
Grande-Bretagne, la Germanie, les royaumes du
nord & une partie de l’Italie. Ce fut dans cette
vafte étendue de pays, qu’après avoir déterminé les
limites qui dévoient les féparer des Scythes, ils
parurent comme une nation puiffante, loumife à
un gouvernement monarchique. Les Sarmates
étoient établis du côté de l’orient. En certains endroits,
ils étoient mêlés, & de ce mélange vinrent
les Baftarnes , les Peucétiens, les Vénètes, &c.
peuples qui tenoient quelque, chofe des Celtes &
des Sarmates.
Leur manière de vivre était différente de celle
des Sarmates. Ils élevoient une grande quantité de
bétail, & fe nourriffoient de leur chaffe, du lait
& de la chair de leurs troupeaux. Ils avoient de
la cavalerie ; mais leur force principale éroit l’infanterie;
ils l’exerçoient à la courfe, & à faire
de longues traites. Leurs habits étoient juftes au
corps , à la réferve d’un manteau court, qu’ils
appeloient fagum. Ils portoient d’énormes boucliers
& des lances. La polygamie leur étoit inconnue,
& leufs femmes les fuivoient à la guerre.
Lorfque les Romains & les Carthaginois pénétrèrent
en Efpagne, ils la trouvèrent occupée par
des peuples différens : Varron en nomme cinq ,
parmi lefquels font les Celtes, les Ibères & les
Celtibêres; mais c’étoit la même nation fous différens
noms. La terminaifon des noms de leurs villes
& de leurs cantons étoit celtique, leurs coutumes
étoient conformes à celles des Celtes ; il eft vrai-
femblable que les Celtes étoient anciennement les
maîtres de toute l’Efpagne. Hérodote & Ephorus
l ’affurent pofitivement.
Du temps de Jules-Céfar, les Celtes n’occu-
poient que la troifième partie des Gaules ; la première,
occupée par les Belges; la fécondé., par
les Aquitains ; & la troifième, par le peuple que
l’on appeloit Gaulois , & qui , félon Jules-Géfar,
dans leur langue , portent le nom de Celtes.
Les Celtes qui étoient en Germanie., ne difré-
roient pas anciennement de ceux des Gaules. On
les défignoifc fous un même nom. Strabon dit :
« les deux peuples font voifins ; ils ne font féparés
» que par le Rhin ; ils ont encore le même tem-
» pérament, la même manière de vivre; ils fç
w reffemblent prefque en toutes chofes ».
La Pologne & la Mofcovie avoient aufli des
Celtes : les anciens en plaçoientle long du Tanaïs,
& autour des Palus-Méotides. Ce peuple, preffé
par les Sarmates, fe retira toujours de plus en
plus du côté de l’occident.
Les Gaulois fe vantoient d’avoir peuplé la Grande-
Bretagne j.& les Bretons fe glorifioient d’avoir env
o y é des colonies dans les Gaules. Cette contefta-
tion prouve que l’origine de ces peuples étoit la
même. Le témoignage de Tacite eft formel à cet
égard. Ils avoient de très-grandes liaifons, le commerce
étoit libre entre eux. Us fe prêtoient des
fecours mutuellement dans les guerres qu’ils avoient
à foutenirfc
Tacite rapporte que la chevelure blonde des
Ecoffois, & leur ftature énorme, prouvent qu’ils-
font Celtes d’origine ; & , félon Diodore de Sicile,
l’Irlande étoit habitée par des B r e to n s le s plus
féroces de tous les Gaulois.
U y avoit des Celtes des deux côtés du Danube r
depuis la fortereffe de Carnuntum jufqu’au Pont-
Euxin, félon Strabon.
Plufieurs peuples Celtes ou Gaulois, reconnus
pour tels par les auteurs anciens, habitoient au
midi du Danube. De ce nombre étoient les Sco.r-
difces, les Baftarnes , les Boïens, les Taurifces &
les Japides.
On prétend .que les autres peuples qui dèmeu-
roient depuis les Alpes jufqu’à la mer Adriatique:
& au Mont-Appennin, étoient tous Celtes.
Les Sicules étoient un peuple Scythe* ou Celte..
Les Aborigènes l’étoient aufli. Ces derniers,pouffés
par des peuples plus feptentrionaux , pafterenf
l’Apennin, pouffèrent à leur tour les. Sicules, &
les obligèrent de. fe retirer en Sicile-.
