
voici le moyen qu’il employa. 11 plaça Ton année »
partie à l’endroit où le fleuve entre dans Babylone,
partie à l ’endroit où il en fort ; avec ordre de s’introduire
dans la ville fur le lit du fleuve dès qu’il
feroit guéable. Son armée ainfi poftée & cet ordre
donné il fe rendit au lac avec la partie la moins
utile de fon armée, il détourna la plus grande partie
des eaux du fleuve dans ce lac ; le lit du fleuvç
devint guéable. Alors les Perfes entrèrent dans
Babylone, car les eaux s’étoient tellement retirées
que les troupes n’avoient guère de l’eau que jufqu’à
la cuifle. On n’avoit pas eu l’attention de fermer
toutes les petites portes qui donnoient ilfue dans les
rues, ainfi les Perfes s’emparèrent dç la ville au
moment où l’on s’y attendoit le moins. « Si l’on en
» croit les Babyloniens, lés extrémités de la ville
» étoient déjà au pouvoir de l’ennemi, que ceux
» qui demeuroient au milieu n’en avoient encore
» aucune connoiflance. Comme les habitans célé-
» broient par hafard en ce jour une fête ( i ) , ils
» ne s’occupoient que de danfes & de plaifirs, qu’ils
» continuoient jufqu’au moment où ils apprirent le
» malheur qui venoit d’arriver. C ’eft ainfi que Ba-
» bylone fut prife pour la première fois ». Cet
événement fe rapporte à l’an 538 ou 539 avant
notre ère.
Cyrus, maître de Babylone, y établit le liège de
fon empire ; fon fils Cambyfe y régna de même. Sous
Darius, fils d’Hiftape, le troifième des fuccefleurs
de Cyrus, en y comprenant Smerdis (2), cette ville
fe révolta. A la première nouvelle, Darius marcha
contre les Babyloniens (Hérod. l . I I , § ./ ƒ / ) ; arrivé
devant la place, il en forma le liège. Mais les
habitans, qui avoient dès long-temps pris leurs précautions
contre un fiège, lui infultèrent de delfusles
murailles. En effet cette entreprife eût échoué fi l’un
des grands de la cour, appellé Zopire, ne fe fût coupé
le nez, les oreilles, & ënfanglanté le corps pour fe
préfenter en cet état aux Babyloniens, & leur demander
vengeance d’un traitement qu’il attribuoit à :
Darius. On le crut. Il étoit homme de guerre; on
lui donna des troupes à commander, après quelques
forties dans lefquelîes il avoit toujours battu
des corps de troupes Perfes, placées exprès par
Darius. Enfin, un jour convenu, tandis que Darius
faifoit avancer fes troupes de toutes parts, & que les
(1) Mais pourquoi par hafard, comme le dit Hérodote ?
< TUX«I» yj.f g | 1 ixcrttv tfpr l. » , § ,p, ). H eft très-
probable au contraire que Cyrus avoit choili ce jour
de preference. Cela eft dit dans Daniel : voyez au fur-
plus le premier volûme de l’hiftoire ancienne de M.Rollin.
Cet apteitr refpe&able s’eft attaché à montrer la confor-
inxte des récits des deux écrivains , l’un grec , & l’autre
juif.
1» ( * ) V oyez le tableau chronographique que j’ai mis à
J article Affyrii. La chronologie, il eft vrai, ne s’en rap-»
porte pas ayec celle qu’a établie M. Larcher : je ne
prétends pas la défendre ; mais l’effentiel eft d’avoir un
enfemble , & ce tableau le donne : on y adapte enfuite
1? lyftçjpe que l’on préfère, •
Babylonîerts fe défendoient de deflùs leurs murailles
, Zopire fit ouvrir deux portes par lefquelîes
entrèrent les afliégeans ; ceux des Babyloniens qui
s’en apperçurent fe réfugièrent dans le temple de
Belus ; mais ceux qui ne s’en apperçurent pas tinrent
ferme dans leurs poftes jufqu’à ce qu’ils eu fient
reconnu qu’on les avoit auflL livrés aux ennemis,
l’an 513 avant l’ère vulgaire.
Ce fut ainfi que Babylone tomba pourfla fécondé
fois en la puiflance des Perfes. Darius s’en étant
rendu maître, en fit abattre les murs & enlever les
portes. Il fit enfuite mettre en croix trois mille
hommes des plus diftingués de la ville. Depuis ce
temps les rois de Perfe ceflerent d’y demeurer
continuellement. Ils firent leur réfidence dans trois
grandes villes. L’hiver feulement ils étoient à Baby-
ïone ; l’été en Médie ( fans doute à Ecbatanes) &
pendant la plus belle partie du printemps ils demeuroient
à Sufe.
