
le plus de commerce, & ce nom lui refia longtemps.
Sous les Romains, G aies devint la plus flo-
ri liante, & fut alors-la ville de Tartefle. Au refte,
les médailles que l’on a trouvées près de Rocadillo
ne permettent pas de douter de la pofition de Carteïa.
Il paroît que quelques auteurs Font confondue
avec Calpe , qui étoit à l’extrémité de la montagne.
Strabon dit qu’elle avoit été fondée par Hercule.
Il cite Thimofthèrife , félon lequel Carteïa avoit d’abord
porté le nom d'Heraclea. Cette ville eut beaucoup
à fouffrir, lorfque Céfar pourfuivoit l’armée
des fils de Pompée, défaite à Manda. Les citoyens
étoient partagés en deux faéiions, 8c Cn. Pompée
s’y étoit retiré. Il s’y fit un grand maflacre entre
•les partifans & fes ennemis : enfin , il s’embarqua,
s’enfuit bleffé, & fut tué peu après.
Les médailles que le père Florez nous a con-
fervées de Carteïa, ont prefque toutes quelques
emblèmes relatifs à la pêche. La tête de Cybèlë
fe voit fur plufieurs; lur d’autres, c’eft 'celle de
Jupiter : mais au revers font ou des poiffons, où
des pêcheurs , ou l’extrémité d’un trident, ce qui
rappelle ce que dit Strabon de la qualité & de l’abondance
du poiffon fur cette côte.
Carteïa fubfiftoit encore, félon Fereras, à l’arrivée
des Maures; & la tour appelée aujourd’hui Caftillon
eft un refie de Carteïa, laquelle porta long-temps
le nom de torre Cartagena.
C arte ïa , ville de l’Hifpanie. Polybe la nomme
'Althoea. Elle étoit dans la Çeltibérie.
C A R T EN A G A , nom d’une ville de l’Inde, que
Ptolemée place en-deçà du Gange.
CARTENNÆ, & C a r t en n a , ville de la domination
romaine en Afrique. Elle étoit fituée au
nord-eft de l’embouchure du fleuve Cartennus, &
au fud-fud-oueft de celle du fleuve Chinàlaph. Pline
& Ptolemée en font mention. Elle avoit été colonie
romaine ; il y eut en fuite un fiège épifcopal. Le
P. Hardouin croit que c’eft aéhiellement Mafgraïm ;
& Marmol croit que c’eft Moftagan.
CARTENNUS, ou Cartenus, rivière de l’A frique
, qui fe perd dans un golfe de la mer mé-
diterranée, au nord-eft du port d'Arfinaria. Il en
eft fait mention par Ptolemée.
C A R T E R IA , nom d’une île de l’A fie mineure,
près de la ville de Smyrne, félon Pline.
CAR TERO N , ou C arterum , ville de la Sar-
inatie afiatique, fituée au bord du Pont-Euxin, félon
Ptolemée.
C A R TH A , ville de la Paleftine, dans la tribu
de Zabulon, félon l'e livre de Jofué, où l’on voit
qu’elle , fut donnée aux lévites de la famille de
Merari. {Joj. , x x i 9 54.) C ’eft probablement la
même dont les notices de l’empire font mention.
Servius la place entre T y r & Beryte.
C A R TH A D A , nom oriental, & véritable de la
ville de Carthage en Afrique. Outre que les con-
noiflances que l’on a fur les langues orientales,
qui ne permettent*pas de douter que Cartha-Hadath
ne fignifie ville nouvelle, c’eft que l’on a le témoignage
de Solin, qui dit 'expreflément : « Elyflh
» bâtit une ville qu’elle nomma Carthada, ce qui,
» dans la bouche des Phéniciens , fignifie ville
» neuve ».
C ’étoit, en traduifant ce nom littéralement, que
les écrivains Grecs ont quelquefois dit Kctivn crokic'
Bodhard dit que les Siciliens avoient l’habitude de
changer le 5^ en & : ainfi , au lieu de Carthada ,
ils dirent Carchedon. Ces changemens de lettre d’un
peuple à l’autre ont des exemples fréquens entre
les peuples qui, s’empruntent des noms, puifque
nous difons Londres, 8c les Anglois London; lé
1 T ib re, 8c les Italiens Tevere ; Lisbonne,-8c les Portugais
Lisboa, 8cc. ( Voye^ C a r th a g o . )
C AR THÆ A , nom d’une ville de l’îlede Ceosf
félon Pline.
