les sauvages, est d’arracher ladentantérieuredes jeunes
gens arrivés à un certain âge, étaient venus des lieux
au-delà du lac Georges à Argyle et Boung-Boung,
pour satisfaire à cette très-importante coutume nationale.
Comme ils passaient ou s’en retournaient par la
case de madame Sherwin, située un peu au nord du lac
Bathurst, ils y entrèrent suivant leur usage, et Taylor
avec la courtoisie qui a ordinairement lieu entre les
blancs et les naturels d’Argyle, leur offrit toute l’hospitalité
qui était en son pouvoir. Mais les destructeurs
de dents lui demandèrent d’un ton farouche d’autres
mets que ceux que le pauvre Taylor avait à leur offrir;
dans leurs gestes de colère et de dépit, ils lui montrèrent
un nombre de dents restant de toute espèce bien
suffisant pour arracher la chair de ses os. Il eut recours
à la mesure qui a toujours été éprouvée comme la plus
dangereuse au monde quand il a fallu traiter avec ces
sauvages humains, savoir : de commencer à manifester
sa terreur, et, ce qui est encore plus dangereux, de
s’enfuir. Le sauvage aujourd’bui en prison, sans plus
d’embarras, ajusta son arme destructive, et d’un coup
fatal perça le corps du malheureux fuyard. Le squelette
de la main de Taylor a été vu chez les noirs. Ce
témoignage, joint à d’autres indications , a convaincu
le capitaine Bisbop que le malheureux homme a servi
de pâture aux naturels, et qu’ils ont été amenés à
l’horrible action de le dévorer par son impossibilité de
leur fournir les alimens qu’ils avalent désirés.
1) Le capitaine Bisbop, au reste, avec cette modération
humaine et sage qui distingue toujours le véritable
brave, était résolu à ne point verser de sang, et
à ne faire d’autre mal aux naturels que de se saisir du
chef de la tribu et des trois naturels ci-dessus mentionnés.
Le sort des derniers a été rapporté. On montra
au chef les carabines et les sabres de la troupe
anglaise qui accomplit en outre ses évolutions rapides,
spectacle bien étonnant pour le simple guerrier du sud.
On se donna beaucoup de peine pour lui expliquer le
pouvoir irrésistible des militaires, si jamais ils étaient
obligés d’agir hostilement contre ses sujets armés seulement
de lances et de ivaddis. Par bonheur, l’aide
d’un interprète intelligent fit que les explications, les
menaces, les avertissemens et les offres de bonne
amitié du capitaine Bishop en cas de paix, furent clairement
comprises par le roi bronze des montagnes
neigeuses ; autant que sa contenance étonnée et stupéfiée
d’accord avec ses protestations ferventes de repentir
sincère pour l’offense commise par ses trois
cannibales , pouvait donner de preuves de sa sincérité
et de la conviction qu’il avait de sa propre incapacité
comme monarque belligérant, autant le capitaine
Bisbop fut parfaitement satisfait de la pénitence
royale et dc sa bonne foi. Le capitaine Bishop
alors, avec beaucoup de politique el une discrète
bienveillance, fit entendre à l’humble chef que Son
Lxcellence avait bien voulu lui pardonner. Après cette
cérémonie, on congédia le roi sauvage avec les marques
convenables et naturelles d’une cordiale réconciliation.
C’est l’opinion de tous ceux qui babitent ce
pays neuf, que l’expédition du capitaine Bishop sera
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