S 44 J E U de diffipation : auffi Hippocrate affure-t-il ( aphor
xüj.J'eiï. i. ) que les vieilles gens fe paffent plus facilement
de manger que les autres, par oppofition
aux enfans qui ne fe paffent que difficilement de
prendre de la nourriture, ÔC ainfi à proportion, tout
étant égal, par rapport aux différens tems de la v ie.
Voyt{ D ie te , Al im en t, Ab stin en ce, Nourr
itu r e .
JEÛNER ( faire ) un arbre. Cette opération eft
encore fort récente dans le jardinage. On fuppofe
un arbre dont un côté pouffe vigoureufement pendant
que l’autre eft très-maigre. On fait fouftraétion
des fucs de la terre en ouvrant le côté gras de la
bonne terre jufqu’aux racines, ôc en lui fubftituant de
la terre maigre ou un fable de ravine ; on fait pareille
fouille du côté maigre, & l’on y met les engrais
néceffaires. On s’apperçoit quelque tems après
d’un changement total, par Inégalité d’embonpoint où
fe trouve l’arbre ; fi c’eft un arbre en efpalier, ondé-
paliffe les branches maigres pour les laiffer pouffer
en liberté, ôc l’on contraint un peu les branches
vigoureufes pour en arrêter la fev e, fouvent même
on les tord un peu. (A )
JEUNESSE, juventus, fi f. (Littéral.') c’eft cet
âge qui touche ôc qui accompagne le dernier progrès
de l’adolefcence, s’étend jufqu’à l ’âge v ir il, ôc
.va rarement au-delà de trente ans.
Les Grecs l’appelloient d’ordinaire l’autonne,
G7rccpa.v, regardant la jeunejfe comme la faifon de l’année
où les fruits parvenus au point de leur maturité
font excellens à cueillir. Pindare dit dans l’Ode
Il des Ifthmioniques,
O çvç teov xctXoç tixev a’ippcJ'iTuç
Enôpopn juvaç’t/psty » S'iÇxv coupeur.
« D e tous les beaux garçons chez qui l’autonne
u ( c ’eft-à-dire le printems de la vie ) reveille la paf-
» fion de l’amour ».
Les Latins fuivirent les mêmes idées, ou les empruntèrent
des Grecs ; de-là vient qu’Horace compare
un jeune homme à une grappe de raifin que
Vautonnc va peindre de fes plus v ives couleurs,
Jam tibi lividos
Dijlinguet autumnus racemos
Purpuero varias colore.
Ode v , lib.IÏ.
Dans notre langue nous avons attaché une idée
toute différente au mot tfautonne, par rapport à
l’âge ; ôc nous ne nous en fervons qu’au fujet des
perfonnes qui commencent à vieillir. Nos poètes appellent
la jeunejfe le printems des beaux jours, ôc
en d’autres termes,
Cette agréable faifon
Où le coeur à fon empire
Affujettit la raifon.
Le Guarini la nomme verde étade ; elle porte partout
avec elle les heureufes faillies de l’imagination,
les attraits féduifans, ôc les grâces enchantereffes.
’ Cet âgfe a fes défauts comme les autres, qui n’ont
pas échapé au crayon des grands peintres.
Un jeune homme toujours bouillant dansfes caprices,
Eft prompt à recevoir CimpreJJion des vices,
Eft vain dans fes difcours , volage en fes dtfirs ,
R é tif à la cenfure , & fou dans les plaijirs.
J’ajoute que la jeune fie fans expérience fe livre
volontiers à la critique qui la dégoûte des modèles
qu’elle auroit befoin d’imiter. Trop préfomptueufe
elle fe promet tout d’elle-même quoique fragile,
croit pouvoir tout, ôc n’avoir jamais rien à craindre
; elle fe confie légèrement de fans précaution.
Entreprenante Ôc v ive elle pouffe fes projets au-delà
de fa portée, ôc plus loin que fes forces ne le permettent.
Elle voie à fon but par des moyens peu
J E U réfléchis, s’affole de fes chimères, tente auhafard,
marche en aveugle, prend des partis extrêmes ôc
s’y précipite ; femblable à ces eourfiers indompta-,
blés qui ne veulent ni s’arrêter ni tourner.
