sincérité. En même temps cesse aussi cet intérêt
qui ne manque guère de se rattacher à la personne
de celui qui raconte ce qu’il a v u , ce qu’il a fait,
ce qu’il a observé dans ses voyages : inte'rêt dont
la vivacité dépend sans doute à la fois du talent
du narrateur, de l’importance des événemens qu’il
doit retracer, ou du mérite de ses observations.
Toutefois cet intérêt se retrouve jusque dans les
Voyages les plus insignifians, et suffit pour les sauver
de l’oubli. Malgré la simplicité, et l’on pourrait
dire la naïveté avec laquelle ils sont écrits, les
Voyages de Dampier offrent un grand exemple de
cette vérité; et qui n’a pas relu quelquefois avec
plaisir les narrations si ingénues du bon Lery !....
Décidé par ces considérations et surtout jaloux
de mettre sous les yeux du public, dans le plus
court délai possible, le résultat de nos efforts, je
suis revenu au mode adopté par la plupart de mes
devanciers. Ma relation sera tout simplement le
journal du voyage, et, comme je m’étais scrupuleusement
imposé la loi de retracer chaque soir
les événemens et même les réflexions de la journée
, je ferai en sorte de m’écarter le moins possible
des sentimens et même des expressions qui me
furent inspirées par les circonstances sous l’influence
desquelles je me trouvais. Mon savant compagnon
M. Quoy m’a remis un journal de son
voyage dont j ’ai extrait les passages les plus remarquables
pour les ajouter textuellement à mon récit,
en ayant soin seulement de les renvoyer à la lin de
chaque volume pour ne pas rompre le cours de la
narration.
Le dernier volume de l’ouvrage réunira les tableaux
des routes, les observations d’inclinaison
et d’intensité magnétiques , les expériences de
température a profondeur, les vocabulaires des
langues sauvages, enfin tous les mémoires qui ne
seront pas de nature a être insérés dans le texte.
Quelquefois il m’arrivera de présenter au lecteur
des documens étrangers, mais qui auront un rapport
immédiat et naturel avec les lieux que nous aurons
visités, et j ’aurai soin de ne choisir ces documens
que parmi ceux que je croirai encore inconnus ou
an moins à peine connus en France; dans tous les
cas, ils ne seront jamais postérieurs à l’époque de
notre voyage. Enfin, attentif à citer mes autorités,
je me propose aussi de distinguer les observations
des autres de celles qui me seront propres.