La plupart des peuples Celtes étoient anciennement
Nomades. Ils ne bâtiffoient ni mailons, ni
cabanes ;. ils paffoient leur vie fur des chariots
& ne s’arrêtoient dans, une contrée, qu’auffi longtemps
qu’ils trouvoient à faire fubfifter leurs troupeaux.
Lorfque les peuples Celtes fe fixoient dans un
pays, chaque particulier s’établiffoit dans une forêt,
au pied d’une colline, le long d’un ruiffeau, au
milieu d’une campagne, félon fon goût pour H
chaffe, la pêche ou l'agriculture;
Les peuples Celtes qui avoient- une demeure,
fix e, étoient ordinairement partagés, en cantons,
en peuples & en nations..
Ces peuples, au commeficement de chaque printemps,
tenoient une affemblée générale, où ,touû
homme libre & capable de porter les armes, étoit
obligé de fe rendre. On y décidoit, à la pluralité*
des vo ix , toutes les affaires qui inréreffoient le
bien de l’état.
"Du temps d’Hérodote, le nom de Celtes étoit
connu & commun à la plupart des peuples de-
l'Europe.
Les peuples Celtes, maîtres d’une grande partie
de l’Europe, demeuroient,. les uns fous un climat
tempéré, & les autres, dans des. pays extrêmement
froids : cependant, ils fe reffembloient, tous. Us
avoient une taille grande, les yeux bleus, le regard
farouche & menaçant, les cheveux blonds, ua
tempérament robufte ; ils réftftoient à la faim, ail
froid, au travail & à la fatigue^
Les peuples Celtes confervèrent long-temps la
manière de vivre des Scythes, de- qui ils def-
cendoient.
Le vin a été long-r temps inconnu aux Celtes ,
aufli-bien qu’aux Scythes. Diodore de Sicile dit
que de fon temps, les Celtes l’achetoient encore,
des étrangers. Lorfqn’ils eurent commencé à con-
BQÎtre. cette liqueur, la plupart d’entre eux. la
recherchèrent avec fureur. Les Celtes prenoient
leurs repas aflis à terre ou fur des bancs devant
une table. Leur vaiffelle étoit anciennement de bois
ou de terre. Us apprirent enfuite des Grecs & des
Romains à en avoir de cuivre. Ils buvoient ordinairement
dans des cruches qui étoient aufli de
terre, de bois ou d’argent; mais dans les feftins
on préfentoit à boire dans des cornes de boeuf
fauvage, ou dans des crânes humains. Les grands
feigneurs avoient coutume de faire orner ces ef-
pèces de gobelets en or ou en argent.
Les nations celtiques avoient dans l’idée que la
valeur étoit la feule vertu c pable d’annoblir véritablement
l’homme ; aufli les crânes ennemis qu’un
brave avoit tués, étoient pour lui & pour fa famille
des titres de nobleffe.
; Lorfqu’un Scythe ou un Celte avoit battu en
duel fon ennemi particulier ,„ ou qu’il avoit ter-
rafle en bataille rangée un ennemi de l’état, il lui
coupoit la tête & promenoir, par toute l’armée, ce,
trophée à la pointe d’une lance, ou à l’arçon, de
la felle, & alloit enfuite la présenter au général
pour avoir la récompenfe due à fa valeur.
Ces têtes étoient fichées fur des troncs d’arbres,
ou clouées aux portes des villes, ou dépofées dans
quelque lieu confacré, ou gardées dans les maifons
des guerriers.
Les têtes des chefs de l’armée ennemie , ou des
perfonnes que l’on avoit tuées en duel, étoient
deftinées à faire des coupes que l’on réfervoit pour
les grands féftins ; mais il falloit que tous les convives
y buffent. On s’en faifoit un honneur, parce
qu’on ne les préfentoit pas aux roturiers, c’eft-
à-dire, à ceux qui n’avoient encore tué perfonne.
Les Celtes ne traitoient aucune affaire publique
ou particulière, dont le feftin ne fût,, pour ainfi
dire, le fceau & la ratification.
Plufieurs auteurs anciens ont accufé les peuples
Celtes de manger les prifonniers qu’ils faifoient à
la guerre, & en général, tous les étrangers qui
tomboient entre leurs mains. D ’autres ont dit que
les enfans tuoient & mangeoient leurs propres
pères, quand ils étoient parvenus à un certain âge.