Mais malgré les écarts de la jeunejfe, ôc la .vérité
de ce tableau qui les peint d’après nature, c’eft toû-
jours l’âge le plus aimable ôc le plus brillant de la
vie ; n’allons donc pas ridiculement eftimer le mérite
des faifons par leur hiver, ni mettre la plus
trifte partie de notre être au niveau de la plus flo-
riffante. Si l’âge avancé veut des égards ôc des refi-
pefrs, la jeunejfe, la beauté, la vigueur, le génie
qui marchent à fa fuite, font dignes de nos autels.
Ceux qui parlent en faveur de la vieilleffe, comme
fage, mûre ôc modérée , pour faire rougir la
jeunejfe, comme vicieufe , folle, & débauchée, ne
font pas de juftes appréciateurs de la valeur des cho-
fes ; car les imperfections de la vieilleffe font affu-
réipent en jilus grand nombre ôc plus incurables que
celles de la jeunejfe. L’hiver de nos années grave
encore plus de rides fur l’efprit que fur le front. Il
fe voit peu d’ames, difoitMontagne, qui en vieil-
liffant ne fentent l’aigre ôc le moifi; ôc quand Montagne
parloit aiufi , il avoit les cheveux blancs.
En effet l’invention & l’exécution qui font deux
grandes ôc belles prérogatives, appartiennent à la
jeunefje; ôc fi fes écarts mènent trop loin, ceux de
la vieilleffe froids ôc glacés retardent & arrêtent
perpétuellement le cours des affaires.
Le fang qui fermente dans la jeunejfe, la rend fen-
fible aux impreffions de la morale, de la vertu, de
l’amour, de l’amitié, & de tout ce qui attendrit
l’ame. La circulation rallentie dans les vieillards ,
produit le refroidiffement pour tous les objets capables
d’émouvoir le coeur, ôc porte en eux feuls le
repli de l’humanité.
La jeunejfe eft légère par bouillonnement ; la
vieilleffe confiante par pareffe. D ’un côté la pétulance
qui s’abufe dans les projets ; de l’autre une
méfiance générale, ôc des foupçons continuels ; dé?
fauts qui fe peignent dans les y e u x , dans les dif*
cours, ôc dans toute la conduite des gens âgés,
Le jeune homme eft amoureux de la nouveauté J
parce qu’il eft curieux & qu’il aime’à changer. Le-
vieillard eft entêté de fes préjugés, parce qu’ils font
les fiens, ôc qu’il n’a plus le tems'de s’inftruire, ni
la fprce de fe paffionner.
En un mot on ne peut donner raifonnablement la
préférence au couchant des jours fur leur midi. Mais
fouverions-nous que ce midi, ce bel âge fi juftément
vanté , n’eft qu’une fleur prefqu’auffi-tôt flétrie
qu’elle eft éclofe. Les grâces riantes, les doux plai-
firs qui l’accompagnent, la force, la fanté, la joie S évanouiffent comme un fonge agréable ; il n’en
refte que des images fugitives : & fi par malheur on
a confirmé dans une honteufe volupté cette brillante
jeunejfe , il ne lui fuccedè qu’un trifte Ôc cruel fou-
venir de fes plaifirs paffés. On paye cher le foir les
folies du matin. ÇD. J.)
JEU N ESSE, Prince de la ( Antiq, Rom.) Uoyeç Prince
Jeunesse, juventus. ( (Æcon. anim.) Comme le
corps humain éprouve des changemens dans tous
les tems de la v ie , la différence la plus marquée de
ces changemens eft ce qui détermine celle des âges :
ainfi comme on appelle enfance ôc adolefcence ou
puberté, les deux premières parties de fon cours ,
qui renferment l’efpace de tems qui s’écoule entre
la naiffance Ôc le terme de l’accroiffemcnt, on donne
le nom de jeunejfe au tems de la vie pendant lequel
le corps, après avoir acquis les dimenfions qui lui
conviennent, achevé de fie perfeélionner en acquérant
toute la force & la folidité néceffaire à fa con-
fervatiçn ; par çonféquçnt I3 durée de la. jeunejfe
J E V
s’ étend depuis environ 21 ans jufquà 3$ que commence
la virilité. . .
t-- Il fuit donc de-là qu en adoptant la dutribution
des tems de la v ie , par feptenaires d’années, comme
l’ont fait la plûpart des auteurs qui ont traité de la
divifion des âges, la jeunejfe fe trouve comprife
dans le quatrième ôc le cinquième feptenaires, après
lefquels vient l’âge viril ou de confiftence. Poye{
A g e , Vie , Economie animale.