Babylone étoit encore très - confidérable lorsque
Alexandre, l’an 325 avant notre ère, y entra
en vainqueur. Ce prince avoit envie de lui rendre
fon ancien éclat ; mais fa mort empêcha l’exécution
de ce defîein. Seleucus Nicator ayant bâti à peu de
diftance au nord, une. ville de fon nom fur le Tigre,
le voifinage de la ville nouvelle affoiblit infenfible-
ment la ville ancienne. Strabon rapporte que de
fon temps Babylone étoit prefque déferte. Diodore,
à-peu-près dans le même temps, difoit qu’il n’y
avoit plus qu’un quartier d’habité. Et au fécond
fiècle de notre ère, Paufànias écrivoit qu’il n’y
avoit plus à Babylone que de vaftes murailles. Selon
S. Jérome les rois Parthes ou Perfes avoient fait
un parc de fon enceinte. Benjamin de Tolède, dans le
12e fiècle, dit qu’il trouva cette ville entièrement
minée ; mais que. l’on y remarquoit encore des
reftes du palais de Nabuchodonofor. Ce furent ap-'
paremment quelques-uns de ces reftes qui furent
vus par Piètro Dellavalle, aufli-bien que d’autres
vus par le P. Emmanuel deS. Albert, & dont il parle
dans un voyage manufcrit cité par M. d’Anvillé ,
Mèm. de Litt., t. 28 ,p . 256.
BA B Y LO N E , ville de l’Egypte, qui étoit ar-
rofée par le fleuve Trajan, félon rtolemée : Etienne
de Byfance en fait aufli mention.
Strabon dit que de fon temps on y tenoit une des
trois légions qui gardoient l’E gypte, & qu’on trou-
voit cette ville en remontant du Delta, par eau,
qu’elle étoit naturellement forte & avoit été bâtie
par quelques Babyloniens, qui, s’y étant retirés,
obtinrent des rois la permiflion de s’y établir.
Jofeph, Antiq. en racontant la route qu’âvoient
faite les Ifraélites pour fortir de l’Egypte, dit qu’ils
paflerent auprès de Latopolis, qui étoit alors déferte,
& que ce fut en ce lieu que l’on bâtit la ville de Babylone
, dans le temps que Cambyfe ravageoit
l’Egypte.
B a b y l o n e . Suidas dit que Sémiramls entoura l a
ville de Ninive de murailles, & qu’elle lui changea
fon npm en celui de Babylone,
B a b y lo n e n s s s
BABYLONENSES, peuple de l’Ethiopie, fous
l ’Egypte, félon Ptolemefe.
B a b y l o n e n s e s , ou B a b y l o n i i , les Babyloniens.
Ce peuple avoit pris fon nom de la ville de
Babylone, long-temps puiflante en Orient & bâtie
fur les bords de l’Euphrate. Comme les détails que
nous avons fur ce peuple aufli bien que fur les A fly-
riens, ne nous font tranfmis que par les Grecs, il
feroit, je crois, téméraire d’en afîiirer l’exa&itude
d’une manière trop pofitive. La différence des langues
& des préjuges influoit d’une manière très-
marquée dans les jugemens que portoient ces
peuples qu’ils nommoient barbares. Et certainement
nous faurions tout autrement l ’hiftoire de
ces anciens peuples d’A fie, fi nous la tenions de
leurs propres hiftoriens. Quoi qu’il en foit, faute de
mieux, je vais préfenter ici une courte analyfe de
ce que nous apprennent les auteurs, du gouvernement
, de la religion, &c. des anciens Babyloniens.
*
Antiquités. Quoique quelques auteurs, confondant
ainfi la fondation de Babylone avec l’établifle-
ment de l’empire auquel cette ville donna fon nom,
faflent remonter les commencemens de cette monarchie
jufqu’au temps de Nimbrod ; ils ne nous
«apprennent cependant rien de Ihiftoire de fes premiers
fiècles.
Gouvernement. On croit que le gouvernement y
ctoit defpotique. Ce qui confirme en quelque forte
cette conje&ure , c’eft que plufieurs princes s’y»
font fait rendre les honneurs divins.
