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vail ; en moins de deux heures elles eurent termine
cinq ou six huttes assez commodes , sous lesquelles
nous nous reposâmes durant cette nuit. Le jour suivant,
de bon matin, une troupe considérable, dont
se trouvaient notre cbef et ses bommes, partit pour la
chasse du kangarou. Elle ne fut pas très-heureuse, car
ils ne purent attraper qu’un kangarou d’une grande
taille ; cependant ils eurent soin de m’en envoyer un
bon morceau de derrière, qui me procura un excellent
repas. Je dois observer qu’ici comme en toute autre occasion
, ils eurent constamment l’attention, soit qu’ils
eussent peu ou beaucoup pour eux-mêmes, tant en
poisson, kangarou ou toute autre chose, de me donner
de leurs provisions autant que j’en pouvais manger. Le
même soir, au soleil couchant, tous les hommes de la
troupe, munis chacun d’un tison allumé, se rendirent
à un mille et demi de distance environ, à l’endroit où le
combat devait avoir lieu le jour suivant. Le chef me
laissa dans sa cabane avec sa femme et ses deux enfans,
et je ne tardai pas à m’y endormir. Du reste, il revint
quelque temps après dans la nuit, car je le trouvai couché
près de moi en m’éveillant le lendemain matin.
Après le déjeuner, la cérémonie de se peindre et de se
décorer fut entièrement renouvelée. Les préparatifs
achevés, nous marchâmes en ordre régulier; notre
tribu avait été jointe par plusieurs étrangers, qui
semblaient tous enchantés de nous tenir compagnie.
Nous nous trouvâmes bientôt sur une étendue de
terrain uni, où l’on avait préparé un espace circulaire
de quarante pieds de diamètre sur trois environ de
DE L’ASTHOLABE.
profondeur. Les deux partis ennemis se placèrent aux
côtés opposés; tous ensemble pouvaient monter à
cinq ou six cents personnes. Alors on me laissa sous la
surveillance de la femme du chef, à peu de distance de
la lice ; mais, poussé par l’envie demieux voir lecombat,
je m’en rapprochai malgré les efforts de nfa gardienne.
N éanmoins elle me suivit en pleurant et criant après
moi ; alors un des hommes de notre tribu vint à moi et
me conduisit vers l’arène. Là je vis une de nos femmes
combattant contre celle d’une tribu étrangère avec des
haches en bois et à toute outrance. Ces haches sont
des bâtons d’environ trente pouces de longueur, termines
à l’une des extrémités par un bouton épais et
pesant. Le combat ne fut pas long, car les deux adversaires
semblaient y déployer tout leur acharnement; en
cinq minutes environ, leurs têtes, leurs bras et leurs
gorges, furent déchirés et meurtris d’une manière
affreuse, et la femme de notre parti déclarée victorieuse
, l’autre ne pouvant plus lui résister. La victoire
fut annoncée par un grand cri que tout le monde
poussa, et les deux amazones sortirent sur-le-champ
de la lice, emmenées par leurs amis respectifs. La
femme du chef revint encore vers moi et tâcha, par
tous les moyens qui étaient en son pouvoir, de me faire
retirer ; mais voyant que je persistais dans ma résolution
, elle alla trou ver son mari qui vint aussitôt à moi,
et me retirant ma lance, me força de sortir de l’assemblée.
Alors il appela plusieurs autres chefs et me montra
à eux. Ils causèrent long-temps, parlant et riant
ensemble, très-surpris apparemment de ma couleur et