CARTHAGENIENSES , les Carthaginois,
Origine. Je parle avec quelque détail,"à l’article
C a r th a g o , de ce peuple, qui étoit certainement
Phénicien, quel que foit le motif qui l’ait établi fur
la côte d’Afrique, où fut Carthage.
Langue. La langue des Carthaginois a été l’objet
des recherches d’un grand nombre de favans. Ceux
qui ont le plus approfondi cette matière, penfent
que la langue Carthaginoife étoit la même que la
langue phénicienne, altérée un peu par le temps
8c par le commerce avec les étrangers, tant L y -
biens que Grecs 8c Romains.' Quant à leurs ca-
raélères, les infcriptions trouvées à Malte, où certainement
on a parlé long-temps le Carthaginois j
prouvent que c ’étoient des lettres phéniciennes.
Religion. Leur religion étoit aufli dans les com-
mencemens celle des Phéniciens. Leur commercé
avec les Grecs leur fit. adopter de nouvelles divinités.
On peut préfumer aufli que les Grecs 82
■ les Romains, en traitant de l’hiftoire de ce peuple,
fubftituèrent les noms de leurs divinités, 8c les
divinités elles-mêmes, à celles qui étoient adorées
dans le pays. Les principale^, autant qu’on peut
le conjeâurer par le rapprochement, étoient Saturne
ou Moloch ;,Uranie ou Aftarte ; Jupiter ou
Belus ; le Soleil, ou Baal Samen ; la Lune, ou
Beliflama ; Mercure ou Afumas ; l’Hercule Lybien,
dent le culte fut apporté à Carthage par Didon.
Entre celles qui probablement leur venoient des
Grecs, on trouve Efculape ; il avoit un temple
très-vafte dans la citadelle ; Pluton , adoré comme
dieu des enfers, 8c Triton , qui veilloit à la con-
fervation des vaifteaux. On rendoit une efpèce de
culte aux deux frères appelés Phileni (1). Tout
paroît prouver que pendant aflez long-temps ils
admirent les facrifices humains au nombre de leurà
cérémonies religieufes.
Gouvernement. Le gouvernement des Carthaginois
a été eftimé de toute l’antiquité. Il tenoit tout-à-
la-fois de celui des Romains 8c de celui de Lacédémone
: au commencement il fut monarchique ;
mais cela dura peu.
(1) Voye\l’article Aræ Philenorvm.
Dans
Dans les beaux jours de la république, l’autorité
étoit partagée entre trois puiffances ; i°. les fuffètes,
qui étoient à la tête des affaires : on les élifoit à
la pluralité des voix : ils n’étoient que deux. . . .
2o. Le fénat, devant lequel on portoit le* affaires
de l’état : on croit que le nombre des fénateurs
montoit à plus de fix cens.. . . 30. Le peuplerait
jugement duquel on renvoyait les affaires que 1 on
n’avoit pas décidées au fénat : cette dernière puif-
fance prévalut dans la fuite. • ;
Il y avoit de.plus, pour les affaires contentieufes,
un confeil compofé de cent quatre perfonnes, parmi
lefquelles on choififloit cinq juges qui avoient une
autorité fupérieure à celle des autres.
Les premiers officiers de la république étoient
le préteur, dont l’autorité influoit fur toutes les
affaires.. . . le quefteur, qui prenoit foin des deniers
publics.. . . le cenfeur, dont la fondion étoit d’empêcher
la trop grande corruption des moeurs.
Il ne nous fefte. que quelques-unes de leurs loix
fur des objets particuliers.
Sciences & arts. On n’ a rien de pofitif fur l’état
des fciences chez les Carthaginois : cependant, à
en juger par indudion , on doit croire qu’ils con-
noiffoient l’aftronomie, le pilotage, 8c d’autres parties
des mathématiques. Ils dévoient çonnoître aufli
l’architedure grecque; il leur étoit, ce me femble,
plus aifé d’employer des artiftes de cette nation,
avec laquelle ils communiquoient par \ç comt
merce , que d’en créer une qui leur fût propre :
au refte, on dit qu’ils avoient de beaux temples,
des palais fpacieux, des meubles fort riches , 8c
des armes artiftemènt travaillées. Il falloit qu’An-
nibal entendît fort bien le grec , puifqu’il compofa
un ouvrage en cette langue. Magon, autre fameux
général, avoit compofé vingt-huit volumes fur l’a- *
griculture ; 8c les Romains qui; après le fac de
Carthage, diftribuèrent aux petits rois d’Afrique
les livres qu’ils y avoient trouvés, eftimèrent ceux
de Magon aflez utiles pour les /aire traduire dans
leur langue : ils avoient cependant déjà ceux de
Caton fur cette matière.