Il paroît que les officiers chargés de l’adminiftra-
tion étoient partagés en trois claffes, & qu’ils étoient
choifis parmi ceux qu’une naiflance illuftre, & fur-
tout une haute fagefle diftinguoient du refte de la
nation. Outre ces officiers publics il y avoit encore
ceux qui compofoient la mai fon du roi, dont les
privilèges étoient confidérables. I l faut diftinguer
entre ces derniers ceux q u i, faifant état de prédire
les événemens futurs, étoient confultés par le roi
dans les événemens de quelque importance. Us
étoient particuliérement défignés par le nom de
Chaldéens.
On connoît peu leurs loix : nous voyons feulement
qu’il étoit défendu à tous les fujets & particuliérement
aux gens du peuple, de difpoler de
leurs filles. Le roi fe chargeoit du foin de les marier
par le miniftère de fes officiers.
Dans les cas de punition, non-feulement on con-
fifquoit les biens oc l’on dètruifoit les maifons des
coupables ; mais fouvent aufli & toujours :à la volonté
du prince, on mettoit le condamné en pièces,
ou on lui tranchoir la tête, ou bien on le précipitoit
dans une fournaife ardente.
Religion. On ignore comment les Babyloniens ,
ayant perdu l’idée d’un Dieu feul créateur de l’univers,
tombèrent dans les abfurdités de l’idolâtrie.
On trouve que leurs principales divinités étoient
Bélus, regardé comme le fondateur de l’empire ;
Géographie ancienne.
Vénus, ou du moins une déefle' qui répondoit à
celle qui portoit ce nom chez les Latins, & dont
le temple le nommoit Succoth-Benoth, ou tabernacle
des filles. On l’adoroi't fous le nom de Salambo (1).
On croit qu’elle étoit la même que l’Aftarté des
Phéniciens. 11 y avoit encore d’autres divinités
qu’il eft fort peu important de connoître.
Les Chaldéens, appelés aufli Mages, avoient introduit
à Babylone le culte du feu. Les idoles
étoient d’or, d’argent, de bois, habillées magnifiquement,
& prefque toujours gardées dans les
temples à la lueur des lampes, par des prêtres qui
leur offroient quelquefois des viélimes humaines.
V'f'âges & coutumes. La loi, comme je viens de le
dire, défendoit aux pères de marier leurs filles. L’u-
fage étoit de les expofer dans une grande place,
où les belles étoient vendues au profit des laides,
auxquelles on faifoit une dot avec les fonds qu’a-
voit produits la vente. Une de leurs coutumes
qui contraftele plus avec les idées de bienféance ,
adoptées 'par tous les peuples policés, c’eft l’obligation
où étoient toutes les femmes de fe préfenter.
une fois en leur vie, à la porte du temple de Vénus
en attendant qu’elles fuflent choifies par quelque
étranger , auquel elles dévoient accorder leurs
faveurs (2).
Ils avoient une fête nommée Sacca qui duroit
cinq jours, pendant lefquels les efclaves comman-
doiént à leurs maîtres. '
Comme ils n’avoient pas de médecins pour le
traitement des malades, ils y fuppléoient en les ex-
pofant dans quelque endroit fréquenté, afin que tous
les paftans puflent les voir, & que tous ceux qui
avoient été attaqués du même mal, leur indiquaflerit
.les procédés & les remèdes qui les avoient guéris.
On enduifoit de cire & de miel les corps morts,
& on leur faifoit des funérailles dans lefquelîes il
entroit beaucoup de cérémonies. <;
Les habillemens des Babyloniens étoient riches
& commodes : ils portoient, dit Hérodote (/ ./ , p.
ipô'), d’abord une tunique de lin qui leur defcen-
doit jufqu’aux pieds, & par-deflùs une autre tunique
de laine ; ils s’enveloppoient enfuite d’un petit
manteau blanc.Us laifloient croître leurs cheveux,
fe couyroiem la tête d’une mître, & fe frottoient
tout le corps de parfums. Us avoient à la main,
lorfqu’ils étoient hors de chez eux, chacun un
cachet & une canne travaillés , au haut de laquelle
e f t , ou une pomme, ou une. rofe, ou un lys , oh
une aigle, ou toute autre figure; car il ne leur eft
pas permis de porter de canne fans un ornement
cara&ériftique..
Les Babyloniens s’occupoient des fcienc-es. Us
avoient cultivé de très-bonne heure l’aftronomie,
qui dégénéra cependant chez eux en aftrologie.
( 1); M. Larcher , dans fon mémoire fur Vénus, doute
de cette affertion d’Hefychius.
(2 j Voyez les notes fur Hérodote de M, Larcher,
1 . 1 r p. 1 48 &fuiv.
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