
portraits de poètes tant tragiques que comiques ( i ) ,
oc il étoit joint à la citadelle par une muraille que
l ’on nommoit aujîrule, parce qu’elle étoit au midi :
on voyoit fur cette muraille une tête de la Gorgone
Alédufe, qui étoit dorée & relevée en boife fur
l’égide. Au haut du théâtre il y avoit, dans l’épail-
feur du mur, une grotte, d’où l’on defcendoitau
pied de la citadelle : dans cette grotte étoit un trépied
où étoient repréfentés Apollon & Diane tuant
les enfans de Niobé. Dans le chemin qui menoit de
la citadelle au théâtre, on trouvoit le tombeau de
Calus, tué par Dédale ; on rencontroit aufli le
temple d’Efculape, qui méritoit toute l’attention des
curieux, tant à caufe de plufieurs de fes ftatues &
de celles de fes ènfans, que pour les belles peintures
qui s’y voyoient : dans ce temple étoit une
fontaine, près de laquelle on difoit que Mars avoit
tué Halirrhothius ; on confervoit dans le même lieu,
comme une grande curiofité, la cuiraffe d’un Sar-
mate, faite avec de la corne de cheval coupée par
écailles, qui étoit aufli-bien travaillée & aufli folide
que celles des Grecs, quoiqu’elle fût cOufue avec
des nerfs, & qu’il n’y eût pas de fer. Après le
temple d’Efculape, toujours furie chemin qui menoit
à la citadelle, on voyoit le temple de Thémis:
à l’entrée étoit le tombeau du malheureux Hyppo-
Ete , qui mourut de l’effet des imprécations de fon
père; il n’y avoit que ce feul chemin pour entrer
dans la citadelle, car de tous les autres côtés elle
étoit défendue’par de bons murs ou par des rochers
efcarpés.
Les veftibuîes qui conduifoiênt à la citadelle, &
que l’on nommoit propylées ou portiquesétoient
une des grandes beautés cTAthènes (a) ; ils étoient
couverts de marbre blanc, qui, pour la grandeur des
pierres, ou pour la fculpture dont elles étoient
ornées , furpafloient en beauté tout ce que l’on
pouvoit voir ailleurs : à droite étoit une chapelle
de la Vi&oire, dont la ftatue n’êtoit pas ailée: cette
chapelle donnoit du côté de la mer, où l’on difoit
qu’Egée s’y étoit précipité. Dans une falle à la
gauche de cette chapelle, il y avoit des peintures,
qui repréfentoient Diomède emportant de'Lemnos
les flèches de Philoâète, & Ulyfle qui enlevoit le
palladium de la citadelle de Troye : dans un autre
tableau on voyoit Orefte qui poignardoit Egiffhe,
& Pylade qui tuoit les enfans de-Nauplius venus au
fecours d’Egifthe d’un autre côté étoit repréfenté
Polyxène, que l’on immcloit fur le tombeau d’A chille
: il y avoit beaucoup d’autres tableaux-, qui
tous avoient été faits par Polygnote. i l y avoit
(2) Le théâtre d'Athènes* dans fon plus grand diamètre
, avoit environ 047 pieds & demi -, l’ouverture de
lafcène en avoit 104.; les murs 8-d^épaiffeur il étoit de
marbre blanc.
( a) On en voit encore de magnifiques ; & M. le Roy,
voyageant’dans le pays, les a reconnus le premier, aux
cinq-portes dont parle Harpocration, ( Ruines des monum.
de ÿ'w.üfy a .Jdit.p.
près' de Ces veftibuîes ( 3 ) des ftafues êqueftres
d’une grande beauté ; mais on ignore qui on avoit
voulu repréfenter. J’ajoute que les clefs des pne-
pylées, qui étoient en effet les portes de la citadelle,
étoient remifes chaque foir entre les mains de
l’Epiflrate, ou Archonte chargé de l’adminiftration
intérieure de la ville (4).
En entrant dans la citadelle on trouvoit les trois
Grâces & un Mercure, que l’on difoit avoir été
faits par Socrate, fils de Sophronifque : les Grâces
font ordinairement repréfentées nues ; mais Socrate
avoit habillé celles-ci. On voyoit aufli dans la citadelle
la ftatue de Diitréphés en bronze, tout percé
de flèches. Près de cette ftatue étoit celle d’Hygie,
que l’on difoit fille d’Efculape, & une de Minerve
Hygiea, ou Salutaire : on montroit auprès de ces
ftatues un petit banc de pierre, où l’on difoit que
Silène fe repofa lorfqué Bacchus vint ,"pour la pre*
mière fois, dans l’Àttique. Parmi beaucoup d’antiques
que l’on confervoit dans la citadelle, on
remarquoit un petit Lyeius, fils de Myron : il étoit
de bronze , & pôrtoir à la main un vafe facré ; une
ftatue de Perfée dans l’attitude vraifemblablement
ou il étoit lorfquil tua Médufe : ces deux ouvrages-
étoient de Myron. L’on voyoit aufli une chapelle
de Diane Broronia, dont la ftatue étoit de Praxitèle.
