4°. L e fmiffeur eft l’ouvrier qui termine rotivrà-
ce du faifeur de monvemens. Il y a deux fortes de
ïnilfeurs ; celui qui finit le mouvement des montres
Amples, & celui qui termine le ronage d’unè
montre à répétition. L’un & l'autre finiffent les pivots
des roues ,' les engrenages. Quand les montra
font à roues de rencontre, les finiffeurs font aufli
l'échappement. Le fini fleur égalife la ftifee avec fon
reffort ; il ajufte le mouvement dans la boîte, remonte
la montre dorée, & la faitmarcher. Refte à
l’horloger à la revoir, à examiner les engrénages ,
les groffeursdes pivots , leur liberté dans leur troii,
les ajuftemens du Ipiral, l’echappement, le poids
du balancier, l’égalité de la fufée, &c, 11 retouchera
lui-même les parties qui ne font pas félon les
réglés, & donnera ainfi l’ame à la machine; mais
il faut premièrement qu’elle ait ete conftruite fur
des bons principes.
5 V Les faifeurs d’échappemens des montres -à
cylindre; ceux-ci ne font que les échappemens*
c eft-à-dire, la roue de cylindre, le cylindre même
fur lequel ils fixent le balancier,ils ajuftent la cou-
lifle & le fpiral. Comme aucun des échappemens
Connu ne corrige ni ne doit corriger les inégalités
de la force motrice, c’eft à ces mechaniftes, qui font
faire des échappemens, à prefcrire la difpofition &
les dimenfions de l’échappement, c eft-à-dire, à fixer
le nombre des vibrations, la grandeur des arcs
qu’il doit faire parcourir, le poids du balancier relatif
à la difpofition de la machine & à la force du
reffort, puiique, comme nous le verrons, c’eft fur
ce rapport que roule toute la jufteffe des montres.^
6°. Le faifeur des refforts des montres, il ne fait
due les petits reflbrtS^
j9 . La faifeufe de chaînes de montres ; on tire
cet ingénieux afîemblage de Genève Ou de Lon-
8°. Les faifeufes de fpiraux ; on tire aufli les fpi-
raux de G enève. ' ' . '
Un fpiral exige beaucoup de foin pour etre bon,
& fa bonté eft effentielle dans une montre. Il faut
qu’il foit du meilleur acier poflible; qu’il foit bien
trempé, afin qu’il reftitue tonte la quantité de mouvement
qu’il reçoit, ou la plus spprochanté. -
9°. L’émailleur, ou le faifeur de cadrans* ; ■
io ° . Les faifeurs d’aiguilles.
i i ° . Les graveurs , qui font les ornemens des
coqs , rofettes, &c.
12°. Les doreufes, font des femmes qui ne font
que dorer les platines,. les coqs &. les autres parties
de montres. Il faut qu’elles ufent de beaucoup de
précautions poitr que-le degré de chaleur qu’elles
donnent à ces pièces ne les amoliffent pas.
1 3°. Les poliffeufes font occupées à polir les pièces
de cuivre d’une montre , comme les roues, &c.
qui ne fe dorent pas. 1 . .
ia°. Les ouvriers qui poUffent les pièces d acier,
comme les marteaux, &c, ■
i <j°.-Les fendeufes-de roues* - - ^
i6°. Ceux qui taillent les fufées & les roues d’é^-
chappement ; la jufteffe d’une roue d’échappement
dépend fur-tout de la jufteffe de la machine qui fert
à la tailler, elle dépend aufli des foins de celui qui
la fendMl eft donc effentiel d’y apporter des attentions
miifque cela contribue aufli à la jufteffe de la
marche* de la montre. a ■
iy°. Les monteurs de boîtes font les boites d’or
& d’argent des montres.
i8°. Les faifeurs d’étuis. - ^
190. Les graveurs: & cifeleurs que l’on emploie
pour orner les boîtes de montres. : : ;
20®. Les émailleurs qui peignent les figures &
les fleurs dont on décore les boîtes -. les horlogers
peuvent très-bien, fans préjudicier à la bonté de
l’ouvrâ«e intérieur, orner les boîtes de leurs montres
; il faut pour cela qu’ils faffent choix d’habiles
artiftes, graveurs & émailleurs.