Afdrubal, connu chez Jçs Grecs fous le nom de
Clitomaque, profeffa la philofophie à- Athènes. Ce
fut pour lui une reffource honorable après la def-
trudion de fa ville. '
Conuncrce. Le commerce devoit occuper une
grande place dans l’hiftoire des Carthaginois : mais
malheüreufement nous n’avons fur cet objet,ainfi
que fur les autres , que de Amples apperçus. Un
homme de beaucoup d’efprit (1) a très-bien obfervé
que le commerce fu t, à proprement- parler, l’occupation
de.Carthage , comme la guerre étoit celle
de Rome : il fut la fource de fa puiffance , l’objet
continuel de fa politique , fon principal foutien ,
le mobile 8c la .fin de toutes fes entreprifes.-La
fertilité de fon territoire, fon port, l’un des meil-
(1) M. de Bougainville , Mém. de Litt, T. x x y x i i
p, "7°Gré-o graphai-e a'n ci•enne,
leurs de la Méditerranée, fa fituation avantage«fe
fur cette mer, à portée de deux autres mers, 8c
des trois parties du monde, en faifoit le lien de
l’occident, de l’orient 8c du midi, lè centre d’une
circulation facile 8c continuelle, 8c l’entrepôt de
l’univers. • \ - .
Le pays qu’ils habitoient eft un des meilleurs de
l’A frique, 8c des plus fertiles de l’imivers. Mifc
en valeur par des mains aétives, cette terré . naturellement
féconde, étoit pour eux une fource
inépyifable de rich elfes : fes productions diverfes
nourrifloient un peuple immenfe, occupaient un
nombre infini de manufactures 8c d’atteliers , 8c
fourniflbient une ample matière à des exportations
avantage Life s. 1
Non-feulement ils commerçoient dans tous les
lieux où commerçoient les Phéniciens, c’eft-à-dire ,
dans prefque toute l’étendue du monde connu des
anciens ; mais même il s’étoit forme des éta-
bliflemeus dans les fieux dont ils étoient les feuls.
maîtres..
Comme les Phéniciens, ils trouvoient en Egypte
le lin , le papier, des voilés , des cables pour les
vaifléaux ; & les côtes de la mer Rouge, 8c celles
•du golfe Perfique, leur fournifloient l’encens, les
aromates, les épiceries, les gommes, l’or, les perles
,8c les pierres précieufes. Dans l’Inde & les îles
voifines , ils alloient chercher des bois odoriférans,
des oifeaux, des animaux rares, de l’ivoire , &c.
Ils prenoient à T y r 8c fur les côtes de la Phénicie
, la pourpre , l’écarlate, les riches étoffes, les
tapis, les meubles précieux. Ils étoient en repu-
• tation pour les boiferies, pour la préparation des
cuirs 8c des peaux , appelées actuellement maro-.
quiris. Enfin, leurs vaifleaux, comme ceux des.
Phéniciens, alloient fur les côtes occidentales: de
• l’Europe, baignées par l’Océan. Ils rapportaient
des ports de la Gaule 8c des îles Britanniques, le
fe r , le plomb, le cuivre, l’étain. Ils tiroient de!
la mer Baltique le fuccin, ou l’ambre jaune. Ils
partageoient avec les Phéniciens, toutes* les ri-
cheffes du commerce de l’Hifpanie.
Mais un commerce qui leur étoit d’autant plus;
avantageux qu’il étoit plus exclufif, c’eff celui qu’ils
faifoienr dans l’intérieur 8c fur les côtes dé F Afrique.
On fait par un voyage fait, félon le fentiment de
M. Bougainville, vers l’an750 avant l’ère vulgaire,
qu’ils envoyèrent,.fous la conduite de Hannon (1),
(2) Ce voyage de Hannon, décrit par quelqu’un de l’ex-;
péditicn même, à ce qu’il paroît, a été depuis traduit cn
grec fous ce titre lA’ vvoem Kupxxhviav Baêi\iceçTItft'7rKcvi^
c’eft-à-dire, périple d’Hannon , roi ( chef ) des Carthaginois
, &c. Ce périple, imprimé dans le premier volume
des petits géographes , avec une favante préface de
Dodwell, a été traduit en. franç.ois par M. de Bougainv
ille , & publié avec une àiiTerratïon qui en montre
l’authenticité , dans le: volume xxviii des mémoires de'
littérature. La Martinière &. quelques autres écrivains
cn avoient attaqué l’authenticité; mais le mémoire de
M, de Bougainville répond à toutes les objeéUons.
H hh.