Jeunesse. (Maladies de la.) Les changemens qui
fe font dans le corps humain, d’où réfulte la différence
des âges, établiffent auffi des difpofitions à
différentes fortes de maladies : ainfi comme on a
obfervé que les mouvemens des humeurs font plus
détermines vers les parties fupérieures, pendant
la première moitié de la v ie ; ce qui donne lieu, pendant
le cours de l’enfance & de l’adolefcence, au
flux de fang, par le nez, qui font fouvent habituels,
( Voye[ Hémorrhagie) , & à plufieurs autres fortes
d’affeétions de la tête, dont il a été fait mention en
traitant des maladies de l’enfance. Voyt{ Enfance
& En fa n t, (maladies des)..
Les parties qui forment la tête ayant acquis les
premières la confiftence, la folidité qui conviennent
à leurs fondions; elles deviennent fufcéptibles de
réfifter davantage aux efforts des fluides qui portent
enfüite leurs effets fur celles qui étant les plus voi-
fines de proche en proche, n’ont pas encore à proportion
autant de reffort, de force fyftaltique : con-
féquemment les vifceres de la poitrine devienneut
plus fujets à être affeôtés, comme l’a très-judicieu-
fiement remarqué Hippocrate ( aphor. 2f>. Jecl. 3 . )
& à éprouver des engorgemens ; d’où fuivent des
embarras inflammatoires, des dilatations forcées de
vaiffeaux, des folutions de continuité dans leurs
parois ; d’où fe forment des angines, des pleuréfies
tant vraies que fauffes, des fluxions de poitrine, des
péripneumonies ou hémoptifies qui deviennent habituelles
, ôc tous les effets qui peuvent s’enfuivre, tels
que des toux d’abord peu fatigantes, enfuite feches
& opiniâtres; des tubercules, des ulcérés dans la fub-
ftance des poumons, la phtyfie.enfin avec tous les
àccidens ôc les dangers qui l’accompagnent.
Sur ces différentes maladies, leur nature ôc leur
traitement, voyeç les articles de ce Dictionnaire qui
leur font propres, ainfi que ceux de Nature ,
(E conomie animale , Flu x io n . Confultez aufli
la differtation de Hoffman, de oetatis mutatione , mor-
borum causa & remedio, où on trouve admirablement
bien établies la théorie ôc la pratique de la Méde-
jcine , concernant les maladies propres à chaque
âge, ôc la difpofition à ce que certaines maladies
puiffent être guéries par les fuites mêmes des changemens
qui le caraûérifent. Sthaal ainfi que fon dif-
ciple Neuter, ont auffi traité très-utilement de tout
ce qui a rapport au changement d’âge ôc aux effets
qui en réfultent dans l’oeconomie animale.
JEVRASCHKA ,f, m. ( Hift. nat. Zool. ) nom que
les Ruffes donnent à un animal quadrupède qui eft
affez commun aux environs de la ville de Jakusk en
Sibérie. Cet animal eft une efpéce de marmotte,
mais beaucoup plus petit que les marmottes ordinaires.
Il y en a qui vivent fous terre, ôc leur demeure
a une entrée ÔC une fortie ; ils y dorment pendant
tout l’hiver. D’autres font toujours en mouvement,
& vont chercher des grains ou des plantes pour fe
nourrir. Voici comme M. Gmelin décrit 1 ejevrafchka:
fa tête eft affez ronde ; fon mufeau eft très-court ;
on n’apperçoit point fes oreilles ; il a tout au plus
un pié de long ; fa queue qui n’a qu’environ 3 pouces
de longueur, eft garnie de poils fort longs ; elle
eft noirâtre , mêlée de jaune en-deffus, & rougeâtre
*,n-délions ; fon corps eft renflé comme celui d’une
fouris ; les poils en font gris mêlés de jaune ; le
J orne VU E
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ventre eft rougeâtre, & les pattes font jaunâtres ;
les pattes de derrière font plus longues que celles
de devant; ces dernieres ont quatre ergots un peu
crochus, & les premières en ont cinq ; ils mordent
très-fort, & ont un cri fort clair quand on leur fait
du mal ; ils fe tiennent fur leurs pattes de derrière,
Sc mangent avec les pattes de devant comme les
marmottes; ils engendrent ordinairement en A v r il,
& ont de cinq à huit petits en Mai. C ’eft fuivant
M. Gmelin une marmotte en petit. Uoye{ Gmelin,
voyage de Sibérie.
