duit le nouvel établissement, devait s’attribuer à la
fois à la négligence et aux délais du ministère, surtout
à un événement des plus malheureux. Deux mois
après le départ du navire le Lady Juliana, d’Angleterre,
le Guardian, de quarante-quatre canons, commandé
par le lieutenant Piiou, avait aussi appareillé,
chargé de provisions, qui, jointes à celles du premier
navire , eussent suffi pour alimenter la colonie durant
deux années. Par malheur le Guardian, en quittant
le cap de Bonne-Espérance, toucha contre une île de
glace le 23 décembre, et le choc fut si violent qu’on
fut obligé de jeter la plus grande partie de la cargaison'
à la mer pour empêcher le bâtiment de couler. Par là
le navire fut sauvé, il rejoignit le cap au moment
meme où le Juliana y arriva, et celui-ci embarqua
soixante-quinze barils de farine qui avaient été conservés.
On apprit en outre, par le Juliana, que peu après
son départ mille autres convicts allaient être expédiés
d’Angleterre, et qu’on levait un régiment de troupes
à pied pour le service particulier de la colonie. Ce surcroît
de bouches ne pouvait êti'e que fort à charge
dans la circonstance où l’on se trouvait.
Heureusement le transport le Justinian, qui arriva
bientôt chargé de provisions et d’objets de tout genre,
fut d’un grand secours ; dès ce moment on rendit à
chacun sa ration complète.
Dans les derniers jours de juin, les navires le Surprise
, Neptune et Scarborough, arrivèrent avec les
condamnes et les soldats dont nous venons de parler.
La santé de ces hommes avait beaucoup souffert dans
le trajet; le 13 juillet l’hôpital ne comptait pas moins
de quatre cent quatre-vingt-huit malades.
Des terres furent accordées aux officiers et aux soldats
envoyés d’Angleterre, qui voulaient s’établir dans
la colonie. Les convicts libérés, soit par émancipation,
soit par pardon , qui désiraient devenir cultivateurs,
reçurent aussi des terres à raison de trente acres par
individu, et ceux qui étaient mariés, à raison de cinquante
acres, plus dix acres pour chaque enfant né au
moment de la concession. La seule condition qui leur
était imposée, était d’y résider et de cultiver leur terre,
en réservant tout le bois nécessaire aux besoins du
service de la marine.
Les naturels se montraient assez tranquilles ; ce fut
vers le mois de septembre de cette année que Beni-
long, chef de la tribu voisine de Sydney, commença
à se lier plus intimement avec les Anglais. En novembre
il vint même s’établir près du gouverneur, dans une
petite maison que celui-ci lui fit construire ; de cette
époque date l’union qui régna dans la suite entre les
tribus de Sydney et les colons.
Dans le cours de l’année 1 790, il mourut cent quarante
trois personnes, savoir : deux marins , un soldat,
cent vingt-trois convicts hommes, sept idem
femmes, et dix enfans.
En février 1791 , la chaleur fut si étouffante à Rose-
Hill, qu’une quantité d’oiseaux et de chauve-souris
tombèrent mortes soit au vol, soit des arbres où elles
étaient suspendues.