Pline dit que c’eft aux Romains que l’on doit
l’abolition de cette coutürae barbare; que c’eft eux
qui anéantirent dans les provinces de la Celtique
qui leur étoient foumifes,le déteftable ufage d’immoler
des hommes & d’en manger la chair.
Les Celtes paffoient parmi les anciens pour être
de grands dormeurs. Cela étoit affez naturel à des
peuples qui n’avoient d’autre occupation que la
guerre & la chaffe, & qui regardoient tout travail
du corps & de l’efprit, comme une chofe baffe
& fervile. Us fe eouchoient à terre tout habillés,
& aimoient à être propres & bien mis. Pour avoir
le teint luifant, les peuples Celtes fe frottoient
le vifage avec dp beurre, & dans les endroits où
l’on faifoit de la bière, les dames employoient au
même ufage la levure ou l’écume dont, elle fe dépouille
, quand elle fermente dans le tonneau.
Les Celtes fuyoient le féjour des villes, qu’ils
regardoient. comme propres à enchaîner la liberté,
te à affermir la fervitude. Lorfqu’ils en prenoient
quelques-unes, ils les démanteîoient & en abat-
toient les fortifications ; mais ils en laiffoient quelquefois
fubfifter les maifons.
Les loix de la bienféance ne permettoient pas
aux Celtes de paroître en public fans armes. Ils
fe rendoient aux affemblées civiles & religieufes
avec l’épée, le bouclier & la l^ice. Ils traitoient
dans le même équipage, toutes leurs affaires civiles
& particulières. Après avoir porté leurs armes
depuis l’âge viril jufqu’à la vieillefle décrépite, il
falloit encore que l’on brûlât les armes d’un Celte,
après fa mort, ou qu’ôn les enterrât avec lui. Leur
attachement pour leurs armes alloit fi loin , qu’ils
préféroient perdre la vie plutôt que de les quitter.
.Lorfqu’un Celte étoit appelé à ferment, il juroit par
Dieu & par fon épée. Dans les armées, l’ufage
étoit de planter en terre une épée ou une hallebarde,
autour de laquelle toute l’armée alloit faire
fa prière, parce, qu’elle étoit la marque du lieu où
fe tenoient les aflèmblées religieufes & le confeil
de guerre. ,
Les peuples Celtes portoient une longue chevelure
: c’etoit, de tous les ornemens, celui dont
les hommes & les femmes étoient le plus jaloux*,
& pour lequel ils faifoient le plus de frais. Ils s’étu-
dioient à rendre rou x , les cheveux qu’ils avoient
naturellement blonds. Us fe fervoient d’une efpèce
de pommade, dont ils fe frottoient les cheveux
,& la barbe. Us avoient la coutume de fe faire
rafer le menton & les joues, & de conferver de
grandes mouftaches. Les Celtes portoient autour
du col des chaînes & des colliers d’or maflif. Ils
portoient aufli autour du bras & du poignet des
bracelets du même métal. Vraifemblablement cet
ornement fervoit à diftinguer les n o b le s & particuliérement
ceux qui avoient quelque commandement
dans les troupes.
L’agriculture chez les Celtes étoit abandonnée
aux femmes, aux enfans, aux vieillards & aux
efclaves, fe réfervarit eux-mêmes pour la guerre.
Ils avoient le même éloignement pour les arts mé-
chaniques. La guerre, à proprement parler, étoit
leur unique profeflion. La jeuneffe ne faifoit pas
d’autre apprentiffage que celui des armes. Les-
hommes faits alloient tous à la guerre, & y alloient
aufli lopg-temps qu’ils étoient en état de fervir.
Perfonne ne les attaquoit, parce qu’il n’y avoit
rien à gagner avec eux ; mais ils. faifoient eux-
mêmes des courfes continuelles fur leurs voifins,.
parce qu’ils tirotent de la guerre toute leur fub-
fiftance. Ce que leurs troupeaux ne leur fournif-
foient pas, il falloit qu’ils L’obtinffent à la pointe de
leurs épées.
Quand un jeune homme étoit parvenu à l’âge,
de dix-huit ans , on l’émancipoit en lui donnant
un bouclier, une épée & une lance. |
La gloire d’un peuple Celte, conftftoit à ravager