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coup au-dessus de ses compatriotes. Il s’absentait
souvent du gouvernement, mais cjuand il revenait,
il ne paraissait jamais devant le gouverneur sans s’habiller,
car il laissait toujours ses vêtemens chez lui
quand il entreprenait quelque excursion.
Immédiatement après son arrivée, son premier soin
fut de s’informer de sa femme Gorou-Barron-Boullo,
qu’il trouva unie à Karuey. A la vue d’un très-joli
jupon rouge et d’un corset de gros drap accompagné
d’un bonnet de la même couleur, elle quitta son amant
pour reprendre son ancien époux. Néanmoins , peu
de jours après, à la surprise générale, on vit la dame
débarrassée de toute espèce de toilette, et Benilong
était absent. On chercha Karuey, et on apprit alors
qu’il avait été rudement battu par Benilong, qui avait
assez appris de la méthode anglaise pour faire usage
de ses poings en place des armes de son pays, au
grand regret de Karuey, car celui-ci eût bien préféré
se mesurer sur le terrain avec son rival, armé de la
lance et du casse-tête. Karuey étant de beaucoup le
plus jeune, et la dame n’étant pas femme à demi,
suivit son penchant, et Benilong fut obligé de renoncer
à elle sans plus d’opposition. Il parut satisfait
de la correction qu’il avait donnée à Karuey, et fit
entendre que, pour le moment, il resterait sans
femme, et verrait par la suite à faire un meilleur
choix.
Vers la fin de cette année, un phénomène extraordinaire
arriva dans FHawkesbury. Quatre fermes
eurent leurs récoltes entièrement détruites par une
pluie de glaçons. Le blé, qui était encore debout, fut
mis en pièces, et le grain haché. Les tiges de maïs
furent coupées et les épis abattus. Un homme, assez
éloigné de toute habitation, fut heureux de pouvoir
se mettre à l’abri dans un creux d’arbre. Tous les arbres
qui se trouvaient sur le chemin de ce grain, et
qui eurent le côté exposé à sa fureur, furent maltraités
comme s'ils eussent reçu des décharges de mous-
queterie. Le temps fut doux durant les deux journées
qui suivirent ; néanmoins la glace resta sur la terre
en aussi gros morceaux qu’à sa chute. On en trouva
quelques blocs, qu’on ne rapporta que le second jour;
ils avaient de six à huit pouces de long sur deux
doigts au moins d’épaisseur.
Gette année vingt-six personnes seulement périrent
dans la colonie, quantité beaucoup moindre qu’on
n’avait lieu de l’attendre.
En 1796, la contrebande des esprits se fit avec
une telle activité, et il en résulta tant d’excès dans la
colonie, que le gouverneur se vit obligé de prendre à
diverses époques plusieurs moyens pour arrêter ces
abus. Mais ses efforts furent inutiles ; il ne put empêcher
les navires qui touchaient à Port-Jackson, de
débarquer frauduleusement cette denrée dont les
convicts étaient si avides et qu’ils payaient à si haut
prix.
Sur une enquête ordonnée par le gouverneur en
mal, on reconnut que les colonsdes districts de Ponds,
Field-of-Mars, Eastern-Farm, Prospect-Hill et 3Iul-
grave-Place, s’étaient endettés jusqu’à la valeur de