On montroit dans cette même citadelle un cheval de
bronze qui imitoit le cheval de bois que l’on prit
à T ro y e , & que Virgile a rendu fi célèbre; derrière
ce cheval étoient plufieurs ftatues, parmi lesquelles,
on diftinguoit celle d’im homme qui difputa
le prix de la courfe tout armé, dans le temps- que
(3) Si quelque le&eur vouloir juger de la vérité de
mon récit, foit dans cet article, foit dans plufieurs
autres, je les préviens de ne pas s’en rapporter aux traductions.
Par exemple, je m’écarte ici de celle que
M. l’abbé Gédoyn a faite de Paufanias.ril dit que ces
ftatues équeftres étoient fur ces veftibuîes. Cela n’eft pas
dans le texte grec que j’ai fous les yeux. M. le Roy
n’a pas manqué non- plus d’en faire la remarque. Je
pourcois citer un grand nombre de contre -•fens qui fe
trouvent dans cette traduction -, & ceft afliiréménc bien
dommage, puifque la leCture de Paufanias eft une des
plus agréables, en fait d’antiquité. Il feroit bien à dëfirer
que quelque homme de lettres, très-verfé d~ns la langue
grecque & 'dans les antiquités-de cette nation, voulût-
, bien revoir cette traduCtiôn , ou plutôt en. refaire une
nouvelle -, car avec les conrre-fens il y, a des tranfpofi—
rions, &c. Voyez l’article. MeJJene, Ira, &c. Ceft une-
confufion où l’on ne comprend rien ; d’autres fois
l’abbé change les divinités que Paufanias indique dans-
un-temple, pour y en fübftituer. d’autres: enfin , cet
ouvrage, d’ailleurs très-bien, écrit ».manque abfolument
fon b u t , qui doit être fur - tout de rendre l’auteur
grec. Quant à fa fuperbe difpofîtion des propylées St
des deux piédeftaux, on les trouve gravés dans l’ouvrage
de M. le R o y , telle qu’il l’a conçue fur le lieu , d’après
la. vue des belles ruines qui y fubfiftent encore , &
d’après la le&ure attentive des auteurs qui en parlent.
(4) Larfque les Turcs fe furent emparés d’Athènes ,
ils firent de ce fuperbe veftibule un magafin à poudre..
La foudre y mit le feu en 1656, 8c fit fauter en l’air
le plafond dé cet édifice Si le logement d’Yfouf-Aga qui-,
éioit.deffus,.
Clianwus étoit Archonte à Athènes. Le Pancratiafte
Hermolycus & Phormion , fils d’Afopicus, étoient
aufli là en bronze : on y voyoit encore une Minerve
qui châtioit le Satyre Marfyas, pour avoir emporte
une flûte qu’elle avoit jettée, & qu’elle ne vouloit
pas que l’on ramaffât : à tout cela il faut ajouter un
tableau qui repréfentoit le combat de Thefee contre
le Minotaure ; dans un autre tableau on voyoit
Phryxus, fils d’Athamas, qui immoloit le bélier
qui l’avoit porté à Colchos. On voyoit dans d autres
tableaux un Hercule qui étouffoit de gros ferpens
dans fes mains ; une Minerve qui fortoit de la tête
de Jupiter , & un taureau qui fut con/acrè en ce
lieu par le fénat de l’Aréopage, en ftatues moins
antiques que celles dont il eft fait mention précédemment,
mais où l’art avoit déployé toutes fes
beautés. On remarquoit un guerrier inconnu qui
avoit la tête dans un cafque., & dont les ongles
étoient d’argent ; cette ftatue étoit de Cloeetas,
grand ftatuaire: une ftatue de la Terre fuppliante
qui, demande de la pluie à Jupiter : une ftatue de
Conon & une de fon fils Timothee ; une autre re-
préfentant Procné qui méditoit d’égorger ton fils,
& la ftatue d’Itys. On voyoit aufli une Minerve
avec l’olivier qu’elle donne aux Athéniens ; un
Neptune qui faifoit fortir une fource d eau en leur
faveur, & une ftatue de Jupiter Polieiis , ou Jupiter
proteaeur de la ville d’Athènes, faite par Léo-
charès. , , . . .
