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182G.
Juin.
32 VOYAGE
d’un homme instruit qui s’intéresse aux progrès des
sciences. Sans lui nous eussions été peut-être fort
embarrassés de trouver im gîte, vu qu’il n’y a point
d’hôtel à rOrotava : ses utiles conseils nous donnèrent
en outre le moyen de rendre, à la fois, notre
excursion et plus complète et plus économique.
Par une rencontre heureuse, le jardin même du
collège contenait cet énorme pied de Dracoena draco
tant célébré par divers voyageurs ; à mon réveil ce
fut le premier objet qui vint frapper mes regards.
Nous mesurâmes son contour à sa base, et trouvâmes
qu’il était de quarante-huit pieds : M. Berthelot nous
assura que sa hauteur était de soixante-quinze pieds,
bien qu’elle paraisse beaucoup moindre, eu égard à sa
prodigieuse grosseur; cependant, en juin 1819, un
coup de vent avait abattu près de la moitié de ce
monstrueux végétal. A peu de distance, un beau dattier
mâle balançait sa cime élégante à plus de cent
pieds dans les airs. Du balcon du collège on jouit
d’une vue admirable : après avoir erré sur les sites les
plus pittoresques, sur les habitations les plus riantes,
l’oeil va se reposer sur l’immensité de l’Océan, qui,
tel qu’un cadre d’azur, entoure le tableau le plus gracieux
et le plus animé.
Après avoir réparé par un sommeil paisible nos
forces affaiblies, et pris un utile déjeuner, vers huit
heures et demie nous nous remîmes en route. La
petite ville de l’Orotava est bien bâtie, bien percée,
mais ses rues offrent pour la plupart une pente si
roide que la circulation y est très-pénible.
DE L’ASTROLABE. 33
A peine hors de ses murs, nous commençânîes à
monter par un chemin très-roide, et pavé de laves si
glissantes qu’on ne saurait s’y hasarder avec d’autres
chevaux que ceux de l’île ; car je redoutais à chaque
instant de leur voir faire un faux pas dont la moindre
suite eût été de casser le bras ou la jambe de leur
cavalier. Durant trois quarts d’heure nous traversâmes
des campagnes bien cultivées, jusqu’au moment
où nous arrivâmes à la région des châtaigniers,
qui offre encore quelques plantations. Cette région
occupe une zône d’une demi-lieue de largeur, sur
deux cents toises environ de puissance en hauteur.
Vers sa limite commence la région des nuages , dans
laquelle le voyageur se trouve enveloppé d’une bi’ume
épaisse, très-pénétranle par son humidité, qu’on dit
presque perpétuelle au printemps. Là vivent encore
plusieurs plantes de la plaine déjà confondues avec
diverses espèces particulières à cette élévation, comme
les Renoncules , le Doronic, les Cistes, etc. On entre
ensuite dans la région des bruyères qui doit avoir au
moins trois cents toises de profondeur sur deux mille
d’étendue ; c’est là que les nuages sont le plus concentrés
, et que la brume devient une véritable rosée. La
bruyère qui lui a donné son nom est un arbrisseau de
six à douze pieds de hauteur, et se trouve entremêlée
FHypericum canariense en grande abondance, de
thym rabougri et de plusieurs autres arbrisseaux et
plantes herbacées ; on traverse cette bande par un
chemin assez agréable et peu difficile.
Cependant l’atmosphère s’éclaircit peu à peu, la
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Juin.
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