calmer la violence de certains fymp