2 i° . Les ouvriers qui font les chaînes d’or pour
les montres, foit pour homme, ou pour femme ; les
bijoutiers & les horlogers en font.
Je ne parle pas ici d’un très-grand nombre d’ouvriers
qui ne font uniquement que les outils & mf*
trumens dont fe fervent les horlogers ; cela feroit
long à décrire, & n’eft d’ailleurs qu’acceffoire à la
main-d’oeuvre.
On voit par cette divifion de l’exécution des pièces
d?Horlogerie, qu’un habile artifte horloger ne doit
être uniquement occupé,
i° . Qu’à étudier les principes de fon art, à fairé
des expériences, à conduire les ouvriers qu’il emploie
, & à revoir leurs ouvrages à mefure qu’ils fe
font*
2°. On voit que chaque partie d’une pendule ou.
d’une montre doit être parfaite, puifqu’elle eft exé-,
cutée par des ouvriers qui ne font toute leur vie que
la même chofe ; ainfi ce qu’on doit exiger d’un habile
homme, c’eft de conftruire fes montres & pendules
fur de bons principes, de les appuyer de l'expé«,
rience -, d’employer de bons ouvriers, & de revoir
chaque partie à mefure qu’on l’exécute ; de corriger
les défauts, lorfque cela l ’exige : enfin, lorfqu®,
le tout eft exécuté, il doit ràffembler les parties, &
établir entre elles l’harmonie, qui fera l’ame de la'
machine. Il faut donc qu’un tel artifte foit en état
d’exécuter lui-même au befoin toutes les parties qui
concernent les montres & les pendules ; car il n ert
peut diriger & conduire les ouvriers que dans ce
cas, & encore moins peut-il corriger leurs ouvrage»
s’il ne fait pas exécuter. Il eft ailé de voir qu’une
machine d’abord bien conftruite par 1 artifte, & en-
fuite exécutée par différens ouvriers, eft préférable
à celle qui ne feroit faite que par un feul, puif-
qu’il n’eft pas poflible de s’inftruire des principes,
de faire des expériences, & d’exécuter en memô.
tems avec la perleCtion dont eft capable 1 ouvrier
qui borne toutes fes facultés à exécuter. |
A juger du point de perfeôion de Y Horlogerie par
celui de la main-d’oeuvre imagineroit que cet
art eft parvenu à fon plus grand degre de perfection,
car on exécute aujourd’hui les pièces d Horlogerie
avec dès foins & une délicateffe furprenante ; ce
qui prouve fans doute l’adreffe de nos ouvriers &
la beauté de la main-d’oeuvre , mais nullement la
perfection de la fcience, puiique les principes n’en
font pas encore déterminés, & que la main-d oeuvre
ne donne pas la jufteffe de la marche des montres
& pendules, qui eft le propre de Y Horlogerie. Il feroit
donc à fouhaiter que l’on s’attachât davantage
aux principes, & qu’on ne fit pas confifter le mérité
d’une montre dans l’exécution, qui n’eft que l’effet
de; la main, mais bien dans l’ intelligence de la com-,
pofition, ce qui eft le fruit du génie.
VHorlogerie ne fe borne pas uniquement aux machines
qui mefurent le tems ; cet art étant la feieneç
du mouvement-, on voit que tout ce qui concerne
une machine quelconque peut etre de fon reffort.
Ainfi de la perfe&ion de cet art dépend celle des
différentes machines & inftrumens , comme , par
exemple, les inftrumens propres à 1 Aftronomie &
à la Navigation, les inftrumens des Mathématiques,
les machines propres à faire des expériences de Phyflque,
&c. • vntà;'-'."' . • t . _ ,
Le célébré G-raham , horloger de Londres, membre
de la fociété royale de cette v ille I n’a pas peu
contribue à la perfection des inftrumens. d’Aftrono-
mie &*les connoiffances qu’il poffedoit dans les
différens genres dont nous avons» parlé , prouvent
bien que la fcience de Y Horlogerie les érige toute^
II eft vrai qu’il faut pour cela des génies fupérieurs ;
mais pour les faire naître , il ne faut qu’exciter l’émulation
& metître èn honneur les artiftes.
