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436 VOYAGE
de Kol-bi nommé Boura-wanaï ct le frappèrent à la
tète de la manière la plus barbare.
Le naturel assassiné fut enterré le jour qui suivit
sa mort, le long de la route, au-dessous des baraques
des militaires. Ses amis le placèrent sur un grand morceau
d ecorce et le déposèrent dans une tombe. Benilong
se trouva au nombre des assistans ; ce fut lui qui
plaça la tête du cadavre près de laquelle il planta un
beau ivarrataa, et recouvrit le corps de la couverture
sur laquelle le malbeureux était mort. La terre fut rejetée
sur le corps avec des épées de bois, et durant
toute la cérémonie les femmes ne cessèrent de pousser
des cris et des burlemens. Les bommes eux-
mêmes entrèrent dans une telle colère qu’ils s’envoyèrent
plusieurs lances et échangèrent quelques
coups de casse-tète; mais cette émeute n’eut point
de suites , car chacun parut déterminé à faire périr
Kol-bi pour avoir si lâchement tué un homme si
généralement aimé. Dans ce but, un bon nombre
de naturels se réunirent en peu de jours près des
baraques; un jeune homme, parent de Kol-bi, reçut
plusieurs blessures. Un petit garçon de sa famille,
qui avait autrefois vécu cbez M. White le chirurgien
, aurait péri, s’il n’eût été sauvé par l’apparition
d’un soldat envoyé pour le protéger ; car on conjecturait
que quand la rage commune contre son oncle
Kol-bi se serait apaisée, on ne penserait plus à l’enfant.
Kol-bi, sachant qu’il lui fallait se soumettre à l’épreuve
ordinaire en pareille circonstance , ou vivre
dans la crainte continuelle d’être assassiné, se décida à
DE L ’ASTROI.ABE. 437
subir son jugement. Ayant fait connaître sa résolution,
le jour désigné il se rendit en armes sur le terrain
près des baraques. La fureur déployée par les amis
du défunt était inexprimable, et Kol-bi eût certainement
perdu la vie, sans la présence des militaires.
Quelque agile qu’il fût à se couvrir avec son bouclier,
le nombre 1 accabla, et, succombant sous les coups
des lances, il eût été immolé sur le terrain si plusieurs
soldats ne s’étaient précipités pour le sauver;
car les cruelles blessures qu’il venait de recevoir
l’avaient rendu incapable de faire aucune résistance.
Les soldats le relevèrent et le transportèrent
dans leurs baraques.
Benilong, l’ami de Kol-bi, était an nombre des spectateurs,
mais avec l’intention de ne prendre parti d’aucun
côté. La conduite de son ami avait été si indigne
qu’il n’eût pu ouvertement épouser sa querelle. Peut-
etre en effet n avait-il pas envie de combattre, si un
moyen s’offrait d’éviter cette extrémité ; il désirait en
paraissant contre lui ne pas augmenter le nombre de
scs ennemis. Du reste il était armé et complètement
nu , et il resta silencieux spectateur de l’affaire , jusqu’au
moment où les soldats se jetèrent sur Kol-bi
pour lui sauver la vie. Alors il entra tout-à-coup en
fureur , et décocha sa lance au travers des soldats
avec une telle violence qu’elle entra par le dos de Tun
d’eux et sortit par le ventre près du nombril, il devait
tomber massacré au moment même, car il avait
déjà reçu snr la tète un coup de crosse dc fusil, mais
le prévot-maréchal vint à son secours ct Temmcna.
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