' Le parthenon ( i ) , ou temple de ^ Minerve, etoit
aufli dans la citadelle, ce temple étoit un des édifices
les plus magnifiques de la ville d’Athènes : on
le nommoit aufli l’Hécatompedon, ou le temple
des cent pieds (a ) , parce qu’il avoit cent pieds en
tout fens r il avoit été rebâti par Péricles, les Perfes
ayant brûlé le premier. Sur lc fronten de la façade
on voyoit tout ce qui a rapport à la naiffance de
Minerve : fur le fronton de derrière , l’ouvrier avoit
repréfenté le différend fin-venu entre Neptune &
Minerve au fujet de l’Attique. Dans l’intérieur du
temple étoit la ftatue de la déeffe, de vingfefix coudées
de hauteur , toute en or & en ivoire ; les deux côtés
de fon cafque étoient foutenus par deux griffons, &
du milieu s’élevoit un fphinx ; la ftatue étoit droite.,
vêtue d’une tunique qui lui defcendoit jufqu au
_ bout des pieds ; fur fon eftomac étoit une tête de
Médufe, en ivoire, & auprès de la déeffe une victoire
haute de quatre coudées ; la déeffe tenoit dans fa
main une pique, & au bas de la pique étoit un fer-
pent, fymbole d’Eriâhonius ; elle avoit fon bouclier
à fes pieds. Sur le piédeftal étoit repréfentée
Pandoré en bas-relief. Cet ouvrage étoit regardé
comme le chef-d’oeuvre de Phidias. Il n’y avoit de
ftatue d’homme dans ce temple , que celle de l’em- 1
(1) J’en ai parlé au mot Acropolis;
(a) M. le Roy a trouvé ces 100 pieds à fa largeur extérieure,
ce qui donne 94 pieds 10 pouces du pied de
Paris. Il avoit de long 200 pieds de notre mefure, 65 de
haut,.
pereür Adrien ; mais à l’entrée on Voyoit celle
d’Iphicrate , célèbre général Athénien. Hors du
temple on voyoit une ftatue en bronze d’Apollon
Parnopius, que l’on difoit avoir été faite par Phidias.
Les ftatues de Xantipe & de fon fils Périclès^or-
noient aufli la citadelle d’Athenes. La ftatue de Pe-.
riclès étoit ifolée ; mais à côté de Xantipe étoit celle
d’Anacréon de Téos, qui étoit repréfenté comme
’ un homme qui a un peu de vin dans la tete & qui
chante. On voyoit enfuite les ftatues d In o , fille
dlnachus, & de Callifto, fille de Lycaon. Le mur
du temple (3) du côté du midi, c’eft-à-dire, la frife
de la Cella, ou corps du temple même, étoit orné-
de bas-reliefs d’environ deux coudées , qui avoient
été reftaurés & confacrés par Attalus. Les fujets
étoient la guerre des dieux contre les géans qui
habitôient la Thracé & l’ifthnre de Pallène, le combat
des Athéniens contre les Amazones, la victoire
des Athéniens fur les Perfes a la journée de
Marathon, & la défaite des Gaulois dans la Myfie (4).
Olympiodore avoit aufli fa ftatue dans ce lieu :
c’eft ce fameux Athénien qui , à la tête des plus intrépides
de fes compatriotes, délivra Athènes du
joug des Macédoniens, fous lequel elle étoit depuis
la bataille de Chéronée perdue contre Philippe, père
d’Alexandre-le-grand : cette ftatue étoit un monument
de la reconnoiflance de fa patrie. Auprès de
cette dernière ftatue il y en avoit une en bronze,
fous le nom de Diane Leucophryné.
Le temple d’Ere&ée étoit fort beau ; fl y avoit
dans le parvis un autel dédié à- Jupiter-le-grand, où
l’on ne facrifioit rien d’animé : on n’y faifoit que des
. offrandes, & on ne fe fervoit même pas de vin-
' dans les libations. En entrant dans le temple on
trouvoit trois autels, dont le premier étoit confacré
à Neptune, & , fuivant un ancien oracle, on y facrifioit
aufli à Ereâée : le fécond étojt confacré à
Butés, un de leurs héros, & le troifième à Vulcain.
Sur les murs du temple on avoit peint à frefque
toutes les aventures qui avoient quelque rapport au
(3) Je m’écarte encore ici du fens donné par l’abbé
Gédoyn, 1°* parce qu’il ri eft pas queftion dans le grec
de la citadelle y 20. parce que M. le Roy, aüfli-bien que
"Wheler, traduifent muraille du temple, les murs de la
citadelle étant très-bas 8c fans ornemens..
(4) Quoique Athènes ait changé de maîtres,, ce temple-
magnifique , bâti par Périclès, fubfifta long-temps dans
toute fa beauté. Les Chrétiens, devenus maîtres de la
ville i, en firent un temple au vrai Dieu-, 8c les Turcs ,.
qui leur fuctédèrent, en firent une mofquée : mais la
guerre, ce fléau qui accélère cruellement les ravages du
temps, fut caufe de fa ruine. En 1677, le Provéditeur
Morofini affiégeoit Athènes à la tête de 8800 foldats
vénitiens : une bombe tomba fur le temple , mit le feu:
aux munitions de poudre que les Turcs y avoient enfermées,
8c dans un inftant une grande partie de l'édifice
fut ruinée. Ce général, pour enrichir fa patrie des-.
dépouilles de ce fuperbe monument; voulut faire enlever,
du fronton l'a ftatue de Minerve, fon char 8c.fes chevaux >
mais une partie du grouppe tomba à terre 8cTe brifa. Les«
Turcs ont depuis bâti la, mofquée qui fe vo it au milieux
des. jaunes,.