Nous diftinguerons trois fortes de pérfonnes, qui
travaillent ou Te mêlent dè travailler à Y Horlogerie :
les .premiers, dont le nombre eft le plus confidérà-
b le , font ceux qui ont pris cet état fans eout, fans
difpofition ni talent, & qui le profeffént fans application
& fans chercher à fortir de leur igriotance ';
ils travaillent Amplement pour gagner de l’argent,
le hazàrd ayant décidé du choix de leur état.
Les féconds font ceux qui par une envie de s’élever
, fort louable , cherchent à acquérir qhelcfties
connoiffances & principes de l’art, mais aux efforts
defquels la nature ingrate fé refufe. Enfin le petit
nombre renferme ces artiftes intelligéns qui, nés
avec des difpofitions particulières , ont l’amour dû
travail & de l’art, s’âppliquent à découvrir de nouveaux
principes, & à approfondir cèux qui ont déjà
été trouvés.
Pour erré uii artifte de ce genre, il né fumt pas
d’avoir un peu de théorie & quelques principes .généraux
des méchaniques , & d’y joindre l'habitude
de travailler, il faut de plus une difpoft'tion particulière
donnée par la nature;eettedifpofîrionfeule tient
lieu de tout : lorsqu’on eft hé avec elle, on ne tarde
.pas à acquérir les autres parties : fi oh veut faitè
ufage de ce don précieux, on acquiert bientôt là
pratique ; & un tel artifte n’exécute rien dont ïl né
fente les effets, ou qu’il ne cherche à les analyfer
enfin rien n’échappe a fes obfervations , & quel
chemin ne fera-t-il pas dans fon a r t , s’il joint aux
•difpofitions l’étude de ce que l’on à découvert juf-
qu’ici à lui ?
Il eft fans doute rare de trouver dès génies heu-
.reux, qui réunifient toutes ces parties néceffaîres ;
mais on en trouve qui Ont toutes les difpofitions naturelles
, il ne leur manque que d’en faire l'application
; ce qu’ils feraient fansdoute, s’ils avoient plus
de motif pour les potter à fe livrer tout entiers à la
perieéHon de leur art : il ne faùdroit, pour rendre
xin fervice effentiel à YHorlogerie & à la fbciété, que
piquer leur amour-propre , faire une diftinûiôn de
ceux qui font horlogers, ou qui ne font que des ôü- î
vriers oii des charlatans : enfin confier l’adnnniftrà-
tion du corps de YHorlogerie aux plus intélligens :
faciliter l’entrée à ceux qui ont du talent, & le fermer
à jamais à ces miférables ouvriers qui né peuvent
que retarder les progrès de l’art qu’ ils tendent
même à détruire.
S’il eft néceffaire de partir d’après dés principes
de méchanique pour compofer des pièces tfHorfo-
gerie , il eft à propos dé les vérifier par des expériences
; car , quoique ces principes foient invariâ- ;
riables , comme ils font compliqués & appliqués à
de très- petites machines, il en réfûlte des effets
différens & affez difficiles à analyfer : nous Obfervè-
rons que, par rapport aux expériences, il y a deux
maniérés de les faire. Les premières font faites par
des gens fans intèlligehce qui rte font des eflàis que
pour s’éviter la peiné de rechercher par uné étude,
line analÿfë pénible que fOuvént ils ne Soupçonnent
pas , l’effet qui réiultera d’un méchanifme com-
pofé fans réglé , fans principe, & fans vue ; ce font
des aveugles qui le cônduifeht par le tâtonnement à
l ’aide d’un bâton.