JÉZIDE ou JÉZIDÊEN, f. m. (Théolog.) nom
qui lignifie hérétique chez les Mahométans. Voye^.
Hér é tiq u e. Dans ce fens jéfidèen eft oppofé à
mufulman. Eoye{ jMusULMAN. Lanclavius dit que-
ce nom vient d’un émir nommé Jéfide qui tua les
deux fils d’A li, Hafan & Huffein, neveux de Mahomet
par leur mere, & qui perfécura la poftérité de
ce prophète. Les Agaréniens dont il étoit émir ou
prince, le regardèrent comme un impie & un hérétique
, & de-là vint la coutume d’appeller jéydéens
les hérétiques.
Quelques-uns parlent des Jéfides comme d’un peuple
particulier qui parle unelangue différente du turc
& du perfan, quoiqu’elle approche de la derniere.
Ils difent qu’il y a deux fortes de Jéfides, les blancs
& les noirs. Les blancs n’ont point le collet de leurs
chemifes fendu ; il n’a qu’une ouverture ronde pour
paffer la tête, & cela en mémoire d’un cercle d’or
& de lumière defeendu du ciel dans le cou de leur
grand Scheik, ou chef de leurs fefres. Les jéfides
noirs font faquirs ou religieux. Voye^ Faq u ir.
Les Turcs ôc les Jéfides fe haïffent fort les uns les
autres ; ôc la plus grande injure que l’on puiffe dire
à un homme en Turquie , c’eft de l’appeller jéjîde.
Au contraire les Jéfides aiment fort les Chrétiens ,
parce qu’ils font perfuadés que Jéfide leur chef eft
Jefus-Chrift,ou parce qu’une de leurs traditions porte
que Jéfide fit autrefois alliance avec les Chrétiens
contre les Mufulmans. Uoye^ Mahométism e.
Ils boivent du vin même avec excès, & mangent
du porc-. Ils ne reçoivent la circoncifion que quand
ils y font forcés par les Turcs. Leur ignorance eft
extrême ; ils n’ont aucuns livres ; ils croient cependant
à l’Evangile & aux livres facrés des Juifs, fans
les lire ni fans les avoir; ils font des voeux & des
pèlerinages ; mais ils n’ont ni mofquées ni temples,
ni oratoires, ni fêtes, ni cérémonies ; ôc tout leur
culte fe réduit à chanter des cantiques fpirituels à
l’honneur de Jefus-Chrift, de la Vierge, de Moïfe ôc
de Mahomet. Quand ils prient ils fe tournent du côré
de l’orient à l’exemple des Chrétiens, au lieu que
les Turcs regardent le midi ; ils croient qu’il fe
pourra faire que le diable rentre en grâce avec Dieu,
Ôc ils le regardent comme l’exécuteur de la juftice
de Dieu dans l’autre monde. De-là vient qu’ils fe
font un point de religion de ne le point maudire ,
de peur qu’il ne fe vange : auffi quand ils en parlent
ils le nomment Vange paon, ou celui que les igno-
rans maudiffent.
Les Jéfides noirs font réputés faints, ôc il n’eft pas
permis de pleurer leur mort ; on s’en réjouit ; ils ne
font pour-tant la plûpart que des bergers. Il ne leur
eft pas permis de tuer eux-mêmes les animaux dont
ils mangent la viande ; ôc ils laiffent ce foin aux
Jéfides blancs. Les Jéfides vont en troupe comme les
Arabes, changent fouvent de demeure, ôc habitent
fous des pavillons noirs faits de poil de chevre, ôc
entourés de gros rofeaux ôc d’épines lies enfemble.
Ils difpofent leurs tentes en‘rond, ôc mettent leurs
troupeaux au milieu. Ils achètent leurs femmes,
dont le prix ordinaire eft de deux cent ecus, quelles
qu’elles foient. Le divorce leur eft permis, pourvu
que çc fçit pourfe faire faquir, Ç ’eft un crime parmi