La fécondé clàffe des perfonnes qui font des ex-,
périences , eft compofée des artiftes inftruits des
principes des machines, des lois du mouvement, des
diverfes aérions des corps les uns fur les autres , &
qui doués d’uh génie qui fait décompofer les effets :
les plus délicats d’uûe machine , voient par l’efprit
toutee qui doit réfulter dé telle ou telle combinaifon,
peuvent la calculer d’avance, la conftruire delà maniere
la plus ayantageufè, enforteque s’ils font des
expériences, c’eft moins pour apprendre ce qui doit
arriver , que polir confirmer les principes qu’ils ont
établis, & les effets qu’ils avoient analyfés. J’avoué
èfu’urie telle maniéré de voir efl très-pénible, & qu’il
railt ctré doué d’un génie particulier;aufli appartient- •
il à fort peu de perfonnes de faire des expériences
utiles , & qui ayent un bût marqué:
L’Horlogerie livrée à elle-même fâns èncôuràgé-
ment, fans diftihftion , fans récompenfe , s’eft éle--
vee par fa propre force au point où nous la voyons
aujourd’ hui ;;celà ne peut être attribué qu’à l’heu-
reufè difpofition dé quelques artiftes , qui aimant
affez leur art pour en rechercher là perfettion, ont
èxcité entr’eiix urte émulation qui a produit des
effets aufli profitablesquefî on les eût encouragés par
desrécompenfes. Le germe de cet efprit d’émulation
éft dû aux artiftes anglois que l’on fitvenir en France
dutems delà régence, entr’autresà Sully, le plus habile
de ceux qui s’établirent ici. Julien le Roy, éleve
de le Bon -, habile horloger, étoit fort lié avec Sul-
ly * , il profita de fes lumières ; cela joint à fon mérite
perfonnel, lui valut la réputation dent il à joui :
celüi-ti eut des émules ', entr’aütres Enderlin, qui
étoit doué d’un grand génie pour les méchaniques ,
ce qüe l’on peut voir par ce qui nous refte de lui
dans 1 e traité d'Horlogerie de M. Thiout ; on ne doit
pas oublier feu Jean-Baptifte Du tertre,' fort habile
horloger ; Gaudron, Pierre le R o y , &c. Thiout
l’aîné , dont le tfaite d’Horlogeric fait l’éloge:
Nous devons à ces habiles artiftes grand nombre
de recherches, & fur-tout la perfection de là
main-d’oeuvre ; Car, par rapport à la théorie & aux
principes de l’àrt de la mefure du tems ils n’en ont
• aucunement traité ; il n’eft pas étonnant que l’on
ait encore écrit de nos jours beaucoup d’abfurdités ;
le feul ouvrage où il y ait des principes eft le Mémoire
de M. Rivaz , en réporife à un affez mauvais
écrit anonyme contre fes découvertes ; nous devons
à ce Mémoire & à ces difputes l’efprit d’émulation
qui a animé nos ârtiftes modernes ; il feroit à fou-
hàiter que M. de Rivaz eût fuivi lui-même Y Horlogerie
, les connoiffances en méchanique auroient
beaucoup fervi à perfectionner cet art.
Il faut convenir que ces artiftes qui Ont enrichi
Y Horlogerie , méritent tous nos éloges ; puifque
leurs travaux pénibles n’ont eu pour objet que la
-perfection de l’a r t , ayant facrifié pour cela leur for^
tune : car il eft bon d’ôbferver qu’il n’en eft pas de
Y Horlogerie, comme des autres arts, tels que la Peinture,
TArchiteCture. ou la -Sculpture ; dans ceux-ci
l’artifte qui excelle eft non-feulement encouragé &
recomp'enfé ; mais, comme beaucoup de perfonnes
font en état de juger de fes productions, la réputation
& la fortune liiiveht ordinairement le mérite.
Un excellent artifte horlôger peut au contraire paf-
fer fa vie dans l’obfeurité, tandis que des impudens;
plagiaires , des charlatans & autres miferables marchands
ouvriers jouiront dè là fortune & des en-
eouragemens dûs au mérite : car le nom qu’on fe
fait- dans le monde , porte moins fur le mérite réel
de l ’Ouvrage que fur là maniéré dont il eft annoncé;
il eftâifé d’en impofer au public qui croit le charlatan
fur fa parole , vû l’impoflibilité 'Où il eft de
juger pàr lui-même.
C ’eft à l’efprit d’émülâtion, dont nous venons de
parler, que la fociété des àrts, formée fous la protection
d'e M. le Comte de Clermont, dut fon ori-
gineiOn ne peutque regretter qu’un établiflementqui
àuroitpu être fortutileau public, ait été de ficourte
durée ;• On a cependant vû fortir dé cétte fociété de
très-bons ftijets qui illuftrent aujourd’hui l’acadé-
* C’eft à Sully <jue nous devons la règle artificielle du tems
fort bon livre. *